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23/06/2022 | FRANCE | N°22/00035

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre section b, 23 juin 2022, 22/00035


COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B







Ordonnance N°: 35



Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 10 Juin 2022



N° RG 22/00035 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FAMD





ORDONNANCE

DU 23 JUIN 2022





Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 20 décembre 2021, assistée de S. LIVAJA, Greffier,





Statuant sur l'appel formé par :



M

adame [D] [H]

née le 02 Janvier 1990 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de [5]



Comparante assistée de Me Hamid KADDOURI substitué par Me Mélanie CH...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

1ère CHAMBRE B

Ordonnance N°: 35

Ordonnance du Juge des libertés et de la détention du MANS du 10 Juin 2022

N° RG 22/00035 - N° Portalis DBVP-V-B7G-FAMD

ORDONNANCE

DU 23 JUIN 2022

Nous, Catherine MICHELOD, Présidente de chambre à la Cour d'Appel d'ANGERS, agissant par délégation du Premier Président en date du 20 décembre 2021, assistée de S. LIVAJA, Greffier,

Statuant sur l'appel formé par :

Madame [D] [H]

née le 02 Janvier 1990 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

actuellement hospitalisée à l'EPSM de [5]

Comparante assistée de Me Hamid KADDOURI substitué par Me Mélanie CHATELAIS, avocats au barreau d'ANGERS, commis d'office,

APPELÉ A LA CAUSE :

Monsieur LE DIRECTEUR DE L'EPSM DE [5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Non comparant, ni représenté,

Après débats à l'audience publique tenue au Palais de Justice le 22 Juin 2022, il a été indiqué que la décision serait prononcée le 23 Juin 2022, par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCEDURE

Par décision de M. le Directeur de l'Etablissement de Santé Mentale de [5], ci-après dénommé EPSM, en date du 04 juin 2022, Mme [D] [H], née 02 janvier 1990 à [Localité 3], a été admise en soins psychiatriques sans consentement dans cet établissement sous le régime de l'hospitalisation complète pour péril imminent.

Cette admission a été décidée sur la base d'un certificat médical dressé le jour même par le docteur [G] [F], médecin exerçant au service des Urgences du Centre hospitalier [Localité 4], ayant constaté que Mme [D] [H] présente les troubles mentaux suivants : bouffée délirante aigüe avec propos suicidaires, agressivité verbale et refus de soins, lesquels rendent impossible son consentement et imposent des soins immédiats assortis d'une surveillance constante compte tenu de l'existence d'un péril imminent pour sa santé.

Au vu de certificats médicaux dressés dans les 24 et 72 heures de l'admission soit les 05 juin et 07 juin 2022 par les docteurs [C] [I] et [R] [Y], tous deux psychiatres de l'EPSM de [5] décrivant l'état mental de l'intéressée et indiquant que les soins psychiatriques contraints selon la même forme de prise en charge étaient justifiés, la mesure d'hospitalisation complète a été maintenue par le directeur de l'établissement le 07 juin 2022.

Par requête datée du 08 juin 2022 à laquelle a été joint notamment l'avis émis le même jour par le docteur [R] [Y], psychiatre de l'EPSM de [5], se prononçant en faveur de la poursuite des soins psychiatriques contraints à temps complet, le directeur d'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention du Mans aux fins de voir contrôler la mesure avant le 12ème jour d'hospitalisation en soins psychiatriques contraints de Mme [D] [H].

Par ordonnance rendue le 10 juin 2022 sur avis conforme du parquet du 08 juin 2022, le juge des libertés et de la détention du Mans a autorisé le maintien des soins psychiatriques sans consentement, dont Mme [D] [H] fait l'objet, sous la forme de l'hospitalisation complète.

Par lettre simple datée du 13 juin 2022 et adressée par télécopie au greffe de la Cour le 14 juin 2022, Mme [D] [H] a relevé appel de cette décision pour laquelle elle a refusé de signer le récépissé de notification retourné le 13 juin 2022.

A réception de la procédure, l'ensemble des personnes concernées a été convoqué à l'audience du 22 juin 2022 à 14 heures 30 et le dossier communiqué au Ministère public.

Dans un avis motivé daté du 15 juin 2022 transmis au greffe de la cour d'appel d'Angers le même jour et dont la teneur a été rappelée à l'audience, le docteur [R] [Y], psychiatre de l'EPSM de [5], a conclu au maintien de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte de Mme [D] [H].

DEBATS EN CAUSE D'APPEL

A l'audience publique du 22 juin 2022, l'appelante est assistée de Maître Chatelais substituant Maître Kaddouri, avocat au barreau d'Angers et désigné au titre de la commission d'office du fait de l'indisponibilité de l'avocat choisi.

