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23/03/2023 | FRANCE | N°19/02363

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 23 mars 2023, 19/02363


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B





NB/FB

ARRET N°



AFFAIRE N° : N° RG 19/02363 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETGC



jugement du 17 Septembre 2019

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 15/01275



ARRET DU 23 MARS 2023



APPELANT :



M. [S] [P]

né le 31 Octobre 1956 à LANDIVISIAU (29400)

[Adresse 4]

[Localité 2]



représenté par Maître Cyrielle DAVID, avocat postulant au barreau d'ANG

ERS et par Me Jean-François ABADIE, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX



INTIMEE :



Mme [H] [A] divorcée [P]

née le 29 Juin 1956 à BREST (29200)

[Adresse 11]

[Localité 3]



représentée pa...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

NB/FB

ARRET N°

AFFAIRE N° : N° RG 19/02363 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ETGC

jugement du 17 Septembre 2019

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance 15/01275

ARRET DU 23 MARS 2023

APPELANT :

M. [S] [P]

né le 31 Octobre 1956 à LANDIVISIAU (29400)

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Maître Cyrielle DAVID, avocat postulant au barreau d'ANGERS et par Me Jean-François ABADIE, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

INTIMEE :

Mme [H] [A] divorcée [P]

née le 29 Juin 1956 à BREST (29200)

[Adresse 11]

[Localité 3]

représentée par Me Nathalie GREFFIER, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, Mme BUJACOUX, Conseillère ayant été préalablement entendue en son rapport, puis mise en délibéré au 30 novembre 2022, délibéré prorogé au 26 janvier puis 23 mars 2023, devant la Cour composée de :

Mme COURTADE, Présidente de chambre

Mme BUJACOUX, Conseillère

Mme PARINGAUX, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 23 mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Signé par Mme COURTADE, présidente de chambre et par Mme BOUNABI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [H] [A] et M. [S] [P] se sont mariés le 5 juillet 1979 devant l'officier d'état civil de la Mairie de [Localité 6] (29), sans contrat préalable.

Par jugement en date du 30 juin 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grand instance d'Angers a prononcé le divorce des époux [S] [P] et [H] [A].

La cour d'appel d'Angers, dans un arrêt en date du 17 décembre 2012, a infirmé le jugement entrepris en ses dispositions relatives au divorce, à la prestation compensatoire et à la pension alimentaire et confirmé le jugement pour le surplus.

Par jugement en date du 15 novembre 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Angers a notamment :

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des intérêts respectifs des époux [P]-[A] conformément à leur régime matrimonial et commis maître [K] [U], notaire à [Localité 3], pour y procéder ;

- ordonné, avant dire droit, une mesure d'expertise, commis pour y procéder M. [J] [O], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Angers, avec pour mission de proposer une estimation de l'immeuble d'habitation, sis [Adresse 11] au jour le plus proche du partage et de déterminer la valeur locative mensuelle de l'immeuble dont s'agit depuis la séparation du couple.

L'expert a déposé son rapport le 28 septembre 2017.

Par ordonnance en date du 18 juin 2018, le juge commis a désigné maître [F] [Z] notaire à [Localité 3] aux lieu et place de maître [K] [U], notaire à [Localité 3], pour procéder à la liquidation et au partage des intérêts respectifs des ex-époux [P]-[A].

Par jugement du 17 septembre 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Angers a notamment :

- débouté Mme [A] de sa demande de voir écarter des débats les conclusions récapitulatives numéro trois et les pièces signifiées par voie électronique par M. [P] le 21 avril 2019 ;

- déclaré les dernières écritures de M. [P] recevables ;

En conséquence,

- débouté Mme [A] de sa demande de rejet desdites écritures ;

- débouté M. [P] de sa demande de voir prononcer la nullité du rapport d'expertise de M. [O] en date du 28 septembre 2017 ;

- fixé à la somme de 250 000 euros la valeur du bien immeuble situé [Adresse 11] ;

- dit que Mme [A] est redevable d'une indemnité d'occupation au bénéfice de l'indivision post communautaire du 12 juin 2009 jusqu'à la date effective du partage définitif, la vente de l'immeuble ou la libération des lieux par remise des clés au notaire ;

- fixé l'indemnité d'occupation due par Mme [A] à la somme de 833 euros par mois correspondant à 4% de l'évaluation retenue (250 000 euros x 4 % = 10 000 euros par an soit 833,33 euros par mois), et ce pour la période du 12 juin 2009, date de l'occupation par Mme [A] du domicile commun à titre onéreux, jusqu'à la date effective du partage, la vente de l'immeuble ou la libération des lieux par remise des clés au notaire ;

- débouté M. [P] de sa demande d'avance sur communauté en application des dispositions de l'article 815-11 du code civil ;

- débouté M. [P] de sa demande de remplacement de maître [Z] notaire à [Localité 3] ;

- renvoyé les parties devant maître [Z] , notaire désigné judiciairement, afin que soit dressé un nouveau projet d'état liquidatif ;

- rejeté les contestations de M. [P] relatives au projet d'état liquidatif dressé par maître [E] ;

- débouté M. [P] de sa demande au titre des indemnités de licenciement ;

- débouté M. [P] de sa demande au titre des sommes versées sur le compte joint du 24 décembre 2006 au 3 mai 2007 inclus ;

- débouté M. [P] de sa demande de dommages intérêts ;

- débouté Mme [A] de sa demande de dommages intérêts ;

- débouté les parties de leurs autres demandes ;

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres frais irrépétibles ;

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation et partage;

