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25/05/2023 | FRANCE | N°18/02484

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 25 mai 2023, 18/02484


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B





P/IM

ARRET N°:



AFFAIRE N° RG 18/02484 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ENMQ



Jugement du 20 Novembre 2018

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 14/01408



ARRET DU 25 MAI 2023



APPELANTE :



Mme [L] [H] épouse [V]

née le 03 Juin 1950 à [Localité 17]

[Adresse 13]

[Localité 9]



Représentée par Me Jean-Marc LAGOUCHE de la SCP LAGOUCHE JEAN-MARC,

avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 1503009



INTIMES :



M. [A] [H]

né le 19 Juillet 1967 à [Localité 16]

[Adresse 3]

[Localité 7]



Mme [G] [D] veuve [H]

née le 27 Avril 1939 à [Loc...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B

P/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/02484 - N° Portalis DBVP-V-B7C-ENMQ

Jugement du 20 Novembre 2018

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 14/01408

ARRET DU 25 MAI 2023

APPELANTE :

Mme [L] [H] épouse [V]

née le 03 Juin 1950 à [Localité 17]

[Adresse 13]

[Localité 9]

Représentée par Me Jean-Marc LAGOUCHE de la SCP LAGOUCHE JEAN-MARC, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 1503009

INTIMES :

M. [A] [H]

né le 19 Juillet 1967 à [Localité 16]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Mme [G] [D] veuve [H]

née le 27 Avril 1939 à [Localité 12]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentés par Me Sébastien NAUDIN de la SELARL NEDELEC & NAUDIN, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 23 Mars 2023, Mme PARINGAUX, conseillère, ayant été préalablement entendue en son rapport devant la cour composée de :

Mme COURTADE, présidente de chambre

Mme BUJACOUX, conseillère

Mme PARINGAUX, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 25 mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Marie-Christine COURTADE, présidente de chambre, et par Florence BOUNABI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] [H], né le 16 juillet 1924, domicilié aux [Localité 10], [Adresse 5], est décédé le 29 septembre 2011, laissant pour lui succéder :

- Mme [G] [D] son épouse, née le 27 avril 1939, avec laquelle il s'est marié en troisièmes noces le 8 mars 1967, avec contrat de mariage préalable du 2 mars 1967 suivant lequel les époux ont adopté le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts ;

- Mme [L] [H] épouse [V], sa fille issue de sa première union avec Mme [G] [N] dissoute par divorce ;

- M. [A] [H], son fils, issu de son union avec Mme [D].

M. [S] [H] a établi un testament olographe le 19 juillet 1991, avec codicille du 4 décembre 2004, déposé au rang des minutes de Maître [U] [O], notaire à [Localité 7] (49).

Maître [O], chargé du règlement de la succession par Mme [D] veuve [H] et son fils M. [A] [H], a rédigé un acte de notoriété le 27 mars 2013 et a établi un projet de déclaration de succession le 27 juin 2012 dans lequel ont été recensé dans l'actif successoral notamment :

- une maison d'habitation située au [Adresse 5] aux [Localité 10] ;

- un terrain situé [Adresse 15] à [Localité 7] ;

- deux terrains situés lieu-dits [Adresse 2] et [Adresse 1] à [Localité 18] (49) ;

- des parts sociales dans des SCI ([...] et [...]) ;

- des parts sociales dans la [...] et un compte courant d'associé dans cette société.

A la demande de M. [A] [H], la Selarl Onillon-Duret géomètres- experts-fonciers-associés, a réalisé une expertise le 13 avril 2012 fixant notamment la valeur de l'hôtel-bar-restaurant [...] à [Localité 7] à 490 000 euros, et relevant l'existence d'autres biens immobiliers dans la même commune entrant dans la succession (une maison au [Adresse 8], un immeuble aux [Adresse 4] et [Adresse 6], deux terrains), ainsi qu'un ensemble immobilier implanté à '[...]' à [Localité 14] (49) comprenant un moulin anciennement à usage d'hôtel, un bâtiment anciennement à usage de salle de réception et une maison d'habitation.

Mme [H] épouse [V] a estimé qu'une partie du patrimoine aurait été dissimulée et que des donations déguisées auraient été effectuées via des montages juridiques astucieux pour favoriser sa belle-mère et son frère consanguin à son détriment.

