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27/10/2022 | FRANCE | N°19/01396

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 27 octobre 2022, 19/01396


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B







IC/IM

ARRET N°



AFFAIRE N° RG 19/01396 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ERD6



Jugement du 21 Mai 2019

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 17/03146





ARRET DU 27 OCTOBRE 2022



APPELANTE :



Mme [O] [U]

née le 18 Juin 1978 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Vanina LAURIEN de la SELARL DELAGE BEDON LAURI

EN HAMON, avocat au barreau d'ANGERS



INTIMEE :



Mme [F] [U]-[R] épouse [Y]

née le 17 Avril 1982 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Christelle POIRIER, avocat au barreau d'AN...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ERE CHAMBRE SECTION B

IC/IM

ARRET N°

AFFAIRE N° RG 19/01396 - N° Portalis DBVP-V-B7D-ERD6

Jugement du 21 Mai 2019

Tribunal de Grande Instance d'ANGERS

n° d'inscription au RG de première instance : 17/03146

ARRET DU 27 OCTOBRE 2022

APPELANTE :

Mme [O] [U]

née le 18 Juin 1978 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Vanina LAURIEN de la SELARL DELAGE BEDON LAURIEN HAMON, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :

Mme [F] [U]-[R] épouse [Y]

née le 17 Avril 1982 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Christelle POIRIER, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier 19/027

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du 23 Juin 2022, Mme COUTURIER, Conseillère, ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :

Mme COURTADE, Présidente de chambre

Mme COUTURIER, Conseillère

Mme PARINGAUX, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière lors des débats : Mme BOUNABI

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 27 octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Marie-Christine COURTADE, Présidente de chambre, et par Florence BOUNABI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCEDURE

M. [C] [U], né le 22 juillet 1954, est décédé le 20 décembre 2016, laissant pour lui succéder ses filles :

- Mme [O] [U],

- Mme [F] [U]-[R] épouse [Y].

Maître [N], notaire à [Localité 7], a été désigné amiablement pour procéder aux opérations de compte liquidation partage de la succession de M. [C] [U].

Par acte en date du 8 décembre 2017, Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] a fait citer Mme [O] [U] devant le tribunal de grande instance d'Angers.

Par jugement en date du 15 janvier 2019, le tribunal de grande instance d'Angers a :

- ordonné le rejet de la constitution et des conclusions de Mme [O] [U] signi'ées respectivement les 14 et 16 novembre 2018 comme tardives ;

Avant dire droit :

- ordonné la réouverture des débats dans le présent litige uniquement afin de :

* permettre à Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de régulariser la procédure en sollicitant préalablement l'ouverture des opérations compte liquidation partage de la succession de leur père M. [C] [U],

* recueillir les observations de Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] sur les dispositions des articles 843, 860 et 860-1 du code civil ;

- sursis à statuer sur les autres demandes ;

- dit que la présente affaire sera rappelée à l'audience du 19 mars 2019 à 14 heures

- réservé les dépens.

Dans ses dernières écritures du 19 mars 2019, Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] sollicite de :

- voir rejeter la constitution de Mme [O] [U] comme postérieure à l'ordonnance de clôture ainsi que les écritures y afférentes,

- voir constater la parfaite recevabilité de l'action intentée par Mme [F] [U]-[R] épouse [Y],

- voir ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de [C] [U],

- voir désigner Maître [N], notaire à [Localité 7], aux fins de procéder et d' stímer les meubles dépendant de ladite succession,

- voir constater l'absence de remboursement par Mme [O] [U] des fonds confiés à titre précaire et temporaire par M. [C] [U], l'en déclarer débitrice,

- lui voir faire obligation de restituer la somme de 159 592,12 euros à la succession, outre l'intégralité des intérêts générés par les sommes placées,

Subsidiairement,

- voir condamner Mme [O] [U] à rapporter à la succession la somme de 159 592,12 euros outre les fruits des placements,