- autorisé l'application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause pouvant y prétendre.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour d'appel d'Angers le 2 décembre 2019, M. [P] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a " débouté M. [P] de sa demande de voir prononcer la nullité du rapport d'expertise de M. [O] en date du 28/09/2017; fixé à la somme de 250 000 euros la valeur du bien immobilier situé [Adresse 11] ; fixé l'indemnité d'occupation due par Mme [A] à la somme de 833 euros par mois correspondant à 4 % de l'évaluation retenue (250 000 x 4% = 10 000 euros par an soit 833,33 euros par mois) et ce pour la période du 12/06/2009 date de l'occupation par Mme [A] du domicile commun à titre onéreux jusqu'à la date effective du partage, la vente de l'immeuble ou la libération des lieux par remise des clés au notaire ; débouté M. [P] de sa demande d'avance sur communauté en application des dispositions de l'article 815-11 du code civil ; rejeté les contestations de M. [P] relatives au projet d'état liquidatif dressé par Me [E] ; débouté M. [P] de sa demande au titre des indemnités de licenciement ; débouté M. [P] de sa demande au titre des sommes versées sur le compte joint du 24/12/2006 au 3/05/2007 inclus ; - débouté M. [P] de sa demande de dommages-intérêts ; débouté les parties de leurs autres demandes ; laissé à chacune des parties la charge de ses propres frais irrépétibles ; dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation et partage ; autorisé l'application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause pouvant y prétendre.'

Mme [A] a constitué avocat le 2 mars 2020.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 septembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 13 septembre 2022, M. [P] demande à la présente juridiction de :

- déclarer l'appel recevable ;

- le dire bien fondé.

- infirmer le jugement dont appel sur les chefs dudit jugement critiqués dans la déclaration d'appel ;

- débouter Mme [A] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à titre principal et à titre d'appel incident ;

Et statuant a nouveau,

- prononcer la nullité du rapport d'expertise déposé par M. [J] [O] ;

- fixer le prix du bien immobilier sis [Adresse 11] à la somme de 425 000 euros, prenant en considération l'évolution à la hausse du prix du marché immobilier Angevin et en considération de l'évaluation faite par l'Expert et déduction faite d'une prétendue vétusté déduite à hauteur de 20 000 euros ;

Et si la juridiction ne s'estimait pas suffisamment informée, et avant dire droit,

- désigner tel expert qui plaira à la cour avec une mission d'usage simplifiée et accélérée aux fins de fixer et d'actualiser la valeur du bien immobilier du [Adresse 11], notamment en considération de l'évolution spectaculaire du prix de l'immobilier à Angers depuis au moins 5 ans, et ce aux frais avancés de l'appelant, et au besoin désigner maître [F] [Z] pour effectuer cette évaluation ;

- fixer l'indemnité d'occupation due par Mme [A] à l'indivision post communautaire à la somme de 1 200 euros par mois avec indexation pour les valeurs locatives antérieures jusqu'au 12 juin 2009 et avec indexation pour les valeurs locatives postérieures jusqu'à la liquidation et le partage de la communauté ;

- dire et juger que la valeur locative ne saurait faire l'objet d'une réfaction de 20 %, Mme [A] ne justifiant pas de la précarité de son occupation en raison de sa désignation en qualité d'attributaire préférentielle du bien immobilier ;

- dire et juger que Mme [A] ne justifie pas du bien-fondé de la récompense sollicitée à la communauté ;

- dire et juger que la somme de 38 586,06 euros versée à M. [P] en réparation de son préjudice moral doit être considérée comme une récompense que lui doit la communauté ;

- dire et juger que Mme [A] doit la somme de 14 670 euros à M. [P] à titre de créance entre époux ;

- dire et juger que l'ensemble des sommes versées par M. [P] sur le compte joint des époux à compter du 24 décembre 2006 sont également constitutives de récompenses au profit de M. [P] ;

- condamner Mme [A] à payer à M. [P] la somme de 25 000 euros à titre de provision sur la liquidation à intervenir ;

- condamner Mme [A] à payer à M. [P] la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

- condamner Mme [A] à verser à M. [P] la somme de 5 000 euros, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [A] aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le 9 septembre 2022, Mme [A] demande à la présente juridiction de :

- déclarer M. [P] non fondé en son appel : l'en débouter ainsi que de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- recevant Mme [A] en son appel incident y faisant droit ainsi qu'en I'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- débouter M. [P] de sa demande de nullité du rapport d'expertise dressé par M. [O] ;

Statuant après le dépôt du rapport d'expertise dressé par M. [O],

- dire que la valeur de l'immeuble situé [Adresse 11] ne saurait excéder la somme de 220 000 euros ;

-subsidiairement, s'il ne devait pas être fait droit à la demande de Mme [A] de valoriser le bien à la somme de 220'000 euros, retenir la valorisation de l'expert à hauteur de 240'000 euros ;

- dire que l'indemnité d'occupation due par Mme [A] à I'indivision, ne saurait excéder la somme de 924 euros par mois, sur laquelle il convient de déduire 20 % en sa qualité de copropriétaire ;

- dire que cette indemnité prendra effet à compter du 12 juin 2009 (cf pièce N°2- ordonnance du juge de la mise en état du 1er septembre 2009) ;

-déclarer M. [P] irrecevable subsidiairement mal fondé en sa demande de désignation d'un nouvel expert ;

- condamner M. [P] à verser à Mme [A] une somme de 80 000 euros minimum à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et financier sur le fondement de I'article 1382 ancien du code civil ;

- et rejetant toutes prétentions contraire comme non recevables en tout cas non fondées ;

- confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions non contraires aux présentes ;

- débouter M. [P] de sa demande d'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [P] à verser à Mme [A] une somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais liés au procès verbal de difficulté.

