COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 744 DU DOUZE DECEMBRE DEUX MILLE ONZE
AFFAIRE No : 10/ 00982
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 20 avril 2010.
APPELANTE
SOCIETE MAINTENANCE ASSISTANCE CAMIONS (MAC) SARL Rue Nobel prolongée-Zi de jarry 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Me BARAKOVA substituant Me Thierry AMOURET (TOQUE 63) avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉ
Monsieur Jérôme Y...... 97139 LES ABYMES Représenté par M. X... (Délégué syndical ouvrier)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Jacques FOUASSE, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jacques FOUASSE, conseiller, rapporteur, M. Philippe PRUNIER, conseiller.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 12 décembre 2011
GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS et PROCÉDURE :
Monsieur Jérôme Y... a été embauché par la S. A. R. L. MAC à compter du 29-03-2005 en qualité de chef d'atelier « statut cadre », moyennant une rémunération de 2500 euros bruts.
L'employeur lui reprochant " son manque d'implication personnelle et son refus presque systématique de venir aux réunions " le licencie pour faute grave, pour avoir " décidé de supprimer la pause entre 12heures et 13heures et de terminer votre journée à 14 heures au lieu de 15 heures. Vous avez pris cette initiative sans en référé à qui que ce soit et à fortiori sans l'accord de votre hiérarchie ", M. Y..., par lettre recommandée avec avis de réception du 16-01-2008 a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale.
Par jugement de départage prononcé le 20 Avril 2010, le Conseil de prud'hommes de POINTE A PITRE
DIT que le licenciement de Monsieur Jérôme Y... est justifié par une cause réelle et sérieuse, non constitutive de faute grave ;
CONDAMNE en conséquence la S. A. R. L. MAC à payer à Monsieur Jérôme Y... les sommes suivantes :
- indemnité de préavis de trois mois : 2 677, 50 € X 3 = 8. 032, 50 € bruts,- indemnité de congés payés sur préavis : 803, 25 € bruts,- indemnité légale de licenciement : 1 517, 25 € bruts, avec intérêts au taux légal à compter du 7-03-2008 ;- indemnité pour préjudice moral du fait de la brusque rupture, du fait de la mise à pied immédiate : 5 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement.- indemnité en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile : 1 000 euros
Par déclaration déposée au greffe le 7 mai 2010, la société MAC a relevé appel de ce jugement.
MOYENS et DEMANDES des PARTIES :
Au soutien de son appel, la société MAC fait valoir que :
- Monsieur Jérôme Y... a commis une faute grave : tout d'abord, en décidant de son propre chef de faire journée continue, faisant ainsi travailler les salariés sous sa responsabilité plus de six heures d'affilée, ensuite en quittant son poste de travail à 14 heures au lieu de 15 heures. Or, le salarié est tenu d'exécuter les ordres qui lui sont donnés. Les heures de travail des salariés sont fixées par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction, de même que les heures d'ouverture de l'entreprise au public. Ainsi, ne pas respecter ces directives caractérise une indiscipline ou insubordination qui peuvent constituer des motifs de licenciement.
- si par extraordinaire, la juridiction de céans devait confirmer le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de POINTE A PITRE en ce qu'il a estimé que le faits reprochés sont réels et sérieux sans toutefois justifier un licenciement pour faute grave, elle infirmera toutefois ledit jugement en ce
qu'il a accordé à monsieur Y... la somme de 5 000 € en réparation de son préjudice moral. En effet, immédiatement après son départ de l'entreprise MAC, monsieur Y... a été embauché par la société SACI et y jouit d'un bon poste, jusqu'à aujourd'hui. Force est de constater que ce dernier est bien en peine de justifier des conséquences'préjudiciables de son licenciement, qu'elles soient morales et financières.
La société MAC demande à la Cour de :
A TITRE PRINCIPAL
-INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de POINTE A PITRE en date du 1er décembre 2009.
A TITRE SUBSIDIAIRE
si par extraordinaire, la juridiction de céans devait confirmer le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de POINTE A PITRE en ce qu'il a estimé que les faits reprochés sont réels et sérieux sans toutefois justifier un licenciement pour faute grave,
- INFIRMER toutefois ledit jugement en ce qu'il a accordé à monsieur Y... la somme de 5 000 € en réparation de son préjudice moral.
