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21/09/2009 | FRANCE | N°166

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 21 septembre 2009, 166


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET N° 166 DU VINGT ET UN SEPTEMBRE DEUX MILLE NEUF

AFFAIRE N° : 05 / 01773
Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la GUADELOUPE du 05 août 2003.

APPELANTE

Madame Jeanine X... épouse Y... ... 97180 SAINTE-ANNE Représentée par Me EROSIE, substituant Me Dorothée LIMON-LAMOTHE (TOQUE 92) avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

CAISSE GENERALE DE LA SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE BP 486 Quartier de l'Hôtel de Ville 97159 POINTE A PITRE-C

EDEX Représentant : Mme A... en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En applicat...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET N° 166 DU VINGT ET UN SEPTEMBRE DEUX MILLE NEUF

AFFAIRE N° : 05 / 01773
Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la GUADELOUPE du 05 août 2003.

APPELANTE

Madame Jeanine X... épouse Y... ... 97180 SAINTE-ANNE Représentée par Me EROSIE, substituant Me Dorothée LIMON-LAMOTHE (TOQUE 92) avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

CAISSE GENERALE DE LA SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE BP 486 Quartier de l'Hôtel de Ville 97159 POINTE A PITRE-CEDEX Représentant : Mme A... en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 939, 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Guy POILANE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, et mise en délibéré au 21 Septembre 2009.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Guy POILANE, Conseiller, Président, M. Hubert LEVET, Conseiller, M. Pierre FAGALDE, Conseiller,

GREFFIER Lors des débats : Mme Marie-Anne CHAIBRIANT, Adjointe Administrative faisant fonction de greffier, serment préalablement prêté.

ARRET :

Contradictoire, prononcé en audience publique le 21 Septembre 2009, signé par M. Guy POILANE, Conseiller, Président, et par Mme Marie-Anne CHAIBRIANT, greffière, présente lors du prononcé.
FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES :

Jeanine X... épouse Y... a formé un recours en date du 3 juillet 2002 à l'encontre de la décision de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe en date du 29 mai 2002 qui a contesté le caractère professionnel de l'accident dont elle a été victime le 12 octobre 2001 au siège du Crédit Agricole de la Guadeloupe situé au lieu-dit Petit-Pérou aux Abymes (Guadeloupe).

Par jugement contradictoire en date du 5 août 2003, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Guadeloupe a :
- rejeté le recours formé par Jeanine Y... épouse X...,- confirmé la décision du comité de l'article R. 754-1 du code de la sécurité sociale en date du 20 mars 2002,- rappelle que la présente procédure est sans frais ni dépens.

Par arrêt avant-dire droit en date du 29 septembre 2009, cette cour a déclaré recevable en la forme l'appel de Jeanine X... épouse Y... à l'encontre de la décision susvisée et invité l'intimée à conclure au fond.
Par des conclusions reçues, en dernier lieu, à l'audience puis soutenues oralement lors de celle-ci, Jeanine X... épouse Y... demande à la cour, au visa des articles L. 411-1, L. 433-2, R. 433-2, R. 436-1 et R. 433-12 du code de la sécurité sociale, de confirmer la recevabilité de l'appel formé le 30 avril 2004, de prononcer le caractère professionnel de l'accident survenu le 12 octobre 2001 dans les locaux du Crédit Agricole dont elle a été victime, de condamner la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe à la prise en charge, au suivi et à son indemnisation selon les articles L. 433-2, R. 433-2, R. 436- 1et R. 433-12 du code de la sécurité sociale, de condamner celle-ci à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour les préjudices subis du fait de cet accident de travail qu'elle a refusé de reconnaître comme tel, ainsi que pour la dégradation jusqu'à ce jour de son état de santé, de dire que la Caisse pourra exercer une action récursoire contre le Crédit Agricole en remboursement des indemnités qui lui seraient versées, outre l'octroi de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par des conclusions en date du 29 mai 2009, régulièrement communiquées à l'appelante et remises lors de l'audience puis soutenues oralement lors de celle-ci, la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe demande à la cour de confirmer le jugement déféré déboutant Mme Y... de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de son malaise, de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts et de frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les moyens de fait et de droit soutenus par les parties dans les conclusions susvisées seront repris par la cour dans l'exposé des motifs qui va suivre.

