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05/12/2011 | FRANCE | N°09/00098

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 05 décembre 2011, 09/00098


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No690 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 00098
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 décembre 2008.
APPELANTE
S. A. R. L. LE PHOCEEN 20 rue Maurice Marie-Claire 97100 BASSE-TERRE Représentée par Me Alberte ALBINA-COLLIDOR (TOQUE 4) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Alexandra X... ... 97120 SAINT-CLAUDE Représentée NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocat au barreau de GUADELOUPE)

COMPOSITION DE LA COUR

:

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour comp...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No690 DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE ONZE

AFFAIRE No : 09/ 00098
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 décembre 2008.
APPELANTE
S. A. R. L. LE PHOCEEN 20 rue Maurice Marie-Claire 97100 BASSE-TERRE Représentée par Me Alberte ALBINA-COLLIDOR (TOQUE 4) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Alexandra X... ... 97120 SAINT-CLAUDE Représentée NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104) avocat au barreau de GUADELOUPE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Philippe PRUNIER, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, rapporteur. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 05 décembre 2011

GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette Z..., Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par requête enregistrée le 6 septembre 2007, Mme Alexandra X... a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de voir requalifier son contrat " Nouvelles Embauches " en contrat de travail à durée indéterminée, condamner son employeur, la SARL LE PHOCÉEN, au paiement des sommes suivantes :-135, 40 € à titre de salaire, ayant été payée au salaire horaire de 6, 50 € au lieu de 8, 27 €,-99, 24 € au titre des heures supplémentaires du 1er mai 2006,-645, 06 € au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,-645, 06 € au titre de l'indemnité de préavis,-645, 06 € au litre de l'indemnité de licenciement,-2 580, 24 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,-1 390 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de voir régulariser ses bulletins de paie sous astreinte de 100 € par jour de retard.

Par jugement du 18 décembre 2008, le conseil de prud'hommes de Basse-Terre a :- ordonné la requalification du contrat " Nouvelles Embauches " en contrat à durée indéterminée,- ordonné à la SARL LE PHOCÉEN, prise en la personne de son représentant légal, de régulariser les cotisations de sécurité sociale, des ASSEDIC et de retraite au profit de Mme X...,- condamné la SARL LE PHOCÉEN, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme X... les sommes suivantes : * 411, 06 € au titre du salaire de janvier 2006, * 598, 94 € à titre de prime de précarité, * 532, 50 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, * 645, 06 € pour procédure irrégulière, * 645, 06 € pour licenciement abusif, * 2 580, 24 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant d'une dépression, * 1 390 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- ordonné à la SARL LE PHOCÉEN la délivrance à Mme X..., sous astreinte de 50 € par jour de retard, à compter du 15ème jour de la notification de la décision : * les fiches de paie régularisées avec justificatif, * le certificat de travail, * l'attestation ASSEDIC,- débouté Mme X... du surplus de ses demandes,- condamner la SARL LE PHOCÉEN aux dépens de l'instance.

Par déclaration enregistrée le 6 février 2009, la SARL LE PHOCÉEN a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions du 3 octobre 2011 reprises à l'audience du même jour, la SARL LE PHOCÉEN, représentée, demande à la cour de :- ordonner la jonction des trois dossiers suivants : la SARL LE MASSILIA, Mr A... et la SARL LE PHOCÉEN,

- réformer les jugements intervenus le 18 décembre 2008,- dire que la rupture du contrat " Nouvelles Embauches " du 11 décembre 2005 est intervenue conformément aux dispositions légales et ne peut être considérée comme une rupture abusive,

