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01/09/2022 | FRANCE | N°22/00042

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 01 septembre 2022, 22/00042


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 42



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 23 Août 2022



N° RG 22/00042 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBQM





ORDONNANCE

DU 01 SEPTEMBRE 2022





Nous, Marie-Christine DELAUBIER, Conseillère à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 juin 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



Ma

dame [R] [F]

née le 09 Septembre 1970 à [Localité 4] (11)

[Adresse 1]

[Localité 2]

actuellement hospitalisée au [5]



Comparante assistée de Me Claire CAVELIER D'ESCLAVELLES, avocat au bar...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 42

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention d'ANGERS du 23 Août 2022

N° RG 22/00042 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FBQM

ORDONNANCE

DU 01 SEPTEMBRE 2022

Nous, Marie-Christine DELAUBIER, Conseillère à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 30 juin 2022, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [R] [F]

née le 09 Septembre 1970 à [Localité 4] (11)

[Adresse 1]

[Localité 2]

actuellement hospitalisée au [5]

Comparante assistée de Me Claire CAVELIER D'ESCLAVELLES, avocat au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉ A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DU [5]

centre hospitalier spécialisé

[Adresse 6]

[Localité 3]

Non comparant, ni représenté,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 31 Août 2022, il a été indiqué que la décision serait prononcée le 01 Septembre 2022, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Sur décision du directeur du centre hospitalier spécialisé de [Localité 7] ([5]) en date du 13 août 2022, Mme [R] [F], née le 9 septembre 1970, a été admise en soins psychiatriques sans consentement sur péril imminent au visa de l'article L3212-1 II 2° du code de la santé publique.

Cette décision a été prise sur la base d'un certificat médical rédigé le 13 août 2022 par le docteur [P] [W], n'exerçant pas au sein du [5], relevant que l'intéressée avait été adressée au service Loire F par le SAMU pour 'crises clastiques à la maison' en précisant que son état d'agitation avait nécessité son placement en chambre d'isolement. Il mentionnait que la patiente présentait 'des troubles maniaques, crise maniaque avec agressivité, propos délirants ; agitation ; impulsivité ; anosognosie'. Ce praticien a conclu que les troubles mentaux ainsi constatés rendaient impossible son consentement et justifiaient, compte tenu du péril imminent, des soins immédiats assortis d'une surveillance complète dans un établissement de santé mentionné à l'article L. 3 222-1 du code de la santé publique.

Un relevé des démarches de recherche et d'information de tiers en vue d'une admission en soins psychiatriques en péril imminent a été dressé.

Au vu de certificats médicaux des 24 et 72 heures dressés respectivement les 14 et 16 août 2022 par les docteurs [X] [T] et [O] [B] psychiatres de l'établissement de soins, le directeur du [5] a, le 16 août 2022, décidé du maintien de la mesure de soins psychiatriques sans consentement de Mme [F], dans cet établissement sous la forme d'une hospitalisation complète.

Le 19 août 2022, le directeur du [5] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers d'une requête aux fins de statuer sur la poursuite de l'hospitalisation complète au visa de l'article L 3211- 12-1 du code de la santé publique en joignant l'avis motivé du 18 août 2022 émis par le docteur [U] [H], psychiatre de l'établissement.

Le procureur de la République a émis un avis favorable à la poursuite de l'hospitalisation dans les conditions actuelles, le 22 août 2022.

Suivant ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers en date du 23 août 2022, la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [F] a été autorisée.

Par courrier daté du 23 août 2022 adressé par télécopie au greffe de la cour d'appel d'Angers le 25 août 2022 et réceptionné le même jour, Mme [F] a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions. Au soutien de son appel, elle souligne uniquement son 'refus du jugement effectué le 22 août 2022 à Angers [5]'.

A l'audience publique du 31 août 2022, Mme [F] a comparu et a exposé qu'initialement, c'est elle qui avait appelé les secours, consciente que cela n'allait pas. Elle explique que si son hospitalisation complète et même son placement en chambre d'isolement se justifiaient à son arrivée au [5], elle estime qu'elle a été maintenue abusivement dans ces conditions. Elle ajoute que son traitement médicamenteux est trop fort. Elle précise avoir fait appel car elle se considère en danger, s'étonnant d'un changement de chambre annoncé par le [5] le jour même de l'audience.

Maître Cavelier d'Esclavelle, avocate au barreau d'Angers, assistant Mme [F] au titre de l'aide juridictionnelle, a été entendue en ses observations tendant à la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète dont Mme [F] est l'objet.

En la forme, elle a observé que la procédure lui paraît régulière.

Au fond, le conseil de Mme [F] a rappelé que cette dernière avait été admise au départ en soins libres. Elle a souligné que celle-ci respectait la prise de son traitement en extérieur depuis de nombreuses années et qu'elle savait faire appel aux équipes médicales en cas de difficultés. En définitive, elle estime que l'état de santé de Mme [F] ne nécessite pas davantage le consentement aux soins exigé.

Par avis écrit du 30 août 2022 mis à disposition des parties et communiqué oralement au conseil de Mme [F] lors de l'audience, le procureur général a conclu à la confirmation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention compte tenu notamment des éléments figurant sur le dernier avis motivé du docteur [H] du 26 août 2022.

