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23/01/2012 | FRANCE | N°10/01041

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 23 janvier 2012, 10/01041


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 33 DU VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 01041
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 6 mai 2010.
APPELANTES
LA SARL NC ASSURANCES Centre commercial de Grand Camp 97139 LES ABYMES Représentée par Me Gérard PLUMASSEAU (T. 16) avocat au barreau de GUADELOUPE

SARL DJN ASSURANCES Boulevard de Houelbourg ZI de Jarry 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par la SELARL J. F. M. (T. 34) avocats au barreau de GUADELOUPE)

INTIMÉE

Madame

Ghislaine X... épouse Y... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Eugène TREPON (TOQUE 52) a...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 33 DU VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 01041
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 6 mai 2010.
APPELANTES
LA SARL NC ASSURANCES Centre commercial de Grand Camp 97139 LES ABYMES Représentée par Me Gérard PLUMASSEAU (T. 16) avocat au barreau de GUADELOUPE

SARL DJN ASSURANCES Boulevard de Houelbourg ZI de Jarry 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par la SELARL J. F. M. (T. 34) avocats au barreau de GUADELOUPE)

INTIMÉE

Madame Ghislaine X... épouse Y... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Eugène TREPON (TOQUE 52) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Jacques FOUASSE, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jacques FOUASSE, conseiller, rapporteur, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 janvier 2012 puis le délibéré a été prorogé au 23 janvier 2012.
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame Ghislaine X... épouse Y... a été embauchée le 19 août 1996, en qualité d'agent administratif par Monsieur Bernard A... exerçant sous l'enseigne N. C. ASSURANCES.
Le 15 juin 2005, un contrat de location gérance était signé entre la S. A. R. L. N. C. ASSURANCES et D. J. N. ASSURANCES pour une durée de 36 mois à compter du 1 er juillet 2005.
Le 20 juin 2005, elle était convoquée par D J N ASSURANCES à un entretien préalable à une mesure de licenciement économique, licenciement motivé par une réorganisation de l'entreprise.
L'entretien s'est déroulé le 27 juin 2005 avec la S. A. R. L. D J N ASSURANCES
Le 7 juillet 2005, elle recevait la notification de son licenciement pour réorganisation de l'entreprise.
C'est dans ces conditions qu'elle a saisit le Conseil de Prud'hommes de Pointe à Pitre pour faire condamner solidairement la SARL D J N ASSURANCES et la SARL N C ASSURANCE à lui verser les sommes suivantes :
-24 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse-5 500 € à titre de contestation du motif économique.-7 000 € à titre de licenciement abusif.-2 800 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Par jugement du 6 mai 2010, le Conseil de prud'hommes de POINTE à PITRE :
CONDAMNE solidairement les entreprises N C ASSURANCES et D J N ASSURANCES en la personne de leur représentant légal respectif, à payer à Madame Ghislaine X... épouse Y... les sommes suivantes :
-5 500 € au titre de la contestation du licenciement économique,-7 000 € au titre du licenciement abusif et vexatoire-500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile,

DÉBOUTE la salariée du surplus de ses demandes
DEBOUTE les sociétés défenderesses de leur prétention à l'article 700 du Code de Procédure Civile
PRONONCE l'exécution provisoire de ce jugement
CONDAMNE les sociétés défenderesses aux dépens de l'instance.

Par acte du 20 mai 2010, la SARL NC ASSURANCES a relevé appel de ce jugement.

MOYENS et DEMANDES des PARTIES :
La société NC ASSURANCES fait valoir au soutien de son appel que :
- à l'appui de ses prétentions, Madame Ghislaine X... épouse Y... allègue sans le moindre élément probatoire, sérieux et vérifiable que la location par la société NC ASSURANCES de son fonds de commerce de courtage en assurances aurait été conçue en fraude de ses droits et en violation des dispositions de l'article L 122-12 du Code du Travail, alors applicable sous cette codification.
- l'étude de la chronologie des faits amène à penser, contrairement aux explications farfelues de la société DJN ASSURANCES, qu'il s'agit effectivement d'un licenciement opéré par le cessionnaire. Que pour s'en convaincre, il suffit de prendre lecture de la lettre de convocation du salarié à l'entretien préalable, ainsi que de la lettre de licenciement, adressées l'une · et l'autre exclusivement par la société DJN ASSURANCES. De plus, la date de la rupture du contrat de travail est celle de la date de notification de la lettre de licenciement, soit en l'espèce le 7 Juillet 2005,
- subsidiairement sur le bien fondé du congédiement : à la lecture des pièces produites par Madame Ghislaine X... épouse Y... et des éléments d'appréciation de la société DJN ASSURANCES, il est parfaitement constant que ce · licenciement a une cause réelle et sérieuse tenant au motif de la nécessaire réorganisation de l'entreprise.
La société NC ASSURANCES demande à la Cour :
Réformer le jugement querellé en toutes ses dispositions ;
A titre principal :.
Dire et juger les demandes de condamnation solidaire à l'endroit du premier employeur, la société NC ASSURANCES, autant irrecevables que mal fondées ;
Mettre la société NC ASSURANCES hors de cause ;
A titre subsidiaire :
Dire et juger que la procédure de licenciement de Madame Ghislaine X... épouse Y... est régulière ;
Dire et juger que le licenciement de Madame Ghislaine X... épouse Y... a une cause réelle et sérieuse ;
La condamner en tout état de cause à payer à la société NC ASSURANCES la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du CPC, outre les dépens.

