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01/09/2022 | FRANCE | N°22/00043

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 01 septembre 2022, 22/00043


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 43



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 19 Août 2022



N° RG 22/00043 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBQO





ORDONNANCE

DU 01 SEPTEMBRE 2022



Nous, Marie-Christine DELAUBIER, Conseillère à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 juin 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Madame [C]

[L] épouse [Y]

née le 06 Octobre 1950 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de [Localité 2]



Comparante assistée de Me Claire CAVELIER D'ESCLAVEL...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 43

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 19 Août 2022

N° RG 22/00043 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBQO

ORDONNANCE

DU 01 SEPTEMBRE 2022

Nous, Marie-Christine DELAUBIER, Conseillère à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 juin 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [C] [L] épouse [Y]

née le 06 Octobre 1950 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de [Localité 2]

Comparante assistée de Me Claire CAVELIER D'ESCLAVELLES, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉS A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DE L'EPSM DE [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Monsieur PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'ANGERS

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Non comparants, ni représentés,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 31 Août 2022, il a été indiqué que la décision serait prononcée le 01 Septembre 2022, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Sur décision du directeur de l'établissement public de santé mentale de [Localité 2] en date du 11 Août 2022, Mme [C] [L] épouse [Y] a été admise en soins psychiatriques sans consentement sur péril imminent au visa de l'article L3212-1 II 2° du code de la santé publique.

Cette décision a été prise sur la base d'un certificat médical rédigé le 11 août 2022 par le docteur [U] [W], n'exerçant pas au sein de de l'établissement public de santé mentale de [Localité 2], relevant que l'intéressée présente 'un syndrome délirant avec rupture thérapeutique-refus d'hospitalisation'. Ce praticien a conclu que les troubles mentaux ainsi constatés rendaient impossible son consentement et justifiaient des soins immédiats assortis d'une surveillance complète dans un établissement de santé mentionné à l'article L. 3 222-1 du code de la santé publique.

Au vu de certificats médicaux des 24 et 72 heures dressés respectivement les 12 et 14 août 2022 par les docteurs [E] [N] et [O] [X], psychiatres de l'établissement de soins, le directeur l'établissement public de santé mentale de [Localité 2] a, le 14 août 2022, décidé du maintien de la mesure de soins psychiatriques sans consentement de Mme [Y] dans cet établissement sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le 16 août 2022, le directeur de l'établissement public de santé mentale de [Localité 2] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans d'une requête aux fins de statuer sur la poursuite de l'hospitalisation complète au visa de l'article L 3211- 12-1 du code de la santé publique en joignant l'avis motivé du même jour émis par le docteur [E] [N], psychiatre de l'établissement.

Le procureur de la République a émis un avis favorable à la poursuite de l'hospitalisation dans les conditions actuelles, le 18 août 2022.

Suivant ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans, en date du 19 août 2022, la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [Y] a été autorisée.

Par courrier daté du 24 août 2022 adressé par télécopie au greffe de la cour d'appel d'Angers le 25 août 2022 et réceptionné le même jour, Mme [Y] a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions.

A l'audience publique du 31 août 2022, Mme [Y] a comparu et a assuré 'avoir toute sa tête' et se sentir mieux chez elle. Elle estime que son état de santé se dégrade sur son lieu d'hospitalisation. Elle affirme ne jamais avoir jeté ses médicaments à la poubelle, mais admet qu'elle a pu en oublier parfois. Elle demande à regagner une maison de repos.

Maître Cavelier d'Esclavelle, avocate au barreau d'Angers, assistant Mme [Y], a été entendue en ses observations.

S'agissant de la régularité de la procédure, elle s'étonne que le docteur [W] ait noté sur le certificat d'hospitalisation du 11 août dernier 'pas de tiers' alors que le fils de Mme [Y] sera contacté le lendemain 12 août 2022 afin d'être informé de la situation de sa mère.

Au fond, elle indique solliciter la mainlevée de la mesure conformément à la volonté de sa cliente.

Par avis écrit du 30 Août 2022 mis à disposition des parties et communiqué oralement au conseil de Mme [Y] lors de l'audience, le procureur général a conclu à la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention.

Dûment convoqué, M. Le directeur de l'établissement public de santé mentale de [Localité 2] est absent. La présente décision est par conséquent réputée contradictoire.

Dans un avis motivé du 29 août 2022 transmis au greffe de la cour le même jour et communiqué oralement aux parties présentes à l'audience, le docteur [T], psychiatre au sein de l'établissement public de santé mentale de [Localité 2], s'est prononcé sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète de Mme [Y]. Cet avis a été mis à disposition des parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Mme [Y] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable.

