La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/01/2012 | FRANCE | N°10/00092

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 23 janvier 2012, 10/00092


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No21 DU VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00092
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 3 décembre 2009.
APPELANTE
Madame Caroline X... ...97122 BAIE-MAHAULT Représentée par la SCP LACLUSE et CESAR (TOQUE 02) avocats au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Martial Y... ... 97130 CAPESTERRE BELLE-EAU Représenté par la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocats au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'aff

aire a été débattue le 07 Novembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bern...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No21 DU VINGT TROIS JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00092
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 3 décembre 2009.
APPELANTE
Madame Caroline X... ...97122 BAIE-MAHAULT Représentée par la SCP LACLUSE et CESAR (TOQUE 02) avocats au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Martial Y... ... 97130 CAPESTERRE BELLE-EAU Représenté par la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocats au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Novembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Philippe PRUNIER, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 janvier 2012 puis le délibéré a été prorogé au 23 janvier 2012

GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Le 2 mai 2007, M. Y... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins d'obtenir paiement par Mme X... exploitant l'entreprise Eco Toner Antilles d'un rappel de salaires, de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, des indemnités de congés payés, de préavis et pour non-respect de la procédure de licenciement ainsi qu'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Il réclame en outre la remise de bulletins de paie et des documents de fin de contrat.
Par jugement du 3 décembre 2009, le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre condamnait Mme X... à payer à M. Y... les sommes suivantes :-514, 28 euros au titre de rappel de salaires pour la période du 1er août 2006 au 12 février 2007,-691, 43 euros à titre d'indemnité de congés payés,-1200 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-120 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,-1200 euros au titre de l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,-1200 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive. Il était en outre ordonné la remise sous astreinte de fiches de paie et des documents de fin de contrat. M. Y... était débouté du surplus de ses demandes.

Par déclaration du 7 janvier 2010, Mme X... interjetait appel de cette décision.
Par conclusions du 20 janvier 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X... entend voir constater que M. Y... ne prouve pas l'existence d'une prestation de travail, d'une rémunération et d'un lien de subordination juridique entre lui et l'entreprise Eco Toner Antilles.
Elle sollicite en conséquence la réformation de la décision déférée et le rejet de l'intégralité des demandes de M. Y.... Elle réclame en outre paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Par conclusions du 4 avril 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. Y... sollicite la confirmation des condamnations prononcées par les premiers juges au titre des rappels de salaire, de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de congés payés sur le préavis et de l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, ainsi que la confirmation de la condamnation à la remise sous astreinte des documents réclamés.
Il demande que les condamnations de Mme X... au paiement de l'indemnité de congés payés et de dommages et intérêts pour rupture abusive soient portées respectivement aux sommes de 771, 43 euros et de 7525, 68 euros. Il entend voir par ailleurs condamner celle-ci à lui payer une somme d'un montant de 7525, 68 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Il réclame enfin paiement de la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes il décrit les conditions dans lesquelles il a pu être embauché et les conditions du travail effectué pour le compte de Mme X..., produisant des attestations à l'appui de ses dires.

Motifs de la décision :

