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05/12/2011 | FRANCE | N°09/00569

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 05 décembre 2011, 09/00569


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 719 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 00569
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 mars 2009.
APPELANTE
Madame Gervaise X... ...97139 LES ABYMES Représentée par Me Michaël SARDA (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Flavie Y... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Camille CEPRIKA (TOQUE 27) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945

-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2011, en audience publique...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 719 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 00569
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 mars 2009.
APPELANTE
Madame Gervaise X... ...97139 LES ABYMES Représentée par Me Michaël SARDA (TOQUE 1) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Flavie Y... ... 97139 LES ABYMES Représentée par Me Camille CEPRIKA (TOQUE 27) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, M. Philippe PRUNIER, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 05 décembre 2011
GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette A..., Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par contrat de travail en date des 1er et 2 juillet 1991, Mme Y... été embauchée pour travailler dans le salon de coiffure de Mme X... à compter du 2 juillet 1991 pour une période d'essai d'une durée d'un mois et demi expirant le 17 août 1991. Ses horaires de travail étaient fixés du mardi au vendredi de 8h00 à 12h30, et de 14h00 à 18h30, le samedi de 7h00 à 18h30. A l'issue de cette période d'essai elle percevait la somme de 3300 francs.
Par un second contrat de travail, non daté, Mme X... employait Mme Y... pour une durée d'un an du 1er novembre 1991 au 31 octobre 1992, le salaire étant fixé au montant net de 2200 francs, et les horaires de travail étant fixés de 8h00 à 12h30 et de 14h00 à 18h30 du lundi au vendredi et de 7h00 à 18h30 le samedi. Il était précisé que les absences répétées n'étaient pas autorisées, ce qui pouvait entraîner une rupture du contrat de travail.
Par courrier daté du 25 novembre 2002, Mme X... informait Mme Y... qu'elle envisageait une mesure de licenciement économique, et qu'à cette fin elle la convoquait pour le 2 décembre 2002.
Par courrier du 9 décembre 2002, Mlle X... notifiait à Mme Y... son licenciement pour raison économique, à savoir : " augmentations de charges sociales et toutes les autres charges "..... " loyer, achat produits, quittance EDF ", " le revenu du salon ne peut faire face à cause d'une baisse de la clientèle ". Il était précisé que la date de présentation de la lettre de licenciement fixait le point de départ du préavis de 3 mois.
Le 13 mars 1003, Mme Y... signait un reçu pour solde de tout compte par lequel elle reconnaissait recevoir paiement des sommes suivantes :-128, 70 euros de salaire,-331, 34 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-1121, 0 9 euros à titre d'indemnité de licenciement, soit au total la somme de 1581, 13 euros.

Par acte huissier en date du 31 octobre 2006, Mme Y... faisait citer Mme X... devant le Conseil des Prud'hommes de Pointe-à-Pitre, aux fins d'obtenir paiement d'un rappel de salaire pour la période du 1er janvier 1998 au 30 avril 2003, d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de congés payés, pour violation de la procédure et paiement de dommages et intérêts pour absence de proposition de reclassement.
Par jugement du 26 mars 2009, le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre jugeait que le licenciement de Mme Y... était sans cause réelle et sérieuse et condamnait Mme X... à lui payer les sommes suivantes :-25 208 euros à titre de rappel de salaire de 2001 à 2003,-2520 euros à titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire,-6000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1011 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,-520 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,-1011 euros de dommages intérêts pour absence de reclassement,-400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il était en outre ordonné le versement des cotisations patronales salariales pour l'année 1996 à la Caisse générale de sécurité sociale.
Par déclaration du 7 avril 2009, Mme X... interjetait appel de ce jugement.
Par conclusions du 3 janvier 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X... sollicite l'infirmation du jugement déféré et le rejet de l'ensemble des demandes de Mme Y.... Elle entend voir constater que les demandes de paiement de salaires et accessoires du salaire sont prescrites dans la limite de 5 années qui précèdent la saisine du conseil de prud'hommes, et que les demandes de paiement de salaires et accessoires, heures supplémentaires, non atteintes par la prescription sont infondées et non corroborées par des éléments précis et étayés.
Elle fait valoir que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, qu'il a été satisfait l'obligation de reclassement et que l'indemnité légale de licenciement a été payée par l'employeur, la prescription devant d'ailleurs s'appliquer à cette indemnité. Elle soutient qu'elle était à jour de ses cotisations patronales et salariales.
Par conclusions datées du 7 janvier 2010, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme Y... sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le montant des dommages intérêts pour non reclassement et l'indemnité pour violation de la procédure. Elle porte ces chefs de demandes respectivement aux montants de 8000 euros pour les deux premiers et à la somme de 2022 euros pour le troisième. Elle réclame en outre paiement de la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles.
Elle entend voir ordonner le reversement sous astreinte, à la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe, des contributions patronales et salariales pour la période de 1991 à 2003.