Pour un exposé plus ample des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions sus visées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité du rapport d'expertise

Il résulte de l'article 175 du code de procédure civile que : « La nullité des décisions et actes d'exécution relatifs aux mesures d'instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure. »

Au soutien de son appel, M. [P] entend rappeler les difficultés rencontrées à l'occasion du déroulement de l'expertise de M. [O], notamment s'agissant de l'opposition rencontrée lorsqu'il a souhaité la présence de M. [W], expert immobilier, à ses côtés.

Il indique à cet effet que seule l'intervention du conseil de la partie adverse a permis que l'expertise puisse se dérouler avec cet expert amiable.

Il estime que l'expert n'a, par ailleurs, pas respecté le principe du contradictoire tout au long de ses opérations, ce qui constitue un vice de fond entachant le rapport d'expertise.

Il fait état de l'impossibilité de présenter certaines pièces ou observations, et s'étonne que l'expert n'ait pas procédé à un reportage photographique de l'immeuble.

Il reproche également à l'expert d'avoir laissé la fille des ex-conjoints assister aux opérations d'expertise, alors que selon lui, Mme [A] manipule leur fille celle-ci refusant de parler à son père depuis des années.

L'expert aurait par ailleurs, selon lui, rejeté les éléments donnés sur les locations effectuées par Mme [A].

M. [P] reproche à l'expert un défaut de communication de son pré-rapport, et un défaut de communication des éléments lui permettant de fonder son appréciation, malgré les demandes réitérées dans les deux dires qui lui ont été transmis.

Il fait aussi état du fait que l'expert aurait choisi d'ignorer l'avenant de son expert conseil, M. [W]. Il conclut en indiquant maintenir sa demande d'annulation malgré le fait que, compte tenu de l'évolution du marché immobilier, celle-ci perd quelque peu de son impact.

Mme [A] fait valoir qu'il a déjà été statué sur les manquements supposés au devoir de l'expert, par le juge du contrôle des expertises dans une ordonnance du 25 juillet 2017, et que cette ordonnance concluait que sur la période de février à avril 2017, M. [P] n'apportait pas la preuve des manquements de l'expert.

Concernant l'absence de prise de clichés photographiques, elle soutient qu'il n'entrait pas dans la mission de l'expert d'autoriser ou non une partie à prendre des photos.

Elle ajoute l'inutilité de débattre sur la présence de M. [W], lequel a bien assisté aux opérations au côté de M. [P].

Elle conteste le fait que leur fille, habitant dans les lieux, ait fait obstruction au déroulé des opérations, précisant que les parties devaient parfois entrer dans chacune des pièces à tour de rôle, compte tenu de leur exiguïté.

Elle ajoute que le juge chargé du contrôle des expertises a tranché sur ce point.

Elle indique encore que la question des locations de chambres effectuées par elle jusqu'en 2012 et 15 jours en 2013, est une question de fond et n'a rien à voir avec un prétendu non-respect du principe du contradictoire.

Sur la communication du pré-rapport, elle souligne que le juge chargé du contrôle des expertises a retenu que M. [P] ne démontrait pas de manquement de la part de l'expert.

Elle affirme encore que l'expert a répondu aux différents dires, en expliquant sa manière de procéder, les méthodes d'estimation retenues, et qu'il n'est pas démontré qu'il y aurait une rétention de quelque pièce que ce soit de sa part.

Sur ce,

Il résulte du rapport d'expertise de M. [O], en date du 28 septembre 2017, que la mission de l'expert était la suivante :

« - se rendre sur les lieux sis [Adresse 11],

- se faire remettre tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

- visiter et décrire les lieux,

- proposer une estimation de l'immeuble d'habitation sise [Adresse 11] au jour le plus proche du partage,

- déterminer la valeur locative mensuelle de l'immeuble dont s'agit depuis la séparation. »

Une ordonnance d'incident d'expertise rendue par le juge chargé du contrôle des expertises en matière familiale, en date du 25 juillet 2017, à débouté M. [P] de sa demande aux fins de remplacement de M. [O] en sa qualité d'expert et prorogé jusqu'au 29 septembre 2017 le délai imparti à l'expert pour déposer son rapport.

Cette ordonnance a tranché plusieurs contestations.

Sur la difficulté s'agissant de la présence de M. [W], expert immobilier, aux côtés de M. [P], le juge a précisé qu'il était constant que cet expert avait pu assister à la visite du bien immobilier le 9 mars 2017 et qu'aucun manquement en conséquence n'était établi à ce titre de la part de l'expert.

Il indique par ailleurs que la seule présence de la fille de Mme [A] lors des opérations d'expertise, sans intervention de sa part sur celles-ci, ne saurait être reproché à l'expert, étant précisé que le bien immobilier constitue son lieu de résidence.

Concernant le reproche de M. [P] quant à la communication du pré-rapport, le juge précise que l'expert reconnaît une erreur de transmission le 30 mars 2017 affectant les deux parties, avec un nouvel envoi par courriel le 4 avril 2017 ayant permis une communication régulière.

Il est ajouté que malgré une erreur de transmission de la pièce jointe au conseil de M.[P], cela n'a pas été préjudiciable puisque il y a eu transmission d'un dire détaillé dès le 27 avril 2017, soit dans le délai d'un mois fixé par l'expert, et qu'en tout état de cause cette erreur réalisée par l'avocat postulant ne pouvait être reprochée à l'expert.

Le juge fait état de ce dire, indiquant qu'il portait sur le fond de l'expertise mais également sur les manquements que M. [P] reprochait à l'expert et qui étaient repris dans le cadre de l'incident.

Le juge du contrôle des expertises concluait au fait que M. [P] ne démontrait pas de manquement de la part de l'expert.

Le premier juge reprend la motivation de l'ordonnance, précisant que le pré-rapport a été régulièrement adressé par courriel aux deux parties le 4 avril 2017, après une difficulté reconnue de transmission initiale le 30 mars 2017, et que M. [P] a pu transmettre dans le délai requis le 27 avril 2017 un dire.