Par exploits des 21 et 28 janvier 2014 , Mme [H] épouse [V] a assigné Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] devant le tribunal de grande instance d'Angers aux fins de liquidation et partage de l'indivision successorale.

Par ordonnance du 3 octobre 2014, le juge de la mise en état a ordonné une expertise pour évaluer l'ensemble des biens dépendant de la succession de M. [S] [H].

Par ordonnance du 9 janvier 2017, le juge de la mise en état a :

- constaté l'accord de Mme [D] veuve [H] à voir produire par la CRCAM du Maine et de l'Anjou le recto d'un chèque numéro 0070651 émis le 7 octobre 2008 d'un montant de 300 030 euros ;

- débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande de dommages-intérêts au titre de la résistance abusive.

Le rapport de l'expert, M. [R], en date du 28 novembre 2016 a été déposé le 1er décembre 2016.

Dans ses dernières conclusions du 5 mars 2018, Mme [H] épouse [V] a demandé au tribunal de :

- ordonner les opérations de compte liquidation partage de la succession de M. [S] [H] ;

- ordonner la communication des contrats d'assurance-vie ;

- ordonner le justificatif de la vente du fonds de commerce de [...] ;

- constater les donations déguisées et le recel de succession effectué par M. [A] [H] sur :

[...] : 334 560 euros ;

les parts sociales de la [...] : valeur actuelle de la part 1 590 euros, l'intéressé en détenant 100 parts soit 159 000 euros ;

les parts sociales de la SARL [H] [...] Hôtel : M. [A] [H] détenant 8 800 parts, la valeur de la part étant de 18,38 euros, soit 161 744 euros ;

- dire que M. [A] [H] ne pourra prétendre à aucune part sur les donations déguisées ;

- dire que la somme de 800 000 euros versée en assurance-vie par M. [S] [H] devra faire partie de l'actif successoral ;

- ordonner à M. [A] [H] et à Mme [D] de donner des éléments sur la vente du fonds de commerce de [...] ;

- homologuer le rapport d'expertise concernant la valeur des biens immobiliers et mobiliers ;

- constater que la part de Mme [H] épouse [V] est de 479 040 euros ;

- commettre tel notaire que le tribunal entendra désigner pour procéder aux opérations de partage ;

- dire que ce notaire devra être désigné dans le département de la Vendée ;

- condamner les défendeurs à la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

Dans leurs dernières conclusions du 1er mars 2018, Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] ont demandé au tribunal de :

- leur donner acte de ce qu'ils sollicitent l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession ;

- désigner le président de la chambre interdépartementale des notaires avec faculté de délégation à un de ses confrères ;

- constater l'absence de recel successoral ou autre dissimulation et voir débouter Mme [H] épouse [V] de toutes se demandes à ce titre ;

- homologuer les valeurs retenues par l'expert judiciaire et retenir sa proposition de partage sans rapport à la succession ;

- condamner Mme [H] épouse [V] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 15 mai 2018 le tribunal de grande instance d'Angers a :

- ordonné la réouverture des débats afin que M. [A] [H] et Mme [D] veuve [H], qui ne contestent pas le placement contesté, produisent les contrats d'assurance-vie souscrits par M. [S] [H] avec le produit de la vente de [...] et justifient de la situation financière et patrimoniale de ce dernier en 2008 lors de la souscription des contrats d'assurance-vie ;

- sursis à statuer sur les autres demandes et réservé les dépens.

Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] n'ont pas conclu après la réouverture des débats.

Par jugement du 20 novembre 2018, le tribunal de grande instance d'Angers a notamment :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision suite au décès de M. [S] [H] ;

- commis Maître [W] [M], notaire à [Localité 11], pour y procéder ;

- désigné Mme [J] [X], vice-présidente, en qualité de juge commissaire,- homologué les estimations proposées par l'expert en son rapport déposé le 1er décembre 2016 pour les immeubles suivants :

maison des [Localité 10] pour la somme de 350 000 euros ;

terrain de [Localité 7] pour la somme de 40 000 euros ;

terrains de [Localité 18], pour la somme de 22 550 euros pour celui de [Adresse 1] et pour la somme de 13 000 euros pour celui de [Adresse 2];

- débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande de rapport à la succession de la somme de 334 560 euros perçue par M. [A] [H] lors de la vente de [...] en 2008 ;

- débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande de rapport à la succession de la somme de 161 744 euros correspondant aux 8 800 parts d'une valeur de 18,38 euros chacune détenues par M. [A] [H] sur la [...] ;

- ordonné le rapport à succession par M. [A] [H] de la somme de 14 271 euros correspondant aux 210 parts d'une valeur de 7,10 euros, dont il bénéficiait au sein de la SARL [H] [...] Hôtel ;

- débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande au titre du recel successoral à l'encontre de M. [A] [H] sur la somme de 14 270 euros correspondant aux 210 parts d'une valeur de 7,10 euros dont il bénéficiait au sein de la SARL [H] [...] Hôtel ;

- débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande de justification de la vente du fonds de commerce par les consorts [H]-[D] ;

- débouté Mme [H] épouse [V] au titre de l'assurance-vie ;

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation et partage ;

- laissé à chaque partie la charge de ses propres frais irrépétibles.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour d'appel d'Angers le 10 décembre 2018, Mme [H] épouse [V] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle l'a :

'- débouté de sa demande au titre d'une donation déguisée et d'un recel de succession au bénéfice de M.[A] [H] sur la [...] ; de sa demande de rapport à la succession de la somme de 334 560 euros perçue par M. [A] [H] lors de la vente de [...] en 2008 ; de sa demande de rapport à la succession de la somme de 161 744 euros correspondant aux 8 800 parts d'une valeur de 18,38 euros chacune détenues par M. [A] [H] sur la [...] ; de sa demande au titre du recel successoral à l'encontre de M. [A] [H] sur la somme de 14 270 euros correspondant aux 210 parts d'une valeur de 7,10 euros dont il bénéficiait au sein de la [...] ; de sa demande de justification de la vente du fonds de commerce par les consorts [H]-[D]; de sa demande au titre de l'assurance-vie'.

Mme [D] veuve [H] et M. [A] ont constitué avocat commun le 2 janvier 2019.

Aux termes de ses écritures déposées le 4 mars 2019, Mme [H] épouse [V] a demandé à la cour d'appel de :

- réformer la décision querellée sur : (sic) ;

- ordonner la communication des contrats d'assurance-vie ;

- ordonner le justificatif de la vente du fonds de commerce de [...] ;

- constater les donations déguisées et le recel de succession effectué par M. [A] [H] sur :

[...] : 334 560 euros ;

les parts sociales de la [...] : valeur actuelle de la part 1 590 euros ; M. [H] en détient 100 parts, soit 159 000 euros ;

' les parts sociales de la [...] : M. [H] détient 8 800 parts, la valeur de la part est de 18,38 euros soit 161 744 euros ;

- dire et juger que M. [A] [H] ne pourra prétendre à aucune part sur les donations déguisées ;

- dire et juger que la somme de 800 000 euros versées en assurance-vie par M. [S] [H] devra faire partie de l'actif successoral ;

- ordonner à Mme [D] et M. [A] [H] de donner des éléments sur la vente du fonds de commerce de [...] ;

- dire et juger que le fonds de commerce de [...] est un bien propre de M. [S] [H] ;

- dire et juger que la vente du fonds de commerce de [...] devra être rapportée à la succession ;

- commettre un juge pour surveiller les opérations de partage ;

- condamner Mme [D] et M. [A] [H] à la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

Aux termes de leurs dernières écritures, déposées le 14 mars 2019, Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] ont demandé à la cour d'appel de :

- confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement intervenu ;

- condamner Mme [H] épouse [V] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 30 août 2021 et l'affaire a été fixée pour plaider à l'audience du 23 septembre 2021.

Par arrêt du 25 novembre 2021 prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la juridiction, la cour d'appel d'Angers a :

Avant dire droit sur le contrat d'assurance-vie,

- Enjoint Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] de produire le contrat d'assurance-vie souscrit courant 2008 et abondé des fonds reversés par la [...] en suite de la cession immobilière de 2008, sous astreinte provisoire globale de 75 euros par jour de retard courant au maximum jusqu'au 2 février 2022 ;

- Réservé les prétentions des parties s'agissant de cette assurance-vie ;

- Ordonné le renvoi de l'affaire devant le conseiller de la mise en état le 3 février 2022 sur ce seul point ;