Très subsidiairement,

- voir constater le recel successoral à hauteur de 159 592,12 euros outre les fruits des placements,

Sur le partage :

- voir constater qu'en raison de son indignité Mme [O] [U] ne pourra prétendre à aucune part des sommes détournées et recelées et qu`il conviendra de calculer ses droits successoraux une fois déduite les sommes susvisées,

- subsidiairement, voir opérer le partage par moitié des biens issus de la succession de M. [U] après établissement de son contenu par Maître [N],

- voir donner acte à Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de ce qu'elle ne s'oppose pas ce qu'une compensation soit effectuée entre les sommes dont Mme [O] [U] est débitrice et celles auxquelles elle pourrait prétendre,

En tout état de cause :

- voir condamner le défendeur aux dépens dont distraction au pro't de Maître Christelle Poirier pour ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision,

- voir ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- voir condamner Mme [O] [U] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Par conclusions signifiées le 18 mars 2019, Mme [O] [U] a sollicité de :

- voir constater l'absence de respect du principe du contradictoire et des droits de la défense à l'égard de Mme [O] [U] ;

- voir constater la communication tardive des conclusions adverses,

En conséquence :

Au principal,

- voir ordonner la réouverture des débats au bénéfice de Mme [O] [U] afin que cette dernière puisse faire valoir ses arguments en défense,

Subsidiairement,

- voir ordonner le rejet des conclusions de la partie adverse compte tenu de leur communication tardive,

- voir déclarer Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] irrecevable dans l'ensemble de ses demandes,

- voir statuer ce que de droit sur les dépens.

Le tribunal de grande instance d'Angers, par jugement du 21 mai 2019, a notamment :

- déclaré irrecevables les dernières conclusions signifiées le 18 mars 2019 de Mme [O] [U] dont la constitution a précédemment été rejetée par jugement du tribunal de grande instance d'Angers en date du 15 janvier 2019 ;

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du régime de succession de M. [C] [U] ;

- commis maître [N], notaire à [Localité 7], pour y procéder ;

- désigné Mme Nadine Gaillou, vice présidente, en qualité de juge commissaire et pour faire rapport en cas de difficulté ;

- dit qu'en cas d'empêchement du juge ou du notaire commis, il sera remplacé par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente ;

- condamné Mme [O] [U] à restituer à la succession de M. [C] [U] la somme de 106 111,82 euros outre les intérêts générés par les sommes placées ;

- autorisé le notaire ci-dessus désigné à obtenir des services du ministère du budget la liste des comptes bancaires 'gurant dans le fichier FICOBA ouverts au nom de Mme [O] [U] en application des dispositions de l'article L. 143 du livre des procédures 'scales, en l'absence de production spontanée par Mme [O] [U] de tous justificatifs bancaires sollicités par le notaire ;

- dit que dans l'hypothèse où la somme de 50 000 euros aurait bien été déposée sur un compte de Mme [O] [U], cette somme devra être restituée à la succession ;

- débouté Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de sa demande au titre des frais d'obsèques qui seront pris en charge par la succession ;

- débouté Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de sa demande au titre de l'indignité de Mme [O] [U] ;

- renvoyé les parties devant le notaire désigné qui opérera le partage par moitié des biens dépendant de la succession de M. [C] [U] ;

- décerné acte à Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de ce qu'elle ne s'oppose pas à ce qu'une compensation soit effectuée entre les sommes dont Mme [O] [U] est débitrice et celles auxquelles elle pourrait prétendre ;

- rejeté toutes autres demandes ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- condamné Mme [O] [U] à payer à Mme [F] [U]- [R] épouse [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [O] [U] en tous les dépens ;

- autorisé l'application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause pouvant y prétendre.

