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05/12/2011 | FRANCE | N°09/015331

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 05 décembre 2011, 09/015331


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 694 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 01533
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 10 septembre 2009.
APPELANT
Monsieur Lucien X... ... 97170 PETIT-BOURG Comparant en personne assisté de M. Ernest Y... (Délégué syndical ouvrier)

INTIMÉE
S. A. AIR FRANCE DELEGATION REGIONALE GUADELOUPE 97142 LES ABYMES Représentée par Me Florence BARRE-AUJOULAT (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affai

re a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Berna...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 694 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 01533
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 10 septembre 2009.
APPELANT
Monsieur Lucien X... ... 97170 PETIT-BOURG Comparant en personne assisté de M. Ernest Y... (Délégué syndical ouvrier)

INTIMÉE
S. A. AIR FRANCE DELEGATION REGIONALE GUADELOUPE 97142 LES ABYMES Représentée par Me Florence BARRE-AUJOULAT (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Philippe PRUNIER, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, rapporteur. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 05 décembre 2011

GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette Z..., Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES
Par déclaration enregistrée au greffe le 18 janvier 2008, M. Lucien X... a saisi le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir condamner son employeur, la société AIR FRANCE, à lui payer les sommes suivantes :-5 334, 01 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,-111 256, 80 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-5 562, 84 € au titre de l'indemnité de préavis,-556, 28 € au titre des congés payés sur préavis,-2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le tout assorti de l'exécution provisoire.

Par jugement du 10 septembre 2009, le conseil de prud'hommes de Pointe-à Pitre a :- a déclaré recevables et bien fondées les demandes de M. Lucien X...,- dit et jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse,- condamné en conséquence la compagnie AIR FRANCE à lui payer les sommes suivantes : * 5 334, 01 € au titre de l'indemnité légale de licenciement, * 14 834, 24 € au titre de l'indemnité pour licenciement abusif, * 5 562, 84 € au titre de l'indemnités de préavis, * 556, 28 € au titre des congés payés sur préavis, * 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté le demandeur du surplus de ses demandes,- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 22 octobre 2009, M. Lucien X... a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions reçues le 04 avril 2011 et soutenues oralement à l'audience du même jour, M. Lucien X..., représenté, a demandé à la cour de :- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse,- infirmer ledit jugement en sa disposition fixant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 14 834, 24 €,- condamner la société AIR FRANCE à lui payer une indemnité de 111 256, 80 € à ce titre,- condamner la même à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du CPC.

Par conclusions remises le 04 avril 2011 et soutenues oralement, la société AIR FRANCE, représentée, demande à la cour de :- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel,- débouter M. X... de sa demande d'indemnité de 111 256, 80 €, reconventionnellement,- infirmer le jugement rendu le 10 septembre 2009,- dire et juger que le licenciement de M. X... est régulier et repose sur une cause réelle et sérieuse,- débouter par conséquent M. X... de ses demandes d'indemnités au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de préavis,

- condamner M. X... à lui payer la somme de 1 574, 89 € au titre du solde du prêt contracté à son profit auprès du Crédit Mutuel par son employeur et du solde négatif d'heures,- dire que M. X... devra lui rembourser la somme de 526, 85 € correspondant aux charges sociales indûment perçues, en application des articles 1235 et 1376 du code civil, en tout état de cause,- le condamner à lui payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par décision avant-dire droit du 27 juin 2011, la cour a ordonné la réouverture des débats en invitant M. X... à s'expliquer sur les demandes de la société AIR FRANCE portant sur les sommes de 1 574, 89 € au titre du solde du prêt contracté à son profit et de 526, 85 € correspondant aux charges sociales indûment perçues.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et aux décisions antérieures.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prise d'acte de la rupture du contrat et ses effets :

