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13/02/2012 | FRANCE | N°10/02050

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 13 février 2012, 10/02050


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 77 DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 02050
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 19 octobre 2010.
APPELANT
Monsieur Charles X...... 83400 HYERES Représenté par Me NEROME substituant Me Charles-Henri COPPET (TOQUE 14) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
SA GROUPIMO Immeuble Palmiste-Gondeau 97232 LE LAMENTIN Représentée par Me WERTER substituant la SCP FRESSE-PANZANI (TOQUE 20) avocats au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION

DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure ci...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 77 DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 02050
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 19 octobre 2010.
APPELANT
Monsieur Charles X...... 83400 HYERES Représenté par Me NEROME substituant Me Charles-Henri COPPET (TOQUE 14) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
SA GROUPIMO Immeuble Palmiste-Gondeau 97232 LE LAMENTIN Représentée par Me WERTER substituant la SCP FRESSE-PANZANI (TOQUE 20) avocats au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, M. Philippe PRUNIER, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 13 février 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Après avoir créé par acte sous seing privé du 2 septembre 2005 la société 2C. IMMO, exploitant une agence immobilière, M. X... et Mme B... s'engageaient, par protocole d'accord signé le 16 juin 2006, à céder 94 % de l'ensemble de leurs parts dans la dite société au profit de la Société Odyssée ; il était stipulé que M. X... deviendrait salarié du groupe Odyssée, ou de l'une de ses structures, en qualité de directeur commercial pour la Guadeloupe et les Iles du Nord, avec le statut de cadre, moyennant un salaire annuel net de 36 000 euros, auquel devait s'ajouter un pourcentage de 1 % brut sur les activités de transactions et locations des agences dont il serait chargé.
Le 1er août 2006, l'engagement de M. X... par la Société Odyssée était concrétisé par la conclusion d'un contrat de travail « nouvelles embauches », le salaire fixe annuel brut étant de 44 163, 21 euros.
Madame B..., qui avait été engagée à compter du 1er janvier 2006 en qualité de directrice d'agence par la Société SETAMAG, conservait, à la suite de l'accord du 16 juin 2006, 1 % des parts sociales de la Société 2C. IMMO et restait salariée de la Société SETAMAG.
Un protocole d'accord était signé le 7 février 2008 entre d'une part M. X... et Madame B..., et d'autre part M. C..., associé majoritaire de la holding GROUPIMO. Il était indiqué dans cet acte sous seing privé que M. X... et Madame B... avait exprimé le souhait de quitter le département de la Guadeloupe et leurs activités dans les sociétés de la holding GROUPIMO, et qu'il était entendu entre les parties la cession de 6 % des parts sociales de la SARL 2C. IMMO, et qu'il leur serait versé la somme de 10 000 euros, soit 5000 euros chacun au titre " d'un protocole transactionnel de licenciement " et solde de tout compte. Un préavis d'un mois prenant fin au 31 mars 2008 était stipulé.
Le 6 mai 2008 M. X... saisissait la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir indemnisation pour rupture abusive et licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que diverses indemnités de fin de contrat.
Par jugement du 19 octobre 2010, le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre déboutait M. X... de l'ensemble de ses demandes.
Le 19 novembre 2010, M. X... interjetait appel de cette décision.
Par conclusions du 7 juin 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions. Il entend voir juger que la rupture du contrat de travail intervenue le 31 mars 2009 ne constitue pas une rupture d'un commun accord, et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il réclame paiement des sommes suivantes :-14 407, 35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-1440, 73 euros au titre des congés payés sur préavis,-900, 23 euros au titre du prorata du 13e mois à valoir sur la période du préavis,-59 531, 04 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,-1025, 10 euros au titre du solde de congés payés, tel que ressortant de l'attestation ASSEDIC,-9000 euros à titre d'indemnité de licenciement,

-9604, 60 euros à titre de dommages intérêts pour les circonstances vexatoires ayant entouré le licenciement,-4961, 87 euros au titre du salaire du mois de mars 2008,-1200 euros correspondants aux commissions dues à valoir du 1er mars au 31 mars 2008,-367, 56 euros à titre de remboursement de la note de frais du mois de février,-3174, 90 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par la fausse déclaration d'indemnité transactionnelle,-4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. M. X... demande en outre la remise sous astreinte des bulletins de paie, certificat de travail et attestation ASSEDIC modifiés en conséquence de la décision à intervenir.

