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16/11/2009 | FRANCE | N°08/01327

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 1ère chambre civile, 16 novembre 2009, 08/01327


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE



1ère CHAMBRE CIVILE



ARRÊT N° 908 DU 16 NOVEMBRE 2009



R.G : 08/01327



Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal de grande instance de BASSE TERRE, décision attaquée en date du 26 juin 2008, enregistrée sous le n° 06/1261



APPELANTS :



S.A.R.L. LA PINEDE

Chez LOCADRESS

[Adresse 13]

[Localité 9]

Représentée par Me Pascal Alexis LUCIANI, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant, et Me Myriam WIN-BOMPARD (TOQUE 114), avocat au bar

reau de GUADELOUPE, avocat postulant





Monsieur [T] [M]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Pascal Alexis LUCIANI, avocat au barreau de GRASSE, a...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT N° 908 DU 16 NOVEMBRE 2009

R.G : 08/01327

Décision déférée à la Cour : Jugement du tribunal de grande instance de BASSE TERRE, décision attaquée en date du 26 juin 2008, enregistrée sous le n° 06/1261

APPELANTS :

S.A.R.L. LA PINEDE

Chez LOCADRESS

[Adresse 13]

[Localité 9]

Représentée par Me Pascal Alexis LUCIANI, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant, et Me Myriam WIN-BOMPARD (TOQUE 114), avocat au barreau de GUADELOUPE, avocat postulant

Monsieur [T] [M]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Pascal Alexis LUCIANI, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant, et Me Myriam WIN-BOMPARD (TOQUE 114), avocat au barreau de GUADELOUPE, avocat postulant

Madame [S] [X] épouse [M]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Pascal Alexis LUCIANI, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant, et Me Myriam WIN-BOMPARD (TOQUE 114), avocat au barreau de GUADELOUPE, avocat postulant

INTIMES :

LA SCP [U] DEVENUE LA SCP [E], notaires associés

[Adresse 11]

[Localité 9]

Représentée par la SCP PAYEN-PRADINES (TOQUE 74), avocats au barreau de GUADELOUPE

LA COMPAGNIE D'ASSURANCES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par la SCP PAYEN-PRADINES (TOQUE 74), avocats au barreau de GUADELOUPE

LE CRÉDIT FONCIER DE FRANCE anciennement COMPTOIR DES ENTREPRENEURS

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représenté par Me Henri ELALOUF, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, la SCP RICOU/TROUPE (TOQUE 102-103), avocats au barreau de GUADELOUPE, avocat postulant

S.A.R.L. CLASA

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Bertrand CHAUCHAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Georges JULIN (TOQUE 55), avocat au barreau de GUADELOUPE, avocat postulant

LA CAISSE CENTRALE DE GARANTIE DE LA RESPONSABILITÉ PROFESSIONNELLE DES NOTAIRES

Représentée par la SELARL JFM (TOQUE 34), avocats au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 septembre 2009, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Jean-Luc POISOT, président de chambre, rapporteur,

Mme Marie-Hélène CABANNES, conseillère,

M. Pierre RICHARD, conseiller.

qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 novembre 2009.

GREFFIER :

Lors des débats: Mme Murielle LOYSON, adjointe administrative, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Luc POISOT, président de chambre, et par Mme Murielle LOYSON, adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

La société Clasa a fait édifier dans l'île de [Localité 9] la première tranche d'un ensemble immobilier à usage de résidence hôtelière, dénommé Hôtel Mont Vernon, au lieudit [Localité 12], revendu sous forme de lots de copropriété à des investisseurs bénéficiant des dispositions fiscales prévues par la 'loi Pons'.

Dans le cadre de cette opération, la SCP de notaires [U], devenue actuellement la SCP [E] (la SCP) est intervenue pour établir :

Le 21 décembre 1989, les statuts de la société à responsabilité limitée La Pinède, en vertu d'une procuration de M. et Mme [M] datée du 18 décembre 1989

Le 27 décembre 1989, l'acte de vente par la société Clasa à la société La Pinède des lots de copropriété n° 38, 39 et 44, les millièmes de copropriété qui y sont attachés et le mobilier garnissant ces lots et ce au prix de 2 820 000 F (429 906, 23€)

Le 27 décembre 1989, l'acte de prêt de 2 820 000 F (429 906, 23 €) consenti à la société La Pinède par le Comptoir des entrepreneurs aux droits duquel ont succédé la société Entenial puis le Crédit Foncier de France

Le 19 mars 1998, l'acte de réitération du cautionnement solidaire consenti par les époux [M] et non mentionné dans l'acte du 27 décembre 1989.

Soutenant que les actes de vente et de prêt étaient nuls dès lors qu'elle n'avait aucune existence juridique avant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) effectuée le 8 janvier 1990, la société La Pinède a fait assigner, par actes d'huissier de justice des 19 février 2001 et du 21 mars 2001, devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre la SCP [E] la société Comptoir des entrepreneurs et la société Clasa.

Les époux [M] sont intervenus volontairement à l'instance le 11 décembre 2000.

Par acte d'huissier de justice délivré le 9 mai 2003, l'assureur de la SCP de notaires, les Mutuelles du Mans Assurances, a été appelé en intervention forcée.

Par acte du 22 avril 2004, la société La Pinède et les époux [M] ont fait assigner la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires.

