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07/06/2023 | FRANCE | N°23/00014

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 07 juin 2023, 23/00014


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 14



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 26 Mai 2023



N° RG 23/00014 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FFET





ORDONNANCE

DU 07 JUIN 2023



Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Monsieur

[G] [E]

né le 06 Août 1961 à [Localité 7] (01)

[Adresse 2]

[Localité 4]

actuellement hospitalisé au [6]



Comparant assisté de Me Alain FOUQUET, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 14

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 26 Mai 2023

N° RG 23/00014 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FFET

ORDONNANCE

DU 07 JUIN 2023

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Monsieur [G] [E]

né le 06 Août 1961 à [Localité 7] (01)

[Adresse 2]

[Localité 4]

actuellement hospitalisé au [6]

Comparant assisté de Me Alain FOUQUET, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉ A LA CAUSE :

Monsieur PREFET DU DEPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE

ARS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Non comparant, ni représenté,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 07 Juin 2023, il a été indiqué que la décision serait prononcée en fin d'après-midi, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par arrêté de M. le Préfet de Maine-et-Loire en date du 19 mai 2023, M. [G] [E], né le 06 août 1961 à [Localité 7] (01), a été admis au Centre de Santé Mentale [Localité 5] sur Loire -ci-après dénommé [6]- sous le régime de l'hospitalisation complète jusqu'au 18 juin 2023 inclus, pour péril imminent.

Cette décision a été prise sur la base d'un certificat médical dressé par le docteur [Z], médecin psychiatre du [6], constatant chez M. [G] [E], connu du secteur psychiatrique et hospitalisé par le passé pour des épisodes de fragilisations de sa maladie affective bipolaire, l'existence de symptômes aïgus, hyperthymiques délirants, ne permettant pas à celui-ci d'exercer ses capacités de consentir de façon claire et pérenne aux décisions de santé le concernant.

Cette décision du représentant de l'Etat a elle-même fait suite à une mesure provisoire d'hospitalisation sans consentement ordonnée par le maire de la commune d'[Localité 4] dans un arrêté du 18 mai 2023 au visa d'un certificat dressé le jour dit par le docteur [M] [K], praticien hospitalier au CHU d'[Localité 4], mentionnant que M. [E] présente une décompensation sur un versant maniaque de son trouble bipolaire sous la forme notamment d'idées délirantes de persécution concernant ses voisins ainsi que des idées de grandeur sur un mécanisme interprétatif et une insomnie sans fatigue avec une anosognosie totale.

Suivant arrêté préfectoral en date du 22 mai 2023, l'hospitalisation complète de M. [G] [E] a été maintenue sur la base de l'avis médical rédigé le 21 mai 2023 soit dans les 72 heures, par le docteur [C] [A], praticien exerçant au sein du [6], considérant que les soins sous cette forme de prise en charge restaient justifiés du fait de la persistance de propos délirants de persécution et d'hallucinations intrapsychiques sans critique et avec une adhésion quasi-totale.

Par requête datée du 24 mai 2023 à laquelle a été notamment annexé l'avis motivé émis à même date par le docteur [S] [L], psychiatre de l'établissement de soins, se prononçant en faveur du maintien des soins psychiatriques contraints sous la même forme de prise en charge, M. Le Préfet de Maine-et-Loire a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de contrôle de la mesure avant le 12ème jour d'hospitalisation.

Aux termes d'une ordonnance rendue le 26 mai 2023 après avis du parquet du 25 mai 2023 et en l'absence du patient dont l'état de santé n'a pas permis son audition au vu du certificat du docteur [X] [U], psychiatre du [6], rédigé le 26 mai 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète sous contrainte de M. [G] [E].

Par courrier manuscrit adressé au greffe du juge des libertés et de la détention et daté du 27 mai 2023 et transmis par télécopie au greffe de la Cour d'appel d'Angers le 30 mai 2023, M. [G] [E] a relevé appel de cette décision qui lui a été notifiée à une date ignorée.

A réception de la procédure, l'ensemble des personnes a été convoqué à l'audience du mercredi 07 juin 2023 à 14 heures 30 et la procédure régulièrement communiquée au Ministère public le 31 mai 2023.

Aux termes d'un avis motivé daté du 31 mai 2023 et transmis au greffe le 05 juin 2023, le docteur [L], psychiatre exerçant au sein de l'établissement de soins, a conclu que les soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète de M. [G] [E] restent justifiés.

DEBATS EN APPEL

A l'audience du 07 juin 2023, M. [G] [E], comparant en personne, est assisté de Maître Alain Fouquet, avocat au barreau d'Angers et désigné au titre de la commission d'office en suite de la demande de la personne hospitalisée.

Entendu sur les motifs de son appel, l'appelant considère que si les soins sont justifiés, il en est pas de même de la contrainte. Il expose qu'il prend le traitement qui lui est prescrit sans le contester même s'il donne son avis dans le sens d'une réduction. Il ajoute qu'il se sent bien actuellement même si l'un des médicaments l'assomme un peu. Il précise avoir été hospitalisé en suite de sa garde à vue pour refus d'obtempérer. Il explique à ce sujet, qu'alors qu'il se rendait au commissariat pour déposer plainte contre X suspectant un détournement du n° 17 réservé à la police, des policiers ont voulu l'intercepter en raison d'un écart dans la conduite de son véhicule mais a pris peur. Questionné sur sa pathologie, il dit avoir été diagnostiqué bipolaire en 2016 et avoir été hospitalisé à plusieurs reprises par le passé.