SUR QUOI :

Vu le dossier de la procédure et les éléments régulièrement versés aux débats.

Il est constant que le 12 octobre 2001, alors qu'elle était enceinte de cinq mois, Jeanine X... épouse Y... a été victime, sur son lieu de travail, au moment où commençait un entretien avec son Directeur et le responsable des ressources humaines du Crédit Agricole de la Guadeloupe, son employeur, d'un malaise ayant entraîné l'intervention des services de secours.
Il résulte des dispositions de l'article L. 411-11 du code du travail qu'est considéré comme accident du travail quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. Ici, le malaise dont a été victime Jeanine X... épouse Y... est un accident survenu alors qu'elle se trouvait sous l'autorité de l'employeur, dans le cadre de l'exécution normale de son travail et entre en conséquence dans le cadre de l'article susvisé en ce qu'il est survenu “ par le fait ou à l'occasion du travail ”.
Dans le cadre de ce même article, il n'appartient pas à l'appelante de combattre la présomption d'imputabilité au travail qu'il fait peser sur la constatation d'un tel accident. Le caractère soudain du malaise est remis en question par la Caisse qui conclut que la lésion a une cause totalement étrangère au travail et que le “ facteur déclenchant ” est le souvenir traumatique d'une fausse couche survenue le 12 mars 1999 (attestation du Dr B..., gynécologue du même jour). En soutenant cela, l'intimée se réfère aux dires du Dr C..., médecin du travail, que son enquêteur a recueilli le 12 octobre 2001.
Cependant, une lecture approfondi de la déclaration du Dr C... à l'enquêteur permet de relever que, selon lui, Jeanine X... épouse Y... est perturbée depuis deux ans ; tout en affirmant plusieurs fois que l'état de santé psychologique de celle-ci n'est pas lié au travail il rappelle qu'elle n'a pas de poste fixe, ce qui entraîne un “ discours revendicateur ” envers sa hiérarchie et des arrêts de travail. Le Dr C... recommande à la Commission Médicale de la Sécurité Sociale de prendre connaissance de ses divers courriers au sujet de l'appelante.
Un autre document du même Dr C... est au dossier de la procédure. Il est en date du 28 avril 2004 et destiné à Jeanine X... épouse Y.... Ce praticien rappelle avoir suivi l'appelante tout d'abord de 1992 à 1995 alors qu'elle était au siège du Crédit Agricole comme opératrice de saisie et qu'alors il n'y avait “ aucune difficulté d'intégration ”. Selon lui (à la différence de la causalité énoncée pour l'enquêteur de la Caisse), la perturbation de son état de santé semble se situer pendant son affectation à l'Agence du Crédit Agricole de SAINTE ANNE. Il explique que la direction a procédé avec beaucoup de soins pour aider alors la salariée à reprendre des activités professionnelles normales et que l'épisode du 12 octobre 2001 est survenu alors que “ Mme Y... remplissait les conditions d'aptitude ”. Il en vient ensuite à la soudaineté de la lésion constatée après les entretiens avec sa hiérarchie (qui ont été selon elle péjoratifs dans leurs conclusions quant au poste proposé) le 12 octobre 2001 en précisant : “ un spécialiste ou un expert pourrait confirmer ou infirmer le lien qui, au regard de la jurisprudence récente reconnaissant une dépression comme accident du travail ne peut a priori être exclu entre le traumatisme psychologique décrit par Mme Y... et cette nouvelle détérioration de son état de santé ”.
Cette analyse du médecin du travail est corroborée par le constat fait de l'état de fragilité psychique de Jeanine X... épouse Y... “ majoré par une situation professionnelle très conflictuelle ” (Dr D... 20 juillet 2001). Dès lors, le malaise présenté le 12 octobre 2001 alors que l'appelante avait décidé de se réfugier dans les toilettes où elle a été secourue par une de ses collègue responsable de la gestion du personnel (Mme E... Marie-Colette entendue par l'enquêteur de la Caisse) a les caractéristiques d'une lésion soudaine liée au travail. Cette personne attachée au service du personnel du Crédit Agricole va déclarer d'ailleurs à l'enquêteur de la Caisse : “ par la suite, je n'ai pas pensé que son état nerveux était lié à sa grossesse ”. Le responsable des ressources humaines du Crédit Agricole Mutuel de la Guadeloupe, M. Z..., apporte une notation importante quant au contexte dans lequel est survenu l'accident en transmettant la déclaration de celui-ci à la Caisse le 7 novembre 2001. Ce supérieur hiérarchique de Mme Y... (qui déclare que le jour des faits à 11heures, elle a été appelée par le responsable du personnel et son “ supérieur ” qui est vraisemblablement M. Z...) écrit dans cette lettre de transmission à la C. G. S. S. : “ nous tenons à vous signaler qu'avant l'entrevue du 12 octobre 2001, l'agent (Mme X... épouse Y...) a laissé son poste de travail sans autorisation de sa hiérarchie pour se rendre à l'inspection du travail (photocopie du mail joint) et qu'en conséquence l'entreprise se dégage de toute responsabilité entre 7heures44 et 10 heures 30 ".