- dire qu'aucun contrat de travail n'a été établi entre Mme X... et la SARL LE MASSILIA et qu'en conséquence, Mme X... n'a pu faire l'objet d'un licenciement entrepris par cette société,- débouter Mme X... de toutes ses demandes qui sont mal fondées,- condamner Mme X... à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner la même à payer respectivement à la SARL LE MASSILIA, et à M. A... la somme de 2 000 € en application du même article.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir que Mme X... a été embauchée par un contrat Nouvelles Embauches le 11 décembre 2005 pour un emploi à mi-temps dans son entreprise de tabac-presse, qu'une clause de mobilité prévoyait son affectation indifféremment dans d'autre établissements situés à Basse-Terre et gérés par la SARL LE MASSILIA et M. A... exerçant sous l'enseigne LA PROVENCE, qu'en octobre 2006, la direction des tabacs presse lui a adressé un premier avertissement pour non-respect des consignes de vente et envisageait de mettre fin au contrat en raison de ses refus de travailler deux dimanches au profit de l'entreprise individuelle de M. A..., que finalement, le contrat n'a pas été rompu puisque Mme X... acceptait un autre contrat à mi-temps dans l'entreprise LE PROVENCE le 1er mai 2007, qu'en dépit de ce nouvel accord entre les parties, la rupture de ce contrat " Nouvelles Embauches " intervenait le 16 juillet 2007 ainsi que celle du contrat passé avec la SARL LE PHOCÉEN le 3 septembre 2007 date à laquelle la salariée a pris acte de la rupture de celui-ci aux torts exclusifs de son employeur, qu'une procédure de licenciement était également lancée le 3 septembre 2007 à son initiative, que dans ces conditions, il est incontestable que ses trois affaires sont liées du fait de l'existence des trois entreprises gérées par la même personne, M. A..., et d'une clause de mobilité au profit des trois établissements, que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a requalifié le contrat " Nouvelles Embauches " en contrat à durée indéterminée, qu'au moment de la prise d'acte, ce contrat était encore en vigueur et non supprimé par la loi du 25 juin 2008, et qu'il ne pouvait s'ensuivre un licenciement sans cause réelle et sérieuse et des conséquences financières ; qu'enfin, il n'existait aucune relation de travail entre Mme X... et la SARL LE MASSILIA, que si Mme X... y a effectué quelques tâches, c'est dans le cadre de son contrat " Nouvelles Embauches " qui prévoyait une clause de mobilité du personnel au profit des trois établissements, clause de mobilité qui a été approuvée par l'inspection du travail, qu'enfin, Mme X... a été régulièrement réglée des heures effectuées au profit du MASSILIA par des salaires supportés par la SARL LE PHOCÉEN, que le conseil des prud'hommes a donc condamné à tort la SARL LE MASSILIA à payer des heures déjà réglées.
Elle fait observer par ailleurs que Mme X... sollicite 6 mois de salaires en vertu de l'article L. 8222-1 du code du travail alors que cette demande n'est pas justifiée eu égard aux éléments du dossier et à la règle non bis in idem.
Par conclusions déposées le 24 juin 2011 et reprises oralement, Mme Alexandra X..., représentée, demande à la cour de :- confirmer la décision du conseil de prud'hommes,- ordonner la requalification du CNE en contrat à durée indéterminée,- ordonner la régularisation des cotisations de sécurité sociale, des ASSEDIC, et de retraite à son profit,

- condamner la SARL LE PHOCÉEN à lui verser les sommes suivantes : * 411, 06 € au titre du salaire de janvier 2006, * 598, 94 € à titre de prime de précarité, * 532, 50 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, * 645, 06 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, * 645, 06 € à titre d'indemnité de préavis, * 645, 06 € à titre d'indemnité pour licenciement abusif, * 2 580, 24 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant d'une dépression, * 1 390 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, * 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- ordonné à la SARL LE PHOCÉEN la remise, sous astreinte de 50 € par jour de retard, les bulletins de paie régularisés avec justificatif, le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC,- condamner, sur appel incident, la SARL LE PHOCÉEN à lui verser la somme de 7 800 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles L. 8221-1 et suivants du code du travail et à la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que :- par contrat " Nouvelles Embauches " (CNE) prenant effet le 1ER février 2006, elle était embauchée par la SARL LE PHOCÉEN, exploitant un établissement de ventes de tabacs et de jeux de hasard dont le gérant est M. A..., en qualité de vendeuse à temps partiel à raison de 78 heures par mois moyennant une rémunération égale au SMIC en vigueur à l'époque,- l'article 4 du contrat précisait qu'elle prenait l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail et qu'elle pourrait aussi travailler dans deux autres établissements situés à Basse-Terre, l'un au 3 rue Lardenoy, l'autre au 2 place Saint-François, que ces deux entreprises étaient visées de manière imprécise par une clause de mobilité établie au profit de sociétés ou d'entités juridiquement distinctes, l'entreprise LA PROVENCE et la SARL LE MASSILIA contrôlées par M. A...,- par lettre du 31 mars 2007, la SARL LE PHOCÉEN l'informait de sa décision de rompre le CNE au motif d'une prétendue " réorganisation du fonctionnement de l'ensemble des magasins ",- le 15 avril suivant, elle lui demandait d'ignorer cette lettre,- le 1er mai 2007, elle signait un nouveau contrat CNE pour un poste de vendeuse aux mêmes conditions que celui du 1er février 2006 mais avec M. A... exerçant en entreprise individuelle sous l'enseigne commerciale LA PROVENCE, que ce contrat comportait la même clause de mobilité en son article 4,- ainsi, elle se trouvait contrainte de cumuler deux emplois à temps partiel tout en travaillant pour trois entreprises, juridiquement distinctes en apparence, mais au profit d'un seul et même employeur en réalité, qu'elle se trouvait contrainte d'effectuer des heures de travail au gré des agencements d'horaires décidés par l'employeur sur l'un ou l'autre des sites et que forcément cette mobilité conduisait à des dépassements d'horaires répétés et sans paiement des heures supplémentaires, que de surcroît, l'employeur tirait profit de cette situation au profit de la SARL LE MASSILIA sans qu'il y ait de lien contractuel existant,- le 16 juillet 2007, M. A... rompait ce nouveau CNE après un mois et demi d'exécution,- elle attirait alors l'attention de son employeur sur l'absence de régularité de cette rupture,- elle prenait acte également de la rupture verbale du contrat du 11 décembre 2005 et se trouvait dans l'obligation de saisir le conseil de prud'hommes de Basse-Terre en assignant la SARL LE PHOCÉEN, la SARL LE MASSILIA et M. A....

