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26/05/2008 | FRANCE | N°178

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Ct0193, 26 mai 2008, 178


CHAMBRE SOCIALE ARRET No 178 DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE HUIT
AFFAIRE No : 06 / 02024
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'Hommes de POINTE A PITRE du 31 mai 2006, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LAIQUE POUR L'EDUCATION LA FORMATION LA PREVENTION ET L'AUTONOMIE (L'ALEFPA) Centre Vauban Bâtiment Naumur-199-201 Rue Colbert 59800 LILLE Représentée par Me René DESPIEGHELAERE (avocat au barreau de LILLE) et Me Jan-Marc FERLY (TOQUE 26) (Avocat au barreau de la GUADELOUPE)
INTIMÉE
Madame Aline Z......... 97122 BAIE-MAHAULT Repr

ésenté par M. Fernand CURIER (Délégué syndical ouvrier)
COMPOSITION DE LA C...

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 178 DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE HUIT
AFFAIRE No : 06 / 02024
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'Hommes de POINTE A PITRE du 31 mai 2006, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LAIQUE POUR L'EDUCATION LA FORMATION LA PREVENTION ET L'AUTONOMIE (L'ALEFPA) Centre Vauban Bâtiment Naumur-199-201 Rue Colbert 59800 LILLE Représentée par Me René DESPIEGHELAERE (avocat au barreau de LILLE) et Me Jan-Marc FERLY (TOQUE 26) (Avocat au barreau de la GUADELOUPE)
INTIMÉE
Madame Aline Z......... 97122 BAIE-MAHAULT Représenté par M. Fernand CURIER (Délégué syndical ouvrier)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Mars 2008, mise en délibéré au 21 Avril 2008, successivement prorogé au 05, 19 et 26 Mai 2008, devant la Cour composée de :
M. Guy POILANE, Conseiller, Président, M. Hubert LEVET, Conseiller, M. Pierre FAGALDE, Conseiller, qui en ont délibéré.
GREFFIER lors des débats : Mme Marie-Anne CHAIBRIANT, Adjointe Administrative faisant fonction de Greffier, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé en audience publique le 26 Mai 2008, par M. Pierre FAGALDE, Conseiller, signé par M. Guy POILANE, Conseiller, Président, et par Mme Marie-Anne CHAIBRIANT, Greffier, présent lors du prononcé.
Madame Aline Z... a été embauchée par l'Association Laïque pour l'Education, la Formation la Prévention et l'Autonomie (ALEFPA) le 28 février 1983, comme infirmière dans la structure des I. M. E Denis A... I et II. Elle a bénéficié d'une " note tenant lieu de contrat à durée indéterminée " dans laquelle figurait la mention : " la rémunération est calculée par référence à la Convention Collective de 1951 avec indexation à 20 % ".
En 1994, suite à un rapport de la DDASS, l'employeur a décidé du gel du bénéfice de la prime pour les salariés embauchés avant 1994, avec exclusion de cet octroi pour ceux qui étaient embauchés après cette année 1994.
Madame Z... a saisi le conseil de prud'hommes de POINTE A PITRE le 14 décembre 2004 en réclamant le rappel de cette prime de 20 %, des congés payés et un rappel de prime à l'assiduité.
Par jugement en date du 31 mai 2006, le conseil de prud'hommes de POINTE A PITRE jugeant " qu'en gelant la prime de 20 % indexée sur le salaire, l'ALEFPA ne s'est basée sur aucune décision à caractère législatif ", a condamné l'employeur à payer à Madame Z... :
1o) pour le rappel de prime de 20 % la somme de 11. 219, 41 € 2o) pour les congés payés la somme de 1. 121, 94 € 3o) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile la somme de 300 €
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 17 octobre 2006 et enregistrée au secrétariat-greffe de la Cour d'appel le 19 octobre 2006, l'ALEFPA a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 4 octobre 2006.
Par écritures remises au secrétariat-greffe de la Cour d'appel le 10 décembre 2007, l'ALEFPA demande à la cour d'infirmer la décision entreprise, en constatant que le versement de la prime au titre de la vie chère ne résulte que d'un usage local et qu'aucune disposition légale, conventionnelle ou contractuelle n'impose une indexation de ladite prime. Il est conclu au rejet de la demande de rappel de prime, et subsidiairement à l'application des règles de prescription, aucune demande ne pouvant, selon l'ALEFPA, prospérer au delà d'une période de 5 années précédant la saisine du conseil des prud'hommes, soit le 15 décembre 1999.
Il est notamment soutenu :
- que l'usage local, dont se prévaut Madame Z..., à la différence de l'usage d'entreprise, ne peut être soumis à une procédure de dénonciation, puisque la mise en place de la prime ne procède pas d'une volonté de l'employeur de l'instaurer ;
- qu'à ce jour la prime, qui correspond à 20 % du salaire de 1993, est payée ;
Par écritures en date du 11 septembre 2007, Madame Z... conclut à la confirmation de la décision entreprise pour le rappel de prime et le paiement des congés payés ainsi que pour la somme attribuée sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il est conclu à l'infirmation en ce qui concerne le refus d'attribuer à l'intimée la somme de 2. 243, 88 € pour le rappel de prime à l'assiduité.
Il est notamment soutenu :
- qu'il y a eu suppression unilatérale d'un usage ;- que l'employeur n'a pas engagé la procédure de dénonciation de cet avantage qui avait fait l'objet d'un protocole d'accord ;- que les salariés de l'association recrutés dès 1993, sont fondés à réclamer le même traitement que leurs collègues, notamment le paiement de la prime de vie chère de 20 % à compter de la date de recrutement ;- que la règle de la prescription ne peut être appliquée ici, du fait de la réclamation chaque année de l'intéressée.

