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27/05/2024 | FRANCE | N°22/00094

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 27 mai 2024, 22/00094


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B







LP/FB

ARRÊT N°:



AFFAIRE N° : N° RG 22/00094 - N° Portalis DBVP-V-B7G-E6D5



jugement du 09 Décembre 2021

Juge aux affaires familiales du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 20/01316



ARRET DU 27 MAI 2024



APPELANT :



M. [R] [V]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représenté par Me Stéphane CORNILLE, avocat au barreau d

u MANS - N° du dossier 2019078



INTIMEE :



Mme [M] [W]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 11]

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me Julien BRUNEAU de la SCP SORET-BRUNEAU, avocat au ...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B

LP/FB

ARRÊT N°:

AFFAIRE N° : N° RG 22/00094 - N° Portalis DBVP-V-B7G-E6D5

jugement du 09 Décembre 2021

Juge aux affaires familiales du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 20/01316

ARRET DU 27 MAI 2024

APPELANT :

M. [R] [V]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Stéphane CORNILLE, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 2019078

INTIMEE :

Mme [M] [W]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 11]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Julien BRUNEAU de la SCP SORET-BRUNEAU, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 2019120

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 11 Mars 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme PARINGAUX, conseillère qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PLAIRE COURTADE, présidente de chambre

Mme PARINGAUX, conseillère

Mme COUTURIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 27 mai 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Marie-Christine PLAIRE COURTADE, présidente de chambre et par Florence BOUNABI, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

- - - - -

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [M] [W] et M. [R] [V], ont vécu en concubinage du 31 juillet 2012 au 15 octobre 2018.

Par acte d'huissier délivré le 19 mai 2020, M. [V] a assigné Mme [W] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire du Mans aux fins de règlement des comptes suite à leur séparation.

Aux termes de ses dernières conclusions M. [V] a demandé la condamnation de Mme [W] à lui payer la somme de 15 511,61 euros en principal et la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a également sollicité l'exécution provisoire de la décision et la condamnation de Mme [W] au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de maître Cornille, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, Mme [W] a demandé le débouté de l'ensemble des demandes de M. [V], et sa condamnation au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau.

Par jugement en date du 9 décembre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire du Mans a :

- débouté M. [V] de sa demande de paiement par Mme [W] de la somme de 15 511,61 euros ;

- condamné M. [V] au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à Mme [W] ;

- condamné M. [V] au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour d'appel d'Angers le 13 janvier 2022, M. [V] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a : '- débouté M. [R] [V] de sa demande de paiement par Mme [M] [W] de la somme de quinze mille cinq cent onze euros et soixante et un centimes ;-condamné [R] [V] au paiement de la somme de mille cinq cent euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à [M] [W];-condamné [R] [V] au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de maître Julien Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau ;- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires'.

Mme [W] a constitué avocat le 17 février 2022.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 21 février 2024.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 15 mars 2022, M. [V], demande à la présente juridiction de :

- dire et juger recevable et bien fondé M. [V] en son appel ;

Y faisant droit :

- infirmer le jugement attaqué, rendu par le juge aux affaires familiales du Mans le 9 décembre 2021, en toutes ses dispositions, principal, article 700 du code de procédure civile et dépens.

Statuant à nouveau :

- condamner Mme [W] à payer à M. [V] la somme de 15 511,61 euros en principal ;

- condamner Mme [W] à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [W] à payer les entiers dépens dont distraction au profit de maître Cornille, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 11 avril 2022, Mme [W], demande à la présente juridiction de :

- juger M. [V] irrecevable et mal fondé en son appel ;

En conséquence :

- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes ;- confirmer le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire du Mans le 9 décembre 2021 en ce qu'il a débouté M. [V] de sa demande de paiement par Mme [W] de la somme de 15 511,61 euros ;

- condamner M. [V] à régler à Mme [W] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau.

Pour un exposé plus ample des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions sus visées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le fond du litige

M. [V] soutient qu'au cours de la vie commune il a remboursé avec ses fonds propres des dettes qui étaient personnelles à Mme [W] d'un total de 15 511,61 euros composé de :

- une dette [10] auprès de l'étude d'huissier [9] pour 6 184,48 euros ;

- une dette prêt Union auprès de l'étude de Maître [Z] huissier de justice pour 2 970,21 euros ;

- une dette auprès du Trésor Public de 3 080 euros ;

- des dettes d'impôts de 1 000 et 2 000 euros ;

- une facture d'achat de pneus pour le véhicule personnel de Mme [W] auprès d'un garagiste pour un montant de 276,62 euros.

M. [V] reproche au premier juge d'avoir écarté l'application de l'article 1346 du code civil permettant une subrogation légale en faisant une lecture incorrecte de ces dispositions qui n'exigent pas une libération totale par le solvens libérant le débiteur principal, celle-ci pouvant être partielle, et en retenant que la seconde condition liée à l'existence d'un intérêt légitime au paiement n'était pas remplie, alors que l'appelant estime avoir eu un intérêt légitime à mettre fin au climat de poursuites planant sur le couple, ce qui explique qu'il a consenti ces différents paiements pour sa concubine.

M. [V] conteste enfin les affirmations de Mme [W], et la fiabilité des attestations des employés placés sous son autorité et qui au surplus n'étaient pas témoins de la vie quotidienne du couple, qu'elle produit aux débats, tendant à démontrer qu'il ne participait en rien aux dépenses de la vie courante du couple.