- Confirmé pour le surplus le jugement du tribunal de grande instance d'Angers du 20 novembre 2018, sauf en celle de ses dispositions déboutant l'appelante de ses demandes de justification de la vente du fonds de commerce par les consorts [H]-[D] ;

Statuant de nouveau de ce seul chef,

- Ordonné à Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] de justifier des conditions de la cession du fonds de commerce de [...], bien propre de M. [S] [H] aux fins de réintégration à l'actif successoral auprès du notaire saisi ;

- Réservé les demandes au titre des frais irrépétibles et dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 13 mars 2023 et l'affaire a été fixée pour plaidoiries à l'audience du 23 mars 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 8 mars 2023, Mme [H] épouse [V] demande à la présente juridiction de :

- réformer la décision querellée sur : (sic) ;

- ordonner la communication des contrats d'assurance-vie ;

- ordonner le justificatif de la vente du fonds de commerce de [...] ;

- constater les donations déguisées et le recel de succession effectué par M. [A] [H] sur :

[...] : 334 560 euros ;

Les parts sociales de la [...] : valeur actuelle de la part 1 590 euros, M. [A] [H] en détient 100 parts, soit 159 000 euros ;

Les parts sociales de la [...]: M. [H] détient 8 800 parts, la valeur de la part est de 18,38 euros soit 161 744 euros ;

- dire et juger que M. [A] [H] ne pourra prétendre à aucune part sur les donations déguisées ;

- dire et juger que la somme de 800 000 euros versée en assurance-vie par M. [S] [H] devra faire partie de l'actif successoral ;

- ordonner à Mme [D] et M. [A] [H] de donner des éléments sur la vente du fonds de commerce de [...] ;

- dire et juger que le fonds de commerce de [...] est un bien propre de [S] [H] ;

- dire et juger que la vente du fonds de commerce de [...] devra être rapportée à la succession ;

- commettre un juge pour surveiller les opérations de partage ;

- condamner Mme [D] et M. [A] [H] à la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 24 février 2023, Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] demandent à la présente juridiction de :

- constater la communication des documents sollicités et dire n'y avoir lieu à liquidation de l'astreinte ;

- débouter la demande de réintégration à l'actif successoral du produit de la cession des fonds de commerce de M. [S] [H] ;

- juger que le fonds de commerce 'Le Relais du Bellay' est un bien commun et que le seul bien propre de M. [S] [H] était le fonds de commerce 'Le Splendid' ;

- confirmer le jugement de première instance ;

- condamner Mme [L] [H] épouse [V] à porter et à payer à Mme [G] [D] et à M. [A] [H] la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens.

Pour un exposé plus ample des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions sus visées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre préliminaire il convient de rappeler que dans son arrêt du 25 novembre 2021 la cour d'appel a vidé sa saisine, à l'exception des seules prétentions relatives à l'assurance-vie souscrite en 2008 et au sort des demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens d'appel.

Sur l'injonction sous astreinte

En application des dispositions de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, il a été enjoint à Mme [D] veuve [H] et à M. [A] [H] de produire le contrat d'assurance-vie souscrit courant 2008 et abondé des fonds reversés par la [...] en suite de la cession immobilière de 2008, sous astreinte provisoire globale de 75 euros par jour de retard courant au maximum jusqu'au 2 février 2022.

Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] indiquent qu'ils ont interrogé Le Crédit Agricole Anjou Maine pour obtenir le contrat d'assurance-vie litigieux mais qu'ils n'ont pu obtenir satisfaction du fait de l'ancienneté du contrat, les recherches et historiques des comptes au-delà de dix ans ne pouvant aboutir.

Mme [H] épouse [V] n'a pas présenté d'observation ou de demande sur ce point.

Sur ce,

Le caractère provisoire de l'astreinte permet une révision à la diminution ou une suppression de son montant lors de sa liquidation.

Si le juge qui a ordonné l'astreinte s'est réservé cette liquidation, ou s'il reste saisi de l'affaire, c'est lui qui liquidera l'astreinte.

L'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution énonce que l'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient en tout ou partie d'une cause étrangère.

En l'espèce le courrier daté du 2 février 2022 émanant du Crédit Agricole Anjou Maine mentionne que suite à la réclamation de M. [A] [H] portant sur le produit référencé Césame n° 695628 prise en charge le 20 janvier 2022 : 'malheureusement la réponse apportée est la suivante : les recherches et historiques des comptes au-delà de 10 ans ne peuvent aboutir'.