Il précise encore à juste titre que la visite du quartier par l'expert ne nécessitait aucun débat contradictoire et que l'expert judiciaire n'est pas tenu par les conclusions amiables de l'expert de M. [P], conservant toute latitude pour chiffrer le bien immeuble selon les méthodes de calcul choisies et précisées au rapport.

Concernant le grief de l'absence de clichés photographiques, il convient de constater qu'il n'entrait pas dans la mission de l'expert d'effectuer de reportage photographique.

La question des locations évoquée n'a par ailleurs aucun rapport avec le respect par l'expert des missions confiées, et relève du fond du litige.

En définitive, M. [P] a pu par l'intermédiaire de son conseil, déposer un dire le 27 avril 2017 et un deuxième le 5 septembre 2017.

M. [O] a, dans son rapport, répondu à ces dires. M. [P] ne démontre pas que l'expert n'aurait pas accompli son travail conformément à sa mission, ni qu'il aurait violé le principe du contradictoire.

Il ne démontre pas non plus avoir subi un quelconque préjudice suite aux difficultés rencontrées dans le cadre de cette expertise, concédant au surplus, que sa demande de nullité n'est plus vraiment d'actualité et a perdu de son impact, compte tenu de l'évolution du marché immobilier.

M. [P] sera en conséquence débouté de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du rapport d'expertise de M. [J] [O].

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'évaluation de l'immeuble situé [Adresse 11]

M. [P] entend souligner des contradictions dans le rapport de l'expert, consistant à mettre en avant une vétusté excessive et un défaut d'entretien de l'immeuble et en même temps indiquer que la maison est en bon état de vétusté.

Il prétend que les éléments objectifs à retenir sur l'état de la maison portent sur l'étroitesse des pièces, les rafraîchissements des sols et peintures, une fuite dans la douche et les velux de l'étage qui ne sont plus parfaitement étanches.

Il ajoute que ces éléments ne sont pas suffisants pour justifier des valorisations aussi importantes à la baisse quant à la valeur du bien immobilier et de la valeur locative.

Il estime que Mme [A] demeure juridiquement responsable de la vétusté ne pouvant dès lors s'en prévaloir pour obtenir une baisse de la valorisation du bien.

M. [P] reproche par ailleurs au premier juge d'avoir estimé le bien en omettant de prendre en considération l'évolution singulière du marché angevin de l'immobilier.

Il fait état d'un avenant de M. [W] du 15 mars 2017 fixant une évaluation à hauteur de 281'000 euros.

Il estime que Mme [A] oublie l'évolution mécanique du prix de l'immobilier en France et particulièrement dans la région d'[Localité 3], en fixant un prix du bien immobilier de 220'000 euros inférieur à son prix d'achat, alors que dans le même temps le prix de l'immobilier aurait pris 30 points d'indice. Il se réfère à plusieurs articles de presse spécialisée, ayant constaté cette évolution depuis 2018.

Il ajoute que la deuxième ligne de tramway d'[Localité 3] va avoir un arrêt à environ 900 m à pied de la [Adresse 11]. Il estime, se référant au site 'se loger.com', que le prix au mètre carré pour une maison dans cette rue peut être estimé en juillet 2022 à 3 800 euros, et qu'il est bien fondé à ce que le montant du bien immobilier soit augmenté de 70 % pour être fixé à la somme de 425'000 euros.

Subsidiairement, il sollicite la désignation d'un expert pour fixer la valeur actualisée du bien.

Mme [A] affirme que les rénovations supportées par la communauté n'ont été que partielles et superficielles alors qu'il aurait fallu déjà prévoir des travaux de fond tels que plomberie, ravalement extérieur, changement de velux, lesquels n'ont jamais été entrepris.

Elle ajoute que les seuls travaux réalisés l'ont été par elle et sa famille, et que seule par exemple la chambre parentale a été rafraîchie.

Elle fait état du rapport d'expertise décrivant la maison en bon état avec la vétusté normale d'une construction de 28 ans, vétusté non imputable à l'occupant.

Elle reprend les défauts décrits par l'expert, tel défaut d'étanchéité des velux, un problème de fuite sur la douche du rez-de-chaussée, des moquettes usagées, un crépi d'origine, mais aussi des dégradations sous la pente du toit.

Elle entend encore indiquer qu'elle a entretenu le bien comme elle le pouvait, notamment au niveau du toit, n'ayant aucune aide financière de la part de M. [P].

Mme [A] fait encore des observations concernant les conclusions de l'expert, précise que le jardin n'est pas entièrement clos contrairement à ce qu'il indique, que la [Adresse 11] est devenue un lieu de circulation malaisée avec des constructions nouvelles, une densité de population plus importante engendrant des nuisances de tous ordres, outre les nuisances récurrentes liées aux matchs de football au stade [V] [M].

Concernant la surface du logement, elle conteste la surface de l'immeuble telle que calculée par l'expert, l'évaluant à 143,5 m², soit 10 m² de moins ce qu'il a retenu.

En outre, elle fait valoir que certaines pièces sont extrêmement étroites, telles que les chambres, ajoutant qu'une seule chambre sur les cinq dépasse les 9 m².

Mme [A] assure que les comparaisons faites par M. [P] avec d'autres biens ne sont pas crédibles dans la mesure où il ignore leurs caractéristiques.

Elle propose de retenir pour l'immeuble un prix du m² de 1 650 euros ou 1 700 euros, et souhaite que celui-ci soit évalué à la somme de 220 000 euros, ou subsidiairement à 240 000 euros.

Mme [A] indique encore que M. [P] n'a réglé que 20 % des échéances d'emprunt ce qu'il l'a empêchée d'entreprendre des travaux d'envergure.

