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20/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948495

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Ct0173, 20 février 2006, JURITEXT000006948495


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE ARRET No DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE SIX AFFAIRE No : 05/00316 Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'Hommes de POINTE A PITRE du 18 novembre 2004, section commerce. APPELANTE Maître Marie Agnès DUMOULIN Liquidateur de MIRAGE TROPICAL CLUB 66, rue du Morne NININE La Marina 97190 GOSIER Représentée par Me Jean-Michel GOUT (TOQUE 9) (avocat au barreau de la GUADELOUPE). INTIMÉES Mademoiselle Lucienne QUERNEL X.../ Melle Lovely Y... 2, allée René CLAIRE 91860 EPINAY SOUS SENART Représentée par Me DERUSSY, substituant Me C

harles NICOLAS (TOQUE 69) (avocat au barreau de la GUADELOUPE...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE ARRET No DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE SIX AFFAIRE No : 05/00316 Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'Hommes de POINTE A PITRE du 18 novembre 2004, section commerce. APPELANTE Maître Marie Agnès DUMOULIN Liquidateur de MIRAGE TROPICAL CLUB 66, rue du Morne NININE La Marina 97190 GOSIER Représentée par Me Jean-Michel GOUT (TOQUE 9) (avocat au barreau de la GUADELOUPE). INTIMÉES Mademoiselle Lucienne QUERNEL X.../ Melle Lovely Y... 2, allée René CLAIRE 91860 EPINAY SOUS SENART Représentée par Me DERUSSY, substituant Me Charles NICOLAS (TOQUE 69) (avocat au barreau de la GUADELOUPE). A.G.S. Centre d'Affaires Dillon Valmenière Route des Pointes de Sable 97200 FORT DE FRANCE Représentée par Me Isabelle WERTER ( TOQUE 8) (avocat au barreau de la GUADELOUPE).

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 939, 945-1 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2005, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Guy POILANE, Conseiller chargé d'instruire l'affaire, et mise en délibéré au 20 Février 2006.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Guy POILANE, Conseiller, Président,

M. Hubert LEVET, Conseiller,

Mme Isabelle Z..., Conseillère,

GREFFIER lors des débats : Mme Marie-Anne A..., Adjoint Administratif faisant fonction de Greffier, serment préalablement prêté. ARRET :

Contradictoire, prononcé en audience publique le 20

Février 2006, signé par M. Guy POILANE, Conseiller, Président, et par Mme Marie-Anne A..., Greffier, présent lors du prononcé. FAITS ET PROCEDURE :

Lucienne QUERNEL a été engagée par la société MIRAGE TROPICAL CLUB à compter du 27 décembre 1999, en qualité de second de cuisine, suivant un contrat de travail à durée déterminée de 24 mois (sic).

Par jugement du tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre en date du 25 août 2000, la société MIRAGE TROPICAL CLUB a été mise en liquidation judiciaire.

Suivant un courrier recommandé avec avis de réception en date du 13 septembre 2000, émanant de Me DUMOULIN, liquidateur, Lucienne QUERNEL a été licenciée pour motif économique, avec effet au 18 septembre 2000.

Considérant qu'il avait été mis fin prématurément à son contrat de travail à durée déterminée, Lucienne QUERNEL a saisi, le 16 janvier 2001, la juridiction prud'homale de diverses demandes.

Par jugement contradictoire en date du 18 novembre 2004, le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre a : - dit qu'il y a lieu de faire application des lois du 25 janvier 1985, - dit que Lucienne QUERNEL possède une créance salariale sur la société MIRAGE TROPICAL CLUB en fixe le montant aux sommes suivantes :

[* 4 042,18 ç salaires de juin, juillet, août 2000, ainsi que les 8 jours de septembre 2000,

*] 22 534,40 ç dommages-intérêts correspondant aux salaires du 19 septembre 2000 au 27 décembre 2001,

* 1 802,75 ç prime de précarité - ordonné à Me DUMOULIN d'inscrire les sommes ci-dessus définies sur le relevé des créances salariales sous les conditions prévues à l'article L.143-11-7 du Code du travail, - déclaré le présent jugement commun à l'AGS, - débouté Lucienne QUERNEL du surplus de ses demandes, ainsi que la défenderesse.

Le premier juge, après avoir considéré qu'il y avait lieu de requalifier le contrat de travail à durée déterminée en ce qu'il ne répondait à aucun des critères légaux, a néanmoins statué sur les conséquences dommageables de la rupture illicite d'un contrat à durée déterminée.

Appel a été interjeté par Me DUMOULIN ès-qualités, suivant démarche au greffe de première instance en date du 11 janvier 2005, de cette décision qui lui a été notifiée le 20 décembre 2004.

Par conclusions d'appel remises à l'audience auxquelles elle se réfère expressément lors de celle-ci, Me DUMOULIN, en sa qualité de liquidateur de la société MIRAGE TROPICAL CLUB SARL, demande à la cour d'infirmer les dispositions querellées du jugement entrepris en requalifiant le contrat de travail de Lucienne QUERNEL en contrat de travail à durée indéterminée et condamner la salariée à lui payer la somme de 600 ç au titre de l'article 700 du NCPC.

Suivant des conclusions en réplique remises également à l'audience et développées oralement lors de celle-ci, Lucienne QUERNEL demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner Me DUMOULIN, ès-qualités, à lui payer la somme de 2 000 ç au titre de l'article 700 du NCPC.