- Sur la régularité de la procédure et la poursuite des soins

Aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement,

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

Le même article L. 3212-1 II 2°précise encore que le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission, lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande présentée par un membre de la famille et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un médecin extérieur à l'établissement. Il est précisé que dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de 24 heures, sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins (...).

Selon l'article L 3211-12-1 I et II du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre, ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de 8 jours à compter de cette décision. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

Enfin, est admis que le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer son avis à l'évaluation par des médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Liminairement, il sera constaté que la procédure est régulière, nonobstant les observations faites par Mme [Y] par la voix de son conseil.

En effet, en application des dispositions prévues par l'article L. 3212-1 II 2° du code de la santé publique précité, il résulte du certificat d'hospitalisation du 11 août 2022, que le docteur [W], après avoir décrit l'état de santé de Mme [Y] nécessitant des soins en milieu hospitalier et son impossibilité à consentir compte tenu de ses troubles, a attesté qu'il s'avérait impossible d'obtenir une demande d'un tiers de sorte que la patiente devait être hospitalisée au regard du péril imminent ainsi constitué.

En outre, le relevé des démarches de recherche et d'information de la famille versé au dossier révèle que M. [M], fils de Mme [Y], a bien été avisé le 12 août 2022, soit dans les 24 heures, de l'hospitalisation complète et contrainte de sa mère. Il y est précisé que celui-ci était à [Localité 5], ce qui a été confirmé à l'audience par Mme [Y], et qu'il rentrerait le lendemain.

Ces documents ne sont donc pas contradictoires, M. [M] ayant pu être injoignable le 11 août au regard de son éloignement et de ses occupations, et donc dans l'impossibilité de solliciter la mesure d'hospitalisation litigieuse.

Ainsi, et en tout état de cause, la lecture comparative des deux documents sus-visés ne révèle pas une quelconque irrégularité procédurale.

Sur le bien-fondé de la poursuite des soins, les pièces versées au dossier notamment les certificats médicaux circonstanciés légalement exigés établissent que Mme [Y] âgée de 72 ans est hospitalisée sur péril imminent depuis le 11 août 2022 en raison d'un syndrome délirant.

Le docteur [N] a fait état le 12 août 2022 d'une 'patiente retrouvée dans un état d'incurie totale à son domicile qui se trouverait dans l'insalubrité.(...)Elle présente des comportements obsessionnels, liés à la propreté sans avoir la capacité de prendre soin d'elle pour son hygiène corporelle. La patiente est connue depuis le mois de janvier. Dans la psychorigidité, elle conteste son hospitalisation et revendique sa sortie immédiate, elle est dans le déni et minimise ses difficultés au domicile qu'elle n'arrive pas à expliquer.'

Le 14 août 2022, le docteur [X] a relevé que Mme [Y] est 'une patiente véhémente, opposée à l'hospitalisation et qui en dénie les motifs (incurie, anorexie). Pour autant, elle déclare être dans l'incapacité de s'occuper d'elle-même, notamment de se laver seule en raison de son état de santé physique. La dimension dépressive des troubles est probable et à confirmer.'

Le docteur [E] [N], dans le certificat actualisant l'état de santé du patient du 16 août 2022 a confirmé que la patiente réclamait sans cesse sa sortie alors qu'elle avait besoin d'aide pour certains gestes de la vie quotidienne.

Enfin, dans un certificat très récent du 29 août 2022, le docteur [T] constate encore 'la persistance d'un déni des troubles ayant nécessité sa ré-hospitalisation. Mme [Y] [C] n'entend pas nos arguments, accusant le médecin de 'menteries'. L'adhésion aux soins est encore à travailler ainsi que son projet d'avenir'.

Ces considérations médicales circonstanciées et actualisées tenant à l'existence et la persistance des troubles de Mme [Y], tels qu'objectivés sur le plan médical et liés à une grande difficulté à prendre soin d'elle-même, outre l'absence de toute reconnaissance de son état et des risques encourus, sont autant d'éléments qui rendent nécessaire la poursuite des soins psychiatriques dans un cadre contraint, les troubles mentaux rendant impossible son consentement.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties est adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état de santé mental de Mme [Y] et à la mise en oeuvre du traitement requis.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, il convient de laisser les dépens à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Nous MC DELAUBIER, déléguée du premier président de la cour d'appel,

Statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

DÉCLARONS l'appel recevable en la forme ;

Au fond, REJETONS l'appel formé par Mme [L] épouse [Y] ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 19 août 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans autorisant la poursuite de l'hospitalisation complète sans consentement de Mme [L] épouse [Y] ;

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

LE GREFFIERLE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA MC DELAUBIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00043
Date de la décision : 01/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-01;22.00043 ?
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