MOTIVATION DE LA DÉCISION :
Sur la nature contractuelle de la prime de vie chère :
L'ALEFPA est une association reconnue d'utilité publique, dont le budget de fonctionnement est soumis annuellement à l'approbation des autorités de tarification. Pour l'IME Denis A..., employeur de Madame Z..., l'autorité de tarification est la DDASS.
Dans un rapport en date du 27 janvier 1995, la Commission inter régionale de la tarification sanitaire et sociale de Paris, indiquait :
" s'agissant d'un avantage extra-conventionnel, l'indexation-de 20 %- peut à tout moment, être remis en cause par l'autorité de tarification, mais celle-ci par souci d'équité pour les agents travaillant déjà dans l'institution, n'a pas supprimé cet avantage. Elle s'est simplement limitée à reconsidérer ses modalités d'attribution en gelant la prime de 20 % à la valeur acquise au 31 décembre 1993 ".
Les salariés de IME A..., embauchés avant 1994, comme ce fut le cas de Madame Z..., ont bénéficié de cette prime de 20 % dite " de vie chère " qui était indexée au salaire. Puis, comme il a été indiqué plus haut, cette prime a été " gelée " sur le montant du salaire de 1993.
Les premiers juges ont considéré que ce versement était un usage, la prime remplissant les conditions cumulées, de constance, de généralité et de fixité. Le conseil de prud'hommes de POINTE A PITRE a également jugé que l'employeur n'a pas respecté les règles nécessaires pour mettre fin à l'usage : " informer les institutions représentatives du personnel, informer individuellement les salariés et enfin respecter le délai de convenance ".
L'employeur, de son côté, soutient qu'il s'agit d'un usage local, qui n'a pas à être soumis, contrairement à un usage d'entreprise, à une procédure de dénonciation, puisque " la mise en place de la prime ne procède pas d'une volonté de l'employeur de l'instaurer ". Enfin l'employeur fait observer qu'aucune disposition légale, conventionnelle ou contractuelle ne précise qu'un prime de 20 % sera versée et que cette prime sera indexée. Il est également fait remarquer que la prime de 20 % est payée à Madame Z..., mais sur le salaire de 1993, ce qui correspond à l'application normale du gel.
L'usage est une pratique habituellement suivie dans une entreprise. Il s'agit d'un avantage supplémentaire accordé aux salariés ou à une catégorie d'entre eux par rapport à la loi, la Convention Collective ou le contrat. Pour que le salarié puisse s'en prévaloir, il faut que la pratique soit constante, générale et fixe. Lorsque l'avantage est déterminé discrétionnairement par l'employeur, si notamment les conditions d'octroi sont aléatoires, l'avantage ne présente pas de caractère de fixité suffisant pour établir l'existence d'un usage. Tel est le cas de la situation de cette prime de 20 %, qui peut être remise en cause par les pouvoirs publics ou plus spécialement par l'autorité publique d'attribution.
En l'espèce, il convient d'observer que la décision d'octroi de la prime découlait d'un usage local (la prime de vie chère dans les départements d'outre-mer). Il n'existe pas dans le cas de Madame Z... et des autres salariés qui ont pu en bénéficier, de volonté de l'employeur d'instaurer cette prime, qui n'a pas à faire l'objet, en l'absence d'un usage d'entreprise à proprement parler, d'une dénonciation par cet employeur.
Le protocole d'accord de fin de conflit no1 en date du 20 novembre 2000, se bornait à indiquer que l'ALEFPA, face à " cette décision unilatérale qui remet en question le principe fondamental du droit du travail " à travail égal, salaire égal ", qu'elle s'engageait " à tout mettre en oeuvre pour mettre un terme à cette situation au plus tard le 31 décembre 2000 ".
En d'autres termes, l'ALEFPA tout en dénonçant l'inégalité entre les différents personnels en matière salariale, lié au gel de la prime de vie chère (20 %), ne faisait que s'engager à mettre un terme à une situation, sans pour autant expliquer par quels moyens elle allait y parvenir, sachant que cette décision dépend de l'autorité de tutelle.
Madame Z... n'apporte pas la preuve dans les pièces qu'elle verse devant la cour, qu'elle est victime, par rapport à d'autres salariés du même établissement d'une discrimination dans le montant salarial.
Il conviendra d'observer au surplus, que la prime dont bénéficiait Madame Z..., employée avant 1994, n'a été que gelée (calculée sur le salaire de 1993) et non pas supprimée.
Cependant, l'association ALEFPA, employeur devait respecter les règles propres au droit du travail dans son rapport contractuel individuel avec la salariée.
La prime de vie chère (20 % indexée sur le salaire) est un des éléments du contrat de travail de Madame Z.... L'usage, fut-il local, a été intégré pour elle dès l'origine dans le contrat de travail.
En procédant au gel de cette prime, l'employeur a omis de requérir l'accord de sa salariée sur cette modification de la structure du contrat de travail.
Il s'agit en l'espèce, de la part de l'employeur, d'une modification unilatérale prohibée du contrat de travail. Il ya a donc lieu de confirmer la décision entreprise en substituant la motivation qui précède à celle du premier juge.
Sur la prescription :
S'il est vrai qu'en matière salariale, les actions se prescrivent par 5 ans. Madame Z... qui réclame cette prime depuis 1999, il n'en demeure pas moins que les salariés dont Madame Z... n'ont cessé de réclamer l'attribution de cette prime.
Dans le protocole d'accord avec les organisations syndicales en date du 20 novembre 2000, l'employeur reconnaissant le caractère injuste de cette situation s'est engagé à tout mettre en oeuvre pour mettre un terme à cette situation avant la fin de l'année. Dès lors le fait que la salariée avait introduit dans le délai de 5 ans une réclamation a suffi à interrompre la prescription.
L'action de Madame Z... n'est pas prescrite.