Elle fait observer en outre que :- que la requalification des contrats " Nouvelles Embauches " conclus, ne satisfaisant pas aux dispositions générales relatives à la procédure préalable de licenciement et notamment à l'exigence d'une cause réelle et sérieuse doivent être requalifiés rétroactivement en contrat à durée indéterminée,- que le fait que le contrat ait été rompu avant l'abrogation des dispositions du CNE par la loi du 25 juin 2008 n'empêche nullement au juge de restituer son exacte qualification au contrat litigieux et d'en tirer toutes les conséquences indemnitaires,- que la lettre de licenciement du 31 mars 2007 invoque un motif économique, que celui-ci n'est pas rapporté par l'employeur et que de surcroît, la poursuite de la relation de travail, sur simple demande verbale de l'employeur, n'avait aucun effet sur le licenciement intervenu, que la notification de celui-ci le rend définitif,- qu'en l'absence d'accord écrit du salarié sur la rétractation du licenciement, la poursuite de la relation de travail au-delà du préavis sans contrat écrit constitue un contrat de travail à durée indéterminée,- de même, M. A... devait également mettre en oeuvre la procédure de licenciement à son égard, qu'il s'en est abstenu et pensait pouvoir tirer avantage des CNE pour congédier une seconde fois sans même se prévaloir d'un motif réel, sérieux, objectif et matériellement vérifiable,- celui-ci n'a pas davantage daigné produire d'éléments permettant au juge d'apprécier la matérialité des faits reprochés,- de plus, par le jeu de deux contrats de travail à temps partiels et de clauses de mobilité, l'employeur a pu dissimuler des heures supplémentaires sous la qualification d'heures complémentaires payées au taux normal et le travail accompli au profit de la société LE MASSILIA,- il en résulte une dissimulation des heures supplémentaires et que c'est à bon droit que ses différents employeurs ont été condamnés à des rappels de salaire,- il en résulte également une dissimulation de travail pour le compte de la société LE MASSILIA comme en attestent les plannings établis par M. A..., les deux contrats de travail et le jugement du tribunal de grande instance de Basse-Terre du 8 février 2008 l'ayant déclaré, dans sa formation correctionnelle, coupable du délit de travail dissimulé sans qu'il ait jugé en interjeter appel par la suite.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et aux décisions antérieures.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la jonction des affaires enregistrées sous les numéros no09/ 00098- no09/ 0099- no09/ 00092 :
Le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il est dans l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble.
La cour considère qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la jonction de ces trois affaires dans la mesure où il n'y a aucun risque de voir se contrarier les décisions à rendre pour chaque affaire.
La demande formulée de ce chef est rejetée.

Sur la requalification du Contrat " Nouvelles Embauches " du 11 décembre 2011 en contrat de travail à durée indéterminée :

