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07/09/2022 | FRANCE | N°22/00046

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 07 septembre 2022, 22/00046


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 46



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 19 Août 2022



N° RG 22/00046 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBSY



ORDONNANCE

DU 07 SEPTEMBRE 2022





Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 août 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Madame

[X] [U]

née le 22 Février 1961 à [Localité 4] (49)

Chez M. [C] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Comparante assistée de Me Aline CHARLES, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,



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COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 46

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 19 Août 2022

N° RG 22/00046 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBSY

ORDONNANCE

DU 07 SEPTEMBRE 2022

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 août 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [X] [U]

née le 22 Février 1961 à [Localité 4] (49)

Chez M. [C] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparante assistée de Me Aline CHARLES, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉS A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER

Direction des relations avec les usagers

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Non comparant, ni représenté,

Monsieur [C] [M]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Comparant,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 07 Septembre 2022 à 14h15, il a été indiqué que la décision serait prononcée le même jour dans la soirée, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par décision du directeur du Centre Hospitalier de [Localité 4], Mme [X] [U], née le 22 février 1961 à [Localité 4] (49), a été admise dans cet établissement le 01 décembre 2019 en soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l'hospitalisation complète pour péril imminent.

Cette mesure a été maintenue sous le régime de l'hospitalisation complète sur décision du directeur de l'établissement le 04 décembre 2019 et soumise au contrôle de plein droit du Juge des libertés et de la détention d'Angers, lequel en a, par ordonnance du 10 décembre 2019, autorisé la poursuite.

Aux termes d'une décision rendue le 30 décembre 2019, le directeur du Centre Hospitalier de [Localité 4] a modifié la forme de la prise en charge des soins psychiatriques contraints de Mme [U] par la mise en place d'un programme de soins selon les modalités proposées par le docteur [H], psychiatre de l'établissement de soins.

Sur la base d'avis médicaux mensuels dressés par les docteurs [H], [I] et [D], psychiatres du Centre Hospitalier de [Localité 4], le directeur d'établissement a décidé les 02 janvier 2020, 04 février 2020, 04 mars 2020, 02 avril 2020, 04 mai 2020 et 03 juin 2020 de la poursuite des soins psychiatriques sans consentement de Mme [U] sous la forme du programme de soins selon les modalités définies le 30 décembre 2019.

Suivant décision du directeur d'établissement du 26 juin 2020, la prise en charge psychiatrique de Mme [U] a été modifiée par la mise en place d'un nouveau programme de soins établi à cette date par le docteur [H].

Depuis lors, les soins psychiatriques sans consentement de Mme [U] ont été maintenus selon la même forme de prise en charge par M. le directeur du Centre hospitalier de [Localité 4] en vertu de décisions régulièrement prises au visa de certificats médicaux mensuels les 02 juillet 2020, 04 août 2020, 02 septembre 2020, 01 octobre 2020, 03 novembre 2020, 01 décembre 2020, 04 janvier 2021, 02 février 2021, 04 mars 2021, 01 avril 2021, 04 mai 2021, 01 juin 2021, 01 juillet 2021, 03 août 2021, 02 septembre 2021, 04 octobre 2021, 04 novembre 2021, 01 décembre 2021, 04 janvier 2022, 03 février 2022, 02 mars 2022, 01 avril 2022, 04 mai 2022, 03 juin 2022, 04 juillet 2021 et 03 août 2022.

* * *

Par requête datée du 30 juillet 2022 et reçue au greffe le 5 août 2022, Mme [X] [U] a saisi le juge des libertés et de la détention d'Angers en vue d'obtenir la main-levée immédiate de la mesure de soins psychiatriques contraints sous une autre forme que l'hospitalisation complète dont elle est l'objet, requête à laquelle s'est associé son ami, M. [C] [M].

Aux termes d'une ordonnance rendue le 19 août 2022 après renvoi à l'audience du 12 août 2022 du fait de l'absence de réception de la convocation par la requérante et sur avis conforme du Parquet du 10 août 2022, le juge des libertés et de la détention d'Angers a rejeté la demande de main-levée sur la base notamment de l'avis médical complémentaire émis par le docteur [I] le 08 août 2022 concluant au maintien de la mesure de soins sans consentement avec poursuite du programme de soins établi le 26 juin 2020.