Par déclaration reçue au greffe le 9 juillet 2019, Mme [O] [U] a relevé appel de chacune des dispositions de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2022, l'affaire étant fixée pour plaidoiries à l'audience du 23 juin 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

- le 17 mars 2020 pour Mme [O] [U]

- le 25 novembre 2020 pour Mme [U]-[R]

aux termes desquelles les parties forment les demandes qui suivent :

Mme [O] [U] demande à la cour de :

- la recevoir en son appel et le déclarer bien fondé ;

Et y faisant droit, en conséquence,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit :

- condamner Mme [O] [U] à restituer à la succession de M. [C] [U] la somme de 106 111,82 euros outre les intérêts générés par les sommes placées ;

- que dans l'hypothèse où la somme de 50 000 euros aurait bien été déposée sur un compte de Mme [O] [U], cette somme devra être restituée à la succession ;

En conséquence, statuant à nouveau,

- dire et juger que la somme de 18 960 euros reçue par Mme [O] [U] le 14 Janvier 2011 est une donation préciputaire ;

- dire et juger que Mme [Y] succombe à apporter la preuve de ce que les chèques émis par M. [C] [U] en 2014 avaient pour destinataire Mme [O] [U] ;

- dire et juger que les 3 000 euros retirés le 24 janvier 2014 en liquide émanaient du compte de Mme [O] [U] ;

- dire et juger qu'en tout état de cause les deux virements de septembre et octobre 2012 ainsi que les chèques prétendument peuvent être considérés comme des présents d'usage et frais d'entretien eu égard à la fortune du disposant (sic) ;

- constater que Mme [O] [U] a reçu, déduction faite des sommes virées à son père, une donation en avancement d'hoirie d'un montant de 71 651,81 euros ;

- dire et juger que cette somme sera rapportée à la masse partageable ;

- dire et juger que Mme [O] [U] peut prétendre à la moitié de l'actif net de la succession de feu M. [C] [U] ;

- dire et juger que les 50 000 euros figurant sur le compte capital revenu sont intégrés dans cette somme ;

- confirmer le reste du jugement entrepris pour le surplus ;

En tout état de cause

- condamner Mme [F] [Y] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la même au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de maître Gérard Chabot pour la partie dont il a dû s'acquitter.

Mme [F] [U]-[R] demande à la cour de :

- débouter Mme [O] [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement en date du 21 mai 2019 en ce qu'il a :

* déclaré irrecevables les dernières conclusions signifiées le 18 mars 2019 de Mme [O] [U] dont la constitution a précédemment été rejetée par jugement du tribunal de grande instance d'Angers en date du 15 janvier 2019 ;

* ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage du régime de succession de M. [C] [U] ;

* commis maître [N], notaire à [Localité 7], pour y procéder ;

* désigné Mme [K] [Z], vice-présidente, en qualité de juge commissaire et pour faire rapport en cas de difficulté ;

* dit qu'en cas d'empêchement du juge ou du notaire commis, il sera remplacé par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente ;

* condamné Mme [O] [U] à restituer à la succession de M. [C] [U] la somme de 106 111,82 euros outre les intérêts générés par les sommes placées ;

* autorisé le notaire ci-dessus désigné à obtenir des services du ministère du budget la liste des comptes bancaires figurant dans le fichier FICOBA ouverts au nom de Mme [O] [U] en application des dispositions de l'article L. 143 du livre des procédures fiscales, en l'absence de production spontanée par Mme [O] [U] de tous justificatifs bancaires sollicités par le notaire ;

* renvoyé les parties devant le notaire désigné qui opérera le partage par moitié des biens dépendant de la succession de M. [C] [U] ;

* décerné acte à Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] de ce qu'elle ne s'oppose pas à ce qu'une compensation soit effectuée entre les sommes dont Mme [O] [U] est débitrice et celles auxquelles elle pourrait prétendre ;

* condamné Mme [O] [U] à payer à Mme [F] [U]-[R] épouse [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné Mme [O] [U] en tous les dépens ;

Y ajoutant,

- condamner Mme [O] [U] à verser à Mme [F] [Y] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile quant à la procédure en appel ;

- condamner Mme [O] [U] aux dépens de l'instance.