L'article 1er du contrat de travail " Nouvelles Embauches " du 11 décembre 2005 précise que Mme Alexandra X... a été engagée pour une durée indéterminée.
Il s'agit d'un contrat à durée indéterminée. Il n'y avait donc pas lieu de requalifier ce CNE en contrat de travail à durée indéterminée.
Il convient alors d'infirmer le jugement entrepris de ce chef.
Sur la prise d'acte de la rupture du contrat " Nouvelles Embauches " du 11 décembre 2005 et ses effets :
Lorsque le salarié prend acte de la rupture du lien contractuel en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits évoqués le justifient, soit d'une démission dans le cas contraire.
En outre, le contrat de travail est rompu par la prise d'acte de la rupture émanant du salarié, peu importe la lettre de licenciement envoyée postérieurement par l'employeur pour lui imputer cette rupture.
Le juge doit uniquement examiner l'existence ou l'absence de manquements de l'employeur.
Par contrat " Nouvelles Embauches " à durée indéterminée du 11 décembre 2005, Mme Alexandra X... a été engagée pour une durée hebdomadaire de travail de 18 heures moyennant une rémunération mensuelle brute de 8, 03 € l'heure, la durée du travail étant prévue de 7 heures à 13 heures sur trois jours de la semaine.
L'article 2 de ce contrat prévoyait que durant une période de deux ans à compter de la date de sa conclusion, le contrat dérogerait aux articles L. 122-11, L. 122-13, L. 122-14 et L. 321-1 à L. 312-17 du code du travail. Durant cette période initiale, chacune des parties pouvait, à tout moment, rompre le contrat par lettre recommandée avec avis de réception. La rupture dans ce délai de deux ans obéissait aux dispositions légales et conventionnelles en vigueur. Il était également prévu que Mme X... travaille au profit de deux autres entreprises situées à Basse-Terre, l'une au 3 rue Lardenoy et l'autre au 2 place Saint-François.

L'examen des extraits KBIS produits révèle que ces adresses sont celles de l'entreprise LA PROVENCE et de la SARL LE MASSILIA, gérées par M. A....
La répartition de la durée du travail, telle que fixée au contrat pouvait être modifiée et cette modification devait être notifiée à Mme X... au moins avant son entrée en vigueur par lettre recommandée. Le refus de l'intéressée d'accepter un changement de ses horaires dans une hypothèse non prévue par le contrat ne pouvait constituer une faute ou un motif de licenciement.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 mars 2007, la SARL LE PHOCÉEN demande à sa salariée à laquelle est transmis le planning des jours de travail du mois d'avril, de confirmer par écrit son refus de travailler le dimanche.

Il est à noter que ce planning d'avril prévoit des heures de travail au profit de la SARL LE MASSILIA.

Par lettre du 31 mars 2007, la SARL LE PHOCÉEN décide de rompre ce CNE au motif d'une nouvelle organisation du fonctionnement dans l'ensemble des magasins.
Cette décision n'est pas par la suite suivie d'effets.
Par lettre du 26 juillet 2007, la SARL LE PHOCÉEN adressait par lettre recommandée à Mme Alexandra X... un nouveau contrat en double exemplaire en rappelant qu'elle est en situation de préavis pour le contrat de la PROVENCE et en lui précisant qu'elle doit retourner ce nouveau contrat signé dans un délai de 7 jours ou, à défaut, accompagné d'un courrier expliquant les motifs de son refus et qu'en l'absence de réponse de ce délai, ce refus serait une cause de grief à l'égard de l'employeur.
Par lettre du 6 août 2007 adressée à la salariée, la SARL LE PHOCÉEN confirmait avoir reçu la prolongation de l'arrêt de maladie de celle-ci et son refus de signer le nouveau contrat. Elle précisait que les modifications unilatérales dans ce nouveau contrat ont été rédigées avec l'aide de l'inspection du travail, que ce nouveau contrat annule et remplace le précédent, que le refus de travailler est injustifié et qu'elle ne pourra réintégrer son poste qu'après la signature du nouveau contrat.
Par lettre du 21 août 2007, Mme Alexandra X... faisait observer à son employeur que toutes les modifications apportées dans le nouveau contrat sont unilatérales et qu'elle ne peut les accepter et qu'elle entendait assumer ses engagements dans le cadre du contrat de travail initialement signé.
Par lettre du 25 août 2007, la SARL LE PHOCÉEN rétorquait que la nouvelle répartition des horaires de travail au sein de la journée ou de la semaine relève du pouvoir de directeur de l'employeur, confirmait les nouveaux horaires de travail et exigeait la présence de l'intéressée aux heures indiquées sur le nouveau planning, munie du nouveau contrat signé.
Par lettre du 3 septembre 2007adressée à son employeur, Mme Alexandra X... rappelait qu'elle s'est présentée le dimanche 2 septembre 2007 à 8 heures, heures indiquées sur le planning reçu en recommandé et que son employeur lui a demandé de rentrer chez elle au motif qu'elle n'avait aucun contrat signé avec lui et qu'ainsi elle prenait acte de la rupture de son contrat aux torts de son employeur, celui-ci lui ayant refusé l'accès à son poste de travail.
Par lettre du 3 septembre 2007, la SARL LE PHOCÉEN faisait savoir qu'elle envisageait de procéder à son licenciement.
Par lettre du 25 septembre 2007, celle-ci reconnaissait la prise d'acte de la rupture à ses torts et convenait de transmettre à sa salariée les sommes qui lui sont dues à ce titre et les documents tels que le certificat de travail, le solde de tout compte, le dernier bulletin de salaire et l'attestation ASSEDIC.
Au vu de ce qui précède, il est établi que la SARL LE PHOCÉEN a commis la faute de vouloir imposer un nouveau contrat de travail à Mme Alexandra X... sans avoir pris soin de rompre le précédent contrat " Nouvelles Embauches " du 11 décembre 2005 et de faire ainsi obstacle à la réintégration de celle-ci à son poste.