Sur l'existence d'un contrat de travail :
M. Y... explique qu'ayant quitté la métropole en décembre 2005 dans le but de poursuivre sa vie familiale en Guadeloupe où résidaient sa belle-famille, son épouse et ses enfants, il s'est trouvé au mois de mai 2006 en fin de droits auprès des ASSEDIC ; il été embauché verbalement par Mme X... exerçant sous l'enseigne Eco Toner Antilles, laquelle était à la recherche d'un recycleur de cartouches. Mme X... avait assuré sa formation pendant une semaine à compter du 1er août 2006. Parvenant à la fin du mois d'août 2006 à atteindre son quota de 8 cartouches, il lui était versé une rémunération de 1000 euros.
Il expose qu'il devait ainsi poursuivre son activité jusqu'en février 2007, ne manquant pas, à plusieurs reprises, de réclamer tant auprès de Mme B... que de M. C... son compagnon, une revalorisation de sa rémunération, laquelle était inférieure au SMIC brut mensuel fixé à 1280 euros, ainsi que l'établissement d'un contrat de travail.
Ce n'est que fin janvier 2007 que Mme B... lui demandait les documents nécessaires à la réalisation de son contrat de travail ; il lui était alors verbalement proposé un " contrat nouvelle embauche ", ce qu'il refusait. Il ajoute qu'en réponse Mme B... lui a demandé de continuer à travailler jusqu'à la fin du mois de février 2007, le temps qu'elle trouve quelqu'un pour le remplacer. Effectivement le 12 février 2007 au matin, une nouvelle personne se présentait et commençait à travailler en suivant une formation avec Mme X.... Après avoir subi mépris, reproches, menaces et injures, il était invité à ne plus venir au travail.
Deux types d'éléments de preuve fournis par M. Y..., permettent d'accréditer ses explications.
En effet M. Jean-Marc D... certifie que M. Y... travaillait bien au sein de l'entreprise Eco Toner Antilles depuis le mois d'août 2006. Mme X... est mal fondée à critiquer dans ses conclusions cette attestation en alléguant que M. D... n'était ni client ni salarié de l'entreprise et ne pouvait donc avoir constaté les faits dont il faisait état. En effet Mme X... verse elle-même aux débats cinq factures émises par M. Jean-Marc D... à l'égard de l'entreprise Eco Toner Antilles pour la vente de cartouches laser, ce qui montre que ce dernier était un fournisseur régulier de l'entreprise, la mauvaise foi de Mme X... étant ainsi caractérisée.
M. Philippe E... certifie pour sa part, avoir été livré de produits provenant de l'entreprise Eco Toner Antilles par M. Y... et l'avoir, à plusieurs reprises, vu dans l'enceinte de cette entreprise. Il joint d'ailleurs une facture émise à son égard par l'entreprise Eco Toner Antilles pour la fourniture de cartouches d'imprimante.

Mme Laetitia F..., assistante commerciale au sein d'une agence immobilière sise, comme l'entreprise Eco Toner Antilles, à Jarry, expliquait dans son attestation que son agence était au moment des faits cliente de l'entreprise Eco Toner Antilles, que celle-ci recherchait des recycleurs, qu'elle avait transmis les coordonnées de M. Y... à M. Jérôme C... en juin 2006, et qu'après entretien, ce dernier avait retenu la candidature de M. Y.... Elle ajoute que ce dernier a effectué des livraisons à plusieurs reprises au sein de l'agence immobilière à Jarry.

Mme Rachel G... atteste pour sa part que M. Y... a bien livré des cartouches encre laser à deux reprises pour la pharmacie Marnicom, son attestation portant le cachet de ladite pharmacie.
Outre ces attestations M. Y... apporte la preuve d'au moins partie du versement par l'entreprise Eco Toner Antilles de sa rémunération.
Il produit en effet des bordereaux de remises de chèque et des photocopies de chèques émis par l'entreprise Eco Toner Antilles en date du 31 août 2006 pour 460 euros, du 2 octobre 2006 pour 600 euros, et du 3 janvier 2007 pour 700 euros, outre un chèque d'un montant de 400 euros en date du 18 août 2006 tiré sur le compte de l'entreprise ZCI qui est le nom commercial de l'entreprise exploitée par M. Jérôme C..., à la même adresse que l'entreprise Eco Toner Antilles route de Cocoyer, Maison Vainqueur, 97 190 Le Gosier, ayant la même activité que l'entreprise Eco Toner Antilles.
Pour justifier ces versements au profit de M. Y..., Mme X... explique qu'elle achète des cartouches vides, et que pour en justifier elle produit aux débats ses factures d'achat. Or aucune de ces factures n'est établie à l'égard de M. Y..., ce qui montre d'une part que celui-ci n'est pas en relation commerciale avec l'entreprise Eco Toner Antilles, et d'autre part que la mauvaise foi de Mme X... est à nouveau démontrée.
Il y a lieu de relever que lorsque M. Y... s'est vu remplacé au sein de l'entreprise Eco Toner Antilles en février 2007, il s'est adressé au contrôleur du travail qui dans un premier temps a pris contact téléphonique avec Mme X..., et a convoqué celle-ci le 13 février 2007 pour un entretien fixé au 16 février 2007 en la priant de fournir notamment le registre unique du personnel, copie des contrats travail, justificatif de déclaration préalable à l'embauche, copie des bulletins de paie des 6 derniers mois, copie des horaires de travail, rapport de vérification des installations électriques, justificatif de la dernière vérification des extincteurs.
Mme X... admet dans ses conclusions qu'elle s'est soustraite aux demandes des services de l'inspection du travail. Elle n'a alors nullement justifié auprès de ceux-ci de relations commerciales entretenues avec M. Y..., ni n'a d'ailleurs allégué leur existence.
Il résulte suffisamment des constatations qui précèdent, que M. Y... a fourni du 1er août 2006 au 12 février 2007 un travail salarié au sein de l'entreprise Eco Toner Antilles, sous la direction de Mme X..., ne pouvant obtenir toutefois de celle-ci, ni l'établissement d'un contrat de travail, ni la délivrance de bulletins de paie.