Motifs de la décision :

Sur le rappel de salaire :

L'employeur ayant été cité à comparaître devant le conseil de prud'hommes par acte d'huissier du 31 octobre 2006, la demande de rappel de salaire portant sur la rémunération des mois d'octobre 2001 et suivants n'est pas prescrite.
Pour la période non prescrite, Mme Y... produit ses bulletins de de janvier 2002 d'un montant brut de 417, 87 euros, de janvier et février 2003, chacun d'un montant brut de 417, 87 euros, et de mars 2003 faisant apparaître une rémunération brute de 153, 22 euros pour la période du 1er au 11 mars 2003 ainsi que la somme de 394, 45 euros à titre de congés payés.
Selon le contrat de travail signé par les parties, ayant pris effet à compter du 1er novembre 1991, Mme Y... dont les horaires de travail étaient fixés de 8h00 à 12h30 et de 14h00 à 18h30 du lundi au vendredi, et de 7h00 à 18h30 le samedi, devait accomplir ainsi 56 heures 30 de travail par semaine.

Sur les bulletins de salaire versés aux débats, l'employeur n'a pas porté le nombre d'heures travaillées par la salariée, ni mentionné de quelconques absences. Il en résulte que Mme Y... apparaît avoir travaillé chaque semaine pendant le nombre d'heures figurant au contrat de travail.

Certes Mme X... produit une attestation de son bailleur, M. B..., selon lequel il aurait observé que Mme Y... venait travailler quand bon lui semblait et avait très peu de présence au salon de coiffure. Le contenu de cette attestation paraît peu crédible, dans la mesure où dans le contrat de travail de novembre 1991, il était tout spécialement stipulé que les absences répétées n'étaient pas autorisées ce qui pouvait entraîner une rupture du contrat de travail, cette attestation étant en outre en contradiction avec les attestations produites par Mme Y... et émanant de Mlle Tania D..., Mme Annick E..., Jean-Paul F... et Daniel G..., desquelles il résulte que la salariée travaillait plus de 8 heures par jour, l'attestation Mme Marie H... faisant état d'une durée de 8 heures et plus par semaine, procédant manifestement d'une erreur matérielle.
Par ailleurs il ressort d'un courrier adressé le 14 avril 2003 par Mme X... au directeur de la caisse de sécurité sociale, que le contrôleur de cet organisme a retenu une durée de travail de 10 heures par jour.
En conséquence, sur la base de 210 heures de travail par mois, telle que retenue par la salariée dans ses conclusions, et compte tenu du taux horaire du SMIC de 6, 66 euros à compter du 1er juillet 2001 et de 6, 83 euros au 1er juillet 2002, Mme Y... aurait dû percevoir :-12 587, 40 euros d'octobre 2001 à juillet 2002,-12 000, 31 euros de juillet 2000 2 au 11 mars 2003, date de fin d'exécution du préavis, soit au total la somme de 24 587, 71 euros.

Pendant la même période, Mme Y... percevait une rémunération mensuelle de 417, 87 euros, selon les indications figurant sur les bulletins de paie versés aux débats. Elle a donc reçu au cours de cette période la somme de 7521, 66 euros. Il lui reste donc dû la somme de 17 066, 0 5. €
Sur la rémunération de Mme Y..., de juin 2002 à mars 2003, d'un montant total de 12 418, 18 euros, il est dû une indemnité de congés payés de 1241, 81 euros. Ayant perçu en mars 2003 une indemnité de cette nature d'un montant de 394, 45 euros, il reste dû à Mme Y... la somme de 847, 36 euros.

