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09/01/2012 | FRANCE | N°10/00393

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 09 janvier 2012, 10/00393


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 4 DU NEUF JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00393
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 28 janvier 2010.
APPELANTE
SARL LOUISOR et FILS 147 route de Chauvel-Cour Louis 97139 LES ABYMES Représentée par Me NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocats au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Mademoiselle Gerty X... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Patrice Gilles TACITA (TOQUE 92) avocat au barreau de GUADELOUPE.

COMPOSITION DE

LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 4 DU NEUF JANVIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00393
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 28 janvier 2010.
APPELANTE
SARL LOUISOR et FILS 147 route de Chauvel-Cour Louis 97139 LES ABYMES Représentée par Me NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocats au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Mademoiselle Gerty X... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Patrice Gilles TACITA (TOQUE 92) avocat au barreau de GUADELOUPE.

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, M. Philippe PRUNIER, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 09 janvier 2012

GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Mme X... était employée par la Société Louisor et Fils depuis le 1er février 1999 en qualité de caissière-vendeuse.
Après avoir adressé le 22 décembre 2004 à la salariée une lettre de convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement disciplinaire et notifié par le même courrier une mise à pied conservatoire, l'employeur envoyait le 12 janvier 2005 à Mme X... un courrier portant licenciement pour faute grave.
Le 7 mars 2005, Mme X... saisissait le Conseil de Prud'hommes aux fins d'obtenir paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et en réparation du préjudice moral né du caractère abusif de la plainte pénale déposée contre elle, ainsi que des propos diffamatoires à son égard. Elle demandait également paiement d'une indemnité de préavis et d'une indemnité de licenciement.
Par jugement du 28 janvier 2010, le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre condamnait la Société Louisor et Fils à payer à Mme X... les sommes suivantes :-5760 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,-2880 euros à titre d'indemnité de préavis,-576 euros à titre d'indemnité de licenciement,-500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Mme X... était déboutée du surplus de ses demandes.

Le 18 février 2010 la Société Louisor et Fils interjetait appel de cette décision.
Par conclusions du 20 avril 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société Louisor et Fils sollicite le rejet de l'ensemble des demandes formées par Mme X.... L'employeur fait valoir que les motifs invoqués à l'appui du licenciement sont parfaitement définis dans la lettre qui a été notifiée à Mme X.... Il s'agit de la délivrance de marchandises gratuitement à l'un des entrepreneurs chargés de la construction de sa maison, en l'occurrence un balai-brosse, de l'émission d'avoirs sans autorisation ni contrepartie, et de l'émission de factures dans l'urgence correspondant à des marchandises livrées, non facturées le jour de leur livraison.
L'employeur fait état de la plainte déposée le 21 décembre 2004 à l'encontre de Mme X... au motif qu'elle détournait des marchandises à des fins personnelles, précisant que l'avis de classement sans suite de la procédure pénale n'a aucune incidence sur le présent litige et qu'au vu des faute graves commises, une réaction immédiate de l'employeur s'imposait, aucune indemnité de préavis ni de licenciement n'étant due à la salariée en raison de la gravité des faits.
L'employeur réclame paiement de la somme de 5000 euros au titre des préjudices subis par l'entreprise et de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 19 septembre 2011, Mme X... sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, et le rejet de toutes les prétentions de l'appelant. Elle invoque l'absence de manquements à son contrat de travail. En ce qui concerne la plainte pénale déposée par son employeur, elle fait valoir qu'elle n'a été nullement inquiétée ni jugée à ce titre. Elle réclame paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Motifs de la décision :
Sur la demande de renvoi formée par le conseil de Mme X... :
À l'audience des débats du 28 novembre 2011, le conseil de Mme X... sollicitait le renvoi de l'examen de l'affaire pour procéder à une communication de pièces. Toutefois il y a lieu de constater que l'affaire appelée initialement à l'audience du 15 novembre 2010 a été renvoyée à celle du 17 février 2011 puis à celle du 2 mai 2011 puis à celle du 19 septembre 2011 et enfin à celle du 28 novembre 2011.
L'appelant ayant notifié ses conclusions et pièces le 26 avril 2011 à la partie adverse, l'intimée ayant notifié ses conclusions le 19 novembre 2011, il n'y a pas lieu de renvoyer l'affaire, l'intimée ayant eu amplement le temps nécessaire pour notifier l'ensemble de ses pièces avant l'audience des débats du 28 novembre 2011.

Sur le licenciement :

Après avoir déposé plainte auprès des services de police le 21 décembre 2004 pour vol commis par sa salariée, un balai-brosse n'ayant pas été facturé, et ayant été livré à l'entrepreneur de Mme X..., l'employeur convoquait par lettre du 22 décembre 2004 cette dernière à un entretien préalable avec notification d'une mise à pied conservatoire, puis lui notifiait par lettre du 12 janvier 2005 son licenciement en invoquant les motifs suivants :
Après avoir constaté en établissant le bilan comptable qu'il y avait beaucoup de matériaux manquants dans les stocks alors même qu'ils n'avaient pas fait l'objet d'une facturation, l'employeur relevait que le 21 décembre 2004, un entrepreneur, en quittant la caisse de Mme X..., partait avec un balai-brosse qu'il n'avait pas payé et qui n'était pas facturé. Interrogée Mme X... expliquait que cet entrepreneur avait l'intention de faire par la suite, l'acquisition d'autres matériaux, et avait indiqué qu'il reviendrait plus tard, alors même que cette pratique était interdite au sein de l'entreprise.
L'employeur expliquait ensuite, que postérieurement à la plainte déposée auprès de la police, Mme X... s'est présentée le 22 décembre 2004 dans l'après-midi, pour faire émettre par l'autre caissière une facture concernant le matériel emporté par l'entrepreneur, qu'elle s'empressait de régler en espèces.
L'employeur indiquait également qu'il avait immédiatement vérifié certains points et qu'il s'était aperçu que Mme X... émettait à son profit de nombreux avoirs sans aucune autorisation, lesquels ne correspondaient à aucune marchandise livrée ou restituée. Il précisait que cette délivrance d'avoirs au profit de Mme X... était d'autant plus surprenante qu'ayant été alerté de cette situation, il avait demandé à son prestataire informaticien de bloquer la possibilité d'édition d'avoirs, afin que toute émission passe obligatoirement par son autorisation préalable. Interrogé l'informaticien avait déclaré à l'employeur que c'était à la demande de Mme X... qu'il avait débloqué l'émission d'avoirs au motif qu'elle éprouvait des difficultés à les émettre.

