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24/04/2024 | FRANCE | N°24/00020

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 24 avril 2024, 24/00020


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 20



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 05 Avril 2024



N° RG 24/00020 - N° Portalis DBVP-V-B7I-FJXN



ORDONNANCE

DU 24 AVRIL 2024





Nous, Marie-Christine PLAIRE COURTADE, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 18 mars 2024, assistée de S. LIVAJA, Greffier,



Statuant sur l'appel formé par :



Monsieu

r [M] [O]

né le 04 Mai 1944 à [Localité 10] (56)

[Adresse 1]

[Localité 5]



Comparant assisté de Me Raphaël MAYET substitué par Me Anna Koenen de la SELARL MAYET & PERRAULT, av...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 20

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 05 Avril 2024

N° RG 24/00020 - N° Portalis DBVP-V-B7I-FJXN

ORDONNANCE

DU 24 AVRIL 2024

Nous, Marie-Christine PLAIRE COURTADE, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 18 mars 2024, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Monsieur [M] [O]

né le 04 Mai 1944 à [Localité 10] (56)

[Adresse 1]

[Localité 5]

Comparant assisté de Me Raphaël MAYET substitué par Me Anna Koenen de la SELARL MAYET & PERRAULT, avocats au barreau de VERSAILLES

APPELÉS A LA CAUSE :

Monsieur [V] [O]

né le 15 Janvier 1984 à [Localité 9] (72)

EPSM de la Sarthe

[Adresse 3]

[Localité 6]

Non comparant représenté par Me Philippe GOUPILLE, avocat au barreau d'ANGERS

Monsieur LE PREFET DE LA SARTHE

ARS - département des soins psychiatriques sans consentement

[Adresse 2]

[Localité 4]

Le Mandataire judiciaire à la protection des majeurs de l'EPSM DE LA SARTHE

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur LE DIRECTEUR DE L'EPSM DE LA SARTHE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Non comparants, ni représentés,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 24 Avril 2024, il a été indiqué que la décision serait prononcée dans l'après-midi, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

M. [V] [O], né le 15 janvier 1984, est placé pour une durée de 120 mois sous le régime de la tutelle confiée à l'Udaf de la Sarthe selon jugement du juge des contentieux de la protection rendu le 30 septembre 2021. Par ordonnance du 12 avril 2023, l'Etablissement public de santé mentale de la Sarthe a été désigné aux lieu et place de l'Udaf de la Sarthe pour exercer la mesure.

M. [V] [O] a été admis en hospitalisation complète auprès de l'Etablissement public de santé mentale de la Sarthe, sur décision du Préfet du 3 décembre 2022. Par ordonnance du 8 mars 2024, le juge des libertés et de la détention a maintenu cette hospitalisation.

Entre temps, le 4 septembre 2023, M. [M] [O], père de M. [V] [O] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans afin de demander le transfert de son fils vers le Centre Hospitalier [8] à [Localité 7]. Par ordonnance du 15 septembre 2023, le juge saisi a rejeté la demande de mainlevée de la mesure de soins psychiatriques contraints de M. [V] [O], indiquant dans les motifs de sa décision n'avoir pas compétence pour statuer sur le lieu d'hospitalisation de M. [V] [O].

Par requête enregistrée le 26 mars 2024 au greffe du tribunal judiciaire du Mans, M. [M] [O], père de M. [V] [O], a saisi de nouveau le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans d'une demande de transfert de son fils vers le même centre hospitalier [8] à [Localité 7].

Selon avis du 5 avril 2024, le procureur de la République a estimé que le juge des libertés et de la détention est incompétent pour statuer sur la demande de transfert de M. [V] [O] vers un autre établissement psychiatrique, cette décision étant de nature administrative, dans le cadre du suivi médical du patient, et ne relevant pas du contrôle de la poursuite de la mesure de soins sans consentement qui relève de la compétence du juge des libertés et de la détention.

Par ordonnance du 5 avril 2024, le juge des libertés et de la détention saisi s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande et renvoyé M. [M] [O] à mieux se pourvoir.

La décision a été notifiée à M. [V] [O], à l'EPSM de la Sarthe, au Préfet de la Sarthe et à M. [M] [O] le 5 avril 2024.

Par lettre adressée au greffe de la cour d'appel d'Angers portant la date d'expédition du 11 avril 2024 indiqué par la poste, maître [C] agissant pour le compte de M. [M] [O] a relevé appel de cette décision.

L'ensemble des personnes concernées a été convoqué à l'audience du 24 avril 2024.

DEBATS A L'AUDIENCE

À la date fixée, M. [M] [O] a comparu en personne avec l'assistance de son avocat, Me [K] substituant maître Mayet.

Maître [K] a exposé que par décision du 3 juillet 2023, le Tribunal des Conflits a posé le principe que toutes les questions relatives à la mesure de soins concernant une personne hospitalisée sans son consentement, relèvent de la compétence du Juge judiciaire selon la théorie du bloc de compétences attribué au Juge judiciaire et en l'espèce au juge des libertés et de la détention; qu'en application de cette décision, il est également compétent pour autoriser le transfert d'un patient dans un autre établissement.

Il ajoute que par application des dispositions de l'article L.3211-1 alinéa 2 du Code de la santé publique, le patient est libre du choix de son praticien et de son établissement ; que c'est sur ce fondement que M. [M] [O] sollicite le transfert de son fils vers un autre établissement ; que cette demande est soutenue par le docteur [L] qui rappelait seulement la condition qu'il ait un logement sur le département de rattachement de l'établissement désiré ; que M. et Mme [E] demeurant à [Localité 11] (22) ont établit un attestation d'hébergement.

