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25/05/2023 | FRANCE | N°22/01757

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 25 mai 2023, 22/01757


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B







MCC/IM

ARRET N°



AFFAIRE N° RG 22/01757 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FCEZ



Ordonnance du 31 Août 2022

Cour d'Appel d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 21/1920





ARRET DU 25 MAI 2023



DEMANDERESSE AU DEFERE :



S.A.R.L. SOTRA prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représentée par Me Jean-Baptiste LEFEVRE de la SELARL 08H08

AVOCATS, avocat au barreau d'ANGERS



DEFENDERESSE AU DEFERE :



S.C.I. DU GRAND MARJO prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentée par Me Marc ROUXEL de la...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B

MCC/IM

ARRET N°

AFFAIRE N° RG 22/01757 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FCEZ

Ordonnance du 31 Août 2022

Cour d'Appel d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 21/1920

ARRET DU 25 MAI 2023

DEMANDERESSE AU DEFERE :

S.A.R.L. SOTRA prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean-Baptiste LEFEVRE de la SELARL 08H08 AVOCATS, avocat au barreau d'ANGERS

DEFENDERESSE AU DEFERE :

S.C.I. DU GRAND MARJO prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Marc ROUXEL de la SELARL CONSILIUM AVOCATS, substitué à l'audience par Me Valentin CESBRON, avocats au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 23 Mars 2023, Mme COURTADE, présidente de chambre ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :

Mme COURTADE, présidente de chambre

Mme BUJACOUX, conseillère

Mme PARINGAUX, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 25 mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Marie-Christine COURTADE, présidente de chambre, et par Florence BOUNABI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCEDURE

Par jugement rendu le 4 mai 2021, le tribunal judiciaire d'Angers a débouté la [...], maître d'ouvrage, de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande, l'a condamnée à verser à la [...] à qui elle avait confié le lot parquet, carrelage, faïence et peinture dans le cadre d'un chantier de rénovation d'un immeuble sis à Carnac, la somme de 20 679,41 euros assortie des intérêts de droit à compter de l'assignation, a fait droit à la capitalisation des intérêts dus pour une année complète en application de l'article 1343-1 du code civil, a dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement et l'a condamnée à verser à la [...] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens conformément à l'article 699 du même code (instance d'appel suivie sous le numéro RG 21/01919).

Par jugement rectificatif en date du 22 juin 2021, le tribunal judiciaire d'Angers a reçu la requête en omission matérielle présentée par la [...], dit qu'il y a lieu de rectifier le jugement du 4 mai 2021 dans son dispositif comme suit et y ajoutant : « Prononce la réception judiciaire des travaux réalisés par la société Sotra avec effet au 14 juillet 2012. », dit que la présente décision sera mentionnée sur la minute du jugement et sera notifiée comme lui et laissé les dépens de la rectification à la charge du Trésor public (instance d'appel suivie sous le numéro RG 21/01920).

Selon déclaration reçue au greffe de la cour d'appel d'Angers en date du 23 août 2021, la [...] a relevé appel de ce jugement rectificatif en toutes ses dispositions.

La [...] a constitué avocat le 19 octobre 2021.

Le 27 octobre 2021, la procédure a été orientée devant le conseiller de la mise en état.

Par conclusions en date du 27 octobre 2021, la [...] a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident.

Par ordonnance en date du 31 août 2022, le conseiller de la mise en état a :

- dit n'y avoir lieu d'écarter des débats les conclusions d'incident - irrecevabilité n° 3 notifiées le 25 mai 2022 dans l'intérêt de l'appelante ;

- dit n'y avoir lieu de déclarer irrecevable l'appel interjeté par la [...] à l'encontre du jugement rectificatif du 22 juin 2021 ;

- dit n'y avoir lieu de statuer dans le cadre de cet appel sur l'irrecevabilité de ses demandes tendant à condamner la [...] à lui régler les sommes de 10 704 euros au titre des travaux réparatoires, valeur indexée sur l'indice BT 01 au 14 juillet 2012 jusqu'au parfait règlement et ce avec anatocisme, et de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le retard à réaliser ses ouvrages et les troubles de jouissance subis ;

- débouté la [...] de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la [...] aux dépens de l'incident.

Le 13 septembre 2022, la [...] a déféré la décision devant la cour d'appel.