La société DJN ASSURANCES expose que :

- la société NC ASSURANCES a donné en location-gérance à la société DJN ASSURANCES à compter du 1 er juillet 2005, pour une durée de 3
années, l'intégralité de son portefeuille de courtage en assurance. Dans le cadre de ce contrat de location-gérance, la société DJN ASSURANCES indiquait que compte tenu de ces effectifs, elle acceptait de reprendre avec leur ancienneté seuls Mme B..., Mr C... et Mr D..., salariés de la société NC ASSURANCES. Par ce contrat, la société NC ASSURANCES s'engageait à faire son affaire des autres salariés.
- quand bien même l'article L122-12 du Code du Travail venait à s'appliquer · dans un contrat de location gérance, le contrat dont s'agit a pris effet à compter du 1er Juillet 2005, par conséquent, au 20 Juin 2005, Mme Ghislaine X... épouse Y... était bien salariée de la société NC ASSURANCES. La société DJN ASSURANCES ne pouvait la licencier.
- en outre, Mme Ghislaine X... épouse Y... déclarait et donc reconnaissait dans ses écritures que bien avant de recevoir cette lettre de licenciement, elle et d'autres salariés avaient trouvé portes closes et n'avaient pu accéder à leur poste de travail au sein de la société NC ASSURANCES, ceci pendant un mois et demi environ soit depuis le début du mois Mai 2005. Il résulte de ces affirmations que la société NC ASSURANCE, avait licencié Mme Ghislaine X... épouse Y... et ses autres salariés depuis Mai 2005, en leur refusant l'accès à leur poste de travail.
- La société DJN ASSURANCES ne peut, en aucun cas être déclarée responsable de cette rupture intervenue à l'initiative et aux torts de la société NC ASSURANCES, bien avant la signature du contrat de mise en location-gérance. Par la suite, c'est par erreur que la société DJN ASSURANCE a cru devoir adresser une lettre de licenciement à Mme Ghislaine X... épouse Y..., le 07 Juillet 2005.
La société DJN ASSURANCES demande à la Cour de :
- Déclarer Madame Ghislaine X... épouse Y... irrecevable et mal fondée en ses demandes dirigées contre la société DJN ASSURANCES.
En conséquence,
- Infirmer le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes le 06 Mai 2010 dans ses dispositions condamnant la société DJN ASSURANCES, solidairement avec la société NC ASSURANCES à payer à Mme Ghislaine X... épouse Y... la somme de 5 500 euros au titre de la contestation du licenciement économique et 7 000 euros au titre du licenciement abusif et vexatoire.
- Condamner Mme Ghislaine X... épouse Y... à payer à la concluante la somme de 2. 500 EUROS au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme Ghislaine X... épouse Y... indique que :

- DJN ASSURANCES, locataire de l'entité économique est l'entreprise qui initie la procédure de licenciement par une lettre de convocation du 20 juin 2005 à un entretien préalable en vue d'un licenciement. La cession, si elle était décidée à cette date n'était pas effective.
- la validité du licenciement est subordonnée à celle de la convocation à l'entretien préalable laquelle, ne peut être faite que par l'employeur. DJN ne pouvait à cette date valablement convoquer Madame Ghislaine X... épouse Y... à un entretien préalable en vue de son licenciement.

Cette société reconnait d'ailleurs que c'est par erreur que le licenciement a été initié par elle.

- NC ASSURANCES ne conteste pas devant la Cour que peu de temps auparavant, elle fermait les locaux de l'entreprise sans donner signe de vie, et que les salariés ont trouvé porte clauses sans pouvoir accéder à leur poste de travail.
- en outre, DJN ASSURANCES ne justifie pas de son impossibilité de conserver les salariées écartées ou de leur proposer un transfert ou un reclassement ou une mise à la retraite, ainsi que le prévoit le contrat de location gérance. Enfin, aucune justification afférente à la réorganisation de l'entreprise, argument ayant-servi au licenciement, n'a été fourni à la salariée.
- cet accord est illicite en ce que le licenciement de Madame Ghislaine X... épouse Y... a été précédé de man œ uvres tendant à écarter celle-ci dans l'entreprise. La signature de cet accord participe d'ailleurs de ces man œ uvres en ce que tant que le contenu du contrat de location gérance que l'exécution de ses clauses comportent une collusion entre le cédant et le cessionnaire.