Il expose enfin que l'article L.3211-3 du Code de la santé publique prévoit en son dernier alinéa que 'En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée' ; que l'Etablissement Public de Santé Mentale de la Sarthe rencontre de nombreuses difficultés quant à la prise en charge des patients ; qu'en raison d'un manque de personnel médical, M. [V] [O] a été placé à de nombreuses reprises pendant plusieurs semaines en isolement injustifié ; qu'il est contraire au principe de dignité du patient de maintenir M. [V] [O] dans un établissement en extrême pénurie médicale, alors même qu'une autre solution est proposée.

M. [M] [O] a ajouté que son fils est très influençable ; que la tutrice a un intérêt financier à ce qu'il demeure dans l'EPSM de la Sarthe ; que cet établissement où son fils est hospitalisé depuis des années, ne lui a rien apporté en terme de soins ; qu'il est 97ème au classement qualitatif des établissements de soins alors que l'établissement [8] à [Localité 7] est classé 16ème ; qu'il agit dans l'intérêt de son fils.

M. [V] [O] n'a pas comparu, signalé en fugue depuis le mercredi 24 avril à 12 heures.

Maître Goupille, son conseil, a rappelé qu'il n'est pas appelant de la décision du juge des libertés et de la détention ; qu'il s'en rapporte sur la compétence de ce magistrat pour statuer sur la demande de M. [M] [O]. Il a rappelé les termes du courrier rédigé par son client le 23 avril 2024 aux termes duquel il dit: ' je soussigné, désire vous faire part de mes projets, à savoir vivre dans un logement de type EHLI à Sablé ou logement autonome en vie indépendante. Je ne souhaite pas aller à [Localité 7], même si mon père m'oppresse pour aller à [Localité 7]. Il m'en parle au moins 3 fois par semaine'. Il a enfin fait référence aux projets visés par la mandataire judiciaire à la protection des majeurs qui répondent à ce souhait.

L'EPSM de la Sarthe, le Préfet de la Sarthe et la mandataire judiciaire à la protection des majeurs dûment convoqués, n'ont pas comparu.

Cette dernière a fait parvenir un courrier daté du 23 avril 2024 dans lequel elle indique que lors des différentes rencontres, M. [O] a toujours été constant dans son projet de vie, celui de vivre en Sarthe ; qu'il est travaillé sur deux projets distincts de logement accompagné d'une part et d'accueil en établissement médico social d'autre part ; qu'un transfert vers un établissement de soins hors département mettrait fin à ces projets.

Dans son avis écrit en date du 17 avril 2024, communiqué aux personnes présentes lors de l'audience, le représentant du Ministère public a conclu à la recevabilité de l'appel et à la confirmation de la décision critiquée. Subsidiairement, il a soutenu que M. [M] [O] n'a pas qualité à agir et que sa demande est irrecevable.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

Interjeté dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique, l'appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention par M. [M] [O] est recevable.

-Sur le bien-fondé de l'appel

Le juge des libertés et de la détention a rejeté la demande de transfert d'établissement présentée par M. [M] [O] au profit de son fils [V] [O] estimant que la décision du Tribunal des conflits du 3 juillet 2023 n'est pas transposable à la présente requête qui intervient en dehors de toute instance, visée à l'article L 3216-1 du Code de la santé publique, introduite en application des articles L 3211-12 et L 3211-12-1 du même code et que le juge des libertés et de la détention ne dispose que du contrôle de légalité et du bien fondé d'une mesure d'admission ou de maintien en soins sans consentement, sans disposer de la possibilité d'ordonner un transfert vers un autre établissement psychiatrique qui relève du pouvoir de gestion des autorités préfectorales ou médicales.

Aux termes des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 du Code de la santé publique, tel que rappelé par le Tribunal des conflits dans sa décision citée du 3 juillet 2023, 'le juge des libertés et de la détention a compétence pour contrôler de manière régulière et systématique ainsi que de manière facultative, à la demande notamment des personnes et de leur entourage, la poursuite des mesures de soins sans consentement prononcée et en ordonner la mainlevée'... et aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la santé publique, 'La régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre (admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent ; admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l'Etat et admission en soins psychiatriques des personnes détenues atteintes de troubles mentaux) ne peut être contestée que devant le juge judiciaire'.

Comme l'a justement souligné le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans, cette jurisprudence n'est pas transposable à la présente instance dans la mesure où aucune décision administrative n'a été prise concernant un possible transfert de M. [V] [O] vers un autre établissement ou une restriction de ses droits, le juge des libertés et de la détention ayant été saisi en première intention, non d'ailleurs par la personne hospitalisée ou son tuteur mais par son père.

Il n'appartient donc pas au juge judiciaire de statuer sur la demande de transfert présentée de sorte que la décision déférée doit être confirmée.

Les dépens de l'instance d'appel seront laissés à la charge de M. [M] [O].

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et mise à disposition au greffe,

DÉCLARONS recevable en la forme l'appel formé par M. [M] [O] ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 5 avril 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans ;

LAISSONS les dépens à la charge de M. [M] [O].

LE GREFFIER LA DÉLÉGUÉE

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA M.C. PLAIRE COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 24/00020
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;24.00020 ?
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