Dûment convoqué, M. Le directeur du centre hospitalier spécialisé de [Localité 7] est absent. La présente décision est par conséquent réputée contradictoire.

Dans un avis motivé du 26 août 2022 transmis au greffe de la cour le même jour et communiqué oralement aux parties présentes à l'audience, le docteur [U] [H], psychiatre au sein du centre hospitalier spécialisé de [Localité 7] , s'est prononcé sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète de Mme [F]. Cet avis a été mis à disposition des parties.

A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré au 1er septembre 2022 à 14H.

Par ordonnance du 21 août 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers avait ordonné la mainlevée de la mesure d'isolement de Mme [F].

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Mme [F] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable.

- Sur la poursuite des soins

Aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement,

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

Selon l'article L 3211-12-1 I et II du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre, ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de 8 jours à compter de cette décision. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

Enfin, il est admis que le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer son avis à l'évaluation par des médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Liminairement, il convient de constater la régularité de la procédure non contestée en cause d'appel. Il sera relevé que les recherches d'un tiers doivent être considérées comme vaines, dès lors que la mère de Mme [F] avait refusé de signer la demande.

Par ailleurs, il sera rappelé que la cour doit statuer dans les limites de sa saisine et que celle-ci est saisie uniquement de l'appel interjeté à l'encontre de l'ordonnance du 23 août 2022 du juge des libertés et de la détention autorisant la poursuite de l'hospitalisation complète, à l'exclusion de toutes autres décisions relatives le cas échéant à une mesure d'isolement ou de contention. Au demeurant, le courrier par lequel Mme [F] a relevé appel ne fait pas mention de son placement en chambre d'isolement, étant précisé que par ordonnance du 21 août 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers avait déjà ordonné la mainlevée de la mesure d'isolement dont elle faisait l'objet.

Sur le bien-fondé de la poursuite des soins, les pièces versées au dossier notamment les certificats médicaux circonstanciés légalement exigés établissent que Mme [F], âgée de 51 ans, est hospitalisée sur péril imminent depuis le 13 août 2022 en raison d'une crise clastique survenue à domicile puis d'un état d'agitation ayant justifié in fine son placement en chambre d'isolement, la patiente présentant des troubles maniaques avec agressivité, propos délirants, impulsivité et anosognosie.

Le docteur [T] a fait état le 14 août 2022 d'une 'patiente suivie de longue date dans le cadre d'un trouble chronique avec antécédents de passages à l'acte suicidaire. Il mentionnait 'une tension psychique certaine avec une sthénicité véritable.' Il relevait également que même si la patiente 'dit ne plus avoir d'idées suicidaires', elle reste logorrhéique, tachypsychique, instable sur le plan de l'humeur nécessitant son maintien en chambre de soins intensifs. Son discernement est à l'heure actuelle aboli et ne peut donc consentir pleinement aux soins qui apparaissent nécessaire à des fins de réadaptation thérapeutique et d'observation médicale.'

Le 16 août 2022, le docteur [B] a constaté que Mme [F] 'reste tachypsychique, avec un discours désorganisé et des coqs-à-l'âne, une logorrhée, sans agitation motrice. On perçoit quelques idées de persécution notamment concernant son entourage. L'humeur reste labile, et mixte avec des idées quasi-délirantes (...) qui apparaissent quand on lui annonce la poursuite des soins sous contrainte'.

Le 18 août 2022, le docteur [H] a relevé que 'malgré la sédation, la patiente reste tachyphémique. Elle présente une désinhibition verbale et comportementale. Elle exprime des propos délirants sur une thématique de persécution.(...) La critique de son état est très partielle.'

Le docteur [H], dans le certificat actualisant l'état de santé de la patiente du 26 août 2022 a fait part d'une amélioration relevant notamment l'absence d'agitation motrice de Mme [F]. Mais il a souligné que celle-ci présentait encore 'une élation de l'humeur avec tachypsychie toujours nette, tendance à la diffluence du discours, logorrhée difficilement canalisable au cours de l'échange, et une perception des troubles partielle.'

Ces considérations médicales circonstanciées et actualisées tenant à l'existence et la persistance des troubles objectivés sous la forme d'une tachypsychie toujours nette avec une perception des troubles partielle, sont autant d'éléments qui rendent nécessaire la poursuite des soins psychiatriques de Mme [F] dans le cadre contraint de l'hospitalisation complète. Une surveillance médicale selon ces modalités s'avère de fait encore nécessaire afin d'ajuster le traitement à l'état de santé de la patiente. En outre, le premier juge a relevé avec justesse que les troubles dont souffre Mme [F] ne lui permettent pas de consentir pleinement et de manière éclairée aux soins et aux traitements prodigués.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée puisque l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties est adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état de santé mental de Mme [F] et à la mise en oeuvre du traitement requis.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, il convient de laisser les dépens à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Nous MC DELAUBIER, déléguée du premier président de la cour d'appel,

Statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

DÉCLARONS l'appel recevable en la forme ;

Au fond, REJETONS l'appel formé par Mme [R] [F] ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 23 août 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Angers autorisant la poursuite de l'hospitalisation complète sans consentement de Mme [R] [F] ;

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

LE GREFFIERLE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJA MC DELAUBIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00042
Date de la décision : 01/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-01;22.00042 ?
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