À l'appui de ses demandes M. X... prétend que le protocole du 7 février 2008 est une transaction en ce qu'elle met fin à un litige existant entre le salarié et l'employeur relatif au paiement d'un prêt qu'il avait souscrit pour la le compte de la Société 2C. IMMO et que la société GROUPIMO s'était engagée à reprendre son compte, mais dont elle payait sporadiquement les échéances.
M. X... conteste l'existence d'un accord amiable sur la rupture du contrat de travail, un tel accord étant exclusif de tout licenciement. Il relève que la transaction est intervenue avant la rupture.
Rappelant qu'en l'absence de lettre recommandée exposant les motifs du licenciement, celui-ci est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse, il explique que bien que la procédure de licenciement n'ait pas été formalisée dans le respect des lois applicables en la matière, la société GROUPIMO a signifié à M. X... son licenciement, celui-ci étant intervenu au 31 mars 2008, comme le montrent les documents de fin de contrat qui lui ont été délivrés.
Il fait valoir qu'il ne peut être tenu compte du licenciement pour abandon de poste notifié postérieurement par la société GROUPIMO, puisque ce licenciement intervient à la suite de la rupture effective du contrat de travail.
Par conclusions du 15 septembre 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la société GROUPIMO sollicite la confirmation pure et simple du jugement entrepris et réclame paiement de la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que la rupture du contrat de travail de M. X... procède d'un accord amiable et que dans ce cas la qualification de licenciement est écartée, la convention de rupture s'imposant aux parties. Elle souligne que c'est M. X... qui a pris l'initiative de la rupture du contrat de travail, notamment en confirmant aux associés de la société GROUPIMO, par mail du 22 janvier 2008, son intention de quitter la Guadeloupe pour des raisons personnelles.
Elle explique qu'il ne s'agit pas, contrairement à ce qu'expose M. X..., d'une transaction mais bien d'un départ négocié.
À titre subsidiaire la société GROUPIMO conteste à la fois le fondement et le montant des sommes réclamées.
Motifs de la décision :
Le contrat de travail peut prendre fin, non seulement par un licenciement ou par une démission, mais encore du commun accord des parties.
La rupture d'un commun accord du contrat de travail n'est valable qu'en l'absence de litige entre les parties au jour de la conclusion de la rupture négociée du contrat de travail.
Contrairement à ce que soutient M. X..., il n'existait lors de la conclusion du protocole d'accord du 7 février 2008, aucun litige entre les parties qui ont souscrit à ce protocole.
En premier lieu il est caractéristique de constater que dans ledit protocole, il n'était nullement fait mention de ce que les parties renoncent à faire valoir tout droit, ou engager toute action l'une contre l'autre.
En outre il est mensonger de la part de M. X... de soutenir que le protocole en cause constituerait une transaction tendant à régler le conflit existant entre lui-même et la société GROUPIMO quant au paiement d'un prêt qu'il avait souscrit pour la le compte de la société 2C. IMMO, et que la société GROUPIMO s'était engagée à reprendre à son compte, mais dont elle payait sporadiquement les échéances.
En effet il ne ressort d'aucun document versé aux débats qu'antérieurement au protocole d'accord du 7 février 2008 il existait un litige entre les parties à propos de la reprise par la société GROUPIMO du prêt personnel souscrit par M. X... pour le compte de la société 2C. IMMO.
Comme le relève le Tribunal mixte de Commerce de Pointe-à-Pitre dans son jugement du 22 octobre 2010, dans l'instance opposant les parties, mais engagée le 20 avril 2009, soit bien postérieurement à l'accord du 7 février 2008, le protocole d'accord du 16 juin 2006 portant cession au profit de la société Odyssée du GROUPIMO, des parts que détenaient M. X... et Madame B... dans la société 2C. IMMO, ne prévoit aucune stipulation sur la reprise du prêt personnel souscrit par les cédants.
Il est significatif de constater que dans ce jugement qui expose notamment les moyens et prétentions de Madame B... et de M. X..., ces derniers ont fait valoir qu'à compter de la cession de leurs parts, « les remboursement du prêt jusqu'alors supportés par eux-mêmes, devenus salariés du groupe, devaient être pris en charge par la société GROUPIMO, et que cette dernière a remboursé chaque mois à Mme B... et à M. X... à compter de ladite date les échéances du crédit, et ce, pendant près de 2 ans ».
Le Tribunal de Commerce relève d'ailleurs que « postérieurement au 1er juin 2006 des règlements mensuels correspondant au montant des échéances de prêt ont bien été effectués sur les comptes des requérants Mme B... et M. X... ".
L'examen des courriers échangés par voie électronique entre d'une part les dirigeants de la société GROUPIMO et d'autre part Mme B... et M. X..., montre que les difficultés relatives à la prise en charge par la société GROUPIMO du prêt personnel souscrit par Mme B... et M.

X..., sont survenues postérieurement au 7 février 2008. En effet l'envoi de ces messages commence le 26 mars 2008 et porte sur les formalités et conditions de reprise du prêt par la société GROUPIMO à l'égard de l'organisme bancaire prêteur, Mme B... se plaignant le 26 mars 2008 à 11 heures 45, de ne pas avoir reçu l'attestation du rachat du prêt, puis critiquant le même jour à 15 heures 23, l'attestation qui fait état d'un accord pour une reprise sous condition de présentation des documents justificatifs, M. C..., représentant la société GROUPIMO, expliquant que c'est une « formulation » dans la mesure où il s'agit d'un prêt personnel repris par une société.