MOTIFS DE LA DECISION

Mme [O] [U] qui a relevé appel de toutes les dispositions du jugement ne s'oppose pas à l'ouverture des opérations de liquidation et de partage de M. [U] ni à la désignation de maitre [N]. Le jugement sera donc confirmé sur ces points.

Il le sera également sur le rejet de la demande de restitution d'une somme de 3 483 euros au titre de frais funéraires et sur le rejet de la demande d'indignité de Mme [O] [U] conformément à la demande de Mme [O] [U], et en l'absence d'appel incident sur ces points ; Mme [O] [U] n'a formé aucune demande relative à la recevabilité de ses conclusions en première instance et le jugement sera sur ce point également confirmé.

Il n'y a pas eu appel incident du renvoi des parties devant le notaire pour partage par moitié de l'actif successoral ; la demande de voir dire que Mme [O] [U] peut prétendre à la moitié de l'actif net est donc sans objet.

Sur la saisine de la cour

Mme [O] [U] n'était pas représentée en première instance. Les demandes formées en appel se rattachent aux demandes formées en première instance, puisqu'elle s'oppose aux demandes de restitution ou et de rapport des fonds qu'elle aurait reçus de son père et Mme [O] [U] oppose une défense aux seules demandes adverses.

Ses demandes sont donc recevables en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.

Sur les demandes de restitution de fonds à l'encontre de Mme [O] [U]

Mme [O] [U] conteste avoir reçu la somme de 73 341,57 euros provenant de la succession de M. [X] [U] reçue par son père le 6 mai 2015 et le 21 avril 2016, à une période postérieure à leur dispute et pendant laquelle elle n'avait plus aucune relation avec lui.

Elle indique qu'en reconnaissance de son dévouement, et pour s'assurer qu'elle ne manquerait de rien, M. [C] [U] lui avait fait donation de 18 960 euros le 14 janvier 2011 en remerciement et pour l'avantager. Elle conteste que les chèques pour 6 200 euros tirés sur les comptes de son père lui auraient profité.

Elle indique que la somme de 3 000 euros qu'elle aurait reçue en liquide le 24 janvier 2014 était un présent d'usage de son père qui l'a ainsi aidée dans son installation, mais elle indique également que ces sommes étaient prélevées de son propre compte et qu'elle n'en est pas redevable.

Elle indique avoir reçu deux virements de 3 500 et 6 000 euros qui correspondent à des frais d'entretien, ce qui ne créait pas d'appauvrissement significatif pour son père, de même que les six chèques versés pendant l'année 2014 pour 6.200 euros, qui peuvent également être des présents d'usage.

Elle indique qu'il a été versé 131 001,21 euros en novembre 2012 sur ses comptes dans le cadre de la relation de confiance réciproque qui existait entre elle et son père, qu'il ne s'agissait pas d'un prêt puisque ces sommes devaient la protéger s'il arrivait quelque chose à son père, que ces sommes étaient une donation, qui était toujours sur son compte en 2013 quand son père lui a demandé de faire des virements pour 46 477,41 euros, puis en 2014 et 2015 pour un total finalement de 59 349,39 euros.

Elle affirme que les 50.000 euros dont il est demandé rapport sont inclus dans les sommes déjà considérées. Elle indique ne pouvoir communiquer ses relevés bancaires de 2011 à mai 2015 car elle n'a pu récupérer ses affaires laissées chez son père, de même qu'en raison du refus des établissements bancaires de lui délivrer duplicatas.

Mme [U]-[R] fait valoir que la somme de 18 960 euros versée par son père à sa soeur n'était pas un don mais un prêt, ne pouvait constituer une rémunération d'une seule de ses filles qui n'était pas la seule à entourer son père de soins, et alors que les traitements subis par M. [U] pouvaient avoir des conséquences sur ses fonctions intellectuelles.