Elle fait état des frais inhérents à l'entretien et aux études des enfants.

Sur ce,

Le rapport d'expertise de M. [O] décrit la propriété située dans le [Adresse 10] comme étant composée au rez-de-chaussée, d'une entrée avec escalier d'accès à l'étage d'un séjour salon, une cuisine ouverte, d'une arrière-cuisine, d'un dégagement, d'un WC et d'une chambre avec un garage attenant ; à l'étage d'un dégagement cinq chambres dont une avec dressing, salle de bains et un WC. La surface utile indiquée est de 153 m² environ la surface habitable de 132 m² environ et la surface annexe (garage) de 23 m² environ. La maison comprend un jardin.

L'expert fait état d'un problème de fuite non résolue sur la douche du rez-de-chaussée et d'un défaut d'étanchéité des velux. Il note un crépi d'origine en état à l'extérieur, une couverture récemment révisée et démoussée. Il précise que ces points mis à part, il faut considérer que la maison est globalement en bon état avec la vétusté normale d'une construction de 28 ans.

Il décrit des éléments valorisants liés à la situation, proximité des commerces et transports en commun, secteur pavillonnaire et rues calmes. D'autres éléments dévalorisants sont relevés, à savoir l'étroitesse des pièces et notamment des chambres, et la nécessité d'envisager des travaux de plomberie et de rafraîchissement des peintures et tapisseries.

Il retient, compte tenu de l'évolution du marché à la baisse jusqu'au début 2017, un prix unitaire de 1 700 euros le m² utile, estime la valeur vénale à la somme de 240'100 euros, en mars 2017, et la valeur locative mensuelle à la somme de 924 euros. Il opère un abattement pour vétusté d'environ 20'000 euros.

L'expert a répondu aux dires du conseil de Mme [A] en indiquant que les logements nouveaux dans le secteur n'entraînaient pas de moins-value sur les propriétés, et que concernant la surface prise en compte, les prix unitaires des références sont bien exprimés en m² utiles.

En réponse aux dires du conseil de M. [P], il précise que le rapport détaillé de M. [W] a été examiné, précise que la valeur vénale est établie suivant l'état actuel de l'immeuble, ajoute que la vétusté excessive ne semble pas être imputable à l'occupant.

Il s'explique également sur ses méthodes d'estimation et de calcul de l'évolution des prix et des taux. Il conclut enfin à la reprise à la hausse de l'ordre de 1 à 2 %, le conduisant à actualiser les estimations initiales pour arriver à valeur vénale de 240 à 245 000 euros, au terme de son rapport du 28 septembre 2017.

Compte tenu des observations de Mme [A] sur les travaux à effectuer, il sera constaté que celles-ci correspondent à ce qu'indique l'expert. Il y a également lieu de constater que l'expert a bien tenu compte d'éléments dévalorisants comme l'étroitesse des chambres, et la nécessité de procéder à des travaux de rafraîchissement dans la maison. Il convient donc de retenir la somme de 20'000 euros au titre de l'abattement fixé par M. [O].

Par ailleurs, le quartier dans lequel se situe l'immeuble, amène bien à considérer qu'il y a une proximité avec les transports en commun et avec les commerces, ces éléments devant être mis en exergue comme étant valorisants, ainsi que le précise l'expert.

Concernant l'évolution du marché, les éléments et les chiffres repris par l'expert, datant de 2017, sont à réactualiser, ainsi que le fait valoir M. [P], compte tenu de l'évolution du marché, surtout depuis 2019 et avec notamment l'influence des périodes de confinement dues à la pandémie Covid, qui ont attiré les acheteurs dans l'ouest et dans les villes de moyenne importance.

M. [P] produit à cet effet plusieurs documents provenant de sites ou d'une presse spécialisée dans l'immobilier qui démontrent une hausse des prix du marché relativement importante depuis cette date.

Ainsi, le site « se loger.com » fait état en 2019 d'une hausse de 11 % sur un an du prix de l'immobilier à [Localité 3], compte tenu de plusieurs facteurs. Le 13 mars 2020, « Figaro Immo » publie un article faisant état d'un prix médian en mètres carrés de 2 200 euros dans le quartier [Adresse 8], soit une hausse de 19,28 %. Le courrier de l'Ouest du 27 mai 2021 fait état d'une augmentation par rapport au premier trimestre de l'an passé, une hausse de près de 17 % à [Localité 3].

M. [P] produit également un autre document de « se loger », non daté, faisant état de prix allant de 3 541 euros à 3 837 euros le m², pour un bien situé [Adresse 11].

Malgré cela, aucun élément détaillé permettant d'apprécier les ressemblances avec la maison des parties n'est produit, aucune évaluation récente de l'immeuble en lui-même n'est fournie.

Il est donc nécessaire de faire procéder à une actualisation de la valeur du bien par le biais d'une expertise .

M. [P] étant demandeur à cette expertise, les frais de consignation seront mis à sa charge.

Sur l'indemnité d'occupation

Il résulte de l'article 815-9 du Code civil que: « Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision.

À défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité. »

Il est de principe que le juge se fonde, pour fixer le quantum de l'indemnité d'occupation, sur la valeur locative du bien. Le droit de l'occupant étant plus précaire que celui d'un locataire protégé par un statut légal, il est usuellement opéré une réfaction sur cette valeur locative, qui peut varier de 15 à 30 % d'un loyer normal.

L'indemnité dont l'indivisaire occupant est redevable revient à l'indivision et non pas au conjoint co-indivisaire.

M. [P] conteste l'appréciation de l'expert ayant fixé une valeur locative un montant de 924 euros, précisant que le bien immobilier ne saurait se situer au plus bas de la fourchette locative, et que l'existence d'un garage est un élément qui ajoute de la valeur ajoutée à la location.