Aux termes de leurs dernières écritures du 19 avril 2007, la société La Pinède et les époux [M] ont demandé au tribunal de grande instance de :

constater la nullité absolue de l'ensemble des actes notariés passés le 27 décembre 1989 par la SCP [U]

en conséquence prononcer la résolution de l'acte de vente notarié du 27 décembre 1989 intervenu entre la société La Pinède et la société Clasa

prononcer la résolution de l'acte de prêt du 27 décembre 1989, consenti par le Crédit Foncier de France au profit de la société La Pinède

constater la nullité de l'acte de cautionnement modificatif du 19 mars 1998

condamner in solidum Me [U], membre de la SCP [U], et la SCP notariale, au remboursement des règlements effectués au Crédit Foncier de France outre les intérêts de droit ayant couru,

condamner in solidum Me [U], membre de la SCP [U], la SCP notariale et le Crédit Foncier de France au paiement d'une somme de 228 675€ de dommages et intérêts, ainsi qu'une somme de 15 245€ par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Par conclusions déposées le 10 janvier 2005, la société Entenial, devenue Crédit Foncier de France, ont demandé à la juridiction de première instance de

prononcer l'irrecevabilité des demandes en nullité des actes notariés du 27 décembre 1989, par acquisition de la prescription prévue par l'article 1304 du code civil,

subsidiairement, rejeter des demandes de la société La Pinède et des époux [M], sur la constatation de la reprise par la société La Pinède et les époux [M], des engagements souscrits le 27 décembre 1989, postérieurement à l'immatriculation de la société

encore plus subsidiairement, en cas d'annulation des actes, de prononcer la condamnation solidaire de la société La Pinède et des époux [M], à lui payer le capital prêté, déduction faite des échéances payées, soit une somme de 58 581,59€, ainsi que la condamnation de la SCP notariale à lui payer à titre de dommages et intérêts, une somme de 291 366, 91 € correspondant à la perte de rémunération pour le prêt considéré outre une somme de 9 709,28 € correspondant aux cotisations d'assurance dont elle a fait l'avance,

La banque a également demandé à être garantie par la SCP notariale, du remboursement de la somme de 58.581, 59 € à effectuer par la société La Pinède et sollicité la condamnation solidaire de la société La Pinède, des époux [M] et de la SCP notariale, à lui payer une somme de 10 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives déposées le 27 septembre 2007, la SCP [E] et la compagnie les Mutuelles du Mans Assurances IARD, ont demandé au tribunal de :

déclarer irrecevable la demande en nullité à raison du défaut de personnalité morale de la société La Pinède, des actes régularisés le 27 décembre 1989 ainsi que l'action en responsabilité notariale, par acquisition de la prescription prévue par l'article L 110-4 du code de commerce dérogeant à l'article 2262 du code civil, les autres moyens de nullité étant prescrits par application de l'article 1304 du code civil

débouter les demandeurs de leur action en responsabilité notariale, en invoquant l'absence de faute et de préjudice et en se prévalant notamment du consentement de la société La Pinède à la vente et au prêt prétendument viciés, après son immatriculation, qui se serait manifestée par l'exécution par la société La Pinède, des obligations au titre du prêt et de la vente, ainsi que par les déclarations fiscales régularisées par cette société et les époux [M]

condamner les demandeurs in solidum, à payer à la SCP notariale, une somme de 150 000 € à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'une somme de 30 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

La société Clasa a déposé des conclusions le 11 juin 2007 tendant à faire :

déclarer prescrite l'action en nullité de la vente engagée par la société La Pinède, par application de l'article L 110-4 du code de commerce, les obligations nées de la vente entre les deux sociétés commerciales à l'occasion de leur activité commerciale étant soumise à la prescription décennale

constater subsidiairement que la société La Pinède a ratifié la vente conclue alors qu'elle était en cours de formation, ou qu'elle a à tout le moins, confirmé la vente en l'exécutant sans réserve, étant précisé que la société La Pinède ne peut se prévaloir du défaut de transfert de l'autorisation d'occupation du domaine public qui a été réalisé au profit du syndicat des copropriétaires de Mont Vernon par arrêté du 10 septembre 1998 faisant suite à une demande du 28 mai 1990

en cas d'annulation de la vente, condamner les époux [M], la SCP notariale et les Mutuelles du Mans Assurances, à réparer le préjudice qui résulterait pour elle, d'une annulation de la vente à laquelle les époux [M] sont intervenus avec la plus parfaite mauvaise foi, et avant dire droit de chef, d'une part ordonner une mesure d'expertise afin de déterminer la valeur actuelle des lots 38,39 et 44, d'autre part les condamner in solidum à lui payer une provision de 429 906 €

condamner la société La Pinède et les époux [M], in solidum, à lui payer une somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'une somme de 15 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Par conclusions déposées le 3 novembre 2004, la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires, tendant à l'irrecevabilité de sa mise en cause et à la condamnation de la société La Pinède et des époux [M] à lui payer in solidum, une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts ainsi qu'une somme de 3 000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 juin 2008, le tribunal de grande instance a :

déclaré les époux [M] et la société La Pinède irrecevables en leurs demandes à l'encontre de la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires,

rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité la société La Pinède et des époux [M] fondée sur le défaut de personnalité morale de la société La Pinède au jour des actes de vente et de prêt régularisés le 27 décembre 1989 devant Me [U]

débouté la société La Pinède et les époux [M] de l'ensemble de leur demandes, fins et conclusions,

débouté la SCP [E], la société Clasa, la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires, de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts,

condamné la société La Pinède et les époux [M], in solidum, à payer par application de l'article 700 du code de procédure civile :

- une somme de 4000 € à la société Clasa,

- une somme de 4000 € au Crédit Foncier de France,

- une somme de 1200 € à la Caisse centrale de garantie de la responsabilité des notaires.

débouter les parties de leurs demandes, fins et conclusions,

dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

condamne la société La Pinède et les époux [M], in solidum, aux dépens avec distraction au profit de Me Mathurin-Belia et Me Joachim

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour d'appel le 12 août 2008, la société La Pinède et M. et Mme [M] ont interjeté appel de cette décision.

