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14/03/2024 | FRANCE | N°21/01414

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 14 mars 2024, 21/01414


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B







LP/ILAF

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 21/01414 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E26H



jugement du 24 Mars 2021

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 14/04831





ARRET DU 14 MARS 2024





APPELANTS :



Mme [L] [S] [U] [R] veuve [F]

née le [Date naissance 20] 1943 à [Localité 34]

[Adresse 24]

[Localité 28]



M. [H] [F]

né le [Da

te naissance 22] 1967 à [Localité 37]

[Adresse 33]

[Localité 27]



Représentés par Me Vanina LAURIEN de la SELARL DELAGE BEDON LAURIEN HAMON, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Me Marc MONTI, avocat plaidant...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B

LP/ILAF

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 21/01414 - N° Portalis DBVP-V-B7F-E26H

jugement du 24 Mars 2021

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d'inscription au RG de première instance 14/04831

ARRET DU 14 MARS 2024

APPELANTS :

Mme [L] [S] [U] [R] veuve [F]

née le [Date naissance 20] 1943 à [Localité 34]

[Adresse 24]

[Localité 28]

M. [H] [F]

né le [Date naissance 22] 1967 à [Localité 37]

[Adresse 33]

[Localité 27]

Représentés par Me Vanina LAURIEN de la SELARL DELAGE BEDON LAURIEN HAMON, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Me Marc MONTI, avocat plaidant au barreau de CHARTRES

INTIMES :

Mme [C] [F] épouse [I]

née le [Date naissance 3] 1973 à [Localité 37]

[Adresse 40]

[Localité 29]

Représentée par Me François GAUTIER, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 2014069

Mme [M] [L] [E] [F]

née le [Date naissance 17] 1996 à [Localité 41]

[Adresse 26]

[Localité 30]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/005590 du 07/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)

M. [T] [O] [Z] [F]

né le [Date naissance 16] 1998 à [Localité 42]

[Adresse 21]

[Localité 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/005593 du 07/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)

Représentés par Me Pascale PARE-DUVAL, avocat au barreau du MANS - N° du dossier 718111

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 14 Décembre 2023, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme PLAIRE COURTADE, présidente de chambre et devant Mme PARINGAUX, conseillère qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PLAIRE COURTADE, présidente de chambre

Mme PARINGAUX, conseillère

Mme BOURGOUIN, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 14 mars 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Marie-Christine PLAIRE COURTADE, présidente de chambre et par Florence BOUNABI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

M. [O] [F] est décédé le [Date décès 25] 2002 laissant pour lui succéder :

- Mme [L] [R] son épouse, avec laquelle il était marié depuis le [Date mariage 18] 1966 sous le régime de la communauté réduite aux acquêts suivant contrat de mariage du 27 mai 1966, et bénéficiaire de l'usufruit de la succession de son époux, par donation consentie le 22 juin 1971, qu'elle a accepté aux termes d'un acte dressé le 7 septembre 2002 par maître [V], notaire à [Localité 38] (61) ;

- ainsi que leurs trois enfants communs, Mme [C] [F], épouse [I], M.'[H] [F] et M. [K] [F].

M. [K] [F] est décédé le [Date décès 12] 2018, laissant pour lui succéder ses enfants Mme [M] [F] et M. [T] [F].

Dépendent de la succession divers biens agricoles qui appartenaient en propre à M. [O] [F], constituant la [...] située sur la commune de [Localité 35] (Sarthe) et par extension sur la commune de [Localité 34] (Orne), comprenant des bâtiments d'habitation et d'exploitation et un ensemble de terres agricoles d'une superficie d'environ 24,5 hectares.

La [...] a été du vivant de M. [O] [F] donnée à bail rural à long terme à Mme [C] [F] ainsi qu'à son époux M. [P] [I], suivant acte reçu le 24 janvier 2000 par Maître [V], renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er'janvier 2018, jusqu'au 1er janvier 2027.

Dépend par ailleurs de la communauté ayant existé entre M. et Mme [F] une maison d'habitation située au [Adresse 24] (Sarthe).

Par actes d'huissier du 11 décembre 2014, Mme [C] [F] épouse [I] a assigné sa mère et ses frères en ouverture des opérations de partage de la succession, et a demandé par ailleurs l'attribution préférentielle des biens ruraux constituant la [...].

Par jugement du 19 avril 2016, le tribunal de grande instance du Mans a fait droit à la demande d'ouverture des opérations de partage de la succession de M.'[O] [F], a commis le président de la chambre interdépartementale des notaires pour le département de la Sarthe avec faculté de délégation à cet effet, et avant dire droit sur la demande d'attribution préférentielle, a ordonné une expertise confiée à Mme [W] [B] pour se prononcer sur la valeur des biens.

Dans son rapport du 14 février 2018 déposé le 21 février 2018, Mme [W] [B] a évalué les biens comme suit :

- bâtiments : 139 959 euros

- terres : 154 123,45 euros,

et compte tenu du renouvellement du bail à long terme pour 9 ans en 2018 et de l'âge des deux exploitants (45 et 44 ans), l'expert a évalué à 20 % l'abattement qui pourrait être appliqué par rapport à la valeur libre des biens.

Aux termes de ses dernières conclusions après expertise, Mme [C] [F] épouse [I] a repris sa demande d'attribution des biens ruraux composant la [...] pour la valeur de 235 266 euros, selon la valeur proposée par l'expert après application d'un abattement de 20 % tenant compte de ce que

les biens sont loués.

