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08/03/2016 | FRANCE | N°13/03085

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 08 mars 2016, 13/03085


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 03085.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 17 Octobre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 01595

ARRÊT DU 08 Mars 2016

APPELANT :
Monsieur James X...... 44840 LES SORINIERES
représenté par Maître Christelle VERDIER, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :
La Société TECHNIQUE SERVICE FORMATION (T. S. F.) 12 rue du Déry ZA Les Fousseaux-BP 70116 49481 SAINT-SYL

VAIN D'ANJOU
représentée par Maître Isabelle CHEVRE, avocat au barreau de NANTES en présence de Mons...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 03085.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 17 Octobre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 01595

ARRÊT DU 08 Mars 2016

APPELANT :
Monsieur James X...... 44840 LES SORINIERES
représenté par Maître Christelle VERDIER, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE :
La Société TECHNIQUE SERVICE FORMATION (T. S. F.) 12 rue du Déry ZA Les Fousseaux-BP 70116 49481 SAINT-SYLVAIN D'ANJOU
représentée par Maître Isabelle CHEVRE, avocat au barreau de NANTES en présence de Monsieur Y..., responsable des ressources humaines de la Société

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 08 Mars 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :
Le Groupe E. V. S est constitué de plusieurs sociétés parmi lesquelles :- la société Technique Service Formation qui a pour activité " la formation professionnelle continue, l'accompagnement des entreprises dans le cadre de la formation professionnelle initiale et le conseil aux entreprises dans les domaines du recrutement, de la gestion des ressources et relations humaines et du personnel " ;- la société Techni-Desoss qui a pour activité " tous travaux de désossage et de parage, tous travaux relatifs à la coupe de la viande et à son conditionnement, toutes prestations de services se rapportant au travail en abattoir, la gestion de la salle de découpe en partialité ou totalité, la vente de tout matériel ayant un rapport avec l'agro-alimentaire, le transport de produits frais " ;- la société Euroviande Service ayant pour activité " le travail à façon en viande ou produits agro-alimentaires ".
L'activité principale du Groupe E. V. S consiste à affecter ses salariés sur les sites d'exploitation de ses clients afin que les travaux de découpe, de désossage et d'emballage des viandes soient réalisés sur les lignes de production qui lui sont exclusivement réservées. Du fait d'une insuffisance de main d'oeuvre qualifiée, le Groupe E. V. S procède à la formation spécifique de personnel via la société Technique Service Formation, organisme de formation spécialisé dans l'activité du Groupe.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 17 mars 1997, la société Techni-Desoss a embauché M. James X... en qualité de boucher. Par avenant du 1er mai 2004, il a été promu chef d'équipe. Puis, par avenant du 13 mars 2006 prenant effet le 1er avril suivant, il est devenu responsable de production.
Par avenant du 28 décembre 2007 à effet au 1er janvier 2008, M. James X... a été muté au sein de la société Euroviande Service pour y occuper l'emploi de responsable du recrutement statut agent de maîtrise, coefficient 340, qualification AGTM TAM 7.
Ces contrat et avenants étaient régis par la convention collective nationale des entreprises de l'industrie des commerces de gros des viandes.
Aux termes d'une convention de transfert conclue le 26 janvier 2011 entre d'une part, la société Euroviande Service et la société Technique Service Formation (ci-après : la société T. S. F), d'autre part, M. James X..., le contrat de travail de ce dernier a été transféré à la société T. S. F à compter du 1er janvier 2011 pour qu'il y occupe les fonctions de recruteur-formateur, statut technicien hautement qualifié niveau E 2, coefficient 270 avec maintien des droits et de l'ancienneté acquis depuis le 17 mars 1997. Ce contrat prévoyait que le salarié était soumis à une convention de forfait annuel en jours fixant la durée annuelle du travail à 214 jours. Son salaire brut mensuel était fixé à la somme de 2 800 ¿ et s'y ajoutait une prime de fonction pouvant atteindre 420 ¿ par mois " à condition que les objectifs définis par le responsable soient atteints " et une prime de fin d'année d'un montant de 1 806 ¿ bruts " pour une présence continue de 12 mois. Dans le dernier état de la relation de travail, la rémunération moyenne brute mensuelle du salarié s'établissait à la somme de 31008 ¿ (trois derniers mois).
Une clause de mobilité précisait que les fonctions en cause impliquaient une très grande mobilité géographique nationale en fonction des impératifs de la société, de sorte que le salarié acceptait expressément d'effectuer " des déplacements professionnels fréquents y compris de longue durée ". Ce contrat contenait également une clause de discrétion et de confidentialité, une clause d'exclusivité professionnelle et une clause de non-concurrence et de protection du savoir faire.
Il était soumis à la convention collective des organismes de formation.