Par courrier recommandé avec accusé de réception portant la date d'expédition du 31 août 2022 indiquée par la poste et parvenu au greffe de la cour d'appel d'Angers le 01 septembre 2022, Mme [X] [U] a relevé appel de cette décision qui lui a été personnellement notifiée à une date ignorée.

A réception de la procédure, l'ensemble des personnes concernées a été convoqué à l'audience d'appel du 07 septembre 2022 à 14 heures 15 et le dossier régulièrement communiqué au Parquet Général le 05 septembre 2022.

Dans son avis mensuel daté du 01 septembre 2022 dont il a été donné lecture lors des débats, le docteur [S], psychiatre au Centre hospitalier de [Localité 4], s'est prononcé en faveur du maintien de la mesure de soins sans consentement avec poursuite du programme de soins établi le 26 juin 2020.

DEBATS EN APPEL

A l'audience publique du 07 septembre 2022, Mme [X] [U] comparaît en personne avec l'assistance de Maître Aline Charlès, avocate au barreau d'Angers, désignée au titre de la commission d'office avec laquelle elle a pu s'entretenir librement.

Entendue sur les motifs de son appel, Mme [U] estime ne pas avoir besoin de soins sans consentement. Elle souhaite arrêter les médicaments qui lui sont prescrits car elle se sent très bien, a une vie différente maintenant et n'a aucun problème notamment de voisinage. Elle considère ne plus avoir besoin de traitement contrairement aux avis médicaux. Sur les tentatives de suicide auxquelles les médecins font référence notamment celle de novembre 2020, elle indique qu'il n'y en a eu qu'une seule suite au décès de son père en juillet 2019 et qui a motivé son admission en hospitalisation complète.

Pour sa part, son conseil indique qu'elle n'a aucune observation à formuler sur la régularité de la procédure. Sur le fond, elle s'en rapporte à justice. Elle souligne l'évolution favorable de Mme [U] depuis son admission en soins psychiatriques contraints en 2019 qui a été liée au décès de son père et à la succession de celui-ci. Elle relève encore que finalement la situation s'est apaisée, que Mme [U] vit chez M. [M] depuis janvier 2020. Elle ajoute que Mme [U] se sent mieux, que celle-ci juge que les médicaments ne lui sont plus nécessaires d'autant qu'ils ont des effets indésirables et considère que le mesure de soins contraints n'est pas justifiée.

Bien que régulièrement convoqué, M. le directeur du Centre hospitalier de [Localité 4] est absent. La présente décision sera réputée contradictoire.

Egalement convoqué en appel suite à son audition par le premier juge, M. [C] [M] est présent. Il est toutefois constaté que l'intéressé n'est pas requérant à la mesure de soins contraints ni demandeur à la main-levée de la mesure à laquelle il s'est simplement associé en sa qualité d'ami de Mme [U]. En accord avec l'ensemble des parties présentes, il ne présente pas d'observations.

Par avis écrit en date du 07 septembre 2022, porté à la connaissance des parties présentes, le représentant du Parquet Général conclut à la recevabilité de l'appel et, au fond, à la confirmation de l'ordonnance entreprise.

SUR QUOI

-Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Mme [X] [U] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique ; étant rappelé que la date de notification de l'ordonnance entreprise à l'intéressée est ignorée.

Il y a donc lieu de le recevoir.

- Sur la mainlevée de la mesure de soins contraints

En droit, l'article L 3211-12 du code de la santé publique énonce que le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, notamment par la personne faisant l'objet de soins, aux fins d'ordonner, à bref délai, la main-levée immédiate d'une mesure de soins prononcée notamment sur décision du directeur d'établissement.

Par ailleurs, il résulte de la combinaison des articles L. 3213-1, L. 3211-2-1 et L. 3211-11 du code de la santé publique qu'une personne ne peut être admise et maintenue en soins psychiatriques notamment sur décision du directeur d'établissement qu'à la condition qu'il soit constaté qu'elle souffre de troubles mentaux rendant impossible son consentement et que son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1 du dit code.

Dans le cas présent, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est régulière. Aucune contestation n'est d'ailleurs émise sur ce point. En particulier sont versés aux débats l'ensemble des certificats et avis médicaux légalement exigés de même que les décisions administratives intervenues à ce jour.