Elle a demandé que la somme de 235 266 euros soit payée pour partie par compensation avec la valeur de ses droits dans la succession de son père et pour le surplus, si nécessaire, au moyen d'un prêt bancaire qui lui a déjà été accordé.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] ont contesté les conclusions de l'expert judiciaire et ont sollicité l'annulation du rapport, faisant valoir que Mme [C] [F] épouse [I] a été condamnée dans le cadre d'une composition pénale pour usage et faux en écriture devant le délégué du procureur d'un document (une autorisation des époux [F] pour qu'elle procède à des travaux dans la [...]) présenté à l'expert.

Ils ont également conclu au débouté de la demande d'attribution préférentielle.

Mme [M] [F] et M. [T] [F], venant par représentation de leur père M. [K] [F], ont indiqué ne pas s'opposer à la demande d'attribution préférentielle formée par leur tante mais ont demandé que les biens soient évalués à 294 082,45 euros sans tenir compte d'un abattement de 20 % proposé par l'expert.

Par jugement en date du 24 mars 2021, le tribunal judiciaire du Mans a :

- reçu en leur intervention Mme [M] [F] et M. [T] [F] venant aux droits de leur père M. [K] [F] ;

- débouté Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] de leur demande en annulation du rapport d'expertise de Mme [B] ;

- attribué en pleine propriété à Mme [C] [F] épouse de M. [P] [I], née le [Date naissance 31] 1973 à [Localité 37], les biens immobiliers suivants formant la [...], divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles :

' commune de [Localité 35] (Sarthe), cadastrés section B, numéros [Cadastre 2], [Cadastre 23], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 19] ;

' commune de [Localité 34] (Orne), cadastrés section 0, n° [Cadastre 13] ;

- dit que ces biens seront attribués à titre de partage à Mme [C] [F] épouse [I], pour la valeur de 235 266 euros, à charge de soulte s'il y a lieu ;

- renvoyé les parties devant le notaire commis ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage, qui comprendront les frais d'expertise judiciaire; mais déboute les parties de leurs demandes d'indemnité en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

- accordé aux avocats des parties le droit de distraction prévu par l'article 699 du code de procédure civile.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour d'appel d'Angers le 14 juin 2021, Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] ont interjeté appel de cette décision en ses dispositions qui ont dit : 'reçoit en leur intervention Mme'[M] [F] et M. [T] [F] venant aux droits de leur père [K] [F] ; déboute Mme veuve [F] et M. [H] [F] de leur demande en annulation du rapport d'expertise de Mme [B]; attribue en pleine propriété à Mme [C] [L] [J] [F] épouse de Mr [P] [I], née le [Date naissance 31] 1973 à [Localité 37] les biens immobiliers suivants formant la [...] divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles ; commune de [Localité 35] (Sarthe)cadastrés section B numéros [Cadastre 2],[Cadastre 23],[Cadastre 4],[Cadastre 5],[Cadastre 6],[Cadastre 7],[Cadastre 8],[Cadastre 9],[Cadastre 10],[Cadastre 11],[Cadastre 14],[Cadastre 15] et [Cadastre 19] - commune de [Localité 34] (Orne) cadastrés section 0 n°[Cadastre 13] ; dit que ces biens seront attribués à titre de partage à Mme [C] [I] née [F] pour la valeur de 236 266 euros, à charge de soulte, s'il y a lieu ; renvoie les parties devant le notaire commis ; ordonne l'exécution provisoire ; ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage, qui comprendront les frais d'expertise judiciaire, mais déboute les parties de leurs demandes d'indemnité en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ; accorde aux avocats des parties le droit de distraction prévu par l'article 699 du Code de procédure civile'.

Mme [C] [F] épouse [I] a constitué avocat le 24 juin 2021.

Mme [M] [F] et M. [T] [F] ont constitué avocat commun le 5 juillet 2021.

Par ordonnance du 19 juillet 2023, le conseiller chargé de la mise en état, saisi par Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F], a notamment :

- rejeté les demandes de nouvelle expertise et de sursis à statuer subséquent en ce qu'elles sont formées devant le conseiller de la mise en état et non devant la cour ;

- condamné in solidum M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] à payer à Mme [C] [F] épouse [I] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] aux dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 29 novembre 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 16'novembre 2023, Mme [L] [R], veuve [F] et M. [H] [F], demandent à la présente juridiction de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire du Mans le 24 mars 2021 en ce qu'il a :

' attribué en pleine propriété à Mme [C] [L] [J] [F] épouse de M. [P] [I], les biens immobiliers suivants formant la [...] divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles sis commune de [Localité 35] (72) cadastrés section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 23], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7] , [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 19] ; et Commune de [Localité 34] (61) cadastrés section O n° [Cadastre 13] ;

' dit que ces biens seront attribués à titre de partage à Mme [C] [I] née [F] pour la valeur de 236 266 euros, à charge de soulte s'il y a lieu ;

Statuant à nouveau :

Avant dire droit :

- ordonner une mesure d'expertise concernant l'ensemble des biens immobiliers constituant la [...] située commune de [Localité 35] et par extension commune de [Localité 34] comprenant :

* divers bâtiments à usage d'habitation et d'exploitation ;

* cour avec puits ;

* jardin ;

* hangars ;

* diverses parcelles de terres ;

A savoir :

¿ commune de [Localité 35] :