L'AGS, par des conclusions remises le 15 novembre 2005 et reprises à l'audience, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de dire et juger que l'AGS dispose d'un droit propre à contester la mise en cause et l'étendue de sa garantie, de requalifier le contrat de travail de Lucienne QUERNEL en contrat de travail à durée indéterminée, de la débouter en conséquence de ses demandes de dommages-intérêts pour rupture anticipée d'un C.D.D. et de sa prime de précarité, de mettre l'AGS hors de cause en ce qui concerne l'article 700 du NCPC et rappelle les limites et conditions de sa garantie légale.

Les moyens de fait et de droit énoncés dans les conclusions susvisées seront repris expressément par la cour pour ce qui concerne l'exposé des motifs qui va suivre.

SUR CE :

Vu le dossier de la procédure et les éléments régulièrement versés aux débats.

Sur la requalification du contrat de travail :

Il est constaté sur ce point que le premier juge, tout en estimant que le contrat à durée déterminée conclu entre les parties le 27 décembre 1999 ne répondait à aucun des critères légaux tels que définis par les articles L.122-1, L.122-1-1, L.122-3 et L.122-3-1 du Code du travail, n'a pas procédé à sa requalification en un contrat à durée indéterminée.

S'il est effectivement constant qu'une telle requalification n'a aucunement été sollicitée par la salariée et que celle-ci est ici, en principe, seule habilitée à le faire au regard du droit positif en la matière, il doit être relevé que, pour ne parler que du motif ayant conduit l'employeur à recourir à un tel contrat, il n'est avancé par celui-ci, représenté par le liquidateur, aucune raison recevable au regard de la situation d'emploi de Lucienne QUERNEL dans une entreprise qui déposera son bilan en mai 2000, soit cinq mois après l'embauche. La durée de ce contrat, soit deux ans, excède largement la durée légale autorisée et souligne donc, en l'absence de motif énoncé, la volonté de l'employeur de réaliser une fraude aux droits de la salariée et aux règles dérogatoires mais d'ordre public régissant les contrats à durée déterminée en pourvoyant de manière durable un emploi de second de cuisine qui, au sein d'une entreprise de restauration, est lié à l'activité normale et permanente de celle-ci. Dans une telle hypothèse, il doit être retenu exceptionnellement, au profit de l'AGS, une possibilité de solliciter la requalification du contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée. Le jugement déféré est donc réformé, la Cour décidant que le contrat de travail liant les parties est à durée indéterminée.

Sur la rupture du contrat de travail :

Au regard des règles propres à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, il est constaté qu'ici, le liquidateur a procédé, en invoquant la procédure collective et notamment le jugement de liquidation du 25 août 2000, au licenciement pour motif économique de Lucienne QUERNEL. La lettre de rupture du 13 septembre 2000 fixe donc les limites du litige sur cette motivation économique qui sera

considérée comme fondée. En conséquence, toute demande d'indemnisation liée à l' illégitimité du licenciement, est écartée, tout comme le versement d'une prime de précarité inadéquate.

Sur le rappel de salaire :

Le jugement est confirmé en ce qui concerne l'octroi des salaires impayés de juin, juillet et août 2000, outre les 18 jours de septembre 2000, cette demande n'étant critiquée ni par le liquidateur, ni par l'AGS. La créance de Lucienne QUERNEL, à ce titre, est fixée à la somme de 4 042,18 ç.

Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens :

L'équité commande qu'il soit alloué à Lucienne QUERNEL la somme de 1 000 ç au titre de l'article susvisé ; le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la salariée de ce même chef.

La société MIRAGE TROPICAL CLUB, représentée par son liquidateur, est condamnée aux éventuels dépens de la procédure qui s'inscriront au passif de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable en la forme,

Au fond :

Confirme la décision entreprise mais seulement en ce qu'elle a fixé à la somme de 4 042,18 ç la créance de Lucienne QUERNEL à inscrire au passif de la liquidation de la société MIRAGE TROPICAL CLUB et débouté la salariée de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure

Civile,

La réforme pour le surplus et statuant à nouveau :

Dit que le contrat de travail liant les parties est un contrat à durée indéterminée,

Déboute Lucienne QUERNEL de sa demande d'indemnités de rupture et de précarité sur le fondement de l'article L. 122-3-4 du Code du travail,

Y ajoutant :

Condamne Me DUMOULIN, en sa qualité de liquidateur de la société MIRAGE TROPICAL CLUB, à payer à Lucienne QUERNEL la somme de 1 000 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Déclare le présent arrêt commun à l'AGS,

Laisse les éventuels dépens de la procédure à la charge de la société MIRAGE TROPICAL CLUB qui les inscrira au passif de la liquidation

judiciaire.

Déboute Lucienne QUERNEL de sa demande en indemnisation

ET ONT SIGNÉ LE PRÉSIDENT ET LE GREFFIER.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Ct0173
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948495
Date de la décision : 20/02/2006

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL

Si la volonté de l'employeur de réaliser une fraude aux droits d'un salarié et aux règles dérogatoires régissant les contrats à durée déterminée est établie, alors et de manière exceptionnelle, eu égard notamment au caractère d'ordre public de ces normes, la requalification en contrat à durée indéterminée peut être sollicitée par une autre partie que le salarié intéressé, en l'occurrence l'AGS.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2006-02-20;juritext000006948495 ?
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