Il sollicite que l'indemnité d'occupation soit fixée à 1 200 euros par mois avec indexation pour les valeurs locatives antérieures jusqu'au 12 juin 2009, et avec indexation pour les valeurs locatives postérieures jusqu'à la liquidation et le partage de la communauté.

Il estime qu'un abattement sur l'indemnité d'occupation n'est pas justifié, Mme [A] étant devenue attributaire préférentielle du bien depuis 2011.

Il affirme qu'une fixation à 9 euros le m² est appropriée à ce jour.

Mme [A] fait valoir que c'est à tort que M. [P] réclame l'indemnité d'occupation à partir de décembre 2006, occultant les termes de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 1er septembre 2009, qui a fixé l'indemnité d'occupation à la date du 12 juin 2009.

Elle rappelle que l'ordonnance de non-conciliation lui a attribué la jouissance gratuite du bien commun en complément au titre de l'exécution du devoir de secours.

Elle affirme qu'aucune indemnité d'occupation n'est due avant le 12 juin 2009. Elle soutient que l'indemnité d'occupation doit être minorée par rapport à la valeur locative, compte tenu d'une occupation précaire, notamment parce que la durée de l'occupation ne peut être prévisible puisque liée à la procédure de liquidation.

Elle entend ajouter qu'elle subit l'obstruction constante de M. [P], qui ne l'a pas laissée jouir pleinement du bien, se refusant au partage des biens mobiliers, l'obligeant à stocker dans le logement des biens appartenant à son ex-époux, sans qu'elle soit autorisée à s'en séparer. Elle sollicite que soit retenue l'estimation de l'expert à hauteur de 924 euros en 2017, avec déduction de 20 %.

Sur ce,

Les parties, compte tenu de la jouissance privative de l'immeuble par Mme [A], ne contestent pas le principe d'une indemnité d'occupation dont elle est redevable à l'indivision.

Concernant le montant de cette indemnité d'occupation, il convient de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'expert désigné par la cour ait déposé son rapport.

Sur la demande d'avance sur capital

Il résulte de l'article 815-11 du code civil que : « Tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels il a consenti qui lui sont opposables.

À défaut d'autre titre, l'étendue des droits de chacun dans l'indivision résulte de l'acte de notoriété de l'intitulé d'inventaire établi par le notaire.

En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserve d'un compte à établir lors de liquidation définitive.

À concurrence des fonds disponibles, il peut semblablement ordonner une avance en capital sur les droits de l'indivisaire dans le partage à intervenir. »

M. [P] soutient que les juges de première instance et de la cour ont une compétence concurrente afin de se prononcer sur une demande d'avance sur la communauté.

Il formule une demande de provision à hauteur de 25'000 euros sur la liquidation à intervenir, arguant du fait de sa situation personnelle est plus précaire que celle de Mme [A], compte tenu du fait qu'il a dû acheter une maison devant être rénovée par ses soins, et en raison du patrimoine de son ex-épouse il considère comme n'ayant rien de comparable avec le sien.

Mme [A] soutient qu'il convient de faire les comptes avant de prévoir une provision, et reprend la motivation du premier juge.

Sur ce,

Le premier juge a débouté M. [P] de sa demande d'avance sur communauté, considérant qu'en l'absence d'accord entre les parties, seul le président du tribunal de grande instance d'Angers est compétent pour statuer sur cette demande en application des dispositions de l'article 815-11 du Code civil.

Il résulte d'une jurisprudence constante qu'en l'absence de consentement unanime des indivisaires, le président du tribunal judiciaire à seul compétence pour fixer le montant de l'avance en capital ( cass civ 1ère 3 novembre 2004.01-16.031).

C'est donc à bon droit que le premier juge a débuté M. [P] de sa demande d'avance sur communauté.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les contestations de M. [P] relatives au projet d'état liquidatif de maître [E]

M. [P] indique prendre acte de ce que le projet d'état liquidatif dressé par maître [E] n'a pas reçu l'assentiment des deux parties.

Il indique toutefois avoir sollicité en première instance que soient tranchées les questions litigieuses révélées par ce projet, dont il indique qu'elles viendront nécessairement retarder les discussions devant maître [Z], désigné en remplacement de maître [E].

Il développe une argumentation visant à démontrer que Mme [A] ne justifie pas de l'existence à son profit d'une récompense de la communauté, ni d'avoir apporté à la communauté une somme réclamée d'un montant de 55'294 euros.

Mme [A] affirme que l'objet du débat n'est pas de discuter des actifs et passifs, et que cette discussion se fera lors des opérations de liquidation dont est saisi maître [Z], d'autant que M. [P] n'a, selon elle, pas adressé les pièces utiles à la liquidation au notaire.

Elle apporte des précisions concernant cette question litigieuse, confirmant que c'est en prévision de l'établissement du projet d'état liquidatif, qu'elle a produit auprès des différents notaires désignés les pièces à partir desquelles elle fera valoir des récompenses.

Elle ajoute qu'il n'appartient pas à la cour de statuer sur lesdites récompenses, le premier juge ayant renvoyé les parties devant maître [Z] pour qu'il soit dressé un nouveau projet d'état liquidatif.

Sur ce,

Le premier juge rappelle que maître [Z] a été désigné judiciairement par ordonnance du 18 juin 2018 du juge commissaire en charge des opérations de compte liquidation partage, et qu'il appartient à ce notaire de dresser un projet d'état liquidatif, celui de maître [E] n'ayant pas reçu l'assentiment des deux parties.

Il constate que Mme [A] ne sollicite pas dans ses écritures de récompense, celle-ci se contentant de rappeler que la discussion se fera sur les actifs et passifs lors des opérations de liquidation dont est saisi maître [Z].