La société La Pinède et M. et Mme [M], par conclusions récapitulatives déposées le 1er septembre 2009, demandent à la cour de:

dire mal fondées et rejeter les fins de non recevoir soulevées par la SCP [U] et les Mutuelles du Mans Assurances

dire et juger que la prescription trentenaire doit s'appliquer

constater qu'il n'y a pas eu réitération de la part de l'appelante ni volonté de former un nouveau contrat

prononcer la nullité de l'ensemble des actes notariés de prêt et de vente passés par la SCP [U] le 27 décembre 1989

en conséquence,

prononcer la nullité de l'acte de vente notarié du 27 décembre 1989 entre la société La Pinède et la société Clasa

ordonner la remise des parties en leur état antérieur à la vente du 27 décembre 1989

condamner la société Clasa à restituer à la société La Pinède la somme reçue au titre du prix de la vente

dire et juger que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil

condamner la SCP [U] et les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la société La Pinède du paiement de cette somme et des intérêts afférents, et plus généralement de toutes sommes dues par la société Clasa à la société La Pinède en exécution du contrat de vente annulé

prononcer la nullité de l'acte de prêt du 27 décembre 1989 consenti par le Crédit foncier de France au profit de la société La Pinède

constaté la nullité de l'acte de cautionnement modificatif du 19 mars 1998

ordonner la remise des parties en leur état antérieur au prêt du 27 décembre 1989

constater que la nullité des actes de vente et de prêt notariés, par la faute du notaire, entraînera des conséquences fiscales pour M. et Mme [M], associés de la société La Pinède

condamner la SCP [U] et les Mutuelles du Mans Assurances à relever et garantir les associés de toutes les conséquences fiscales qui pourront être tirées par les autorités compétentes des décisions rendues par la juridiction de céans

condamner in solidum la SCP [U], devenue SCP [E] et la société Entenial, actuellement Crédit Foncier de France, au paiement de la somme de 152 450 € de dommages et intérêts au profit de la société La Pinède

les condamner in solidum au paiement de la somme de 100 000€de dommages et intérêts au profit des époux [M]

les condamner in solidum au paiement de la somme de 15 245€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

les condamner aux entiers dépens avec distraction au profit de Me WIN-BOMPARD.

Par conclusions déposées le 28 avril 2009, la société Clasa, qui a vendu les lots n° 38, 39 et 44 à la société La Pinède, demande à la cour de :

confirmer le jugement déféré et statuant à nouveau

dire et juger que l'action de la société La Pinède en nullité de l'acte de vente conclu avec elle le 27 décembre 1989 se heurte à la prescription de l'article L.110-4 du code de commerce

subsidiairement, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société La Pinède et M. et Mme [M] de leurs demandes en nullité de l'acte de vente du 27 décembre 1989

plus subsidiairement, dire et juger que M. et Mme [M], la SCP [E] et la société les Mutuelles du Mans Assurances devront être condamnés solidairement à l'indemniser du préjudice que lui causerait l'annulation de l'acte de vente du 27 décembre 1989

dans cette hypothèse subsidiaire,

condamner solidairement les époux [M], la SCP [E] et la société les Mutuelles du Mans Assurances à lui payer, à titre de dommages et intérêts provisionnels, la somme de 429 906 €

instituer une mesure d'expertise ayant pour objet de calculer l'entier préjudice qui serait subi par elle

à cette fin, dire que l'expert devra établir la valeur des lots n° 38, 39 et 44 de la première tranche de la résidence hôtelière Mont Vernon, en tenant compte des charges y attachées au regard de la situation de la résidence hôtelière Mont Vernon et des conditions d'exploitation

dire que la SCP [E] et la société les Mutuelles du Mans Assurances devront faire l'avance des frais d'expertise.

condamner solidairement la société La Pinède et M. et Mme [M] à lui payer la somme de 15 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

condamner solidairement la société La Pinède et les époux [M] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel dont distraction au profit de Me Georges Julin, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Crédit Foncier de France, par conclusions déposées le 17 septembre 2008, demande à la cour de :

dire que l'action initiée par la société La Pinède et M. et Mme [M] est fondée sur la nullité des actes authentiques du 27 décembre 1989 tel qu'indiqué dans leurs demandes et conclusions, et se trouve ainsi est prescrite en vertu de l'article 1304 du code civil

constater que la société La Pinède et M. et Mme [M] ont repris les engagements souscrits le 27 décembre 1989 et ont renouvelé leur accord à l'acte de prêt postérieurement à l'immatriculation de la société La Pinède au registre du commerce, notamment en exécutant le prêt par remboursement des échéances

débouter la société La Pinède et Mr et Mme [M] de toutes leurs demandes

à titre infiniment subsidiaire,

si la cour devait faire droit aux demandes de la société La Pinède et de M. et Mme [M],

condamner solidairement la société La Pinède et M. et Mme [M] à régler au Crédit Foncier de France le montant du capital prêté, déduction faite des échéances déjà payées, soit :