Il est vrai qu'il résulte des termes du jugement du Tribunal de Commerce que jusqu'au 7 février 2008, la reprise du prêt souscrit par les consorts B... et X..., n'avait pas fait l'objet d'engagement de la part des repreneurs à l'égard de l'organisme bancaire, mais que les échéances étaient remboursées sur les comptes de Madame B... et de M. X..., notamment par M. C....
Par la suite, au regard du litige prud'homal qui s'est noué dès le 6 mai 2008 à l'initiative de M. X..., la société GROUPIMO n'a plus entendu assurer la reprise du prêt souscrit par Mme B... et M. X..., arguant qu'il n'avait été pris aucun engagement exprès en son nom à cette fin, ce qui a donné lieu au contentieux porté en avril 2009 devant le Tribunal mixte de Commerce de Pointe-à-Pitre.
Si dans le protocole d'accord du 7 février 2008, il est fait état « d'un protocole transactionnel de licenciement », et si les parties ont indiqué qu'elles « envisagent le licenciement avec accord négocié au 31 mars 2008 », c'est que les parties ont entendu donner à l'accord amiable de résiliation du contrat de travail, la forme d'un licenciement, ce qui avait pour but de permettre à M. X... de percevoir des indemnités ASSEDIC. Au demeurant, celui-ci s'apercevant de l'incidence du montant de l'indemnité transactionnelle, dans un message du 26 mars 2008 adressé à M. C..., revenant sur le protocole d'accord du 7 février 2008, indique : « vous nous collez des indemnités de transaction 10 000 euros qui vont être déduites sur nos indemnités ASSEDIC … sympa ! ».
C'est pourquoi d'ailleurs, le responsable du service juridique de la société GROUPIMO, M. Harry D..., envoyait le 20 mars 2008, un mail dans lequel il s'adressait à Mme B... et M. X... dans les termes suivants :
« Bonjour Claire et Charles,
comme convenu je te transmets les documents relatifs à ton départ négocié ainsi que celui de X....
Tu trouveras ci-joint :- la lettre de convocation à signer avec mention " reçue en main propre le 14/ 12/ 08 " en deux exemplaires-les lettres de licenciement à signer avec mention " reçu en main propre le 31/ 12/ 08 " en deux exemplaires-les acte de cession à imprimer et signer en 7 exemplaires,- les accords transactionnels en date du 31 mars 2008 à signer en deux exemplaires »

Il s'agit donc de la mise en forme d'un licenciement fictif convenu entre les parties, ayant pour but manifestement de permettre à M. X... de percevoir des indemnités ASSEDIC.
Enfin il ressort de la lecture du contenu même du protocole d'accord du 7 février 2008, qu'aucun différend, à cette époque, n'opposait les parties, ledit protocole exposant qu'il fait suite à la demande de M. X... et de Mme B..., et de leur souhait de quitter le département de la Guadeloupe, et leurs activités dans les sociétés de la holding GROUPIMO, et aménageant leur départ en prévoyant que ceux-ci assureraient " la bonne transmission de l'activité des dossiers en cours à Mme Florence Y... ou toute autre personne venant à assurer la passation et la continuité jusqu'à leur départ le 31 mars 2008 ". Il était prévu qu'ils poursuivraient « la mise en place de l'organisation ainsi que la bonne continuité de l'activité sur la Guadeloupe et Saint-Martin du réseau le marché de l'immobilier durant leur présence ».
Il convient de souligner que ce protocole d'accord, intervient à la suite d'une demande formée conjointement par Mme B... et M. X... dans un message électronique adressé le 22 janvier 2008 à M. C..., dans lequel ils indiquent « suite à notre annonce de la semaine dernière, Mme B... et moi vous confirmons notre souhait de quitter pour des raisons personnelles la Guadeloupe ».
D'ailleurs dans les faits exposés par le conseil de prud'hommes dans son jugement du 19 octobre 2010, il est indiqué que le 2 mars 2008, M. X..., constitue avec Mme B... et un tiers, la société N2CI SARL, agence immobilière dont le siège social est à Hyères, ce qui n'a fait l'objet d'aucune critique ni contestation de la part de l'appelant.
Dans la mesure ou le contrat de travail de Monsieur X... a fait l'objet d'une résiliation dans le cadre d'un accord amiable intervenu avant tout litige entre les parties et prévoyant l'octroi d'une somme de 5000 euros au profit de M. X..., celui-ci doit être débouté de l'ensemble de ses demandes indemnitaires et de rappel de rémunération.
Chacune des parties ayant évalué à 4000 euros le montant de ses frais irrépétibles, il paraît inéquitable, au regard de la mauvaise fois manifestée par M. X..., de laisser à la charge de l'intimée les frais irrépétibles qu'elle a exposés. En conséquence il lui sera alloué la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne M. X... à payer à la Société GROUPIMO la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de M. X...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02050
Date de la décision : 13/02/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-02-13;10.02050 ?
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