Sur le licenciement et ses conséquences financières :

Les dispositions de l'article L 1235-7 du code du travail, édictant une prescription de 12 mois pour contester la régularité ou la validité du licenciement pour motif économique, ne sont applicables qu'aux contestations susceptibles d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement pour motif économique, mais les contestations sur la cause réelle et sérieuse du licenciement échappent à ce délai abrégé.
En l'espèce ce n'est pas la nullité du licenciement pour motif économique qui est sollicité, mais une demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il convient donc de vérifier la réalité de la cause économique invoquée par l'employeur à l'appui du licenciement de Mme Y....
Pour justifier de difficultés économiques, Mme X... produit un décompte manuscrit des recettes et charges pour les années 2006 et 2007, et des comptes de résultats pour les années 2008 à 2010. Force est de constater qu'elle ne produit aucun compte permettant de démontrer qu'au cours des années 2002 et 2003 une dégradations de sa situation financière soient survenues et aient justifié à cette époque le licenciement de Mme Y.... Au contraire le certificat établi le 10 janvier 2007 par le contrôleur des impôts, montre que la base d'imposition de Mme X... a augmenté régulièrement au cours des années 2001, 2002, 2003, et 2004, passant respectivement de 3690 euros, à 4560 euros, puis à 4950 euros, et enfin à 5650 euros.
En conséquence, faute de démontrer l'existence de difficultés économiques réelles, l'employeur ne justifie pas du bien-fondé du licenciement qu'il a notifié à Mme Y....
Celle-ci a subi un préjudice consistant en la perte de son emploi et de ses revenus salariaux, ladite perte résultant non seulement du licenciement sans cause réelle et sérieuse dont elle a fait l'objet, mais aussi de l'absence de propositions de reclassement. Toutefois Mme Y... ne fournit aucun élément permettant d'apprécier l'étendue du préjudice subi, notamment la durée de la période de chômage qui a suivi son licenciement.
Faute d'élément permettant d'apprécier l'étendue du préjudice dont elle demande réparation, l'indemnisation de Mme Y... sera limitée à une somme équivalente à un mois de salaire, soit la somme de 1434 €, étant rappelé que s'agissant d'une entreprise employant moins de 11 salariés, les dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail prévoyant une indemnisation à hauteur de 6 mois de salaire minimum, ne sont pas applicables, et ce en vertu des dispositions de l'article L 1235-5 du même code.
Ces dispositions excluent également l'application de l'article L 1235-2 relatif à l'indemnisation pour procédure irrégulière de licenciement, Mme Y... ne justifiant pas au demeurant avoir subi un préjudice lié à une quelconque irrégularité de la procédure de licenciement.
En application des dispositions de l'article L 1234-9 du code du travail, Mme Y... a droit à une indemnité de licenciement qui doit être calculée à raison d'un dixième de mois de salaire par année d'ancienneté, selon les dispositions applicables à l'époque du licenciement. Sur la base d'un salaire mensuel moyen de 1434, 30 euros pour les 3 derniers mois dus à Mme Y..., et compte tenu d'une ancienneté, à compter du 1er novembre 1991, de 11 ans et 4 mois, il sera retenu un montant de 1642 euros comme réclamé par Mme Y..., lequel sera ramené à 520 euros compte tenu du versement de 1122 euros figurant sur le dernier bulletin de salaire et sur le reçu pour solde de tout compte.
Par ailleurs il ressort du relevé de carrière établi le 27 septembre 2002 par la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe, qu'au cours de l'année 1996, aucune cotisation sociale n'a été versée par l'employeur. Les appels de cotisations et relevés de dettes sociales produites par Mme X... pour les années 2000 à 2002, sont insuffisants pour justifier que celle-ci se soit acquittée des cotisations sociales pour l'année 1996.
Il ressort des mentions figurant sur les bulletins de salaire délivrés à Mme Y..., que les cotisations sociales à la charge de la salariée ont été prélevées sur son salaire, notamment en 1996. S'agissant d'un détournement

dont la salariée n'a pu avoir connaissance qu'après établissement par la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe de son relevé de carrière le 27 septembre 2002, aucune prescription n'a pu éteindre son action concernant le versement des dites cotisations.

En conséquence il doit être ordonné le versement par Mme X..., des cotisations sociales concernant l'année 1996.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... les frais irrépétibles qu'elle a exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée par le premier juge sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme Y... était sans cause réelle et sérieuse, et condamné Mme X... à payer à cette dernière, la somme de 520 euros à titre d'indemnité légale de licenciement outre 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et ordonné le versement des cotisations patronales et salariales pour l'année 1996 à la Caisse générale de sécurité sociale de Guadeloupe,
Le réforme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
Condamne Mme X... à payer à Mme Y... les sommes suivantes :-17 066, 0 5 euros à titre de rappel de salaire,-847, 36 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-1434 euros à titre d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et absence de propositions de reclassement,

Y ajoutant,
Condamne Mme X... à payer à Mme Y... la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Dit que l'obligation de versement des cotisations sociales patronales et salariales pour l'année 1996 à la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe, mise à la charge de Mme X..., est assortie d'une astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de Mme X...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/00569
Date de la décision : 05/12/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2011-12-05;09.00569 ?
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