- Le condamner au paiement d'une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile
Monsieur Jérôme Y... s'oppose à ces demandes et sollicite la confirmation du jugement, outre la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Monsieur Jérôme Y... expose que :
- il ne discute pas la matérialité des faits qui lui sont reprochés : il reconnait avoir pris l'initiative de fermer l'atelier dès 14 heures au lieu de 15 heures le Vendredi 21 Décembre 2007 et avoir ainsi permis aux trois salariés de l'atelier présents, de partir plus tôt, et ce sans référer à sa hiérarchie. dans sa lettre de protestation, et cela n'est pas contesté par l'employeur, les salariés étaient loin d'avoir le matériel adéquat, malgré ses demandes, sachant qu'ils intervenaient sur des véhicules de toutes marques, la personne chargée de la réception des véhicules, de l'établissement des factures, et des devis a été licenciée au début de sa prise de fonction, de sorte que Monsieur Jérôme Y... a effectuer les travail de deux personnes pendant toute la durée de son contrat de travail.
- la fiche d'activité journalière de l'atelier en date du 21 décembre 2007 produite par Monsieur Jérôme Y... établit que ce jour là, seul Monsieur C... a travaillé sans interruption de 7H à 14H, soit sans respect de la pause obligatoire de 20 minutes au bout de 6 heures de travail, mais Messieurs D... et E... ont été tous les deux en attente de pièces, le premier pendant plus d'une heure et le second pendant plus de trois heures, et que de plus, Monsieur E... n'avait pas de travail de 12H30 à 14H, de sorte que même si au sens strict, ces salariés n'ont pas observé la pause légale, ils ont néanmoins pu se reposer.
L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 17 octobre 2011.
MOTIFS de la DÉCISION :
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la Cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, spécialement en indiquant :
- Monsieur Y... ne discute pas la matérialité des faits qui lui sont reprochés : il reconnaît avoir pris l'initiative de fermer l'atelier dès 14heures au lieu de 15 heures le vendredi 21 décembre 2007, et avoir ainsi permis aux trois salariés de l'atelier présents, de partir plus tôt, et ce sans en référer à sa hiérarchie. Il explique que ce jour-là la personne chargée d'approvisionner l'atelier était absente, et que de ce fait il avait dû personnellement se rendre chez les différents fournisseurs pour obtenir les pièces nécessaires à la réparation des véhicules à l'atelier ;- à 12h45 il était de retour à l'atelier, aucun des mécaniciens n'était en pause. Il lui est apparu évident qu'il serait impossible de respecter les impératifs fixés par les clients concernant les heures de livraison de leur véhicule, dans les temps s'ils arrêtaient de travailler. Il a donc proposé aux mécaniciens de continuer leur travail pour terminer ces véhicules dans les temps, chose qui leur a paru évident. Les réparations terminées facturées et les véhicules livrés, et n'ayant aucun autre rendez-vous de prévu, les mécaniciens et lui ont été déjeuner chacun de leur côté.
- il ressort de l'attestation de Monsieur F..., bien que sujette à caution en raison des liens de subordination existant entre le témoin et l'employeur, et faite plus d'un an après le licenciement de Monsieur Jérôme Y..., qu'un client s'est présenté à 14h15, qu'un agent commercial lui a restitué son véhicule, et qu'entre 14h15 et 15h les clients qui ont téléphoné ont été accueillis pour les prises de rendez-vous des semaines suivantes. Il n'y a donc pas eu de préjudice pour l'entreprise du fait de la fermeture inattendue de l'atelier une heure plus tôt que prévu.
- dans ces conditions, il convient de considérer que les faits reprochés à Monsieur Jérôme Y... sont réels, et sérieux, sans toutefois justifier un licenciement pour faute grave, ni une mise à pied immédiate.
Le jugement dont appel sera confirmé en toutes ses dispositions, la Cour considérant également que le quantum des sommes alloués par le premier juge est conforme aux différents préjudices subis par le salarié ;
- sur les frais irrépétibles :
Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais qu'il a du engager en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne la société MAINTENANCE ASSISTANCE CAMIONS – MAC – au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les éventuels dépens
Le Greffier, Le Président,