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22/06/2023 | FRANCE | N°23/00018

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 22 juin 2023, 23/00018


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 18



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 09 Juin 2023



N° RG 23/00018 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FFJ5



ORDONNANCE

DU 22 JUIN 2023



Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,



Statuant sur l'appel formé par :



Madame [T] [U]

e le 07 Avril 1969 à [Localité 8] (57)

[Adresse 3]

[Localité 4]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de la Sarthe



Comparante assistée de Me Marie-pierre MPIGA VOUA OFOUNDA, avoca...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 18

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 09 Juin 2023

N° RG 23/00018 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FFJ5

ORDONNANCE

DU 22 JUIN 2023

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [T] [U]

née le 07 Avril 1969 à [Localité 8] (57)

[Adresse 3]

[Localité 4]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de la Sarthe

Comparante assistée de Me Marie-pierre MPIGA VOUA OFOUNDA, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉ A LA CAUSE :

Monsieur LE PREFET DE LA SARTHE

ARS - département des soins psychiatriques sans consentement

[Adresse 1]

[Localité 2]

Non comparant, ni représenté,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 21 Juin 2023, il a été indiqué que la décision serait prononcée le 22 Juin 2023, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par arrêté du Préfet de la Sarthe en date du 04 juin 2023, Mme [T] [U], née le 07 avril 1969 à [Localité 8] (57), a été admise jusqu'au 02 juillet 2023 inclus en soins psychiatriques contraints sous la forme d'une hospitalisation complète à l'Etablissement public de Santé Mentale de la Sarthe situé à [Localité 5].

Cette décision a fait suite à une mesure d'admission provisoire prescrite par le maire de [Localité 6] le 02 juin 2023 au visa d'un certificat médical dressé à même date par le docteur [O] [R], praticien des urgences du Centre Hospitalier de cette commune, lequel a considéré que les troubles mentaux constatés sous la forme d'un trouble du comportement et délire avec persécution, refus de soins et déni des troubles rendaient impossible le consentement de Mme [T] [U] et compromettaient la sûreté des personnes tout en portant atteinte, de façon grave, à l'ordre public, nécessitant son admission provisoire en soins psychiatriques sans consentement en application de l'article L 3213-1 et suivants du code de la santé publique.

Sur la base de certificats médicaux établis dans les 24 et 72 heures de l'admission en service de psychiatrie à l'EPSM de la Sarthe le 03 juin 2023, précisément les 04 et 05 juin 2023, par les docteurs [K] [A] et [D] [I], toutes deux psychiatres exerçant dans l'établissement d'accueil, la mesure de soins contraints sous la forme de l'hospitalisation complète de Mme [T] [U] a été maintenue en vertu d'un arrêté pris le 06 juin 2023 par le Préfet de la Sarthe.

Par requête en date du 07 juin 2023 à laquelle a été notamment annexé l'avis motivé dressé le 06 par le docteur [D] [I], psychiatre de l'EPSM de la Sarthe, favorable au maintien des soins contraints sous la même forme de prise en charge, M. le Préfet de la Sarthe a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans aux fins de contrôle de la mesure d'hospitalisation complète de Mme [T] [U] avant le 12ème jour d'hospitalisation.

Aux termes d'une ordonnance rendue le 09 juin 2023 après avis conforme du parquet du 07, le juge des libertés et de la détention a maintenu le régime d'hospitalisation complète sans consentement dont Mme [T] [U] fait l'objet.

Par courrier daté du 10 juin 2023 et transmis le 13 au greffe de la cour d'appel d'Angers, Mme [T] [U] a relevé appel de cette décision.

L'ensemble des personnes concernées a été convoqué à l'audience d'appel du 21 juin 2023 à 14 heures 30 et le dossier communiqué au Ministère Public le 19 juin 2023.

Dans un avis motivé daté du 19 juin 2023 transmis au greffe de la cour à même date et dont la teneur a été rappelée à l'audience, le docteur [E] [S], psychiatre de l'établissement d'accueil, considère que le maintien en hospitalisation complète sans consentement est nécessaire.

POSITION DES PARTIES

A l'audience du 21 juin 2023, Mme [T] [U] est assistée de Maître Marie-Pierre Mpiga Voua Ofounda, avocate au barreau d'Angers et désignée au titre de la commission d'office en suite de la demande de la personne hospitalisée.