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 2], 40 a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 4], 45a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 5],2ha 89a 50ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 6], 2ha 09a 40ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 7], 32a 80ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 8], 19a 30ca ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 9], 3ha 97a 20ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 10], 5ha 26a 80ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 11], 2ha 60a 90ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 14] 2ha 12ca 05a ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 15], 2ha ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 23], 1ha 44a 04ca ;

' [Adresse 32], section B n°[Cadastre 19], 22a ;

¿ commune de [Localité 34] :

' section O n°[Cadastre 13] au lieudit « [...] », 4ha 97a 70ca ;

- désigner tel expert qu'il plaira au conseiller avec pour mission de :

* se faire remettre tous documents utiles et entendre les parties ainsi que tous sachant ;

* décrire les biens immobiliers concernés, en précisant leur situation les uns par rapport aux autres ;

* donner son avis motivé sur la valeur actuelle des biens immobiliers concernés, en distinguant le bâti et le non bâti et, s'agissant des biens immobiliers objet du bail consenti le 24 janvier 2000 au profit de Mme [C] [F] et de son époux M. [P] [I], en indiquant leur valeur libre de toute occupation ;

* se prononcer, le cas échéant, sur les conséquences des travaux réalisés par Mme [C] [F] et de son époux M. [P] [I] sur la valeur des immeubles dépendant de la succession ;

* faire connaître dans son avis toutes les informations qui apportent un éclaircissement sur les questions à examiner ;

* se prononcer sur l'impact des travaux réalisés par Mme [C] [F] et de son époux M. [P] [I] sur la valeur vénale des biens dépendant de la succession ;

* répondre, le cas échéant, aux dires des parties ;

- fixer le montant de la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert, laquelle sera mise à la charge de l'indivision successorale ;

Par conséquent :

- surseoir à statuer sur la question de la valeur des biens attribués dans l'attente du rapport de l'expert judiciaire tel que sollicité auprès du conseiller de la mise en état, mais dès à présent dire que le bien sera attribué à sa valeur libre ;

En tout état de cause ;

- attribuer en nue-propriété à Mme [C] [F] épouse de M. [P] [I] les biens immobiliers suivants formant la [...] divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles sis commune de [Localité 35] (72) cadastrés section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 23], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7] ; [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 19] ; et Commune de [Localité 34] (61) cadastrés section O n° [Cadastre 13] ;

- dire et juger n'y avoir lieu à attribution préférentielle de la parcelle sise commune de [Localité 35] cadastrée section B n° [Cadastre 14] ;

- débouter Mme [C] [F] épouse [I], Mme [M] et M. [T] [F] de toute autres demandes plus amples ou contraires ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

- condamner Mme [C] [F] épouse [I], au besoin in solidum avec tout autre partie succombante, à verser à M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage qui comprendront les frais d'expertise judiciaire.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 17'novembre 2023, Mme [M] [F] et M. [T] [F], demandent à la présente juridiction de :

- déclarer M. [H] [F] et Mme [L] [R], veuve [F] irrecevables, et en tout cas mal fondés en leurs prétentions ;

- les débouter de leurs demandes en cause d'appel ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire du Mans le 24 mars 2021 en toutes ses dispositions, à l'exception cependant de la valeur des biens ;

Sur l'appel incident :

- fixer à 294 082,45 appel, la valeur des biens sis :

¿ commune de [Localité 35] :

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 2], 40 a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 4], 45a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 5],2ha 89a 50ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 6], 2ha 09a 40ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 7], 32a 80ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 8], 19a 30ca ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 9], 3ha 97a 20ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 10], 5ha 26a 80ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 11], 2ha 60a 90ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 14] 2ha 12ca 05a ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 15], 2ha ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 23], 1ha 44a 04ca ;

' [Adresse 32], section B n°[Cadastre 19], 22a ;

¿ commune de [Localité 34] :

' section O n° [Cadastre 13] au lieudit « [...] », 4ha 97a 70ca ;

A titre subsidiaire :

- fixer à 10 %, le coefficient d'abattement applicable à la valeur des biens faisant l'objet de l'attribution préférentielle au profit de Mme [C] [I] ;

- condamner M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] à verser une amende civile en raison de l'abus dans l'exercice de leur droit d'appel ;

- les condamner aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 21 novembre 2023, Mme [C] [F] épouse [I], demande à la présente juridiction de :

- déclarer recevables mais mal fondés M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] en leur appel du jugement contradictoire et en premier ressort en date du 24 mars 2021 rendu par le tribunal judiciaire du Mans en leurs prétentions contraires aux présentes ;

- les débouter en conséquence de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- déclarer recevables mais mal fondés Mme [M] et M. [T] [F] en leur appel du jugement contradictoire et en premier ressort en date du 24 mars 2021 rendu par le tribunal judiciaire du Mans en leurs prétentions contraires aux présentes ;

- les débouter en conséquence de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- confirmer le jugement contradictoire et en premier ressort rendu le 24 mars 2021 par le tribunal judiciaire du Mans (N° RG 14/04831) en ce qu'il a :

' reçu en leur intervention Mme [M] et M. [T] [F] ;

' débouté M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] de leur demande en annulation du rapport d'expertise de Mme [W] [B] ;

' attribué en pleine propriété à Mme [C] [F] épouse [I] de M.'[P] [I], née le [Date naissance 31] 1973 à [Localité 37] (72) les biens immobiliers suivants formant la [...], divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles situés :