La banque a néanmoins accompagné ce courrier des relevés d'une autre police d'assurance dénommée 'Floriane par transfert', référencée n° 67007695, ayant pris effet le 11 septembre 2008, issue d'un contrat initial souscrit en 1988 au nom de M. [S] [H].

Le courrier du Crédit Agricole Maine Anjou établit comme soutenu par les intimés qu'ils ont respecté l'injonction judiciaire, mais que leur démarche n'a pu aboutir du fait d'une cause qui leur est étrangère.

Aussi l'astreinte provisoire fixée par la cour d'appel d'Angers dans l'arrêt du 25 novembre 2021 sera supprimée.

Sur l'assurance-vie

L'article L. 132-8 du code des assurances dispose notamment que : 'Le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre'.

Ce droit est personnel au souscripteur.

Aux termes de l'article L 132-13 du même code, le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.

Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.

Les primes versées par le souscripteur d'un contrat d'assurance vie ne sont rapportables à la succession et ne peuvent donner lieu à réduction pour atteinte à la réserve des héritiers que si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur.

Un tel caractère s'apprécie au moment du versement au regard de l'âge et des situations patrimoniale et familiale du souscripteur.

Enfin l'utilité de la souscription est l'un des critères devant être pris en compte pour évaluer le caractère exagéré ou non des primes versées.

Mme [H] épouse [V] soutient que la somme de 800 000 euros que M. [S] [H] et son épouse Mme [G] [D] ont perçu lors de la cession de [...] qui a été placée en assurance-vie devra faire partie de l'actif successoral et est , en application de l'article L. 132-13 du code des assurances, une prime manifestement excessive.

Elle argue de ce que le défunt a placé l'intégralité du produit de la vente des murs de [...] qui était le plus bel hôtel qui constituait son patrimoine sur une assurance-vie, trois ans avant son décès, alors qu'il avait déjà des soucis de santé.

Elle craint que les seuls bénéficiaires de cette assurance-vie soient son demi frère ou les descendants de ce dernier.

Mme [H] épouse [V] dénonce l'opacité qui règne sur ce point depuis le début du litige, du fait de l'attitude des parties adverses, et observe que le premier juge n'a pas tiré les conséquences du refus de communiquer les pièces sollicitées, qu'elle a vainement tenté d'obtenir auprès des établissements bancaires.

Mme [H] épouse [V] estime que compte tenu de l'actif post-communautaire qui s'élevait lors du décès de M. [S] [H] le 29 septembre 2011 à 678 753 euros, sur la base de la déclaration de succession dressée par Maître [O], la somme de 800 000 euros constituait la quasi intégralité du patrimoine du défunt et qu'il est par suite évident que le produit de la vente des murs de l'hôtel de luxe a été placé en assurance-vie pour le soustraire à la succession.

Mme [D] veuve [H] et M. [A] [H] demandent la confirmation du jugement.

Ils soulignent que le patrimoine de M. [S] [H] était composé lors de son décès de plusieurs biens immobiliers et mobiliers dont la valeur, près de 680 000 euros, n'a pas été contestée, et que dans ces conditions rien ne caractérise la disproportion alléguée par la partie adverse.

Le placement effectué par M. [S] [H] trois ans avant son décès n'avait donc pas pour but d'évincer l'appelante, mais correspondait seulement à un produit d'assurance souscrit au bénéfice des époux [H]-[D], en cas de décès de l'un ou de l'autre.

Sur ce,

La [...] a été créée le 11 septembre 1974, avec égal apport de ses deux associés, M. [S] [H] et son épouse Mme [D].

Leur fils, M. [A] [H] est entré dans cette société par augmentation de capital le 30 décembre 1983.

Le 10 novembre 1984 la [...] a donné à bail commercial l'hôtel 'Le Splendid' pour exploitation aux époux [H]-[D]. Le 27 janvier 1987, M. et Mme [H] et leur fils ont crée la SARL '[...] hôtel' pour reprendre l'exploitation du fonds de commerce.

Suivant acte notarié du 15 mai 2008 dressé par Maître [O], la [...] (pour deux bâtiments) et M. [A] [H] (pour un local poubelles avec puits) ont vendu l'ensemble immobilier à usage d'hôtel situé sur la commune de [Localité 7] au prix de 1 120 000 euros (1 119 000 euros pour la [...] et 1 000 euros pour M. [A] [H]), à la [...] du Bellay, dont les gérants étaient les époux [K].