Entendue personnellement sur les motifs de son appel qu'elle maintient ce jour, Mme [T] [U] se dit convaincue que son hospitalisation a été et est bénéfique et s'engage à continuer les soins nécessaires soit en hospitalisation de jour soit en ambulatoire, d'autant qu'elle est infirmière dans l'armée et mère de famille notamment de jumeaux âgés de 14 ans. Elle estime que son hospitalisation sous contrainte qu'elle ressent comme une mesure de détention n'est pas nécessaire. Questionnée sur ses antécédents et sur les troubles mentaux objectivés, elle précise avoir été hospitalisée à deux reprises en secteur psychiatrique : la première fois en 2013 durant un mois au CPO d'Alençon et la deuxième en 2018 à [Localité 7] puis Laigle durant 3 mois et ce, sous contrainte. Elle se dit exempt de trouble mental mais admet être hyperactive en cas de stress chronique, ce qui explique la présente hospitalisation qu'elle dit être liée à un 'burn out' consécutif au harcèlement qu'elle aurait subi durant 8 mois dans le cadre professionnel. Elle insiste en tout cas sur son engagement de suivre des soins en ambulatoire.

Pour sa part, son conseil fait part de l'interrogation de Mme [T] [U] quant au fait qu'elle n'aurait pas reçu l'arrêté préfectoral d'admission. Quant à la procédure mais aussi sur le fond, elle n'a aucune observation particulière à formuler.

Dans son avis écrit daté du 20 juin 2023 dont il a été donné lecture à l'audience, le Parquet Général conclut à la recevabilité de l'appel et à la confirmation de la décision entreprise.

Régulièrement convoqués, M. le Préfet de la Sarthe est absent et non représenté.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Mme [U] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable.

- Sur la poursuite des soins

En application de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave à l'ordre public.

Selon l'article L 3211-12-1 3° du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention préalablement saisi par le représentant de l'Etat dans le département ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

En outre, il est admis que si le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, il ne peut substituer son avis à l'évaluation, par les médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Dans le cas présent, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est régulière. En particulier sont versés aux débats l'ensemble des certificats et avis médicaux légalement exigés de même que les décisions administratives intervenues à ce jour étant observé que le défaut de remise de l'arrêté d'admission allégué ne saurait faire grief puisque Mme [U] admet avoir eu connaissance oralement de cette décision et reçu l'information de ses droits et voies de recours et garanties, ainsi qu'en attestent d'ailleurs les mentions figurant sur les certificats médicaux rédigés dans les 24 et 72 heures de son admission à l'EPSM de la Sarthe.

S'agissant de la mesure de soins contraints, il ressort des pièces notamment médicales du dossier que Mme [T] [U], déjà hospitalisée il y a plusieurs années dans l'Orne pour une pathologie psychiatrique, a été admise en soins psychiatriques contraints sous le régime de l'hospitalisation complète sur décision du Préfet de la Sarthe en suite d'un arrêté municipal portant admission provisoire du 02 juin 2023 à raison de troubles du comportement sur la voie publique avec passage à l'acte hétéro-agressif et menaces avec délire de persécution dans un contexte de refus de soins et de déni des troubles objectivés.

L'impossibilité d'un consentement aux soins et la nécessité de soins sous surveillance constante ont été confirmées par les certificats médicaux dressés dans les 24 et 72 heures de son admission à l'EPSM de la Sarthe le 03 juin 2023 du fait du manque de place au sein de l'établissement le 02 juin 2023 et, encore, par l'avis circonstancié établi dans la perspective de l'audience de première instance du 09 juin 2023.

Ce dernier décrit en particulier au 06 juin 2023 chez Mme [T] [U], l'absence de manifestations agressives au cours de l'examen mais l'existence d'un manque d'insight et d'une hypomanie avec des idées de persécution et de mégalomanie justifiant la poursuite des soins psychiatriques à temps complet dès lors qu'en cas d'absence de surveillance médicale constante, les troubles constatés sont, selon le psychiatre, susceptibles de compromettre l'ordre public et la sûreté des personnes.

Tel est encore le cas de l'avis motivé actualisé au 19 juin 2023 transmis en cause d'appel en vertu de l'article L 3211-12-4 alinéa 2 du code de la santé publique.

Le docteur [S] de l'EPSM de la Sarthe mentionne en effet l'existence d'un vécu pathologique et interprétatif de plusieurs événements de vie ayant précédé l'hospitalisation en cours, la contestation par Mme [U] d'une pathologie psychiatrique autre qu'un 'stress chronique', un manque important de conscience de ses troubles ainsi qu'une adhésion aux soins très fragile.

Il est ainsi médicalement établi que Mme [T] [U] présente toujours des troubles rendant impossible son consentement et imposant des soins sous surveillance médicale constante en sorte que le cadre contraint et contenant de l'hospitalisation complète se doit d'être maintenu.

L'ordonnance dont appel sera donc confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties de l'intéressée demeure adaptée, nécessaire et proportionnée à son état de santé mental et à la mise en oeuvre du traitement qu'il requiert.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens seront laissé à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président de la Cour d'appel d'Angers,statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

En la forme,

DÉCLARONS recevable l'appel formé par Mme [T] [U] ;

Au fond,

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 09 juin 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans ayant maintenu le régime d'hospitalisation complète sans consentement de Mme [T] [U] ;

LAISSONS les dépens d'appel à la charge de l'Etat.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA C. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00018
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;23.00018 ?
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