Pour sa part, son avocat relève, sur la forme, que le certificat médical dressé par le docteur [Z] porte une date surchargée en sorte de mettre en doute sa régularité. Sur le fond, il s'en est rapporté en soulignant que M. [E] est gêné par l'expression d'hospitalisation 'sous contrainte'. Il ajoute être surpris de la différence entre les éléments contenus dans les certificats médicaux -anosognosie totale et logorrhée notamment- et la présentation de M. [E] à l'audience, lequel reconnaît sa pathologie bipolaire qui, en revanche et selon lui, peut être soignée à l'extérieur et s'exprime posément.

Régulièrement avisé de l'audience, M. le Préfet de Maine-et-Loire est absent de sorte que la présente décision est réputée contradictoire.

Dans son avis écrit daté du 06 juin 2023 dont il a donné lecture à l'audience, le parquet général conclut à la recevabilité de l'appel et, sur le fond, à la confirmation de l'ordonnance déférée.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

En application de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai 10 jours à compter de sa notification.

Au vu des énonciations qui précèdent au titre des faits et procédure, il convient de constater que l'appel de M. [G] [E], régulier en la forme, a été relevé dans le délai requis par le texte précité.

Il y a donc lieu de le recevoir.

- Sur la poursuite de la mesure de soins

En droit et en application de l'article L.3213-1 du code de la santé publique, le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave à l'ordre public.

Selon l'article L 3211-12-1 3° du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le représentant de l'Etat, ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission puis de six mois à compter de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

En outre, si le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, il ne peut substituer son avis à l'évaluation par les médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Dans le cas présent, sont versés aux débats l'ensemble des certificats médicaux légalement exigés et l'ensemble des décisions administratives intervenues à ce jour.

A ce titre, la surcharge constatée sur le certificat de 24 heures dressé par le docteur [Z] ne saurait affecter la régularité et la validité de ce document. Elle porte en effet sur la mention manuscrite du jour de l'entrée de M. [E] en SDRE en vertu du certificat effectivement établi par le docteur [K] le 18 mai 2023 à 14 heures 06 et non sur la date à laquelle le docteur [Z] a effectivement rédigé et signé son certificat -soit le 19 mai 2023 à 13 heures 45, ainsi que porté au recto de son certificat, donc bien dans le délai de 24 heures.

Sur le fond, il ressort des pièces notamment médicales de la procédure que M. [G] [E], patient âgé de près de 62 ans et connu du secteur psychiatrique pour un trouble bipolaire ayant conduit à de multiples hospitalisations en établissement spécialisé pour des décompensations maniaques, a été admis en soins psychiatriques sans consentement au [6] sur décision du préfet de Maine et Loire du 19 mai 2023 en suite d'un arrêté provisoire pris par le Maire d'[Localité 4] la veille à raison d'une nouvelle décompensation sur un versant maniaque de son trouble bipolaire avec anosognosie totale et insomnie sans fatigue, se manifestant essentiellement par des idées de persécution concernant ses voisins ainsi que des idées de grandeur sur un mécanisme interprétation ayant conduit à son examen dans le cadre d'une garde à vue.

L'impossibilité d'un consentement aux soins et la nécessité de soins sous surveillance constante ont été confirmées par les certificats médicaux dressés dans les 24 et 72 heures de l'hospitalisation complète de M. [E] ainsi que dans l'avis motivé établi dans la perspective de l'audience devant le premier juge, qui ont mis en évidence la réalité et la persistance d'idées délirantes à thème mégalomaniaque et persécutif ainsi qu'une adhésion totale aux idées délirantes et une absence de toute critique de celles-ci.

Tel est encore le cas au regard de l'avis motivé transmis le 31 mai 2023 en vertu de l'article L 3211-12-4 alinéa 2 du code de la santé publique. Le docteur [L] se prononce en effet clairement sur la nécessité du maintien de M. [E] en hospitalisation complète sans consentement au constat de la persistance d'un trouble de l'humeur avec syndrome maniaque et caractéristiques psychotiques (idées délirantes) ainsi qu'une anosognosie totale de sa pathologie.

Au vu de ces éléments y compris les plus récents il est médicalement établi que les troubles constatés rendent toujours impossible le consentement de M. [G] [E] et que son état mental continue d'imposer des soins assortis d'une surveillance constante qui justifient la poursuite de sa prise en charge sous le régime de l'hospitalisation complète.

L'ordonnance dont appel sera donc confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties de M. [G] [E] demeure adaptée, nécessaire et proportionnée à son état de santé mental et à la mise en oeuvre du traitement requis

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, il convient de laisser les dépens à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire,

En la forme,

DÉCLARONS recevable l'appel formé par M. [G] [E] ;

Au fond,

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 26 mai 2023 par le juge des libertés et de la détention d'Angers ayant ordonné la poursuite de l'hospitalisation complète de M. [G] [E] ;

LAISSONS les dépens d'appel à la charge de l'État.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA C. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00014
Date de la décision : 07/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-07;23.00014 ?
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