Il renvoie donc les parties devant ce notaire afin que soit dressé un nouveau projet d'état liquidatif.

Force est de constater que la cour n'est pas saisie d'une demande de récompense de Mme [A].

Le jugement ayant renvoyé les parties devant maître [Z] afin que soit dressé un nouveau projet d'état liquidatif, et ayant rejeté les contestations de M. [P] relatives au projet d'état liquidatif dressé par maître [E], sera donc confirmé.

Sur la demande au titre des indemnités de licenciement

Il résulte de l'article 1401 du code civil que : « La communauté se compose activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres. »

L'article 1402 du code civil dispose que : « Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l'on prouve qu'il est propre à l'un des époux par application des dispositions de la loi. »

M. [P] soutient qu'ayant perçu des indemnités de licenciement de la société PPG SYSPY, pour un montant de 38'586,06 euros, en réparation de ses préjudices moral, psychologique et de carrière, cette somme doit être considérée comme des fonds propres, et qualifiée de récompense qui lui serait due par la communauté.

Il estime qu'il ne s'agit pas d'indemnités réparant un préjudice de perte d'emploi mais un préjudice moral psychologique et de carrière.

Mme [A] affirme que les indemnités de licenciement sont des biens communs, considérés comme une compensation de salaire.

Sur ce,

Le premier juge a considéré que s'agissant de réparer le préjudice résultant de la perte de l'emploi par l'époux, il n'y avait pas lieu de tenir compte des modalités de calcul de ces indemnités, l'intégralité des indemnités de licenciement faisant sans distinction partie de la communauté.

Le protocole de transaction en date du 10 mai 2006 conclu entre la société PPG SYSPY et M. [P], précise en page trois : « PPG SYSPY versera à M. [S] [P], en réparation de préjudice moral, psychologique et de carrière dont il se réclame, du fait de la rupture de son contrat de travail et en contrepartie des engagements par lui pris notamment à l'article 3 ci-après, une somme équivalente à six mois de salaire brut à titre de dommages et intérêts définitifs, forfaitaires et transactionnels, avant CSG et CRDS ».

La transaction reprend le fait que M. [P] a invoqué les difficultés de retrouver un emploi en raison de son âge, et a fait valoir le fait que son licenciement fragilise et inquiète sa famille et perturbe l'équilibre de son environnement.

Le reçu pour solde de tout compte fait état d'une somme de 38'586,06 euros au titre d'indemnité transactionnelle.

Il est donc constant, que cette indemnisation répare un préjudice global, moral et de carrière, englobant un préjudice familial dont M. [P] s'est prévalu pour obtenir cette somme.

Il ne démontre pas qu'il s'agisse de l'indemnisation d'un préjudice uniquement moral, l'affectant exclusivement et personnellement.

M. [P] n'apporte donc pas la preuve que la somme reçue de son employeur serait un bien propre.

Cette somme constitue donc un acquêt, provenant de son industrie au sens de l'article 1401 du code civil.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la créance revendiquée par M. [P]

Il résulte de l'article 223 du code civil que : « Chaque époux peut librement exercer une profession, percevoir ses gains et salaires et en disposer après s'être acquitté des charges du mariage. »

Il est constant que les gains et salaires ont un caractère commun, lorsque les époux sont mariés sous le régime de la communauté.

Il est de jurisprudence constante que les mesures provisoires ordonnées dans le cadre d'une procédure de divorce se substituent d'office à la contribution aux charges du mariage dès le prononcé de l'ordonnance de non-conciliation.

De même le report de la date de dissolution de la communauté par le jugement de divorce n'a d'effet qu'entre les époux et ne concerne que la contribution aux dettes.

M. [P] sollicite que la somme de 14'670 euros, perçue au titre d'indemnités de chômage et versée sur le compte joint, soit déterminée à titre de créance entre époux à son profit, déduction faite de ses dépenses personnelles.

Il considère qu'il a laissé cette somme à la disposition de Mme [A], sur le compte joint, après le 24 décembre 2006, date fixant les effets du divorce entre les parties, et jusqu'au 3 mai 2007 inclus.

Mme [A] reprend l'argumentation du premier juge, et conteste le fait que M. [P] puisse récupérer des sommes d'argent versées sur le compte joint alors qu'il était débiteur d'une obligation de contribuer aux charges du mariage.

Sur ce,

Le premier juge rappelle que l'obligation de contribuer aux charges du mariage ne cesse pas à la date de dissolution du régime matrimonial mais à la date de l'ordonnance de non-conciliation, intervenue en l'espèce le 24 juillet 2007.

Il précise que les sommes revendiquées par M. [P] sur le compte joint ont été versées antérieurement au 24 juillet 2007 alors que l'obligation de contribuer aux charges du mariage persistait.

Il est constant que du 24 décembre 2006 au 3 mai 2007, l'obligation de contribuer aux charges du mariage était encore d'actualité, et M. [P] ne peut se prévaloir du report des effets du jugement de divorce à la date à laquelle les époux ont cessé de cohabiter et de collaborer.

De la même manière, il convient de débouter M. [P] de sa demande tendant à voir l'ensemble des sommes versées par lui sur le compte joint à compter du 24 décembre 2006 constituer des récompenses à son profit.

Le jugement qui a débouté M. [P] de sa demande au titre des sommes versées sur le compte joint du 24 décembre 2006 au 3 mai 2007 sera confirmé.

Sur les demandes de dommages et intérêts

L'article 1240 du code civil dispose que 'tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.

Sur la demande de dommages-intérêts de M. [P]

M. [P] reproche à son ex-épouse d'être à l'origine du retard pris dans la liquidation afin de repousser le paiement de la soulte et de pouvoir occuper le bien immobilier sans verser d'argent, et afin de continuer à percevoir des intérêts de placements en ne versant rien.