Entendue sur les motifs de son appel, Mme [D] [H] explique pour l'essentiel qu'elle remet en cause le terme de contrainte dès lors qu'elle se prend en charge par un suivi psychiatrique et qu'en cas d'impossibilité de gérer, elle demande elle-même à être hospitalisée. Elle considère encore que le régime de la contrainte n'est pas positif pour son évolution sur le plan de la santé. Elle accepte le traitement. Elle indique avoir été hospitalisée en milieu psychiatrique une dizaine de fois mais dans un contexte différent dont la dernière durant 3 jours en juin 2021. Elle précise souffrir de troubles bipolaires qu'elle impute à des actes de maltraitances subis alors qu'elle était âgée de 2 à 18 ans, à une consommation de stupéfiants à l'adolescence et aux violences conjugales exercées par son ex-compagnon qui ont conduit aussi au placement de son fils en famille d'accueil depuis 11 ans. Sur sa situation, elle précise ne pas avoir de famille proche et développer des projets dans l'événementiel ajoutant être inscrite à la Sacem comme chanteuse. Elle souhaite donc ne plus être sous contrainte qu'elle trouve injuste et trop violent mais en hospitalisation libre. Elle se dit en désaccord avec les termes du dernier avis médical notamment quant à un état morbide et insiste sur le fait qu'elle n'est nullement opposée aux soins.

Pour sa part, son conseil ne formule aucune observation sur la régularité de la procédure. Sur le fond, l'avocate de l'appelante souligne la prise de conscience de Mme [H] quant à la nécessité de soins dont elle est demanderesse. Elle réaffirme la détresse de celle-ci face au régime de contrainte, laquelle manifeste la volonté d'y mettre fin d'autant qu'elle a des projets professionnels.

Bien que régulièrement convoqué, M. le directeur de l'EPSM de [5] est absent.

Par avis écrit daté du 16 juin 2022 dont il est donné lecture à l'audience, le Parquet Général conclut à la recevabilité de l'appel et, au fond, à la confirmation de l'ordonnance dont appel.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel

Au regard des éléments détaillés au titre des faits et de la procédure, l'appel de Mme [D] [H] a été relevé dans les formes et délais prévus par les articles R. 3211-18 et R. 3211-19 du code de la santé publique.

Il est donc parfaitement recevable.

- Sur la poursuite des soins

En droit, aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1°- ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2°- son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

En application de l'article L.3212-1 II 2° du même code, le directeur d'établissement prononce l'admission lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date de l'admission, un péril imminent pour la santé de la personne dûment constaté par un certificat médical établi.

Par ailleurs, selon l'article L.3211- 12-1 du dit code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention préalablement saisi par le directeur de l'établissement n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de 12 jours à compter de l'admission. Cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète.

Enfin, il est admis que le juge qui se prononce sur le maintien de l'hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer son avis à l'évaluation par des médecins des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Dans le cas présent, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est régulière et aucune contestation n'est d'ailleurs émise sur ce point. Figurent en particulier l'ensemble des certificats et avis médicaux circonstanciés et motivés exigés par la loi ainsi que des décisions administratives intervenues à ce jour.

S'agissant du bien-fondé de la mesure et la poursuite des soins, les pièces médicales du dossier notamment médicales établissent que Mme [D] [H] est admise en soins psychiatriques contraints sous le régime de l'hospitalisation complète sans demande d'un tiers pour péril imminent le 04 juin 2022 sur décision du directeur de l'établissement en application de l'article L.3212-1 II 2° du code de la santé publique au constat initial de troubles caractérisés par une bouffée délirante aigüe avec tenue de propos suicidaires ainsi qu'une agressivité verbale et un refus des soins proposés.

Les certificats dressés dans les 24 et 72 heures de l'admission par deux psychiatres de l'établissement autres que le médecin, auteur du certificat initial qui y était extérieur, et encore l'avis médical transmis dans la perspective de l'audience devant le premier juge ont confirmé chez Mme [H], pour les premiers, des manifestations hypomaniaques avec logorrhée, tachyphémie ainsi que des troubles du cours de la pensée avec tachypsychie majeure chez une patiente dans le déni de ses troubles et au discours marqué par un sentiment de persécution très fort vis- avis des habitants de son village et des forces de police ainsi qu'une position de toute puissance par rapport à son traitement dont elle a refusé la modification.

Aux termes de son avis daté du 15 Juin 2022, le docteur [Y] conclut clairement que la nécessité d'une mise en sécurité en milieu psychiatrique spécialisé demeure. Le praticien objective en effet la persistance des idées délirantes bien adhérées ainsi qu'une tachypsychie et une logorrhée congruentes à son délire. Il considère encore que la reconnaissance par Mme [H] de son état morbide et l'adhésion aux soins restent faibles.

Au regard de ces éléments circonstanciés, il est médicalement établi que les troubles présentés par Mme [H] rendent encore impossible à ce jour son consentement et que son état mental continue d'imposer des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante qui justifient la poursuite d'une hospitalisation complète, en dépit des déclarations qu'elle a pu formuler au soutien de son appel.

Dès lors que l'atteinte portée à l'exercice des libertés constitutionnelles garanties demeure nécessaire et proportionnée à l'état de santé mental de Mme [D] [H] et à la mise en oeuvre du traitement requis, l'ordonnance déférée sera confirmée.

- Sur les dépens

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens de la procédure d'appel seront laissés à la charge de l'Etat.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement et par décision réputée contradictoire,

DÉCLARONS recevable l'appel de Mme [D] [H] ;

Au fond, CONFIRMONS l'ordonnance rendue le 10 juin 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Mans ayant maintenu le régime complète sans consentement à l'EPSM de [5] de Mme [D] [H] ;

LAISSONS les dépens d'appel à la charge de l'État.

LE GREFFIERLE DÉLÉGUÉ

DU PREMIER PRÉSIDENT

S. LIVAJAC. MICHELOD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre section b
Numéro d'arrêt : 22/00035
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;22.00035 ?
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