Lorsque le salarié prend acte de la rupture du lien contractuel en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits évoqués le justifient, soit d'une démission dans le cas contraire.
En outre, le contrat de travail est rompu par la prise d'acte de la rupture émanant du salarié, peu importe la lettre de licenciement envoyée postérieurement par l'employeur pour lui imputer cette rupture.
Le juge doit uniquement examiner l'existence ou l'absence de manquements de l'employeur.
Dans la présente affaire, M. Lucien X... a été embauché à temps partiel le 04 juin 1984 par la compagnie aérienne AIR FRANCE au service Passages de Pointe-à Pitre et au terme de la relation contractuelle, il occupait le poste de technicien du trafic de l'escale 3. Il a sollicité de nombreux congés de formation sans solde, de mobilité professionnelle et pour convenance personnelle d'octobre 1989 à février 2006. La société AIR FRANCE les lui accorda. Ces différentes périodes ont permis à M. Lucien X... de se former au métier de pilote de ligne et de devenir commandement de bord au profit de la compagnie aérienne AIR CARAÏBES. Dès Le 25 novembre 2005, M. Lucien X... sollicitait sa réintégration au sein de la société AIR FRANCE. Par courrier du 16 février 2006, son employeur conditionnait sa réintégration à sa démission concomitante de la société AIR CARAÏBES, devenue depuis une compagnie aérienne concurrente. Sans trop tarder, les 27 février et 07 mars 2006, M. Lucien X... faisait connaître à son employeur son refus de démissionner de cet autre poste eu égard à l'autorisation initialement donnée par celui-ci le 16 octobre 2001, sans limitation de durée, de cumuler deux emplois distincts. M. Lucien X... lui proposait alors les trois solutions suivantes :- la possibilité d'un détachement à la compagnie AIR CARAÏBES,- la possibilité d'un autre congé,- un départ négocié entre les deux parties.

Par lettre du 19 avril 2006, la société AIR FRANCE lui demandait de réintégrer son poste dès le 26 avril 2006. Le 18 mai 2006, celui-ci ne s'étant pas manifesté, elle le mettait en demeure de reprendre son service de technicien dans les meilleurs délais.

Parallèlement, M. Lucien X... était placé sans solde par son employeur du 1er mars au 30 avril 2006, sans en être avisé.
Par lettre recommandée du 20 mai 2006 avec avis de réception signée le 29 mai 2006 par l'employeur, M. Lucien X... prenait acte de la rupture du lien contractuel aux torts exclusifs de celui-ci, en invoquant trois fautes, à savoir la modification substantielle de son contrat de travail par sa mise d'office en congé sans solde du 1er mars au 30 avril 2006, l'absence de travail et le défaut de règlement de ses salaires.

La société AIR FRANCE soutient alors un argumentaire largement développé sur son refus de renouveler l'autorisation du cumul de deux activités et reconnaît en fin d'exposé (page 7 de ses conclusions) avoir consenti cette autorisation à M. Lucien X... le 19 avril 2006, ce qui justifierait la mise en position de congé sans solde comme une simple modalité d'exécution du contrat de travail.

Lorsque la période de suspension du contrat de travail prend fin, le salarié doit retrouver son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente. L'employeur ne peut déroger à cette règle en prévoyant une condition nouvelle à la reprise du contrat qui en modifie la structure même.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour considère que la société AIR FRANCE, ayant en définitive renoncé à exiger de son salarié sa démission au sein de la compagnie concurrente comme condition nécessaire à la reprise du travail, fait la démonstration de sa propre faute portant atteinte à la structure même du contrat pour avoir ainsi privé M. X... de son métier, de ses salaires et de ses droits à la retraite sur la période du 1er mars 2006 au 30 avril 2006 sans aucun motif légitime.
La cour confirme en conséquence le jugement entrepris de ce chef.
Sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
M. Lucien X... sollicite la somme de 111 256, 80 € au titre de l'indemnité de licenciement qui correspond à 60 mois de salaire, en invoquant sa détermination à vouloir progresser professionnellement et accéder au poste de commandement de bord, les différents congés pris sans solde à cet effet et ses charges familiales liées aux études de ses deux enfants étudiants, au versement d'une pension alimentaire et au remboursement de cinq prêts souscrits dans l'intérêt familial et professionnel.
La société AIR FRANCE s'oppose à cette demande qui lui semble extravagante et soutient qu'elle n'a jamais fait obstacle aux différentes demandes de congés de son salarié, que la somme réclamée correspond à plus de 73 mois de salaire, autrement dit à 6 ans de salaire, que M. Lucien X... ne produit en cause d'appel que des justificatifs de charges, et ne justifie d'aucune pièce pour ses ressources actuelles, alors que certains prêts ont été obtenus pendant ses congés sans solde et qu'il lui a bien fallu, pour en avoir le bénéfice, justifier de ses revenus.