429 906, 23 € (capital prêté) - 371 324, 64€ (échéances et accessoires déjà réglés) = 58 581,59 € - solde en faveur du Crédit Foncier de France

vu les dispositions de l'article 1382 du Code Civil,

dire le Crédit Foncier de France recevable et bien fondé à solliciter, à titre de dommages et intérêts, la condamnation de la SCP [E] au paiement d'une somme de 291 366,91 €, augmentée des cotisations d'assurance dont la société Entenial, dont le Crédit Foncier vient aux droits, a fait l'avance, soit la somme de 9709, 28 €, soit au total la somme de 301 076,19 €

plus généralement dire que la SCP [E] devra garantir le Crédit Foncier de France du remboursement d'une somme de 58 581, 59 € que la société La Pinède devra rembourser au Crédit Foncier de France et représentant la différence en faveur du Crédit Foncier de France entre la restitution du capital prêté (429 906, 23 €) et le montant des échéances déjà payées (371 324, 64 €) soit la somme de 58 581, 59 €

condamner solidairement la société La Pinède et la SCP [E] de la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens distraits au profit de la SCP Ricou Troupé.

La SCP [E] et son assureur Les Mutuelles du Mans Assurances demandent à la cour de :

en la forme

statuer ce que de droit sur la recevabilité du présent appel

au fond

déclarer la société La Pinède et les époux [M] mal fondés en leur moyen d'irrecevabilité tiré de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 26 octobre 2006 pour les causes sus énoncées

déclarer irrecevable et mal fondé le moyen fondé sur les articles 617 et 618 du code de procédure civile

confirmer le jugement querellé par substitution de motif et pour ce faire

constater que l'assignation en nullité l'acte de prêt du 27 décembre 1989 n'a été délivrée à la société Entenial que le 19 février 2001 (et non 2000)

constater que la société La Pinède dispose de la personnalité morale à la date de l'immatriculation de la présente action et qu'elle est donc commerciale en la forme

en conséquence,

dire et juger que la prescription applicable est celle stipulée à l'article L.110-4 du code de commerce dérogeant à l'article 2262 du code civil

dire et juger que les actions en nullité ont été introduites plus de 10 ans après la date des actes

constater qu'aux termes de son assignation du 23 août 1999 et de l'ensemble de ses conclusions prises devant le tribunal de grande instance de Basse-terre, la société La Pinède et les époux [M] n'ont jamais dirigé une quelconque demande à l'encontre de la SCP [E]

constater que l'ensemble de leurs demandes étaient dirigées contre Maître [J] [U], non partie à la présente procédure

constater que pour la première fois en cause d'appel, la société La Pinède et les époux [M] dirigent leurs demandes contre la SCP [U]

dire et juger qu'aucune demande n'a été régulièrement formée contre la SCP notariale dans le délai de 10 ans de l'article L 110-4 du Code de Commerce.

déclarer la société La Pinède et les époux [M] irrecevables en leur demande par application de l'article 122 du nouveau code de procédure civile en raison de la prescription encourue

dire et juger que la société La Pinède et les époux [M] n'ont pas d'intérêt à agir en nullité des actes de vente et de prêt pour les causes sus énoncées

les déclarer en conséquence irrecevables en leurs demandes

constater qu'en sollicitant seuls la nullité des actes de vente et de prêt, la société La Pinède et les époux [M] se créent eux-mêmes le préjudice dont ils se plaignent et dont ils sollicitent réparation

dire et juger qu'en agissant ainsi, ils violent les dispositions de l'article 1134 alinéa 3 du code civil

dire et juger que cette mauvaise foi entraîne l'irrecevabilité de leur action en responsabilité contre le notaire

constater au surplus que la société La Pinède et les époux [M] ne subissent aucun préjudice en relation avec les nullités alléguées, qu'au contraire ils réaliseraient un substantiel profit

en conséquence, les débouter purement et simplement de toutes demandes à l'encontre de la SCP [U] et de la compagnie Les Mutuelles du Mans

constater que postérieurement au 8 janvier 1990, date à laquelle la cause de la nullité a disparu, la société La Pinède a conservé les lots acquis et les sommes empruntées

constater que chaque année de 1990 à 2007, la société La Pinède confirme son intention de voir figurer à son actifs les lots 38, 39 et 44 et à son passif le prêt

constater que chaque année de 1990 à 2007, les époux [M] ont approuvé les comptes de la société La Pinède

constater que chaque année de 1990 à 2007, les époux [M] ont reporté sur leur propre déclaration de revenus, les déficits BIC générés par la société La Pinède.

constater qu'à 57 reprises, du 3 septembre 1990 au 2 mai 1995, la société La Pinède et les époux [M] se sont acquittés du remboursement du prêt auprès de la banque

constater que Mme [M] a participé aux réunions de copropriété et du GIE Hôtel Mont Vernon le 29 septembre 1992 en sa qualité de représentante de la société La Pinède, propriétaire des lots 38, 39 et 44

dire et juger que des nouveaux contrats de vente et de prêt sont nés de la volonté des parties de demeurer dans les liens contractuels

dire et juger en conséquence que la société La Pinède et les époux [M] ne peuvent se prévaloir d'un quelconque préjudice résultant de l'inefficacité des actes puisque de nouveaux contrats se sont formés

constater au demeurant que la société La Pinède et les époux [M] peuvent parfaitement régulariser la situation en signant de nouveaux actes

déclarer la société La Pinède et les époux [M] tant irrecevables par application de l'article 1304 du code civil que mal fondés pour les causes sus énoncées relativement aux autres moyens de nullité invoqués

déclarer la société Clasa irrecevable en sa demande de condamnation au paiement du prix des lots objet des actes de vente dont il est sollicité la nullité

dire et juger que le prix de ces lots fait partie des restitutions et qu'il ne constitue pas un préjudice indemnisable

déclarer la société Clasa mal fondée en sa demande d'expertise eu égard aux dispositions des articles 1315 du code civil et 146 du nouveau code de procédure civile

En tant que de besoin,

déclarer la société Crédit Foncier de France mal fondée à solliciter la garantie de la SCP [U] pour le remboursement des sommes dues par la société La Pinède au titre des restitutions, faute de démontrer l'impossibilité avérée et absolue de cette dernière société à rembourser les sommes qu'elle doit restituer.

dire et juger que le surplus du préjudice invoqué par la société Crédit Foncier De France est la conséquence directe de l'exécution de mauvaise foi par les époux [M] de la convention sous seings privés qu'ils ont signée le 18 décembre 1989.