* commune de [Localité 35] (Sarthe), cadastrés section B, numéros [Cadastre 2], [Cadastre 23], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 19] ;

* commune de [Localité 34] (Orne), cadastrés section O, n° [Cadastre 13] ;

avec application d'un coefficient d'abattement de 20% sur la valeur des biens attribués pour exploitation agricole aliénée par bail rural ;

' renvoyé les parties devant le notaire commis ;

' ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage qui comprendront les frais d'expertise judiciaire ;

Et statuant à nouveau :

A titre subsidiaire :

- attribuer en nue-propriété à Mme [C] [F] épouse de M. [P] [I], née le [Date naissance 31] 1973 à [Localité 37] (72), les biens immobiliers suivants formant la [...], divers bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres agricoles situés :

' commune de [Localité 35] (Sarthe), cadastrés section B, numéros [Cadastre 2], [Cadastre 23], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 19] ;

' commune de [Localité 34] (Orne), cadastrés section O, n° [Cadastre 13] ;

avec application d'un coefficient d'abattement de 20 % sur la valeur des biens attribués pour exploitation agricole aliénée par bail rural ;

Avant dire plus amplement droit :

- ordonner une mesure d'expertise judiciaire des biens immobiliers constituant la [...] située commune de [Localité 35] (72) et de [Localité 34] (61) comprenant :

* divers bâtiments à usage d'habitation et d'exploitation ;

* cour avec puits ;

* jardin ;

* hangars ;

* diverses parcelles de terres figurant au cadastre comme suit :

¿ commune de [Localité 35] :

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 2], 40 a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 4], 45a ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 5],2ha 89a 50ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 6], 2ha 09a 40ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 7], 32a 80ca ;

' au lieudit « [...] », section B, n°[Cadastre 8], 19a 30ca ;

' au lieudit « [...] », section B n°[Cadastre 9], 3ha 97a 20ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 10], 5ha 26a 80ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 11], 2ha 60a 90ca ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 14] 2ha 12ca 05a ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 15], 2ha ;

' au lieudit « [...] » section B n°[Cadastre 23], 1ha 44a 04ca ;

' [Adresse 32], section B n°[Cadastre 19], 22a ;

¿ commune de [Localité 34] : section O n°[Cadastre 13] au lieudit « [...]», 4ha 97a 70ca ;

- désigner tel expert qu'il plaira à la Cour commettre avec pour mission de :

' déterminer la valeur actuelle des biens immobiliers constituant la [...] située commune de [Localité 35] et de [Localité 34] ;

' se faire remettre tous documents utiles et entendre les parties ainsi que tout sachant ;

' décrire les biens immobiliers concernés, en précisant leur situation les uns par rapport aux autres ;

' donner son avis motivé sur la valeur actuelle des biens immobiliers concernés, en distinguant le bâti et le non bâti et s'agissant des biens immobiliers objet du bail, en indiquant leur valeur tenant compte de l'existence d'un bail ;

' fixer le montant de la provision destinée à l'expert qui sera mise à la charge de l'indivision successorale ;

En tout état de cause :

- condamner in solidum M. [H] [F] et Mme [L] [R] veuve [F] à payer à Mme [C] [F], épouse [I] une somme de 6 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage qui comprendront les frais d'expertise judiciaire.

Pour un exposé plus ample des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions sus visées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour d'appel

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] n'ont pas repris dans le dispositif de leurs dernières conclusions du 16 novembre 2023 des contestations initiales du jugement du 24 mars 2021 formalisées dans leur déclaration d'appel du 14 juin 2021 relatives à la réception de l'intervention volontaire de Mme [M] [F] et de M. [T] [F] venant aux droits de leur père M. [K] [F], au débouté de leur demande en annulation du rapport d'expertise de Mme [B], au prononcé de l'exécution provisoire, à l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage comprenant les frais d'expertise judiciaire, au débouté des parties de leurs demandes d'indemnité en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile et à l'octroi aux avocats des parties du droit de distraction prévu à l'article 699 du Code de procédure civile.

Ces prétentions conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile sont par suite réputées abandonnées et la cour n'en est pas saisie.

Sur les demandes d'expertise

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] demandent qu'une nouvelle expertise confiée à tel expert qu'il plaira à la cour d'appel, soit ordonnée pour déterminer la valeur de l'ensemble des biens immobiliers constituant la [...].

Ils soutiennent que la valeur retenue par le premier juge fixée par l'expert dans son rapport qui remonte au 14 février 2018 avec une valeur libre à 294 082,45 euros et après abattement à 235 266 euros n'est plus pertinente, puisque que depuis 5 ans des faits nouveaux sont survenus susceptibles d'influer sur la valeur vénale de l'ensemble.

Principalement la crise sanitaire du Covid qui a entraîné une hausse nationale du prix des terres agricoles, ce dont atteste l'évolution des biens comparables du marché local, comme la ferme de '[...]' située à 400 mètres de celle de '[...]', vendue le 27 janvier 2022 pour la somme totale de 370 000 euros, bien que plus petite, ayant moins de cachet, et dont les 25 ha de terre sont eux non drainées donc de moindre qualité.

Les appelants précisent en outre que la ferme de '[...]', autrefois exploitée par feu M. [K] [F], est le lieu d'implantation depuis 2010 d'un laboratoire de fabrication de glaces ' [39]', mais que Mme [M] [F] et M. [T] [F] ne rapportent pas la preuve des 100 000 euros de travaux qui auraient été réalisés par leurs parents pour ce bien.