Elle indique que suite aux violences du compagnon de Mme [O] [U] sur M. [C] [U], sans que Mme [O] [U] n'ait défendu son père, l'état de ce dernier s'est dégradé psychologiquement et physiquement et il a souhaité se voir restituer les fonds prêtés.

Mme [U]-[R] fait valoir que du fait des difficultés de santé, M. [C] [U] avait souhaité verser des fonds sur le compte de Mme [O] [U] pour qu'elle ne soit pas en difficulté en cas de décès de son père et le temps de la succession et du rapport des sommes confiées, et afin qu'elle puisse payer les factures de son père et avancer des fonds si son propre état de santé se dégradait ; elle affirme qu'il ne voulait que prêter ces fonds puisque lui-même était en difficulté financière.

Elle conteste qu'il y ait eu donation ou don, mais seulement dépôt à charge de restitution à première demande ; elle précise qu'il a versé des fonds sur le compte CIC, compte livret orange et LDD de Mme [O] [U] qui lui avait consenti procuration sur le livret orange.

Elle soutient qu'il a été versé au total la somme de 165 761,21 euros à Mme [O] [U] : la somme de 18 960 euros en 2011, 3 500 puis 6 000 euros sur le LDD de Mme [O] [U] puis 131 101,21 euros sur son livret orange.

Il n'a été versé aucune somme en 2013 tandis que Mme [O] [U] commençait à rembourser. Elle précise qu'il a été versé 5 200 euros sur les comptes de Mme [O] [U] en 2014. Mme [U]-[R] indique qu'il est établi que Mme [O] [U] a remboursé 59 649,39 euros, ce qui vient confirmer qu'elle savait que les fonds ne lui étaient pas donnés.

Elle précise que si elle ne conteste pas que la somme de 50 000 euros n'a pas lieu d'être ajoutée, il y a tout de même lieu de voir produire tous les relevés bancaires pour clarifier la situation. Elle souligne que Mme [O] [U] a aussi profité des chèques de 6 200 et 3 000 euros, ce qui apparaîtra sur les relevés de 2014.

Sur ce,

M. [C] [U] était devenu paraplégique des membres inférieurs à l'âge de 30 ans après un accident. M. [C] [U] a divorcé et les deux enfants sont partis vivre chez leur mère, Mme [E]. Celle-ci témoigne de la proximité de Mme [O] [U] avec son père avec qui elle a choisi de vivre dès ses 14 ans.

Mme [O] [U] ne conteste pas avoir vécu avec un premier compagnon de 2002 à 2013, puis avec un second compagnon depuis 2014. Elle a passé quelques mois chez son père en 2013.

Il y a lieu de relever l'accord des parties sur la somme de 73 341,57 euros provenant de la succession de M. [X] [U] versée sur le compte de M. [C] [U] qui est compris dans le contenu de la succession de ce dernier et n'a jamais été prêtée ou versée à Mme [O] [U].

Il est également admis par les deux parties que la somme de 50 000 euros versée sur un compte intitulé capital revenu au nom de Mme [O] [U] ne s'ajoute pas mais fait partie des sommes à restituer. La disposition du jugement qui ordonne la restitution des 50 000 euros dans l'hypothèse où cette somme aurait été déposée sera donc infirmée.

Il n'est pas contesté que M. [C] [U] a fait ouvrir des comptes à sa fille [O] et qu'il y a versé des fonds.

Il est justifié de virements de M. [C] [U] à Mme [O] [U] :

- le 14 janvier 2011 pour 18 960 euros,

- le 26 septembre 2012 pour 3 500 euros,

- le 3 octobre 2012 pour 6 000 euros,

- le 16 novembre 2012 pour 97 600 euros, 18 974,21 euros, 3 027 euros et 11 500 euros, soit la somme de 159 561,21 euros.