Mme [W] conclut à la confirmation du jugement.

Elle adhère à l'application de l'article 1346 du code civil faite par le juge aux affaires familiales relevant que le simple concubinage n'est pas suffisant pour établir l'intérêt légitime exigé par le texte, aucune solidarité légale n'existant entre concubins, et qu'ainsi il appartient au demandeur de rapporter la preuve que les sommes réglées étaient un prêt et non un don.

Mme [W] soutient que M. [V] l'a laissée seule faire face aux dépenses courantes du ménage, hormis un virement mensuel insuffisant de 400 euros, jusqu'à ce qu'elle lui demande d'aider en réglant les sommes réclamées au titre de sa participation au ménage, ce qu'il a accepté, ce qui selon elle constitue donc un don.

Mme [W] affirme que M. [V] vivait littéralement 'à ses crochets' comme cela était perceptible par leur entourage professionnel et familial et qu'elle en justifie par la production d'attestations.

Elle mentionne enfin une plainte pour abus de confiance déposée contre elle par M. [V] qui a été classée sans suite.

Sur ce,

L'article 515-8 du code civil énonce que : 'Le concubinage est une union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple'.

Les parties ont vécu en concubinage du 31 juillet 2012 au 15 octobre 2018, sans qu'une convention n'ait été établie pour régler leurs rapports patrimoniaux.

Le concubinage a cessé à raison de la séparation du couple.

La liquidation des intérêts communs et les demandes concernant les créances entre leurs patrimoines respectifs s'opèrent donc par le droit commun.

L'article 1346 du code civil, dont M. [V] revendique l'application, dispose que : 'La subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette'.

La subrogation légale agit même sans l'accord du débiteur voire à son insu.

En l'espèce, M. [V] produit les pièces justificatives de la réalité des paiements suivants opérés par ses soins :

- une somme de 6 184,48 euros payée par chèque le 26 avril 2015 à l'étude d'huissier de justice [9] pour le règlement d'un prêt [10] contracté par Mme [W] seule ;

- une somme de 2 970,21 euros payée par chèque le 24 avril 2016 à l'étude d'huissier de justice [Z] pour le règlement partiel d'un prêt Union contracté par Mme [W] seule ;

- une somme de 6 080 euros, réglée par des versements au Trésor Public de 1 000, 2 000 euros et un chèque de 3 080 euros le 26 avril 2015 pour des dettes de Mme [W] dont la nature (taxe, impôt, redevance) n'a pas été précisée ;

- une somme de 276,62 euros payée par chèque le 17 mai 2018 au garage [7] pour la fourniture de pneumatiques sur le véhicule personnel de Mme [W] ;

soit un total de 15 511,31 euros.

Ces paiements ont entraîné la libération du débiteur, la première condition posée par l'article 1346 du code civil est donc remplie.

Cependant, le concubinage existant entre deux parties, pas plus qu'il ne produit d'effets personnels, n'a de conséquences pécuniaires entre elles, ni obligation alimentaire, ni devoir de secours, ni solidarité des dettes ménagères.

Les dépenses faites par chacun des concubins pour faire vivre le ménage sont à sa charge exclusive sans qu'il ait de recours contre l'autre, sous réserve de la volonté contraire des concubins de partager les dépenses de la vie commune.

En l'espèce, les sommes d'argent payées par M. [V] sont exclusivement des dettes personnelles à Mme [W].

Il n'est pas établi l'intention purement libérale de M. [V].

Aucune convention n'a été passée entre les deux concubins pour préciser le sort de ces paiements dans leurs rapports financiers ordinaires, ni en cas de séparation.

Par suite, M. [V] ne peut prétendre avoir agi en ayant un intérêt légitime à payer les dettes personnelles de sa concubine, qui a un patrimoine distinct du sien, sans création d'une indivision immobilière commune, en raison d'une forme d'engagement moral auquel il s'est lui-même obligé pour mettre fin aux relances adressées par les créanciers notamment via les huissiers de justice.

Aussi, M. [V] qui a payé pour la débitrice sans y avoir un intérêt légitime, ne remplit pas la seconde condition posée par l'article 1346 du code civil, et le mécanisme de la subrogation ne peut être retenu.

Le jugement contesté sera confirmé.

Sur les frais et dépens

M. [V] a succombé en première instance, c'est donc à bon droit qu'il a été condamné à payer à Mme [W] au titre de ses frais irrépétibles la somme de 1 500 euros, et aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau.

Le jugement contesté de ces chefs sera confirmé.

M. [V] succombe en cause d'appel, il est par suite équitable de ne pas laisser à la charge de Mme [W] les frais irrépétibles qu'elle a du exposer pour y défendre ses droits.

Aussi, M. [V] sera condamné à verser à Mme [W] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et sera débouté de sa demande formée sur le même fondement juridique envers la partie adverse.

M. [V] sera condamné aux dépens, dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement rendu le 9 décembre 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire du Mans en toutes ses dispositions contestées ;

DÉBOUTE M. [R] [V] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [R] [V] à payer à Mme [M] [W] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [R] [V] aux dépens d'appel, dont distraction au profit de maître Bruneau, membre de la SCP Soret & Bruneau.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

F. BOUNABI M.C. PLAIRE COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00094
Date de la décision : 27/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-27;22.00094 ?
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