Mme [L] [R] veuve [F] et M.'[H] [F] considèrent qu'une nouvelle expertise à la lumière de cet élément de comparaison dont ne disposait pas Mme [B] en 2018 permettrait ainsi d'apprécier l'état actuel de la [...] dont Mme [C] [F] épouse [I] tente de minimiser la valeur vénale pour en obtenir l'attribution au plus bas prix en dépit des travaux réalisés (circuit de géothermie, réaménagement intérieur de l'habitation), même si la mauvaise qualité de leur réalisation par les époux [I] locataires et leur manque d'entretien général du bien est à déplorer.

Les appelants soulignent qu'ils ne sont animés par aucune volonté dilatoire comme reproché par Mme [C] [F] épouse [I] puisqu'il n'y a pas d'opposition de principe à sa demande d'attribution du bien, le litige ne portant que sur la nature de cette attribution, et sur la retenue ou non d'un abattement de valeur.

Ils relèvent également que Mme [B] a tenu compte pour remplir sa mission d'évaluation de factures de travaux présentées par Mme [C] [F] épouse [I] comme ayant été faits avec l'autorisation de la bailleresse et des nus-propriétaires alors qu'elle a produit une fausse autorisation datée du 20'septembre 2000, fait pour lequel elle a été condamnée dans le cadre d'une composition pénale validée par ordonnance du 25 mai 2018, et qu'il est aussi nécessaire de connaître l'étendue des dégradations occasionnées au bien du fait de ses manquements en sa qualité de preneur du baux rural.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] estiment enfin que le rapport de Mme [B] est incomplet puisqu'il ne détermine aucune valeur pour la parcelle de bois cadastrée section B n°[Cadastre 14] à [Localité 35] qui, même si elle ne fait l'objet d'aucune demande d'attribution préférentielle, doit être prise en compte dans l'actif de la succession.

Mme [C] [F] épouse [I] demande la réalisation d'une nouvelle expertise mais avec un contenu différent de celui sollicité par les appelants.

Elle dénonce l'attitude dilatoire de sa mère et de son frère, et la faiblesse de leur argumentation tendant à présenter le sort de le ferme de '[...]' comme particulièrement éclairante sur la valeur en comparaison sous-estimée des biens litigieux, alors que si ces derniers sont de qualité agricole identique, la maison d'habitation et les deux dépendances de la ferme de '[...]' sont eux en très bon état pour avoir bénéficié de travaux de restauration (en 2008 des murs à l'ancienne avec chaux, installation d'une chaudière à fioul, chauffage par géothermie depuis 2013, fosse septique aux normes, isolation en fibre de bois, couverture en ardoises d'Espagne), à la différence de la [...] comme observé par Mme [B].

Mme [C] [F] épouse [I] rappelle qu'elle occupe les lieux avec son époux en qualité de preneurs à bail rural et qu'il est indispensable que la nouvelle expertise ne se prononce pas sur les conséquences des travaux qu'ils ont pu réaliser sur la valeur du bien ou sur les éventuelles dégradations commises qui ne relèvent que des relations preneurs-bailleurs en matière de bail rural et donc de la compétence du tribunal paritaire des baux ruraux.

Elle précise d'ailleurs que par ordonnance du 18 novembre 2022, le tribunal paritaire des baux ruraux statuant en référé a ordonné une mesure d'expertise judiciaire toujours en cours, et qui n'a donné lieu à aucun pré-rapport qui permettrait aux appelants d'imputer la responsabilité de désordres, dont la matérialité n'est pas même établie, aux époux [I].

Mme [M] [F] et M. [T] [F] s'opposent aux demandes d'expertise.

Ils estiment que les appelants ont fait montre d'une attitude procédurière dilatoire et qu'ils sont mal venus de prétendre que les valeurs retenues cinq ans auparavant seraient devenues obsolètes, et alors qu'ils ne démontrent pas en quoi la ferme de '[...]' qui a fait l'objet de travaux de renovation pour 100 000 euros par leurs parents, serait d'une valeur comparable.

Mme [M] [F] et M. [T] [F] considèrent enfin que l'expertise confiée à Mme'[A] par le tribunal paritaire des baux ruraux du Mans éclairera sur la réalité de l'état de la [...] et de connaître la part des travaux due par la bailleresse (leur grand-mère) et celle due par les preneurs, leur tante et leur oncle par alliance.

Sur ce,

L'article 829 du code civil énonce que : 'En vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant. Cette date est la plus proche possible du partage'.

L'article 832-4 du code civil dispose que: 'Les biens faisant l'objet de l'attribution sont estimés à leur valeur à la date fixée conformément à l'article 829".

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] se basent sur un rapport dénommé 'L'essentiel des marchés fonciers ruraux' établi par la Fédération Nationale des SAFER en 2022 pour soutenir que la valeur de l'ensemble agricole de la [...] a nécessairement connue une forte augmentation depuis la réalisation de l'expertise de Mme [B] en 2018.

Ce document mentionne en page 6 à la rubrique 'Marché des terres et prés' : 'la valeur de la production agricole se redresse dans un contexte de hausse des prix qui compense la baisse des volumes dans certaines productions (céréales, viande). Après le sursaut de 2021 consécutif à la fermeture de 2020 due à la crise sanitaire, de nouveaux records sont atteints en nombre de transactions en surface et en valeur. Les hausses sont nettement moins soutenues qu'en 2021".