En conséquence et au visa de l'article 1134 alinéa 3 du code civil dire et juger que les époux [M] devront :

supporter seuls le préjudice occasionné par la nullité des actes aux sociétés Clasa et Crédit Foncier de France,

ou relever indemne la SCP [U] et la compagnie Mutuelles du Mans Assurances de toutes condamnations pécuniaires au profit de la société Crédit Foncier de France et de la société Clasa au titre de leur préjudice causé par la nullité des actes.

condamner la société La Pinède et les époux [M] in solidum au paiement de la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens distraits au profit de la SCP d'avocats soussignée.

Par conclusions déposées le 14 septembre 2009, la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires conclut à la confirmation du jugement qui a déclaré irrecevable son intervention forcée et sollicite la condamnation de la société La Pinède et des époux [M] au paiement d'une indemnité de 5 000 € à titre de dommages et intérêts et d'une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sollicite enfin la condamnation des mêmes aux dépens avec distraction au profit de Me Fischer-Merlier, avocat.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 14 septembre 2009.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour entend se référer à leurs conclusions régulièrement déposées après avoir été notifiées.

MOTIFS :

Sur l'intérêt à agir de la société La Pinède et des cautions :

Attendu que l'intérêt à agir de cette société et des cautions pour faire constater la nullité absolue des actes notariés ne saurait être apprécié au regard des seules conséquences indemnitaires susceptibles d'en résulter et être subordonné à la justification préalable d'un préjudice alors que la détermination de celui-ci relève du fond du litige et non conditionner la recevabilité de l'action ;

Attendu que les parties concernées, qui doivent bénéficier de l'absolue sécurité juridique attachée aux actes auxquels le notaire, en sa qualité d'officier public, a conféré l'authenticité, ont un intérêt à faire reconnaître les manquements de celui-ci dans l'exercice de cette mission d'authentification pour en tirer toutes les conséquences juridiques et indemnitaires au titre de sa responsabilité professionnelle;

Sur la nullité des contrats de prêt et de vente immobilière :

Attendu que le 27 décembre 1989, Me [U], notaire associé de la SCP [U], a reçu, par acte authentique, un contrat de prêt conclu entre le Comptoir des entrepreneurs (CDE), représenté par un clerc de notaire, et 'la société La Pinède', aux termes duquel, pour financer l'acquisition des lots n° 38, 39 et 44 de l'ensemble immobilier Hôtel Mont Vernon, à [Localité 9], la banque consentait à cette société, un prêt de 2 820 000 F, remboursable en 180 mensualités au taux de 10, 40 % l'an (TEG de 10, 60 %) ;

Attendu que ce contrat de prêt précise que l'emprunteur est 'La société La Pinède, société à responsabilité limitée au capital de 50 000 F ayant son siège social à [Localité 14], île de [Localité 9], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Basse-Terre sous le numéro 90 B 52. Ladite société constituée aux termes de ses statuts établis suivant acte reçu par Me [A] [U], notaire soussigné le 21 décembre 1989 représentée par Mlle [K] [C], clerc de notaire, demeurant à [Localité 14], île de [Localité 9]. En vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés aux termes d'une délibération des associés en date du 22 décembre 1989, dont une copie certifiée est demeurée ci-annexée après mention' ;

Attendu que, le 27 décembre 1989, le notaire a établi sous la forme authentique un acte portant vente par la société Clasa, représentée par un clerc de notaire, à 'la société La Pinède', représentée également par un clerc de notaire, des lots n° 38, 39 et 44, avec mobilier, de l'ensemble immobilier dénommé Hôtel Mont Vernon, à usage d'hébergement touristique, situé au lieudit [Localité 12] à [Localité 9], moyennant paiement du prix, hors TVA, de 2 820 000 F ;

Attendu que cet acte notarié mentionne pour sa part que l'acquéreur est 'La société dénommée La Pinède, société à responsabilité limitée au capital de 50 000 F ayant son siège à [Localité 14], île de [Localité 9], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Basse-Terre sous le numéro 89 B 52. Ladite société constituée aux termes de ses statuts établis suivant acte reçu par Me [A] [U], notaire à [Localité 9] le 21 décembre 1989. Ladite société, représentée par Mlle [K] [C], clerc de notaire, demeurant à [Localité 14], île de [Localité 9]. En vertu des pouvoirs qui lui sont conférés suivant délibération des associés en date du 22 décembre 1989' ;

Qu'il ressort des mentions de ces deux actes, concordantes et exemptes d'ambiguïté, que le prêt et la vente immobilière n'ont pas été conclus le 12 décembre 1989 au nom d'une société en formation, mais bien par la société, elle-même, déjà constituée et immatriculée comme telle au registre du commerce et des sociétés (RCS) sous le numéro 89 B 52 pour le contrat de vente et le numéro 90 B 52 pour le contrat de prêt ;

