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10/05/2023 | FRANCE | N°23/00010

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 10 mai 2023, 23/00010


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 10



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 21 Avril 2023



N° RG 23/00010 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FEYH



ORDONNANCE

DU 10 MAI 2023



Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Madame [U] [J]r>
née le 20 Décembre 1972 à [Localité 5] (GABON)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

actuellement hospitalisée au [3]



Comparante assistée de Me Morgane BOUCHARA, avocat au barreau d'ANGERS,...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 10

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 21 Avril 2023

N° RG 23/00010 - N° Portalis DBVP-V-B7H-FEYH

ORDONNANCE

DU 10 MAI 2023

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 16 décembre 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [U] [J]

née le 20 Décembre 1972 à [Localité 5] (GABON)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

actuellement hospitalisée au [3]

Comparante assistée de Me Morgane BOUCHARA, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉS A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DU [3]

centre hospitalier spécialisé

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Non comparant, ni représenté,

Madame [Z] [F]

née le 26 Septembre 1986 à [Localité 4] (GABON)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparante,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 10 Mai 2023, il a été indiqué que la décision serait prononcée dans l'après-midi du 10 mai 2023, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par décision du directeur du [3] en date du 11 avril 2023, Mme [U] [J], née le 20 décembre 1972 à [Localité 5] (Gabon), a été admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète sur demande d'un tiers, en l'espèce de sa fille, Mme [Z] [F], au visa de l'urgence.

Cette décision a été prise sur la base d'un certificat dressé le jour même par le docteur [Y], médecin psychiatre au [3], décrivant l'état de santé de l'intéressée et précisant que les troubles mentaux constatés rendent impossible son consentement et justifient des soins immédiats assortis d'une surveillance constant en urgence compte tenu du risque grave d'atteinte à son intégrité physique.

Sur la base des certificats médicaux dressés dans les 24 et 72 heures de l'admission en hospitalisation complète par les docteurs [C] et [L], tous deux psychiatres exerçant au sein de l'établissement de soins, le directeur du [3] a, le14 avril 2023, décidé du maintien de Mme [U] [J] en soins psychiatriques contraints sous la même forme de prise en charge.

Les décisions portant admission et maintien de cette mesure de soins ont été notifiées à Mme [U] [J] les 12 et 16 avril 2023.

Saisi par requête du directeur du [3] en date du 18 avril 2023 aux fins de contrôle de la mesure d'hospitalisation complète dans les 12 jours de l'admission à laquelle a été joint notamment l'avis rédigé le 17 avril 2023 par le docteur [C], psychiatre de l'établissement d'accueil, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers a, par ordonnance rendue le 21 avril 2023 sur avis conforme du parquet du 20, autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [U] [J].

Par lettre simple reçue au Greffe de la cour d'appel d'Angers le 02 mai 2023, Mme [U] [J] a relevé appel de cette décision qui lui a été notifiée le jour de son prononcé.

L'ensemble des parties concernées a été convoqué à l'audience d'appel du mercredi 10 mai 2023 à 11 heures et le dossier communiqué au Ministère Public le 02 mai 2023.

Dans un avis circonstancié daté du 03 mai 2023, transmis au greffe de la Cour le 05 mai 2023 et dont la teneur a été rappelée à l'audience, le docteur [C], psychiatre du [3], a conclu au maintien de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte.

DEBATS EN APPEL

A l'audience publique du 10 mai 2023, Mme [U] [J] est assistée de Maître Morgane Bouchara, avocate au barreau d'Angers désignée au titre de la commission d'office en suite de la demande de la personne hospitalisée.

Entendue sur les motifs de son appel, Mme [U] [J] souhaite rentrer et suivre son traitement à son domicile. Elle se dit ignorer les raisons de ce traitement qu'elle est obligée de prendre et se dit prête à consulter un psychologue si nécessaire.

Pour sa part, son conseil souligne que la procédure est régulière. Sur le fond, elle relaye les dires de sa cliente qui est hospitalisée depuis presque un mois et dont l'état s'est amélioré. Elle observe que Mme [J] est plus enclin à prendre son traitement, souhaite rentrer chez elle avec un suivi psychologique, travaille chez Auchan et est bien entourée par ses enfants qui sont prêts à aider à la prise du traitement à domicile.

Tiers demandeur à l'hospitalisation, Mme [Z] [F] est présente. Entendue en ses observations, Mme [F] fait état la nette amélioration du comportement et des propos de sa mère depuis son admission. Elle constate ainsi que cette dernière est plus réceptive à la prise du traitement et se montre plus calme en ne braquant plus comme avant. Elle ajoute que la demande de tiers a été faite en accord avec ses frère et soeur qui souhaitent tout comme elle-même que leur mère regagne son domicile avec leur surveillance car si auparavant celle-ci était réfractaire au traitement, elle se montre plus dans l'acceptation actuellement.