Sur les demandes en paiement formées par M. Y... :

L'employeur ayant mis fin à la relation de travail salariée avec M. Y..., sans convocation préalable, et ne lui ayant notifié aucune lettre de licenciement, ce dernier est fondé à invoquer une rupture du contrat de travail imputable à l'employeur sans cause réelle et sérieuse. L'octroi d'une somme de 1200 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive sera confirmé.
Par ailleurs l'emploi prolongé et délibéré de M. Y..., en lui refusant l'établissement d'un contrat écrit de travail et la délivrance de bulletins de salaire, caractérise l'intention manifeste de l'employeur de se soustraire à ses obligations en matière de déclaration préalable à l'embauche, et de délivrance des bulletins de paie. Il sera donc alloué à M. Y..., en application des dispositions de l'article L8223-1 du code du travail, une indemnité forfaitaire de 7 200 euros correspondants à 6 mois de salaire.
M. Y... ayant moins de 2 ans d'ancienneté dans l'entreprise Eco Toner Antilles, et le licenciement étant prononcé sans cause réelle et sérieuse, ne peut, en application des dispositions des articles L 1235-5 et L1235-2 du code de travail, bénéficier d'une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, les dommages et intérêts alloués à hauteur de 1200 euros réparant l'entier préjudice subi par l'intéressé.
M. Y... a également droit à une indemnité de préavis de 1200 euros outre une indemnité de congés payés sur préavis de 120 euros.
Mme X... ne justifiant pas avoir versé de rémunération pour la période du 1er au 12 février 2007 pendant laquelle M. Y... a travaillé, elle est redevable à l'égard de ce dernier de la somme de 514, 28 euros.
M. Y... n'ayant pu bénéficier de congés payés, il lui sera alloué une indemnité compensatrice de congés payés pour la période du 1er août 2006 au 12 février 2007 équivalente à 1/ 10ème de la rémunération brute perçue, soit la somme de 771, 43 euros.
Le licenciement ayant été prononcé sans motif, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise à M. Y... d'une lettre de licenciement. Par contre celui-ci est en droit d'obtenir la délivrance d'un certificat de travail, conforme aux énonciations du présent arrêt, ainsi que des bulletins de paie et une attestation ASSEDIC.
Enfin comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. Y... les frais irrépétibles qu'il a exposés, il lui sera alloué la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à M. Y... les sommes suivantes :
-514, 28 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er août 2006 au 12 février 2007,-1200 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-120 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,-1200 euros de dommages intérêts pour rupture abusive,

Confirme également ledit jugement en ce qu'il a ordonné la remise d'un certificat de travail, de fiches de paie et d'une attestation Pôle-Emploi, en précisant toutefois que l'astreinte sera ramenée à 50 euros par jour de retard, passé le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt,

Le réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,
Condamne Mme X... à payer à M. Y... les sommes suivantes :-771, 43 euros à titre d'indemnité de congés payés pour la période du 1er août 2006 au 12 février 2007,-7200 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,-2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les entiers dépens tant de première instance que d'appel sont à la charge de Mme X...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00092
Date de la décision : 23/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-01-23;10.00092 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award