Attendu que les mentions de l'extrait K bis du 25 janvier 1990 révèlent cependant que la société La Pinède n'était pas encore immatriculée lors de la conclusion des actes de prêt et de vente et qu'elle n'a acquis la personnalité juridique par son immatriculation que postérieurement le 8 janvier 1990 ;

Que la déclaration concernant l'immatriculation de la société La Pinède auprès du centre de formalités des entreprises était inopérante pour conférer la personnalité juridique à ladite société avant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ;

Qu'il se déduit de ces éléments que, d'une part, la société La Pinède était dépourvue de la personnalité morale lui permettant de contracter en son nom le 27 décembre 1989 et que, d'autre part, elle n'a pu se livrer, après son immatriculation, à aucune reprise de ces actes, faute pour ceux-ci d'avoir été souscrits par un mandataire pour le compte de la société en formation et d'être à ce titre soumis à l'application du régime de reprise par une société des actes conclus en son nom au cours de sa formation, tel que défini par les dispositions de l'article 1843 du code civil et de l'article 6 du décret d'application (n 78-804 du 3 juillet 1978) de la loi du 4 janvier 1978 ;

Que, de même, étant frappés de nullité absolue pour avoir été conclus par une société alors inexistante ces contrats n'étaient pas davantage susceptibles de confirmation ou de ratification, par un acte unilatéral, exprès ou tacite, de la part de cette société après son immatriculation au RCS ;

Qu'ainsi, l'irrégularité de fond tenant à l'inexistence de la société La Pinède lors de la conclusion des contrats de vente et de prêt n'a pu être couverte, après le 8 janvier 1990, ni par les actes d'exécution de ces contrats accomplis par elle depuis cette date en tant que propriétaire des lots n° 38, 39 et 44 et d'emprunteur, ni par l'attitude ou le comportement de ses associés à l'égard des tiers ;

Qu'il n'est, par ailleurs, justifié d'aucune démarche des parties en vue de procéder à la réfection des actes nuls et à la conclusion de nouveaux contrats se substituant à ceux-ci, ni même d'aucun élément de preuve laissant supposer qu'elles en aient eu l'intention ;

Qu'en particulier, en ce qui concerne la conclusion par les époux [M] et la banque, le 19 mars 1998, d'un acte rectifiant le contrat de prêt du 27 décembre 1989 qui ne faisait pas mention du cautionnement solidaire des époux [M] consenti en vertu d'une procuration du 27 décembre 1989, il ne peut être considéré que l'acte rectificatif, en ce qu'il exprime une manifestation de volonté des parties destinée à produire des effets de droit, a été conclu en vue d'une réfection du contrat du contrat de prêt nul dès lors que il s'agissait de corriger l'acte initial de prêt en y ajoutant le cautionnement dont celui-ci était l'accessoire ;

Attendu que la nullité tirée du défaut de personnalité morale de la société La Pinède lors de la conclusion des actes litigieux est une nullité absolue qui échappe aux prescriptions de l'article 1304 du code civil et de l'article L 110-4 du code du commerce, ainsi que l'ont rappelé à juste titre les premiers juges, et qui, nonobstant l'exécution desdits contrats, peut dès lors être soulevée pendant le délai de la prescription trentenaire de droit commun ;

Qu'il résulte de ces éléments que la société La Pinède est recevable et fondée à se prévaloir de cette nullité et à réclamer, en contrepartie de la restitution des lots de copropriété au vendeur, la restitution par celui-ci du prix de vente ;

Attendu qu'afin de replacer les parties dans une situation aussi proche de celle où elles se trouvaient avant la vente nulle, le jeu des restitutions réciproques et l'équilibre de celles-ci obligent, en principe, à une restitution de l'immeuble fondée sur sa valeur au jour de la vente;

Que toutefois ce principe de restitutions équilibrées ne trouve pas à s'appliquer lorsque l'immeuble a subi une dépréciation résultant d'un fait fortuit, exclusif d'un usage abusif ou d'un défaut d'entretien imputable à l'acquéreur ;

Que, dans ce cas, les risques de dépréciation fortuite sont à la charge du vendeur qui reprend l'immeuble et qui est censé en être toujours resté propriétaire par l'effet de la rétroactivité de la nullité absolue de la vente;

Qu'en l'occurrence, dès lors qu'il n'est pas établi que la société La Pinède a manqué à ses obligations dans l'entretien et la jouissance des lots de copropriété depuis son acquisition en 1989, ces lots seront réintégrés dans le patrimoine de la société Clasa sans que leur dépréciation économique, à la supposer établie, puisse être compensée par une indemnité venant s'ajouter à la restitution en nature ;

Qu'il résulte de ce qui précède que la société Clasa, qui obtient la restitution des lots vendus, n'est pas fondée à réclamer l'indemnisation, même à titre provisionnel, d'un préjudice qui résulterait de la nullité de l'acte de vente ;

Attendu que, pour sa part, la société La Pinède qui justifie d'une publication régulière des assignations à la conservation des hypothèques, devra recevoir de la société Clasa la somme 429 906, 23€ correspondant au prix d'acquisition des lots restitués ;

Attendu que les intérêts au taux légal dus à compter du 21 mars 2001, date de l'assignation de la société Clasa, donneront lieu à une capitalisation conforme à l'article 1154 du code civil, comme le demande la société La Pinède ;

Attendu que la nullité absolue du contrat de prêt pour la même cause que celle du contrat de vente oblige l'emprunteur à restituer les sommes prêtées pour financer l'acquisition immobilière ;