Par lettre remise en main propre le 9 juillet 2012, la société T. S. F a convoqué M. James X... à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 19 juillet suivant et lui a notifié sa mise à pied conservatoire immédiate.
Par lettre recommandée du 26 juillet 2012 réceptionnée le 28 juillet suivant, elle lui a notifié son licenciement pour faute grave tenant à la violation de son obligation de discrétion et de confidentialité.
Le 4 décembre 2012, M. James X... a saisi le conseil de prud'hommes auquel, dans le dernier état de la procédure de première instance, il demandait le paiement d'un rappel de prime de fonction, de dommages et intérêts pour forfait jours non conforme et d'une indemnité pour travail dissimulé, de voir déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui payer un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, les indemnités de rupture, des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et pour préjudice moral.
Par jugement du 17 octobre 2013 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- jugé que le licenciement de M. James X... était justifié par une cause réelle et sérieuse mais non par une faute grave ;- en conséquence, débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement injustifié et préjudice moral ;- condamné la société Technique Service Formation à lui payer les sommes suivantes : ¿ 2 110, 17 ¿ de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire outre 211, 02 ¿ d'incidence de congés payés ; ¿ 6 496 ¿ d'indemnité compensatrice de préavis outre 649, 60 ¿ au titre des congés payés afférents ; ¿ 12 918 ¿ d'indemnité de licenciement ; ¿ 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- dit que la prime de fonction devait être accordée à M. James X... par la société T. S. F au titre des mois de novembre 2011, juin et juillet 2012 et condamné l'employeur à lui payer de ce chef la somme de 1 067, 16 ¿ outre 106, 72 ¿ de congés payés afférents ;- débouté M. James X... de sa demande pour forfait jours non conformes et de sa demande au titre du travail dissimulé ;- invité la société T. S. F à remettre à M. James X... un bulletin de paie rectifié au titre du dernier mois de salaire récapitulant les sommes dues en exécution du jugement ainsi qu'une attestation Pôle emploi rectifiée et ce, dans les deux semaines de la notification du jugement sous peine, passé ce délai, d'une astreinte de 20 ¿ par jour de retard, le conseil de prud'hommes se réservant la faculté de liquider l'astreinte ;- dit que les sommes allouées au titre des créances salariales porteraient intérêts au taux légal à compter de sa saisine et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement ;- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 3 369, 96 ¿ ;- condamné la société Technique Service Formation aux dépens.
M. James X... a régulièrement relevé appel de cette décision par lettre recommandée postée le 25 novembre 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 8 décembre 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 8 décembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles M. James X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de juger qu'il est injustifié ;- de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives au rappel de salaire du chef de la mise à pied conservatoire, à l'indemnité compensatrice de préavis et à l'indemnité de licenciement, au rappel de prime de fonction, au montant du salaire moyen mensuel et aux dépens ;- de l'infirmer en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre du forfait annuel en jours, du travail dissimulé, de dommages et intérêts pour licenciement injustifié et pour préjudice moral ;- de condamner la société T. S. F à lui payer les sommes suivantes : ¿ 50 500 ¿ nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ¿ 20 220 ¿ nets de dommages et intérêts pour préjudice moral, ¿ 15 000 ¿ nets de dommages et intérêts pour convention de forfait en jours non conforme ;
à défaut, en tout état de cause, de condamner la société T. S. F à lui payer les sommes suivantes : ¿ 4 074, 43 ¿ bruts de rappel de salaire pour heures supplémentaires accomplies au cours des années 2011 et 2012 outre 407, 44 ¿ bruts de congés payés afférents ; ¿ 3 654, 81 ¿ bruts au titre de la contrepartie pour les temps de déplacement outre 365, 48 ¿ de congés payés afférents ; ¿ 3 500 ¿ de dommages et intérêts pour non-respect des temps de repos quotidiens ;- de condamner la société T. S. F à lui payer la somme de 23 512, 29 ¿ nets de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;- de la condamner à lui rembourser la somme de 400 ¿ nets indûment déduite du bulletin de paie rectificatif dont la délivrance a été ordonnée par le conseil de prud'hommes ;- de la condamner à lui remettre un bulletin de paie rectificatif des sommes dues ainsi qu'une attestation Pôle emploi rectifiée conformes au présent arrêt et ce, sous peine d'une astreinte de 100 ¿ par jour de retard ;- de dire que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande et d'ordonner la capitalisation des intérêts ;- de condamner la société T. S. F à lui payer la somme de 4 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Le salarié fait valoir en substance que :