Et à la rubrique 'Marché des maisons à la campagne' : 'le marché immobilier ancien, bien que toujours élevé, confirme son inversion en 2022. Les taux d'intérêts amorcent une remontée régulière en début d'année. Après deux années de vive progression le marché s'inverse du fait d'un ralentissement au second trimestre'.

Ce rapport de portée générale sur les grandes tendances nationales ne fait donc pas le constat d'une augmentation spectaculaire pérenne des biens agricoles passées les deux années qui ont suivi la crise sanitaire de 2020, mais au contraire souligne, pour le type de biens objets du litige, une chute voire un inversement des tendances depuis 2021.

D'autre part, l'unique bien qu'ils entendent soumettre à comparaison avec celui objet du litige, ne présente à l'évidence pas les mêmes caractéristiques quant à la partie habitation, qui a fait l'objet de nombreux travaux de rénovation et d'aménagement par M. [K] [F] et son épouse Mme [X] [D], dont celle-ci atteste sur l'honneur de la réalisation à hauteur de 100 000 euros.

Par ailleurs, l'acte de vente de l'ensemble immobilier n'est pas produit aux débats de sorte que la surface habitable, la qualité des terres agricoles le composant et leur superficie exacte, et la plus-value éventuellement apportée par l'existence d'un laboratoire à glaces, ne sont pas connues.

A contrario, Mme [B] s'est livrée à un examen circonstancié du corps de ferme bâti comprenant une habitation et divers bâtiments d'exploitation situés sur les communes de [Localité 35] et de [Localité 34] pour relever que :

- pour l'habitation : le rez-de-chaussée composé d'une cuisine/salle à manger/salon, d'une pièce en cours de travaux (ancien fournil), et le premier étage composé de quatre chambre, des WC et d'une salle de bains, se trouvaient dans un état moyen, à bon pour la seule chambre n° 4, avec une cave et un grenier, et avaient après pondération d'un prix/m2 moyen du marché, une valeur vénale de 89 355 euros ;

- pour les dépendances : un bâtiment façon préau, un bâtiment à usage agricole, une salle de traite et d'étable, un bâtiment à usage de stabulation, un bâtiment à usage de stabulation pour génisses, un fournil et pièce/laboratoire, un hangar /remise, avaient selon la même méthode de calcul, une valeur vénale de 50'604''euros ;

soit un total de 139 959 euros.

Il est à noter d'autre part que la condamnation de Mme [C] [F] épouse [I] pour avoir falsifié et utilisé une autorisation de faire des travaux prétendument obtenue en 2000 de ses deux parents, est sans conséquence sur l'analyse de fond à laquelle s'est livrée l'expert, puisqu'elle a circonscrit sa mission à l'examen de la matérialité desdits travaux, indépendamment de savoir s'ils étaient ou non valablement autorisés par les bailleurs, et sans imputer à l'une ou l'autre des parties la récupération de leur coût, ce qui relève du contentieux des rapports entre bailleurs et preneurs de baux ruraux dont le tribunal paritaire des baux ruraux du Mans est actuellement saisi.

De même, Mme [B] sur la base de son examen in concreto des parcelles de terres agricoles, (hors bois pour la parcelle cadastrée section B n° [Cadastre 14] de 2 ha 12'a 05 a dans l'attente du rapport de l'expert forestier), d'une surface totale de 24 ha 51 a 15 ca, et à l'aide notamment des informations provenant de la SAFER locale de Normandie qualifiant la mobilité du foncier comme rare sur ce territoire et par comparaison avec deux ventes pour des biens similaires réalisées en 2017, a estimé le total de leur valeur vénale libre à 154 123,45 euros.

Ainsi celles des parties qui sollicitent la réalisation d'une nouvelle expertise ne démontrent pas la survenance depuis 2018 d'éléments déterminant susceptibles d'avoir modifié la pertinence économique des conclusions de Mme [B].

Et le notaire en charge des opérations de compte liquidation et partage de la succession dispose de la qualification juridique et technique, outre son implantation en Sarthe garantissant une connaissance affinée du marché local, pour se prononcer sur une l'évaluation de la parcelle cadastré section B n° [Cadastre 14]

Aussi Mme [L] [R] veuve [F], M. [H] [F] et Mme [C] [F] seront déboutés de leur demande tendant à la réalisation d'une seconde expertise.

Sur l'attribution préférentielle

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] demandent que les biens immobiliers formant la [...] soient attribués en nue-propriété à Mme [C] [F] épouse [I] et qu'il soit dit n'y avoir lieu à lui attribuer préférentiellement la parcelle cadastrée section B n°[Cadastre 14].

Ils soutiennent qu'en attribuant ces biens en pleine propriété à Mme [C] [F] épouse [I], alors que Mme [L] [R] veuve [F] bénéficie, suivant donation du 22'juin 1971 de son époux acceptée le 7 septembre 2002, de l'usufruit de l'universalité des biens dépendant de la succession, le tribunal lui a accordé un droit qui excède celui dont dispose la succession.

Les appelants exposent que si la jurisprudence ne rend pas irrecevable la demande d'attribution préférentielle en présence d'un usufruit, elle doit être compatible avec les droits de ce dernier.

Or, en l'espèce, l'attribution en pleine propriété décidée par le premier juge implique nécessairement l'entrée en jouissance dès le partage effectif et crée une difficulté nouvelle à savoir l'impossibilité de signer un acte de partage du vivant de Mme'[L] [R] veuve [F] sauf à procéder en violation de ses droits d'usufruitière.