Il affirme que la situation a été paralysée par Mme [A] qui a produit des évaluations bien inférieures à la valeur du bien, qui n'auraient pas communiqué toutes les pièces permettant d'avancer dans la procédure, et qui aurait manipulé leurs enfants pour parvenir à ses fins.

Il prétend encore que Mme [A] minimise les ennuis de santé qu'il connaît, notamment lorsqu'il a fait une tentative d'autolyse avec diagnostic ultérieur de bipolarisation.

Il ajoute avoir été obligé d'acheter un bien immobilier délabré avec des travaux à effectuer qui lui ont occasionné beaucoup de fatigue.

Il estime avoir subi un préjudice qu'il chiffre à 12'000 euros.

Mme [A] affirme que M. [P] ne justifie pas un quelconque statut d'handicapé, qu'il a pu au contraire auparavant mettre en avant le fait d'être débordé de travail, et qu'il a pu s'offrir avec sa compagne des vacances, à plusieurs reprises.

Elle indique qu'il a cherché à gagner du temps depuis l'introduction de la procédure de divorce, en 2007. Elle prétend encore que M. [P] continue d'entretenir le flou sur sa situation, qu'il n'a jamais daigné communiquer les pièces relatives à sa retraite, les bilans de sa société, toutes pièces justifiant de la réalité de ses revenus ainsi que de ceux de sa compagne.

Elle souligne que dès 2009, le juge précisait que chaque partie disposait d'importantes liquidités provenant de la maison d'[Localité 7], lui permettant d'assumer ses obligations.

Elle met en avant le fait qu'il ait acquis un bien où il héberge et entretient sa compagne et où il aurait créé une entreprise en 2021.

Elle déplore enfin que M. [P] n'ait jamais remboursé sa part du prêt immobilier depuis février 2009.

Sur la demande de dommages-intérêts de Mme [A]

Mme [A] fait état que M. [P] se refuse un partage amiable des meubles pour lui nuire et lui réclamer une prétendue valeur d'usage alors qu'il n'a pas l'intention de récupérer ses biens.

Elle ajoute que les affaires personnelles M. [P] étaient prêtes dans des cartons entreposés dans la maison le jour de l'expertise, et qui n'a pas daigné les récupérer.

Elle entend préciser que depuis 2012 elle ne reçoit plus d'étudiants chez elle hormis un étudiant canadien resté 15 jours en septembre 2013, alors que M. [P] l'accuse de percevoir des revenus complémentaires à ce titre.

Elle fait état d'une situation financière dégradée avec une baisse de son activité de professeur à domicile suite à la pandémie et à la refonte du baccalauréat.

Elle argue d'une souffrance morale et d'un épuisement dus aux humiliations que lui ferait subir M. [P] dans ses écritures et ses courriers, et ce dans le but de lui nuire ou d'ignorer sa personne.

Elle ajoute que c'est M. [P] qui se complaît dans cette situation de blocage, ce qui a eu des incidences sur sa santé au fil des années.

Elle estime ainsi avoir subi un préjudice qu'elle chiffre à une somme de 80'000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier.

M. [P] affirme que Mme [A] déforme la réalité, invente des conflits là où il n'y en a jamais eu, tel le fait de lui avoir reproché d'avoir arraché la haie des voisins et provoquer leur mécontentement.

Il soutient qu'en réalité Mme [A] n'a jamais accepté son départ avec une autre femme et nourrit une forme de vengeance au travers de la procédure, ne démontrant ni faute de la part de son ex-époux, ni lien de causalité ou préjudice quelconque.

Compte tenu de la nouvelle expertise diligentée, il convient de surseoir à statuer sur les demandes respectives des parties de dommages intérêts.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de réserver les demandes relatives à l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant dans les limites de l'appel,

CONFIRME le jugement rendu le 17 septembre 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d'Angers sauf en ses dispositions afférentes à la valeur de l'immeuble, à l'indemnité d'occupation et aux demandes de dommages et intérêts ;

AVANT DIRE DROIT sur la valeur du bien immeuble situé [Adresse 11] et la demande d'indemnité d'occupation ;

ORDONNE une mesure d'expertise immobilière ;

COMMET pour y procéder M. [X] [C], expert inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Angers, [Adresse 9], port : [XXXXXXXX01]- courriel : [Courriel 5]

avec pour mission de :

- prendre connaissance de l'expertise réalisée par M. [O] dont le rapport a été déposé le 28 septembre 2017 ;

- proposer une estimation de l'immeuble d'habitation, sis [Adresse 11] au jour le plus proche du partage ;

- déterminer l'évolution de la valeur locative mensuelle de l'immeuble dont s'agit depuis la précédente expertise dont le rapport a été déposé le 28 septembre 2017 ;

DIT que M. [S] [P] fera l'avance des frais d'expertise à hauteur de 3 000 euros à consigner avant le 28 avril 2023 auprès du régisseur de recettes et d'avances de la cour d'appel d'Angers ;

DIT qu'à défaut de consignation dans les délais et montants fixés, l'expertise sera caduque ;

DIT qu'en cas d'empêchement de l'expert il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance,

DIT que l'expert devra déposer son rapport auprès de la cour d'appel dans le délai de 6 mois suivant la date à laquelle il sera avisé du versement de la consignation ;

SURSOIT à statuer sur les demandes concernant la fixation de la valeur du bien immobilier, la demande d'indemnité d'occupation, et les demandes de dommages et intérêts jusqu'au dépôt du rapport de l'expert ;

RENVOIE la cause et les parties sur ces points devant le conseiller de la mise en état le 9 novembre 2023 à 09 H 30 ;

RESERVE les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

F. BOUNABI M.C. COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 19/02363
Date de la décision : 23/03/2023
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;19.02363 ?
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