Il résulte de ce qui précède que la dépression nerveuse soudaine manifestée par Jeanine X... épouse Y... le 12 octobre 2001 vers onze heures sur le lieu de son travail dans le décours d'une réunion tendue avec ses supérieurs hiérarchiques constitue un accident du travail au sens de l'article L. 411-11 du code de la sécurité sociale.
C'est donc à tort que le premier juge a cru bon de rejeter la demande de Jeanine X... épouse Y..., le jugement déféré étant infirmé en toutes ses dispositions.
La demande présentée par l'appelante à l'encontre de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe en réparation des préjudices qui lui auraient été causés par cet organisme n'est pas justifiée. En effet, le contentieux de la reconnaissance d'un accident du travail est de nature technique en ce qu'il comporte un régime légal d'indemnisation spécifique.
Il n'y a pas lieu de condamner la Caisse à la prise en charge, au suivi et à l'indemnisation de l'appelante, la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident entraînant automatiquement ces conséquences qui sont de droit.
L'équité commande qu'il soit alloué à l'appelante la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant publiquement, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort,
Vu son arrêt avant-dire droit en date du 29 septembre 2008,
Au fond :
Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
Dit que Jeanine X... épouse Y... a été victime le 12 octobre 2001, au siège du Crédit Agricole Mutuel de la Guadeloupe, d'un accident du travail,
Y ajoutant :
Condamne la Caisse Générale de la Sécurité Sociale à payer à Jeanine X... épouse Y... la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Constate que cette procédure est exempte de dépens.
ET ONT SIGNÉ LE PRÉSIDENT ET LA GREFFIÈRE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 166
Date de la décision : 21/09/2009
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Temps et lieu de travail - Applications diverses -

Un épisode traumatique, constatée médicalement et qualifié de dépression nerveuse soudaine, survenu sur le lieu de travail immédiatement après la participation d'une salarié à une réunion tendue portant sur son devenir dans l'entreprise, constirue un accident du travail au sens de l'article L.411-11 du code de la sécurité sociale. c'est donc à tort que le Conseil des Prud'hommes de Pointe-à-Pitre a exclu cet épisode traumatique comme étant un accident à caractère professionnel


Références :

article L.411-1 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Pointe à Pitre, 05 septembre 2003


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2009-09-21;166 ?
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