L'employeur ajoutait que son analyse avait également montré que lors du passage en caisse de Mme X... le 22 décembre, elle avait fait émettre des factures correspondant à des marchandises qui avaient été livrées antérieurement, manifestement pour régulariser une situation qu'elle savait douteuse.

En résumé l'employeur reprochait à la salariée d'avoir délivré de la marchandise gratuitement à l'un des entrepreneurs chargés de la construction de sa maison, de s'être fait établir des avoirs sans aucune contrepartie réelle et fait émettre dans l'urgence des factures correspondant à des marchandises livrées, non facturées au jour de leur livraison.
En réponse Mme X... fait valoir que les pièces versées aux débats ne justifient pas suffisamment les faits qui lui sont reprochés, et encore moins leur gravité
À l'appui de ses prétentions, la Société Louisor et Fils produit un avoir établi le 21 décembre 2004 au profit de Mme X... et concernant la livraison le jour même d'un manche et d'un ballet " cantonnier ", ainsi qu'une facture en date du 22 décembre 2004 au nom de Mme X... concernant le même matériel outre un quart de ronde et portant la mention « livré » avec le cachet de l'entreprise, ce qui tend à corroborer les explications fournies par l'employeur selon lesquelles Mme X... a, le lendemain de la plainte pénale déposée par l'employeur, régularisé l'achat d'un balai qui avait été précédemment livré sans être payé, Mme X... s'est en fait préalablement délivré un avoir correspondant au prix du matériel ainsi livré.
La Société Louisor et Fils verse également des factures établies au nom de Mme X..., concernant des matériels livrés les 9 et 14 décembre 2004, concernant des quarts de ronde et du contreplaqué, les dites factures, bien que datés des 9 et 14 décembre 2004, ont été manifestement éditées le 22 décembre 2004 puisqu'elles portent mention de leur règlement à cette dernière date, la première par versement d'espèces et la seconde par carte bancaire.
Ainsi les explications fournies par l'employeur sont également corroborées par ces factures puisqu'il apparaît que Mme X... est entrée en possession de marchandises les 9 et 14 décembre 2004, mais ne les a réglées que le 22 décembre 2004, après demande d'explication de l'employeur et dépôt de la plainte pénale par celui-ci
En outre Mme X... s'est fait délivrer un avoir en date du 21 décembre 2004 pour deux plaques de contreplaqué de 6 millimètres, livrées le 21 décembre 2004, alors que cet avoir a été manifestement édité le 22 décembre 2004 puisqu'il porte mention du règlement à cette date par carte bancaire, une facture du 22 décembre 2004 se rapportant à la même marchandise a été éditée sans mention de règlement. Il apparaît ainsi que l'avoir porte une date antérieure à la facture pour le même matériau.
Par ailleurs l'entreprise JR SOFT, prestataire informatique, dans un courrier du 15 décembre 2004 informe la Société Louisor et Fils qu'elle a effectivement rétabli la modification des pièces de vente courant novembre 2004, obtempérant ainsi à la demande de la caissière en l'occurrence Mme X..., laquelle éprouvait des difficultés à cause du blocage informatique. Ainsi il est démontré que c'est Mme X... qui a pris l'initiative de faire modifier le système informatique pour pouvoir émettre des avoirs, et ce à l'insu de son employeur.

Au vu de ces constatations, il apparaît que l'employeur a fourni des éléments étayant suffisamment les griefs précis, invoqués dans la lettre de licenciement. Les agissements dénoncés dans cette lettre, étant constitutifs de détournement et de dissimulation par régularisation postérieure au moins partielle, caractérisent la faute grave justifiant la mesure de licenciement prononcé.

En conséquence Mme X... ne peut prétendre à l'attribution d'aucune indemnité de préavis et de licenciement, ni dommages et intérêts.
Le préjudice réel final subi par l'employeur, tel qu'il résulte des pièces produites, portant sur des marchandises de faible coût, il ne sera alloué à l'appelante que la somme de 100 euros à titre de dommages intérêts.
En raison des modestes ressources de Mme X..., l'équité n'implique pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Mme X... des dommages et intérêts pour rupture abusive, des indemnités de préavis et de licenciement ainsi qu'une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau,
Déboute Mme X... de l'intégralité de ses demandes,
Condamne Mme X... à payer à la Société Louisor et Fils la somme de 100 euros à titre de dommages intérêts,
Dit que les entiers dépens tant de première instance que d'appel sont à la charge de Mme X...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00393
Date de la décision : 09/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-01-09;10.00393 ?
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