Ils considèrent en outre que l'attribution préférentielle en nue-propriété ne nuit aucunement à Mme [C] [F] épouse [I] qui occupe le bien en qualité de titulaire du bail rural et qui pourra en devenir pleinement propriétaire au décès de sa mère lorsque l'usufruit en application de l'article 617 du code civil s'éteindra.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] demandent que soit exclue de l'attribution préférentielle la parcelle de bois cadastrée section B n° [Cadastre 14] aux motifs qu'elle n'a pas été évaluée par Mme [B], restée dans l'attente du rapport de l'expert forestier, et que ce bien n'est pas compris dans le bail rural dont Mme [C] [F] épouse [I] est titulaire et qu'il ne constitue pas par ailleurs une unité économique indissociable de l'exploitation.

Mme [C] [F] épouse [I] demande à titre principal la confirmation de l'attribution préférentielle en pleine propriété décidée par le tribunal de l'ensemble des biens y compris la parcelle bois section B n°[Cadastre 14] et à titre subsidiaire l'attribution préférentielle en nue-propriété seulement.

Elle explique que sa demande est fondée par son activité professionnelle agricole sur la [...], et que la parcelle forestière lui est utile pour la fourniture du bois qu'elle emploie pour la chauffe d'un four à pain, 25 stères par an, et qu'elle loue d'ailleurs depuis 23 ans une parcelle de la même composition cadastrée B [Cadastre 2].

Mme [C] [F] épouse [I] explique en outre être en capacité de payer la soulte pour partie en compensation de la valeur de ses droits sur la succession de son père et à l'aide d'un prêt de 200 000 euros obtenu en son principe du [36].

Mme [M] [F] et M. [T] [F] demandent la confirmation du jugement observant que les autres parties se rejoignent sur le principe d'une l'attribution préférentielle, et qu'il appartiendra au notaire d'établir l'acte de partage selon la nature des droits de chacun dans la succession.

Sur ce,

Aux termes de l'article 831 du code civil, tout héritier copropriétaire, peut demander l'attribution préférentielle par voie de partage, à charge de soulte, s'il y a lieu, de toute entreprise ou partie d'entreprise agricole, ou quote-part indivise d'une telle entreprise, même formée pour une part de bien, dont il était déjà propriétaire ou copropriétaire avant le décès, à l'exploitation duquel il participe ou a participé effectivement, la condition de participation pouvant être ou avoir été remplie par son conjoint ou ses descendants.

L'article 833 du code civil énonce que les dispositions des articles 831 à 832-4 profitent au conjoint ou à tout héritier appelé à succéder en vertu de la loi, qu'il soit copropriétaire en pleine propriété ou en nue-propriété.

L'article 885 du code civil dispose que : 'Chacun des cohéritiers est personnellement obligé, à proportion de son émolument, d'indemniser le cohéritier évincé de la perte qu'il a subie, évaluée au jour de l'éviction'.

L'attribution préférentielle ne constitue qu'une modalité du partage, au même titre que la formation de lots suivie du tirage au sort ou de la licitation, les biens attribués par préférence sont donc placés dans le lot de l'attributaire et imputés sur ses droits à concurrence de leur valeur.

Le jugement accordant l'attribution préférentielle ne confère pas à celui qui en bénéficie la propriété des biens qui en sont l'objet et ce n'est qu'au terme du partage que se produit l'attribution privative de propriété (Civ 1ère 20 décembre 1976 ).

Et jusqu'à la date du partage, les fruits produits par le bien qui a fait l'objet de l'attribution préférentielle appartiennent à l'indivision (Civ 1ère 11 janvier 1977).

En l'espèce, Mme [C] [F] épouse [I] remplit les conditions légales pour solliciter l'attribution préférentielle de la [...] puisqu'elle est avec son époux titulaire d'un bail rural consenti le 24 janvier 2020, toujours en cours, et qu'elle participe effectivement et personnellement à l'exploitation agricole.

Il est en outre justifié d'inclure dans les biens objets de l'attribution préférentielle la parcelle de bois section B n° [Cadastre 14] dont la nature forestière contribue à l'exploitation des parcelles de terres voisines.

Elle est également héritière de son père et copropriétaire des biens immobiliers agricoles.

Cette attribution n'est cependant pas de plein droit et relève de l'appréciation du juge quant aux intérêts en présence.

La capacité financière de Mme [C] [F] épouse [I] à pouvoir s'acquitter d'une soulte n'est sujette à aucune contestation.

L'attribution préférentielle à Mme [C] [F] épouse [I] de l'ensemble agricole de la [...] en pleine propriété est donc compatible avec le droit à usufruit sur l'intégralité des biens de sa mère Mme [L] [R] veuve [F] obtenu par la donation de son époux du 22 juin 1971, la répartition de leurs droits dans la succession et l'attribution privative de propriété ne s'opérant à l'issue du partage dont le notaire est en charge de la réalisation.

Par suite le jugement contesté sera confirmé.

Sur l'abattement de 20 %

Mme [M] [F] et M. [T] [F] demandent que compte tenu de la valeur retenue par Mme [B], les immeubles situés à [Localité 35] et celui situé à [Localité 34] soient évalués à 294 082,45 euros sans retenir un coefficient d'abattement de 20 %, les biens n'étant certes pas libres de preneurs mais ces derniers ayant une qualité particulière puisque leur tante est aussi héritière du bien.