Il est justifié que M [C] [U] avait reçu de la succession de son frère [M] les sommes de 83 153,94 euros le 11 septembre 2012, 63 267,21 euros le 29 octobre 2012 outre 10 589,80 euros le 28 novembre 2012, sommes initialement versées au crédit mutuel sur son compte.

Mme [O] [U] a effectué des versements à son père :

- 2 956,21 euros le 7 juin 2013,

- 22 745,56 euros le 7 juin 2013,

- 11 475,64 euros le 7 juin 2013,

- 9 300 euros le 7 juin 2013,

- 3 000 euros le 12 mai 2014,

- 1 000 euros le 12 juin 2014,

- 2 000 euros le 25 août 2014,

- 3 000 euros le 17 octobre 2014,

- 2 000 euros le 10 décembre 2014,

- 2 000 euros le 29 janvier 2015,

- 171,98 euros le 3 avril 2015,

soit un total de 59 649,39 euros.

Il doit être relevé que M. [C] [U] a, le 26 janvier 2011, donné procuration à Mme [O] [U] sur ses comptes et celle-ci a, le même jour, donné procuration à son père sur ses comptes.

Il n'est pas contesté que Mme [O] [U] a été proche de son père jusqu'à leur dispute en janvier 2015, et Mme [U]-[Y] convient que leur père craignant ne pouvoir subvenir à sa propre prise en charge en cas de dégradation supplémentaire de son état, souhaitait qu'il puisse être disposé de son argent pour faire face à ses propres besoins, et ceci à titre de sécurité.

Il est également établi notamment par Mme [E] que Mme [O] [U] a soutenu son père. Mme [O] [U] n'établit pas avoir eu un investissement total auprès de son père qui était notamment aidé par l'ADMR et des aides ménagères pendant les quinze dernières années de sa vie comme elle l'indique elle-même.

Les mouvements financiers litigieux entre Mme [O] [U] et son père commencent en 2011. A cette date, M. [C] [U] vire 18 960 euros sur le compte de sa fille le 14 janvier 2011, alors qu'il a des dettes notifiées par l'ADMR pour 6 588,39 euros selon courrier du 13 janvier 2011, et une dette fiscale de 11 590,71 euros selon commandement du 19 avril 2011. Il était donc débiteur d'une somme de 18 179,10 euros. Il a alors négocié ses dettes et obtenu des échéanciers et il a repris notamment 7 000 euros le 4 mai 2011 des comptes de sa fille pour régler le Trésor public partiellement.

L'existence de dettes de M. [C] [U] et les procurations réciproques consenties aussitôt après ouverture des comptes sur lesquels les fonds ont été versés à Mme [O] [U] permettent de conclure que M. [C] [U] n'avait, en réalisant les virements, aucune volonté de gratifier sa fille des sommes virées sur son compte.

Il a d'ailleurs fait ouvrir des comptes à sa fille pour recevoir les fonds et leur conserver ainsi une visibilité et une séparation du reste des biens de sa fille. Mme [O] [U] sera donc déboutée de sa demande de voir reconnaître une donation préciputaire de 18 960 euros.

M.[U] a ensuite viré les fonds reçus de la succession de son frère. Les versements de Mme [O] [U] pour restituer les fonds attestent qu'il n'y avait pas davantage de volonté de M. [C] [U] de faire donation de ces fonds dont elle se reconnaissait ainsi dépositaire.

Il n'y a pas lieu de retenir que les versements du 26 septembre 2012 pour 3 500 euros et du 3 octobre 2012 pour 6 000 euros seraient des donations particulières dès lors qu'il s'agit des premiers fonds reçus de la succession de [M] [U] par son frère, qui a été versée par montants fractionnés et successivement sur les comptes de Mme [O] [U]. M. [C] [U] a effectué ces versements par virements clairement nominatifs, confirmant une volonté déjà manifestée de garder la trace de ses versements.