L'expertise judiciaire réalisée par M. [R] a permis d'établir que seuls les murs de [...], propriétés de la [...], ont été vendus en 2008, le fonds de commerce de l'hôtel étant détenu par les époux [H] à titre personnel.

Les parties s'accordent sur le fait que suite à cette cession immobilière intervenue en 2008 portant sur les murs de [...], une somme de 800 000 euros a été placée en assurance-vie par M. [S] [H].

Le contrat d'assurance-vie n'a pu être obtenu de l'organisme bancaire auprès duquel il a été souscrit du fait de l'ancienneté de son archivage et il n'est pas démontré que les intimés en détiennent une copie.

De sorte que l'identité du ou des bénéficiaires (qui permettrait d'apprécier le cas échéant s'il y a lieu à appliquer en fonction de leur qualité les règles du rapport ou de la réduction) et les spécificités du contrat (clause de rachat) ne sont pas connues.

Quoiqu'il en soit, il appartient à Mme [H] épouse [V], en application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, de rapporter la preuve du caractère excessif des primes versées compte tenu de différents facteurs, à savoir l'âge du souscripteur, l'utilité de la souscription, sa situation familiale et patrimoniale.

Or il apparaît au vu du projet de déclaration de succession dressé le 27 juin 2012 par Maître [O] notaire et du rapport de l'expert foncier du 13 avril 2012, qu'au moment de son décès, M. [S] [H] disposait d'un patrimoine conséquent, constitué de plusieurs maisons et de terrains ainsi que de parts sociales, dont l'estimation confirmée par l'expert judiciaire M. [R], est de l'ordre de 678 753 euros.

Par ailleurs le contrat d'assurance-vie 'Floriane par transfert' dont M. [S] [H] était l'assuré et les bénéficiaires son épouse Mme [D] et, à défaut, son fils [A], est produit aux débats.

Il est issu du transfert, le 11 septembre 2008, d'un précédent contrat source 'PREDIGE V1"souscrit auprès du Crédit Agricole Anjou Maine le 27 décembre 1988, et avait une valeur en mars 2010 de 248 347,29 euros.

Ce contrat d'assurance-vie démontre que M. [S] [H] entendait depuis plusieurs années consacrer des liquidités importantes à la protection de ses intérêts financiers, de ceux de son épouse, et à défaut de son fils.

Le versement de la somme de 800 000 euros, produit de la vente des murs de [...], sur une assurance-vie paraît ainsi s'inscrire dans une démarche de placement de précaution ancienne pour M. [S] [H], alors qu'il avait en parallèle un patrimoine immobilier conséquent.

Les relevés des comptes DAV des époux [H] versés aux débats par l'appelante, contemporains à l'année 2008, sont en outre largement créditeurs et témoignent d'une aisance financière.

Le capital versé par le souscripteur était donc en adéquation avec son niveau de vie et son patrimoine et avait une finalité vraisemblable lors de la conclusion du contrat d'assurance-vie, compte tenu de l'âge avancé de M. [S] [H] (84 ans), soit de se constituer des liquidités en cas d'admission en établissement de retraite ou en EHPAD, soit de ménager un apport de liquidités en cas de pré-décès à son épouse, plus jeune que lui de quinze années (69 ans).

Par suite le jugement rendu le 20 novembre 2018 par le tribunal de grande instance d'Angers qui a débouté Mme [H] épouse [V] de sa demande au titre de l'assurance-vie sera confirmé.

Sur les frais et dépens

Aucun élément de l'espèce ne fonde en équité la condamnation de l'une ou l'autre des parties au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties seront déboutées de leurs demandes de ce chef.

Mme [H] épouse [V] sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel d''Angers ;

SUPPRIME l'astreinte provisoire fixée par l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel d'Angers ;

CONFIRME le jugement rendu le 20 novembre 2018 par le tribunal de grande instance d'Angers en sa disposition contestée afférente à l'assurance vie ;

DÉBOUTE Mme [L] [H] épouse [V], Mme [G] [D] veuve [H] et M. [A] [H] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [L] [H] épouse [V] aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

F. BOUNABI M.C. COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 18/02484
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;18.02484 ?
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