Sur la poursuite de la mesure, les pièces de la procédure établissent que Mme [X] [U], patiente âgée actuellement de 61 ans, a été admise en soins psychiatriques sans consentement sur décision prise le 01 décembre 2019 par le directeur du Centre Hospitalier de [Localité 4] sous le régime de l'hospitalisation complète pour péril imminent en application de l'article L 3212-1 II 2° du code de la santé publique du fait de la majoration de ses troubles alors qu'elle se trouvait en soins libres en suite d'une tentative de suicide par pendaison dans un contexte délirant et de déni total des troubles objectivés.

La prise en charge en soins psychiatriques contraints de Mme [U] a été transformée le 30 décembre 2019 sur décision du directeur de l'établissement d'accueil au profit d'un programme de soins sollicité par le docteur [H] en application du 2° de l'article L. 3211-2-1 du même code sous la forme d'un suivi SPID et d'un traitement psychotrope retard compte tenu d'une évolution clinique jugée favorable et de la conscience chez la patiente de la nécessité de la poursuite des soins en ambulatoire.

A compter du 26 juin 2020, le cadre thérapeutique de soins psychiatriques sans consentement dont Mme [U] a fait l'objet a été maintenu dans le cadre d'un programme de soins, lequel a toutefois été modifié, d'une part, par la mise en place de soins ambulatoires consistant en des visites à domicile des infirmières du Centre Médico-psychologique une fois par semaine ainsi qu'au Centre d'accueil à temps thérapeutique, des consultations médicales régulières et, d'autre part, par des soins à domicile sous forme de passages d'une infirmière une fois par jour pour administration du traitement médicamenteux oral et pratique mensuelle de son traitement retard et ce, au constat médical d'un état clinique certes stabilisé mais fragile ainsi que de la fragilité de l'alliance thérapeutique de l'intéressée.

Par la suite, les certificats et avis médicaux ayant servi de base à la décision critiquée se sont prononcés clairement sur la nécessité de maintenir la mesure de soins sans consentement avec poursuite du programme de soins établi le 26 juin 2020.

En particulier, l'avis circonstancié émis le 08 août 2022 par le docteur [I] mentionne que Mme [U] est porteuse d'un trouble psychique persistant qui a évolué sans soins jusqu'à une tentative de pendaison survenue au mois de novembre 2020, qu'elle est anosognosique et demande à chaque consultation une interruption des soins dont elle estime ne pas avoir besoin et que, dès lors que Mme [U] a fait par le passé quatre tentatives de suicide dont trois non médicalisées, il est nécessaire de maintenir la mesure de soins contraints car elle est à haut risque de rupture de soins et de récurrence suicidaire dans l'année qui suivra.

Il sera constaté que ces divers éléments demeurent d'actualité. En effet, dans son avis médical actualisé au 01 septembre 2022 dont la transmission répond aux exigences de l'article L 3213-4 du code de la santé publique, le docteur [S] conclut tout aussi clairement que les soins psychiatriques sans consentement en ambulatoire doivent être maintenus du fait de la persistance du trouble psychique dont Mme [U] est porteuse, de son anosognosie et du risque majeur de rupture de soins et, par suite, d'un nouveau passage à l'acte auto-agressif.

Sans méconnaître l'évolution favorable de l'état de santé de Mme [U] depuis son admission initiale en hospitalisation complète, il est donc médicalement caractérisé que les troubles présentés par Mme [U] rendent encore impossible son consentement et que son état mental continue d'imposer des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale régulière.

Dès lors que l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties demeure adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état de santé mental de Mme [U] et à la mise en oeuvre du traitement requis, l'ordonnance dont appel ayant rejeté la demande de levée de la mesure de soins psychiatriques contraints sous la forme d'un programme de soins en ambulatoire doit être confirmée.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens d'appel seront laissés à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du Premier président de la cour d'appel, statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

En la forme,

DÉCLARONS l'appel recevable ;

Au fond,

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 19 août 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers ayant rejeté la demande de main-levée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'un programme de soins dont Mme [X] [U] fait l'objet ;

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

LE GREFFIERLE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJAC. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00046
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;22.00046 ?
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