Bien que régulièrement convoqué, M. le directeur du [3] est absent et non représenté.

Dans son avis écrit daté du 05 mai 2023 dont il est donné lecture à l'audience, le Parquet Général conclut à la recevabilité de l'appel et, au fond, à la confirmation de l'ordonnance entreprise.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Mme [U] [J] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable et sera déclaré comme tel.

- Sur la poursuite de la mesure de soins

En droit et aux termes de l'article L. 3212-1 I du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L 3211-2-1 du dit code.

Par ailleurs, l'article L 3212-3 du code de la santé publique énonce qu'en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement de soins mentionné à l'article L 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement.

En outre et selon l'article L 3211-12-1 du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation en soins psychiatriques a été prononcée à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent en application de l'article L 3212-1 du dit code, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

Il sera enfin rappelé que si le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, il ne peut substituer son avis à l'évaluation par les médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Dans le cas présent, il ressort des éléments détaillés dans l'exposé des faits et de la procédure que figurent au dossier l'ensemble des avis et certificats motivés légalement exigés ainsi que les décisions administratives intervenues à ce jour et leur notification à la personne hospitalisée.

La procédure est donc régulière étant précisé qu'aucune observation n'est formulée à cet égard en cause d'appel.

S'agissant de la poursuite de la mesure de soins, les pièces du dossier notamment médicales établissent que Mme [U] [J], âgée de 50 ans, a été admise le 11 avril 2023 en soins contraints sous le régime de l'hospitalisation complète en vertu d'une décision du directeur du [3] prise à la demande de sa fille selon la procédure d'urgence prévue à l'article L 3212-3 du code de la santé publique dans un contexte de décompensation délirante évoluant depuis plusieurs mois avec refus d'adaptation thérapeutique et un état d'agitation au domicile.

Dans le certificat médical rédigé en vue de cette admission, ont été objectivés chez l'intéressée des troubles du comportement se manifestant par une logorrhée, un syndrome de persécution, un vécu délirant de mécanisme hallucinatoire et interprétatif avec adhésion totale, une anosognosie ainsi qu'un refus de traitement et d'alimentation. La nature et la gravité des troubles ainsi constatés ont caractérisé la nécessité de soins urgents en milieu spécialisé sous contrainte et le risque grave d'atteinte à l'intégrité physique de Mme [U] [J].

Les divers certificats et avis médicaux parfaitement circonstanciés et motivés se prononçant en faveur du maintien de soins psychiatriques contraints sous la même forme de prise en charge qui ont fait suite à l'admission de Mme [U] [J] -notamment ceux rédigés dans les 24 et 72 heures de son admission- ont pour leur part mis en évidence la persistance d'un vécu persécutif non accessible à la critique ainsi qu'une anosognosie majeure.

Tel est encore le cas de l'avis motivé actualisé au 03 mai 2023 dont la transmission répond aux exigences de l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique.

Le praticien participant à la prise en charge de Mme [J] mentionne en effet qu'est objectivée depuis l'admission de l'intéressée la persistance d'un syndrome délirant relativement structuré, de thématiques identitaire et de persécution avec initialement une participation affective intense, à ce jour, relativement contenue. Le psychiatre ajoute que l'intéressée se montre néanmoins toujours très opposée à cette hospitalisation, ayant pu accepter la reprise d'un traitement adapté mais niant sur le fond la nécessité de soins, estimant ne pas présenter de troubles psychiatriques et considérant l'hospitalisation comme abusive. Il en conclut clairement qu'un temps d'hospitalisation demeure nécessaire afin d'adapter la prescription médicamenteuse et d'aider la patiente dans la reconnaissance du caractère pathologique de ses troubles avec, à ce jour, un risque élevé de rupture précoce des soins en cas de retour à domicile prématuré.

L'ensemble de ces éléments médicaux, y compris les plus récents, témoigne ainsi de ce qu'en dépit de l'amélioration de son état psychique objectivé sur le plan médical et par son entourage proche depuis l'admission, les troubles dont souffre Mme [U] [J] rendent toujours impossible son consentement et que son état mental continue d'imposer des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante.

Par conséquent, la décision entreprise sera confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties reste à ce jour adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état mental de l'intéressée et à la mise en oeuvre du traitement qu'il requiert.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens seront laissés à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le Délégué du premier président de la cour d'appel,

Statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

En la forme,

DÉCLARONS l'appel recevable ;

Au fond,

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 21 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers ayant autorisé le maintien des soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète de Mme [U] [J].

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA C. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 23/00010
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;23.00010 ?
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