A titre subsidiaire ils demandent que le coefficient d'abattement n'excède pas 10 %.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] forment des demandes principale et subsidiaire identiques et sur le même fondement.

Mme [C] [F] épouse [I] demande la confirmation du jugement qui a retenu l'abattement de 20 % proposé par l'expert.

Elle fait état de la jurisprudence qui comme dans le cas d'espèce, lorsqu'une exploitation agricole fait l'objet dans un partage d'une attribution préférentielle au profit d'un héritier titulaire avec son conjoint d'un bail rural retient que cette attribution n'entraîne, par l'effet de la réunion sur la tête de l'héritier des qualités de propriétaires et de locataire, que la disparition du bail qui a été consenti, de sorte que le conjoint de l'héritier demeurant titulaire du bail rural, l'exploitation ne peut être évaluée comme libre de toute occupation.

Sur ce,

Mme [B] a appliqué un abattement de 20 % sur la valeur vénale libre de l'exploitation agricole en raison de l'existence d'un bail rural en date du 24 janvier 2000 conclu pour une durée de 18 ans, renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2018 jusqu'au 1er janvier 2027 dont les bénéficiaires, Mme'[C] [F] épouse [I] et M. [P] [I] au regard de leur âge respectif 45 et 44 ans, ont encore vocation à profiter sans perspective d'une cessation prochaine d'activité.

Le quantum de cet abattement, initialement évoqué dans son pré-rapport du 26'octobre 2017 à hauteur de 30 % par l'expert, qu'il a ramené après réception des dires des parties à 20 %, est conforme à l'usage en cette matière compte tenu de ce qu'il fait perdre au bien une partie de son attractivité marchande, et ce même si Mme [C] [F] épouse [I] est attributaire du bien, dans la mesure où elle est co-titulaire du bail rural, et que son conjoint M. [P] [I] qui n'a pas la qualité d'héritier demeurera titulaire du bail rural, le rendant non libre de toute occupation ( Civ 1ère 6 novembre 2013).

Par suite le jugement contesté de ce chef sera confirmé.

Sur l'amende civile

Mme [M] [F] et M. [T] [F] demandent que les appelants soient condamnés à payer une amende civile en raison de l'abus dans l'exercice de leur droit d'appel.

Ils considèrent que cette attitude doit être sanctionnée, l'affaire étant pendante depuis le 11 décembre 2014, et la multiplication de leurs actes de procédures dilatoires les ayant contraints à intervenir en lieu et place de leur père M. [K] [F] décédé en cours de procédure.

Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] concluent au débouté de la demande adverse au motif qu'elle n'est fondée sur aucune caractérisation d'une faute ou d'un abus de leur part qui ne se présume pas par le seul fait de multiplier les actes de procédures.

Ils soutiennent que cette demande est d'autant plus incongrue que les intimés forment eux-mêmes un appel incident sur la question de l'abattement appliqué aux biens litigieux, et que l'action des appelants sert aussi leurs intérêts puisqu'elle tend à obtenir une valorisation au plus juste et à une date la plus proche du partage.

Mme [C] [F] épouse [I] ne développe pas de conclusions sur ce point.

Sur ce,

L'article 32-1 du code de procédure civile énonce que : 'Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés'.

Il est de jurisprudence constante que le caractère infondé des allégations formulées avec insistance, tant en première instance qu'en cause d'appel, ne suffit pas à caractériser une faute ayant fait dégénérer en abus le droit d'exercer une voie de recours.

Relever appel pour ne faire valoir que les moyens déjà avancés devant les premiers juges et rejetés par ceux-ci ne caractérise aucun abus du droit de saisir la juridiction du second degré pour statuer en fait et en droit sur la chose jugée en première instance.

Par ailleurs le nombre et la durée des procédures, même générateurs d'un préjudice pour le défendeur, ne suffisent pas à caractériser la faute du demandeur.

En l'espèce, il n'est rapporté ni l'existence d'une mauvaise foi patente, ni d'une intention exclusivement dilatoire qui animeraient les appelants dans leur action judiciaire, alors qu'ils ont un intérêt à agir pour garantir l'étendue de leurs droits patrimoniaux respectifs.

Par suite, Mme [M] [F] et M. [T] [F] seront déboutés de leur demande tendant à voir prononcer une amende civile à l'encontre de Mme [L] [R] veuve [F] et de M. [H] [F].

Sur les frais et dépens

Les appelants qui succombent en leurs demandes seront condamnés in solidum à payer la somme de 2 000 euros à Mme [C] [F] épouse [I] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement rendu le 24 mars 2021 par le tribunal judiciaire du Mans en toutes ses dispositions contestées ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE Mme [L] [R] veuve [F], M. [H] [F] et Mme'[C] [F] épouse [I] de leurs demandes d'expertise ;

DIT que le notaire commis pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage de la succession devra se prononcer sur la valeur vénale de la parcelle de bois cadastrée section B n°[Cadastre 14] ;

DÉBOUTE Mme [M] [F] et M. [T] [F] de leur demande tendant à voir condamnés Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] au paiement d'une amende civile ;

CONDAMNE in solidum Mme [L] [R] veuve [F] et M. [H] [F] à payer à Mme [C] [F] épouse [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

DIT que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

F. BOUNABI M.C. PLAIRE COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 21/01414
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;21.01414 ?
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