PRETENTIONS DES PARTIES

Selon ses dernières conclusions déposées le 14 septembre 2023, la [...] sollicite de la cour d'appel de :

- déclarer la société Sotra recevable et bien fondée en sa requête en déféré ;

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 31 août 2022 et statuant à nouveau :

- déclarer la [...] irrecevable en son appel dans la double mesure où les significations d'huissiers sont parfaitement régulières et qu'au surplus, l'appel porte sur la demande de réception judiciaire qui n'a jamais été contestée en première instance par l'appelante ;

- condamner la [...] à verser 2 500 euros à la société Sotra au regard du caractère abusif de son appel étant rappelé que le jugement déféré porte sur l'existence d'une réception judiciaire au 14 juillet 2012, laquelle est parfaitement reconnue par l'appelante ;

- juger par conséquent que le jugement du 4 mai 2021 a force de chose jugée ;

- subsidiairement, juger irrecevables les demandes nouvelles de la SCIdu Grand Marjo en cause d'appel portant sur les réclamations suivantes :

' condamner la société Sotra à régler à la [...] la somme de 10 704 euros TTC au titre des travaux réparatoires ; valeur indexée sur l'indice BT 01 au 14 juillet 2012 jusqu'au parfait règlement et ce avec anatocisme ;

' condamner la société Sotra à régler à la [...] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intéréts tant à propos du retard à réaliser ses ouvrages que des troubles de jouissance subis par l'appelante ;

- condamner la [...] à verser 5 000 euros à la [...] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions déposées le 22 mars 2023, la [...] sollicite de la présente juridiction de :

- déclarer l'action de la société Sotra mal fondée ;

- débouter la société Sotra de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 31 août 2022 ;

- condamner la société Sotra à verser la somme 3 000 euros à la [...] au titre de ses frais irrépétibles ;

- condamner la société Sotra aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'irrecevabilité de l'appel

La [...] expose que la [...] a interjeté appel du jugement rectificatif du 22 juin 2021 en ce qu'il a prononcé la réception judiciaire des travaux réalisés par la société Sotra ; que la [...] ne s'est jamais opposée à cette demande dans le cadre de ses conclusions au fond ni suite à la requête diffusée par la société Sotra ; qu'elle ne peut donc pour la première fois s'opposer en appel à la demande de réception judiciaire des travaux sollicitée en première instance par application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ; que la [...] a elle-même confirmé l'existence de la réception dans ses conclusions d'appel au fond ; qu'il importe peu de savoir si le chef de jugement peut faire grief à la [...] ; qu'au demeurant une réception judiciaire n'a pas vocation à porter grief au maître de l'ouvrage mais lui permet au contraire d'obtenir des garanties légales quant au point de départ de la garantie décennale.

La [...] expose ensuite que l'appel est irrecevable en ce le jugement du 4 mai 2021 disposait de l'autorité de la chose jugée ; qu'un jugement rectificatif portant sur un jugement passé en force de chose jugée ne peut fait l'objet d'un appel même si l'appel a été formé contre le jugement rectificatif dans le délai d'un mois de sa signification ; qu'en l'espèce, le jugement du 4 mai 2021 a été signifié le 30 juin 2021 et la déclaration d'appel de la [...] a été formulée le 23 août 2021, soit plus d'un mois après la signification.

Elle dit que l'huissier de justice a signifié le jugement à la bonne adresse [Adresse 1] après avoir vérifié que le siège social n'était plus sis [Adresse 2] ; que la SCI Sotra ne pouvait contester l'acte de signification que par une procédure d'inscription de faux.

Sur ce,

La [...] fonde sa demande sur un mélange tenant à l'intérêt à faire appel et à la nouveauté des demandes.

Sur l'intérêt à interjeter appel

Le conseiller de la mise en état a, sur le fondement des dispositions de l'article 546 alinéa 1 du Code de procédure civile, écarté la demande de la [...] d'irrecevabilité de l'appel interjeté par la [...] au motif que celle-ci succombe sur la prétention adverse du prononcé de la réception des travaux par une disposition susceptible de lui faire grief.

Il convient de rappeler que le jugement rendu le 22 juin 2021 répondait non à une demande en omission de statuer qui aurait imposé l'examen au fond d'une prétention mais à une requête en rectification d'omission de statuer qui affectait le dispositif de la décision, les motifs ayant expressément répondu à la demande formée par la [...] au titre de la date de réception des travaux.

Dès lors, s'il est constant que la [...] n'a pas formé d'observation lors de la demande en rectification de l'omission de statuer, cela ne signifie nullement qu'elle a acquiescé à la date de réception judiciaire proposée mais bien qu'elle ne s'est pas opposée à la rectification sollicitée.

Or, la décision rectificative s'incorpore à la décision qu'elle rectifie et y est rattachée par un lien de dépendance nécessaire pour aboutir après correction du vice qui l'affectait à une décision judiciaire unique.

Le conseiller de la mise en état relève que la [...] ne s'était pas opposée à la demande dans ses conclusions en défense déposées le 9 mai 2019, devant le premier juge.

Néanmoins, elle n'a pas non plus conclu favorablement à la demande présentée par son adversaire. Cela est d'autant plus vrai que ses conclusions en appel contestent précisément la date retenue par le tribunal judiciaire pour en proposer une autre.

On doit donc considérer que la [...] avait bien intérêt à interjeter appel du jugement rectificatif complétant le jugement initial du 4 mai 2021 qu'elle avait d'ores et déjà critiqué.