Attendu que, s'agissant du prêt de 429 906, 23 € , après déduction des sommes versées par la société La Pinède pour un montant total de 371 324, 64 €, il subsiste un solde à restituer de 58 581, 59 € à la charge de la société La Pinède ;

Sur l'engagement des cautions :

Attendu que la banque ayant consenti un prêt à cette société sous condition d'un cautionnement hypothécaire consenti par les époux [M] et ce cautionnement étant une cause déterminante du prêt, la nullité du contrat de prêt entraîne de plein droit celle des actes de cautionnement accessoires qui sont indissociables de ce contrat ;

Que si les dispositions de l'article 2289 du code civil, selon lesquelles le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable, impliquent une limitation de l'engagement des cautions à la seule exécution des obligations régulièrement contractées par l'emprunteur, la Cour de cassation a toutefois étendu le champ de leurs obligations à la garantie des restitutions consécutives à l'annulation du contrat de prêt au motif que l'obligation de restituer, inhérente au contrat de prêt, demeurant valable tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de la convention annulée, le cautionnement, en considération duquel le prêt a été consenti, devait dès lors subsister jusqu'à l'extinction de cette obligation ;

Attendu ainsi qu'il a lieu de faire application de cette règle jurisprudentielle dans la mesure où la société La Pinède doit restituer une somme 58 581, 59 €et que le versement de cette somme reste garanti par les cautions jusqu'à extinction de la dette de restitution ;

Sur la faute du notaire et ses conséquences indemnitaires :

Attendu qu'un notaire a l'obligation de veiller à l'efficacité juridique des actes qu'il établit en s'assurant notamment que les parties ont la pleine capacité juridique pour contracter ;

Attendu qu'après avoir établi le 21 décembre 1989 les statuts de la société à responsabilité limitée La Pinède, en vertu d'une procuration du 18 décembre 1989 de M. [M] et de son épouse, Me [U] a ajouté aux actes de vente et de prêt du 27 décembre 1989, de manière délibérée et nécessairement fautive, la mention d'une d'immatriculation de la société La Pinède au RCS opérée seulement le 8 janvier 1990 ;

Qu'en agissant ainsi, alors qu'il connaissait l'absence d'immatriculation de la société, le notaire a manqué aux obligations de sa charge et a de manière intentionnelle commis une faute qui engage la responsabilité de la SCP de notaires dont il fait partie, en application de l'article 16 de la loi du 29 novembre 1966 ;

Que, contrairement à ce que la SCP soutient, la société La Pinède ne réclame pas l'indemnisation d'un dommage qu'elle a elle-même créé, dès lors que le préjudice invoqué par elle résulte non pas de son action en nullité des actes authentiques mais de la seule faute commise par le notaire qui les a rédigés irrégulièrement ;

Que la SCP n'est pas fondée à se prévaloir de la mauvaise foi des époux [M] dans l'exécution de leurs obligations au motif qu'ils resteraient engagés par la convention de vente en l'état de futur achèvement des locaux à usage de résidence hôtelière qu'ils ont signée le 18 décembre 1989 dès lors qu'aucune des parties à ce contrat sous seings privés ne s'est prévalue de la survivance des obligations contractées par les acquéreurs à cette occasion et n'a remis en cause l'application de l'article 1601-4 du code civil en vertu duquel la cession par eux des droits tirés de cet acte a eu pour effet de substituer de plein droit le cessionnaire dans leurs obligations envers le vendeur ;

Qu'enfin les dispositions de l'article 1134 du code civil qui institue une obligation d'exécution de bonne foi des conventions ne trouvent pas à s'appliquer au refus de réitération d'un acte nul qui ne se rattache pas l'exécution d'un contrat soumis à cette obligation ;

Qu'il en résulte que la SCP de notaires ne peut s'exonérer des conséquences indemnitaires découlant de la faute du notaire en invoquant de prétendues fautes commises par les époux [M] ;

Attendu qu'au titre de cette responsabilité pour faute, la SCP et son assureur doivent garantir la restitution par la société Clasa des sommes perçues par elle au titre de la vente des lots de copropriété, outre les intérêts au taux légal selon les modalités ci-dessus fixées ;

Qu'elle doit également garantir la restitution du solde du capital prêté qui est à la charge de la société La Pinède ;

Attendu que, du fait de la privation de la rémunération attendue du crédit qu'elle avait consenti, la banque a subi un préjudice qui est équivalent aux intérêts conventionnels convenus pour le prêt qui s'élèvent à la somme de 291 366, 91 € ;

Que la SCP et son assureur seront en conséquence tenus d'indemniser la banque à hauteur de cette somme ;

Qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'y ajouter la somme de 16 101, 10 € réclamée au titre des primes d'assurances dès lors qu'il s'agit de primes qui rémunèrent la garantie accordée par un assureur et non une prestation assurée par la banque et que celle-ci ne produit aucun justificatif établissant qu'elle en a fait l'avance ;

Attendu que, pour l'évaluation des préjudices de la société La Pinède et des époux [M] découlant de la faute du notaire, il n'appartient pas à la cour de prendre en compte les avantages que les époux [M] ont tirés de l'opération de défiscalisation, ni d'ailleurs les conséquences d'une éventuelle remise en cause de ces avantages qui pourraient résulter de la nullité de la vente immobilière et qui ne concernent que l'administration fiscale, étrangère au présent litige ;

Qu'eu égard au caractère hypothétique du préjudice invoqué en matière fiscale, la demande de la société La Pinède visant à une extension de la garantie de la SCP à un tel préjudice sera rejetée ;