Il ressort des documents versés aux débats que le temps de travail effectif de M. Lucien X... passé au sein de la société AIR FRANCE demeure limité et ce d'autant que son travail à temps plein s'est limité à deux ans et six mois, largement inférieur à sa période de formation de huit années dont cinq ans sans solde par sa propre volonté de réaliser son projet professionnel. Il faut également relever qu'aucune pièce n'est produite pour justifier des ressources actuelles de l'appelant et que certains des contrats produits sont sans rapport avec les périodes de formation.

La cour confirme en conséquence le jugement entrepris de ce chef.
Sur la répétition de l'indu :
Par lettre du 16 juillet 2004, M. Lucien X... reconnaissait devoir la somme de 2 757, 03 € à l'égard de son employeur et lui réglait à ce titre la somme de 1 300 €.
La société AIR FRANCE réclame aujourd'hui le solde de 1574, 89 €.
M. Lucien X... s'est engagé, à l'audience de réouverture, à payer celui-ci.

Il convient en conséquence de condamner M. Lucien X... à payer à la société AIR FRANCE la somme de 1574, 89 €.

Sur le remboursement des cotisations sociales :
La société AIR FRANCE réclame le remboursement de la somme de 526, 85 € au titre des charges sociales qui seraient à rattacher à l'indemnité compensatrice de préavis de 5 562, 84 € et à l'indemnité de congés payés de 556, 28 € au paiement desquelles elle a été condamnée en première instance et qu'elle aurait versées en valeur nette à l'intéressé à la demande de l'huissier de justice chargé de mettre à exécution la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire.
L'indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au salaire brut, assujetti au paiement des cotisations sociales et à l'impôt sur le revenu, que le salarié aurait touché s'il avait travaillé pendant la durée du délai-congé.
En conséquence, dans la mesure où l'huissier mandaté par le salarié a exigé et encaissé le montant brut de l'indemnité compensatrice de préavis et le montant brut de l'indemnité de congés payés afférente au préavis, le salarié est redevable de la part salariale de cotisations sociales que l'employeur lui a réglé à tort et que celui-ci devait verser aux organismes sociaux.
Il sera donc fait droit à la demande de l'employeur, tendant au remboursement de la somme de 526, 85 euros au titre des cotisations sociales qu'il a été contraint de verser à l'huissier instrumentaire.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire en matière sociale et en dernier ressort :
Déclare recevable en la forme l'appel de M. Lucien X... ;
Confirme la décision querellée sauf en sa disposition rejetant la demande de remboursement de la somme de 1 574, 89 € au titre du solde du prêt contracté auprès du Crédit Mutuel ;
Statuant à nouveau,
Condamne M. Lucien X... à payer à la société AIR FRANCE la somme de 1 574, 89 € ; l Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt ;

Y ajoutant,
Dit que l'indemnité compensatrice de préavis et que l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à cette dernière, allouées à M. Lucien X..., sont fixées en montant brut, mais que ce montant est soumis aux cotisations sociales devant être versées aux organismes sociaux par l'employeur, le montant des dites cotisations devant être déduit des sommes versées à M. Lucien X... lequel en doit restitution à la Société AIR FRANCE à hauteur de 526, 85 euros,
Rejette le surplus de demandes ;
Condamne la société AIR FRANCE aux éventuels dépens de l'instance ;
La GreffièreLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 09/015331
Date de la décision : 05/12/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2011-12-05;09.015331 ?
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