Concernant la question de la recevabilité de la demande que l'argumentation de la [...] laisse poindre en citant les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, il convient de rappeler que par un avis en date du 11 octobre 2022, n° 22-70.010, la Cour de cassation a dit que 'les fins de non-recevoir tirées des articles 564 et 910-4 du code de procédure civile relèvent de la compétence de la cour d'appel.'

Le conseiller de la mise en état, et par suite la cour d'appel statuant sur déféré de l'ordonnance de ce magistrat, n'a donc pas à connaître de cette critique qui relève de la cour d'appel statuant au fond.

Sur l'autorité de la chose jugée

L'article 538 du Code de procédure civile dispose que 'le délai de recours par une voie ordinaire est d'un mois en matière contentieuse'.

La décision rectificative a, quant aux voies de recours, le même caractère et est soumise aux mêmes règles que la décision rectifiée.

La décision modificative n'acquiert pas autorité de la chose jugée quand un appel a été interjeté à l'encontre de la décision modifiée. Tel est bien le cas en l'espèce, puisqu'appel a été interjeté le 23 août 2021 contre un jugement rendu le 4 mai 2021.

En l'espèce, le jugement rectificatif du 22 juin 2021 a été signifié par acte de la SELARL [G] [C] et [V] [L], huissiers de justice, le 26 juillet 2021 et appel en a été interjeté le 23 août 2021, soit dans les délais légaux.

Enfin, lorsque la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, le juge du second degré doit effectivement relever d'office l'irrecevabilité de l'appel formé contre la décision rectificative.

La [...] soutient que ce premier jugement rectifiée du 4 mai 2021 a acquis autorité de la chose jugée.

La cour est saisie en parallèle de cette critique et n'a donc pas à statuer de ce chef dans le présent arrêt qui ne peut que constater l'existence de l'appel en cours contre le jugement rectifié et donc l'absence d'autorité de chose jugée du jugement du 4 mai 2021.

L'appel contre le jugement rectificatif du 22 juin 2021 est donc recevable.

L'ordonnance critiquée sera confirmée en ce qu'elle l'a déclaré.

Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel

La [...] expose que la [...] formule dans ses conclusions au fond une demande de réformation du jugement au titre des condamnations de 10 704 euros au titre des travaux réparatoires et 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que ces réclamations sont dilatoires, nouvelles en appel comme n'ayant pas pour objet de faire écarter les prétentions adverses ou pour opposer compensation ; que la [...] est appelante et ne peut présenter aucune demande reconventionnelle en déclaration d'appel en qualité de demanderesse ; que les demandes reconventionnelles en appel ne sont recevables que si elles ont déjà été formulées en première instance.

La [...] soutient qu'en première instance, elle a sollicité qu'il soit considéré que la société Sotra est irrecevable à agir en paiement et subsidiairement qu'elle n'est pas fondée à solliciter le paiement de ses mauvaises prestations ; que la demande en dommages et intérêts à hauteur d'appel n'est pas une demande nouvelle car les demandes indemnitaires présentées en cause d'appel tendent aux mêmes fins que celle formée en première instance visant à faire échec à la demande en paiement de la société Sotra ; qu'au demeurant, il s'agit de demandes accessoires puisque les prétentions de première instance étaient fondées sur l'article 1217 du code civil tendant à refuser sa propre obligation de paiement et encore à demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Sur ce,

Le conseiller de la mise en état a, à bon droit, souligné que cette discussion relève de l'appel formé contre le jugement rendu le 4 mai 2021 et non de celui limité au jugement rectificatif qui a statué sur la date de réception de l'ouvrage.

Il sera confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à statuer de ce chef dans le cadre de la présente procédure afférente au jugement rectificatif du 22 juin 2021.

Sur la demande en dommages et intérêts

La [...] soutient qu'il est abusif d'interjeter appel du jugement prononçant la réception judiciaire, point non contesté.

La [...] n'a pas formé d'observation de ce chef.

La cour a estimé recevable l'appel formé par la [...] contre le jugement rectificatif du 22 juin 2021.

Dès lors, la demande en dommages et intérêts ne peut qu'être rejetée et l'ordonnance du conseiller de la mise en état confirmée à ce titre.

Sur les frais et dépens

La [...] qui succombe sera condamnée aux dépens.

La somme qu'il convient de mettre à la charge de la [...] aux titre des frais exposés par la [...] et non compris dans les dépens sera équitablement fixée à 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 31 août 2022, sous le RG 21/01920 ;

CONDAMNE la [...] prise en la personne de son représentant légal à payer à la [...] prise en la personne de son représentant légal la somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la [...] prise en la personne de son représentant légal aux dépens de la présente procédure de déféré.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

F. BOUNABI M.C. COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/01757
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;22.01757 ?
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