Attendu qu'il convient de rejeter la demande de la société La Pinède qui sollicite la condamnation de la SCP et son assureur au paiement d'une somme de 152 450 € à titre de dommages et intérêts, dès lors qu'elle n'invoque qu'un préjudice hypothétique au titre des incidences fiscales susceptibles de découler de la nullité des actes et qu'elle ne justifie pas de l'existence de 'frais inhérents à cette opération immobilière' dont elle fait état ;

Que la demande en paiement de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral sera rejetée dès lors que les époux [M], qui se sont volontairement engagés comme cautions de la société, ne peuvent imputer les désagréments liés à l'engagement de poursuites contre eux qu'à la seule défaillance de la société qu'ils ont constituée et non à la nullité des actes de vente et de prêt ;

Attendu qu'enfin il y a lieu d'ordonner la publication de l'arrêt au bureau de la conservation des hypothèques du lieu de la situation de l'immeuble;

Sur la demande reconventionnelle de la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires :

Attendu que, dès lors que les appelants ont dirigé leur appel contre la caisse mais n'ont formulé aucune demande contre elle à hauteur d'appel ni aucun grief contre le jugement qui a déclaré irrecevable son intervention forcée, l'appel revêt à son égard un caractère abusif ;

Qu'en réparation du préjudice qui en résulte, il convient de condamner les appelants à leur payer la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts ;

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Attendu que le litige principal trouvant son origine dans la faute du notaire, seules les demandes dirigées contre la SCP et son assureur seront accueillies à hauteur de 6 000 € pour chacune d'elles, à l'exception toutefois de la demande de la caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires dirigée contre les appelants qui sera également accueillie hauteur de 3 000 € ;

Que pour les mêmes motifs, les dépens seront mis à sa charge de la SCP et de son assureur, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Julin, de Me Win Bompard et de la SCP Ricou-Troupe, avocats, sauf en ce qui concerne les dépens engagés au titre de l'intervention forcée de la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires qui seront à la charge des appelants avec distraction au profit de la Selarl JFM, avocats ;

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement rendu entre les parties le 26 juin 2008 par le tribunal de grande instance de Basse-Terre sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes dirigées contre la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires, rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription et les moyens d'irrecevabilité et débouté la société Clasa et la SCP [E] de leur demande en paiement de dommages et intérêts

Et statuant à nouveau,

Rejette la fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société La Pinède et des époux [M]

Constate que le contrat de vente immobilière conclu le 27 décembre 1989 entre la société Clasa et la société La Pinède, dépourvue d'existence juridique à cette date, est frappée de nullité absolue

Dit qu'en conséquence de cette nullité, la société La Pinède est tenue de restituer à la société Clasa les lots de copropriété n 38, 39 et 44 de l'ensemble immobilier Hôtel de Mont Vernon situé à [Localité 9] au lieudit [Localité 12] et qu'en contrepartie, la société Clasa a l'obligation de lui verser la somme de 429 906, 23 € correspondant au prix d'acquisition des lots, outre les intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2001, avec capitalisation des intérêts conforme à l'article 1154 du code civil

Condamne la SCP [E], in solidum avec son assureur, Les Mutuelles du Mans Assurances à garantir la restitution de cette somme ainsi que le paiement des intérêts à la société La Pinède

Constate que le contrat de prêt conclu le 27 décembre 1989 entre le Comptoir des entrepreneurs, aux droits duquel se trouve actuellement le Crédit Foncier de France, et la société La Pinède, dépourvue d'existence juridique à cette date, est frappé de nullité absolue

Dit que la société La Pinède, est tenue de restituer au Crédit Foncier de France la somme de 58 581,59 € correspondant au capital non remboursé

Dit que les cautions consenties par les époux [M] sont maintenues jusqu'à extinction de l'obligation de rembourser au Crédit Foncier de France la somme de 58 581,59 € due au titre du capital non remboursé

Condamne la SCP [E] in solidum avec son assureur les Mutuelle du Mans Assurances à garantir le remboursement de la somme de 58 581,59 €

Condamne la SCP [E] à payer, in solidum avec son assureur les Mutuelles du Mans Assurances, au Crédit Foncier de France la somme de 291 366, 91 €, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier résultant de la nullité du contrat de prêt

Condamne la société La Pinède et les époux [M], in solidum, à payer à la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires une indemnité de 3 000 € à titre de dommages et intérêts ;

Déboute les parties de leurs plus amples demandes

Ordonne la publication de la décision à la conservation des hypothèques de [Localité 10]

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP [E] et de son assureur, les Mutuelles du Mans Assurances, et les condamne à payer ensemble à la société La Pinède, aux époux [M] et à la société Crédit Foncier de France, la somme de 6 000 € à chacun d'eux

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Pinède et les époux [M] à payer ensemble une indemnité de 3 000 € à la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires

Condamne la société La Pinède et les époux [M] aux dépens liés à l'intervention forcée de la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires, à recouvrer directement par la Selarl JFM en application de l'article 699 du code de procédure civile

Condamne la SCP [E] et son assureur, les Mutuelles du Mans Assurances, aux dépens à recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Win-Bompard, de Me Julin et de la SCP Ricou-Troupe, avocats, sauf en ce qui concerne les dépens se rapportant à l'intervention forcée de la Caisse centrale de garantie de la responsabilité professionnelle des notaires qui seront supportés ensemble par la société La Pinède et les époux [M] avec recouvrement direct au profit de la Selarl JFM.

Et ont signé le présent arrêt.

La greffière, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 08/01327
Date de la décision : 16/11/2009

Références :

Cour d'appel de Basse-Terre, arrêt n°08/01327


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-16;08.01327 ?
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