Ce double manquement est suffisamment grave pour justifier la rupture du lien contractuel aux torts de l'employeur.

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris est confirmé sur le paiement des indemnités suivantes :-645, 06 € pour procédure abusive, étant précisé que la condamnation au paiement de la somme de 1 390 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fait double emploi et n'est justifiée par aucun élément,-645, 06 € pour non-respect de la procédure de licenciement,-645, 06 € au titre de l'indemnité de licenciement dans la limite de ce qui est demandé,-645, 06 € à titre d'indemnité de préavis,-532, 50 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

Sur le salaire de janvier 2006 :
Le contrat CNE du 11 décembre 2005 a pris effet à compter du 1er février 2006, ce qui n'est pas contesté par les parties.
La SARL LE PHOCÉEN ne peut être condamnée à payer un salaire de 411, 06 € au titre de janvier 2006.
Il convient d'infirmer le jugement entrepris à ce titre.

Sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice moral :

Les parties n'ayant pas fait valoir de nouvelles demandes et de nouveaux moyens à ce titre, il y a lieu de confirmer la décision entreprise de ce chef.
Sur la prime de précarité :
L'indemnité de précarité n'est versée qu'aux salariés recrutés sous contrat à durée déterminée et lorsque la relation contractuelle ne poursuit pas au terme du contrat.
En l'espèce, le contrat CNE du 11 décembre 2005 est un contrat à durée indéterminée. La prime de précarité ne trouve donc pas à s'appliquer.
Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef.
Sur l'indemnité pour dissimulation de salaires :
L'article L. 3243-2 du code de travail impose la remise d'un bulletin de paie lors de versement de salaire. La remise d'un bulletin de paie mentionnant un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ne caractérise le délit de dissimulation d'emploi salarié que s'il est établi que l'employeur a agi intentionnellement. Le salarié doit donc apporter la preuve de l'omission intentionnel de l'employeur.
Par ailleurs, le paiement de l'indemnité forfaitaire de l'article L. 8223-1 du code du travail est due quelle que soit la qualification de la rupture. Son versement est compatible ave l'octroi de dommages et intérêts alloués dans le cadre d'une procédure pénale.
Au vu des bulletins de paie des années 2006 et 2007 établis par la SARL LE PHOCÉEN, des plannings de travail, de la prétendue clause de mobilité, des tableaux reconstituant les heures complémentaires et supplémentaires et du jugement du tribunal de grande instance de Basse-Terre de 8 février 2008, il est prouvé que la SARL LE PHOCÉEN a dissimulé les heures de travail accomplies par Mme Alexandra X... au cours des années 2006 et 2007 au-delà de celles lui incombant en application de son contrat de travail.
Dès lors, il convient de condamner la SARL LE PHOCÉEN à payer à Mme Alexandra X... une indemnité de 4 797, 48 € (799, 58 € x 6 MOIS).
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire en matière sociale et en dernier ressort :
Dit n'y avoir lieu à prononcer la jonction des affaires enregistrées sous les numéros no09/ 00098- no09/ 0099- no09/ 00092 :
Confirme la décision querellée sauf en ses dispositions requalifiant le CNE du 11 décembre 2005 en contrat de travail à durée indéterminée et condamnant l'employeur au paiement du salaire de janvier 2006, d'une prime de précarité et de l'indemnité de de 1 390 € ;
Statuant à nouveau,
Dit n'y avoir lieu à requalification du contrat Nouvelles Embauches du 11 décembre 2005 ;
Déboute Mme Alexandra X... de ses demandes en paiement de salaire pour le mois de janvier 2006, d'une indemnité de précarité et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
et y ajoutant,
constate que la dissimulation de salaires est caractérisée ;
Condamne en conséquence la SARL LE PHOCÉEN, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme Alexandra X... la somme de 4 797, 48 € au titre de l'indemnité pour dissimulation de salaires ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt ;
Condamne la SARL LE PHOCÉEN, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme Alexandra X... la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL LE PHOCÉEN, prise en la personne de son représentant légal, aux éventuels dépens de l'instance ;
La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/00098
Date de la décision : 05/12/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2011-12-05;09.00098 ?
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