Mme Ghislaine X... épouse Y... demande à la Cour :

Déclarer son licenciement sans causes réelle et sérieuse tout en constatant l'abus de droit à son encontre ;
En conséquence condamner solidairement NC ASSURANCES et DJN ASSURANCES au paiement des sommes suivantes :
24 000, 00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
5. 500, 00 € au titre de sa contestation du licenciement économique
7. 000, 00 € au titre de sa contestation d'une procédure abusive et vexatoire (abus de droit) ;
Les condamner à lui payer la somme de 2. 500, 00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 21 novembre 2011.
MOTIFS de la DECISION :
La lettre de licenciement doit mentionner à la fois les raisons économiques et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail. L'incidence des raisons économiques sur l'emploi doit être décrite de façon individualisée. Ainsi n'est pas suffisamment motivée la lettre visant l'obligation de réduire l'effectif afin de maintenir l'activité ou invoquant la restructuration de l'entreprise sans mentionner ni la suppression, ni la transformation de l'emploi du salarié.

En l'espèce, la lettre de licenciement de Mme Ghislaine X... épouse Y... est adressée le 7 juillet 2005 par la SARL DJN Assurances. Elle mentionne :

« OBJET : Notification de licenciement

Madame,
À la suite de notre entretien préalable du 27 juin dernier, nous sommes au regret de vous informer que nous sommes dans l'obligation de poursuivre notre projet de licenciement économique à votre égard.
Comme nous vous l'avons indiqué lors de cet entretien, votre contrat est rompu pour les motifs économiques suivants :
Réorganisation de l'entreprise suite au transfert de portefeuille d'assurance de NC ASSURANCES à DJN ASSURANCES dans le cadre d'une location-gérance impliquant deux suppressions de contrat de travail (déjà transférés par application de l'art. L 122-12 du Code du travail) pour le bon équilibre de l'entreprise DJN ASSURANCES.
Votre licenciement prend en principe effet à la fin de votre période de préavis d'une durée de 2 mois, toutefois, nous vous dispensons d'exécuter ce préavis et une indemnité compensatrice vous sera versée à ce titre. «
Le motif invoqué est très général et imprécis : « Réorganisation de l'entreprise »
Or l'indication d'un motif imprécis équivaut à une absence de motif, et le licenciement est alors dépourvu de cause réelle et sérieuse ; en effet la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé précis des motifs du licenciement économique.

De plus, la Cour relève d'autres irrégularités dans ce licenciement :

- DJN ASSURANCES, locataire de l'entité économique est l'entreprise qui initie la procédure de licenciement par une lettre de convocation du 20 juin 2005 à un entretien préalable en vue d'un licenciement. Or la cession, si elle était décidée à cette date n'était pas effective.
- la validité du licenciement est subordonnée à celle de la convocation à l'entretien préalable laquelle, ne peut être faite que par l'employeur. DJN ne pouvait à cette date valablement convoquer Madame Ghislaine X... épouse Y... à un entretien préalable en vue de son licenciement. Cette société reconnait d'ailleurs que c'est par erreur que le licenciement a été initié par elle. Quand bien même l'article L122-12 du Code du Travail venait à s'appliquer dans un contrat de location gérance, le contrat dont s'agit a pris effet à compter du 1er Juillet 2005, par conséquent, au 20 Juin 2005, Mme Ghislaine X... épouse Y... était bien salariée de la société NC ASSURANCES. La société DJN ASSURANCES ne pouvait la licencier.
- NC ASSURANCES ne conteste pas que peu de temps avant la cession, elle fermait les locaux de l'entreprise sans donner signe de vie, et que les salariés ont trouvé porte clauses sans pouvoir accéder à leur poste de travail.
- la société NC ASSURANCES a donné en location-gérance à la société DJN ASSURANCES à compter du 1 er juillet 2005, pour une durée de 3 années, l'intégralité de son portefeuille de courtage en assurance. Dans le cadre de ce contrat de location-gérance, la société DJN · ASSURANCES

indiquait que compte tenu de ces effectifs, elle acceptait de reprendre avec leur ancienneté seuls Mme B..., Mr C... et Mr D..., salariés de la société NC ASSURANCES. Par ce contrat, la société NC ASSURANCES s'engageait à faire son affaire des autres salariés. Or c'est DJN Assurances qui a licencié.

Il y a donc bien eu collusion entre les deux sociétés pour éluder les droits de la salariée et, en conséquence, le cédant peut être condamné au paiement de dommages et intérêts au salarié, en qualité de coauteur du dommage subi par ce dernier.

Le jugement dont appel sera donc confirmé.
- sur les frais irrépétibles :
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais qu'elle a du engager en cause d'appel pour la défense de ses droits.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne solidairement NC ASSURANCES et DJN ASSURANCES au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01041
Date de la décision : 23/01/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-01-23;10.01041 ?
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