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17/05/2023 | FRANCE | N°23/00011

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 17 mai 2023, 23/00011


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 11



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention de LAVAL du 09 Mai 2023



N° RG 23/00011 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FE35



ORDONNANCE

DU 17 MAI 2023



Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Monsieur [J] [O]r>
né le 14 Mai 1968 à [Localité 5] (93)

[Adresse 1]

[Localité 3]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [Localité 3]



Comparant assisté de Me Sandrine TAUGOURDEAU, avo...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 11

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention de LAVAL du 09 Mai 2023

N° RG 23/00011 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FE35

ORDONNANCE

DU 17 MAI 2023

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Monsieur [J] [O]

né le 14 Mai 1968 à [Localité 5] (93)

[Adresse 1]

[Localité 3]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de [Localité 3]

Comparant assisté de Me Sandrine TAUGOURDEAU, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉ A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 3]

[Adresse 4]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant, ni représenté,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 17 Mai 2023 à 14h30, il a été indiqué que la décision serait prononcée en fin d'après-midi, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

Faits et procédure

Par décision du directeur du Centre hospitalier de [Localité 3] en date du 02 mai 2023, M. [J] [O], né le 14 mai 1968 à [Localité 5] (93), a été admis en soins psychiatriques sans consentement sous le régime de l'hospitalisation complète en l'absence de tiers et en cas de péril imminent.

Cette décision a été prise au vu d'un certificat médical dressé le jour même par le docteur [F], médecin des Urgences, décrivant l'état de santé de l'intéressé et précisant que les troubles constatés rendent impossible son consentement et imposent des soins immédiats assortis d'une surveillance constante à raison du péril imminent pour sa santé.

Sur la base des certificats médicaux établis les 03 et 05 mai 2023 par les docteurs [L] et [D], tous deux psychiatres exerçant au sein de l'établissement de soins, le directeur du Centre Hospitalier de [Localité 3] a, le 05 mai 2023, décidé du maintien de M. [J] [O] en soins psychiatriques contraints sous la même forme de prise en charge.

Par requête datée du 05 mai 2023 et transmise le jour même à laquelle a été joint notamment l'avis circonstancié à même date du docteur [D], psychiatre du Centre Hospitalier de [Localité 3], le directeur de l'établissement de soins a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Laval en vue de voir statuer sur la poursuite de la mesure sans consentement avant le 12ème jour de l'hospitalisation.

Aux termes d'une ordonnance rendue le 09 mai 2023 après avis conforme du parquet du 05 mai 2023, le juge des libertés et de la détention a autorisé le maintien des soins psychiatriques sans consentement dont fait l'objet M. [J] [O] sous la forme de l'hospitalisation complète.

Par lettre simple datée du 09 mai 2023 et transmise au greffe de la Cour d'appel d'Angers le 11, M. [J] [O] a relevé appel de cette décision qui lui a été notifiée le jour de son prononcé.

L'ensemble des parties concernées a été convoqué à l'audience d'appel du mercredi 17 mai 2023 à 14 heures 30 et le dossier communiqué au ministère public.

Dans un avis circonstancié et motivé du 12 mai 2023 adressé au greffe de la cour d'appel et dont la teneur a été rappelée à l'audience, le docteur [L], médecin psychiatre au Centre Hospitalier de [Localité 3], a conclu que les soins sous contrainte sont justifiés et à maintenir en hospitalisation complète.

Débats devant la cour

A l'audience fixée, M. [J] [O] a été assisté de Maître [W] avocate désignée au titre de la commission d'office comme suite à sa demande.

Entendu sur les motifs de son appel, M. [O] a exposé que le fait d'être chômeur ne justifie pas d'être séquestré et qu'il est en capacité de vivre chez lui et de prendre ses médicaments. Il a ajouté que, depuis son hospitalisation, il n'a plus de vague à l'âme en fin de journée comme il en connaît depuis le décès de sa mère survenu le 5 septembre 2021 dans les suites d'une opération de la cataracte en 2017 dont il a critiqué les conditions de prise en charge sur le plan médical. Il a tenu à présenter des photos de bâtiments en ruine qu'il dit être prises de Varsovie en montrant qu'il est en dessous d'un immeuble. Il a exposé encore qu'il fait tout sans avoir besoin d'être hospitalisé du moment qu'il a un traitement. Il a estimé que l'on ne peut pas mettre en prison toute personne qui n'est pas satisfaite de ses conditions d'existence et que le vrai remède est qu'il trouve un emploi, ce qui n'est pas facile car il a 55 ans. Questionné sur le traitement qui lui est prescrit dans le cadre de son hospitalisation et les raisons de celle-ci, il a indiqué prendre des comprimés pour l'anxiété, qu'il n'a pas de travail, pas de famille et pas d'amis et qu'il ne sait pas ce qu'il fait sur terre. Il a enfin insisté sur le fait qu'il n'a aucun problème avec ses contemporains de quelque nationalité que ce soit, qu'il n'est pas asocial et qu'il est lucide.