Il peut être admis que l'état de santé de M. [C] [U] explique qu'il ait pu mettre les fonds sur le compte de sa fille pour permettre à celle-ci d'effectuer des opérations en sa faveur s'il se trouvait brutalement empêché, et ceci en conséquence des excellentes relations de confiance qui existaient entre le père et la fille. Néanmoins, M. [U] s'était clairement ménagé un pouvoir permanent sur les fonds et n'avait donc pas la volonté de s'en déposséder.

Il est apporté la preuve que Mme [O] [U] a tiré 3 000 euros en liquide de ses comptes le 24 janvier 2014 mais sur lesquels son père avait procuration, sans qu'il soit établi leur usage, à l'exclusion d'un versement à son père. Dans le contexte de contrôle des fonds versés sur le compte de sa fille, il n'est pas apporté la preuve que ces sommes étaient données à Mme [O] [U].

Il n'est pas contesté que le 24 janvier 2015, une violente dispute est survenue entre le compagnon de Mme [O] [U] et M. [C] [U] et à la suite de laquelle Mme [O] [U] et son père se sont brouillés et ont cessé de se rencontrer.

Par message du 28 janvier 2015, M. [C] [U] a demandé à sa fille de récupérer immédiatement les fonds qu'il lui avait versés, ce qu'il lui a confirmé le 14 février 2015 après avoir été informé par la banque du refus de Mme [O] [U] de procéder au versement.

Mme [O] [U] a révoqué le 7 mai 2015 la procuration générale accordée à M. [C] [U] le 26 janvier 2011. M. [C] [U] a, le 22 mai 2015, révoqué la procuration donnée sur ses comptes à Mme [O] [U] le 26 janvier 2011.

Il apparaît en conséquence que l'absence de volonté de donation a été confirmée, et la double révocation des procurations confirme qu'il existait un accord de dépôt des sommes de M. [U] sur les comptes de sa fille.

Il est justifié de chèques débités du compte de M. [C] [U] les 14 mai 2014, 17 juin 2014, 14 juillet 2014, le 1er septembre 2014, le 21 octobre 2014 et le 15 décembre 2014.

Les talons de ces chèques portent l'ordre AX. Le total versé est de 6.200 euros. Il n'est pas établi que ces chèques ont été encaissés par Mme [O] [U] et il n'y a pas lieu de retenir ces fonds comme ayant été déposés par M. [U] sur les comptes de sa fille. Mme [O] [U] ne sera donc pas tenue de restituer ces sommes à la succession de son père.

C'est donc la somme de 99 911,82 euros (159 561,21 - 59 649,39 euros) que Mme [O] [U] devra restituer à la succession de son père, outre les intérêts générés par les sommes placées.

Sur les frais et dépens

Mme [O] [U] et Mme [U]-[R] succombent toutes deux partiellement. Elles seront donc déboutées de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [O] [U] a présenté sa défense pour la première fois en appel dès lors qu'elle a omis de se constituer en première instance, sans justifier d'un motif à son abstention. Elle sera donc condamnée au paiement des dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance d'Angers du 21 mai 2019 sauf en ce qu'il a condamné Mme [O] [U] à restituer à la succession de M. [C] [U] la somme de 106 111,82 euros et dit que dans l'hypothèse où la somme de 50 000 euros aurait bien été déposée sur un compte de Mme [O] [U], cette somme devra être restituée à la succession ;

Statuant de nouveau de ces seuls chefs,

DEBOUTE Mme [O] [U] de ses demandes de voir reconnaître des donations préciputaires ou des présents d'usage ;

CONDAMNE Mme [O] [U] à restituer à la succession de M. [C] [U] la somme de 99 911,82 euros outre les intérêts générés par les sommes placées ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [O] [U] au paiement des dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE

F. BOUNABI M.C. COURTADE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 19/01396
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;19.01396 ?
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