Sur la demande incidente de Madame Z... concernant la prime d'assiduité :
Madame Z... formule une demande incidente de paiement de rappel de prime d'assiduité pour un montant de 2. 243, 88 €. Elle demande que la décision des premiers juges soit infirmée, en ce qu'ils ont écarté cette demande sans pour autant motiver leur décision sur ce point.
La salariée ne justifie pas dans les pièces versées aux débats qu'elle bénéficiait de cette prime. Les tableaux produits par elle aux débats ne portent que sur la prime de vie chère, la salarié s'étant contentée de porter sur la première page la somme de 2. 243, 88 € (non explicitée) avec comme indication : " rappel de prime d'assiduité ".
Madame Z... sera déboutée de cette demande incidente.
Il convient de confirmer la décision entreprise dans toutes ses dispositions en substituant aux motifs des premiers juges, ceux qui viennent d'être exposés.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Statuant publiquement, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire, en matière sociale et en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable en la forme,
Au fond :
Confirme la décision entreprise dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
Dit n'y avoir lieu, en appel, de faire application des dispositions de l'article 700 du CPC,
Condamne l'association ALEFPA aux dépens éventuels.
ET ONT SIGNÉ LE PRÉSIDENT ET LE GREFFIER.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Ct0193
Numéro d'arrêt : 178
Date de la décision : 26/05/2008

Références :

ARRET du 08 avril 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 avril 2010, 08-43.599, Publié au bulletin

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, 31 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2008-05-26;178 ?
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