Pour sa part, son conseil a considéré la procédure irrégulière en l'absence de justification de la recherche d'un tiers. Au fond, elle a conclu à l'infirmation de la décision et à la levée de la mesure en s'interrogeant sur la motivation du dernier avis médical qui fait état de problèmes de relations avec autrui et dans le même temps à une amélioration du contact relationnel. Elle a considéré que le maintien de la mesure de soins contraints n'est donc pas justifié ; M. [O] étant parfaitement consentant pour suivre un traitement avec un aménagement notamment sous contrôle d'un psychiatre.

Bien que régulièrement convoqué, M. le Directeur du Centre Hospiatalier de [Localité 3] n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

Dans son avis écrit daté du 15 mai 2023 dont il a été donné connaissance lors des débats, le Parquet Général a conclu à la recevabilité de l'appel et, au fond, à la confirmation de la décision entreprise.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

Au vu des énonciations détaillées au titre des faits et procédure, il convient de constater que l'appel de M. [J] [O] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable et sera déclaré comme tel.

- Sur la poursuite des soins

En droit, l'article L. 3212-1 du code de la santé publique dispose qu'une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

Selon le même texte en son II 2°, le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande d'hospitalisation présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci et s'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical.

En application de l'article L 3211-12-1 du dit code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation en soins psychiatriques a été prononcée à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent en application de l'article L 3212-1 du dit code, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission et avant l'expiration d'un délai de six mois à compter de toute décision prise par le juge des juges des libertés et de la détention, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

Enfin, il est admis que si le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, il ne peut substituer son avis à l'évaluation par les médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Dans le cas présent, s'il est exact que les démarches de vaines recherches de tiers préalablement à l'admission de M. [O] en soins psychiatriques contraints sous le régime de l'hospitalisation complète en cas de péril imminent ne figurent pas expressément au dossier, la situation d'isolement de l'intéressé sur le plan familial et social résulte des conditions dans lesquelles celui-ci a été prise en charge et qui ont du reste été confirmées par l'intéressé lui-même.

Dès lors, l'irrégularité liée au cas présent à un simple défaut dans la formalisation de recherche de tiers ne saurait conduire à la nullité de la procédure, en l'absence de tout grief.

Sur le fond, les pièces notamment médicales établissent que M. [O], âgé de 55 ans, a été admis en soins psychiatriques contraints sous le régime de l'hospitalisation complète au Centre Hospitalier de [Localité 3] sur décision du directeur d'établissement pour péril imminent conformément à l'article L 3212-1 du code la Santé publique à raison de troubles psychotiques aigus qui ont pris la forme de propos incohérents et désorganisés ainsi que la présence de nombreuses vélléités autolytiques avec un déni complet du trouble fonctionnel.

Les certificats rédigés dans les 24 et 72 heurs de l'admission et l'avis médical motivé transmis dans la perspective de l'audience devant le juge des libertés et de la détention ont confirmé la nécessité de soins psychiatriques contraints sous la même forme de prise en charge au constat d'une désorganisation mentale et d'éléments délirants de premier plan, systématisés avec une anosognosie totale conduisant M. [O] à réclamer sa sortie malgré les troubles altérant son jugement.

Par référence à l'avis parfaitement motivé et circonstancié transmis le 12 mai 2023 dans la perspective de l'audience à hauteur d'appel conformément à l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, les motifs médicaux en faveur du maintien de l'hospitalisation complète demeurent.

Le psychiatre participant à la prise en charge de ce patient y relève en effet la persistance depuis son admission d'un discours diffluent émaillé d'éléments interprétatifs, délirants avec une absence de critique de l'inadaptation de son comportement et de difficultés dans les relations à autrui.

Il ajoute clairement, qu'en dépit d'une amélioration récente du contact relationnel, d'un certain apaisement sur le plan émotionnel et d'une acceptation des soins plus qu'une véritable adhésion, la sortie réclamée par l'intéressé apparaît prématurée dès lors que la situation clinique mérite d'être davantage améliorée avant un retour à domicile.

Il est ainsi médicalement établi que les troubles objectivés chez M. [J] [O] rendent toujours impossible son consentement et que son état mental continue d'imposer des soins assortis d'une surveillance constante qui justifient la poursuite de sa prise en charge dans le cadre contraint et contenant de l'hospitalisation complète.

La décision entreprise sera donc confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties demeure adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état mental de l'intéressé et à la mise en oeuvre du traitement qu'il requiert.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens seront laissés à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président de la cour d'appel,

statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et prononcée par mise à disposition au greffe

En la forme,

DÉCLARONS l'appel recevable ;

Au fond,

REJETONS le moyen d'irrégularité soulevé pour le compte de M. [J] [O];

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 09 mai 2023 par le juge des libertés et de la détention de Laval ayant autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de M. [J] [O] ;

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA C. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00011
Date de la décision : 17/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-17;23.00011 ?
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