sur l'inopposabilité du forfait en jours :
- l'accord d'entreprise du 15 avril 2003 qui instaure la possibilité de mettre en place des conventions de forfait en jours au sein de la société T. S. F ne prévoit pas de modalités propres à garantir le respect des durées maximales de travail et celui des repos journaliers et hebdomadaires et leur vérification par l'employeur mais il fait peser sur le salarié la responsabilité du respect des dispositions relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et au nombre de jours travaillés ;- la rencontre annuelle prévue par l'article L. 3121-46 du code du travail mais aussi par l'accord d'entreprise pour veiller au respect de la charge de travail et des temps de repos n'a pas été mise en oeuvre à son égard ;- la mise en oeuvre d'une convention de forfait illicite lui a nécessairement causé un préjudice ;- dans la mesure où son forfait en jours est illégal, il est soumis à l'ensemble des dispositions relatives à la durée du travail, notamment, à la durée légale du travail et il a droit au paiement des heures supplémentaires qu'il a accomplies ;
- par les éléments qu'il verse aux débats, il étaye sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;- compte tenu du nombre considérable d'heures supplémentaires qu'il a réalisées, sa demande indemnitaire pour travail dissimulé est justifiée ;
sur la prime de fonction :
- si aux termes du contrat de travail, la prime de fonction est soumise au respect d'objectifs, il apparaît qu'en réalité, ces " objectifs " sont déterminés sans référence précise et que la prime est attribuée de manière totalement subjective ;- il n'est donc pas normal qu'aucune somme ne lui ait été versée de ce chef en novembre 2011 et en juin et juillet 2012 ;
sur le licenciement :
- les relevés des appels téléphoniques passés à partir de son téléphone mobile professionnel obtenus par l'employeur et sur lesquels ce dernier fonde le licenciement constituent un mode de preuve illicite en ce qu'ils ont été obtenus sans qu'il ait été préalablement informé dudit contrôle alors que les relevés comportent tous les chiffres des numéros appelés et non pas seulement les six premiers ;- aucune déclaration n'a été faite auprès de la CNIL ;- le fait que des salariés aient démissionné n'autorisait pas l'employeur à obtenir ces relevés de manière illicite, étant observé en outre qu'aucun lien objectif et certain n'est établi entre ces appels téléphoniques et ces démissions ;- les appels téléphoniques invoqués comme fautifs sont prescrits ; l'employeur n'établit pas qu'il n'aurait eu connaissance des relevés téléphoniques qu'en juin 2012 alors qu'il reçoit chaque mois les factures téléphoniques de ses salariés ;- l'employeur n'établit pas avoir contrôlé les relevés téléphoniques d'autres salariés ;- les faits que l'employeur a toléré pendant plusieurs mois, en l'occurrence, les appels téléphoniques à M. A..., ne peuvent pas constituer une faute ;- dans la mesure où l'employeur avait connaissance de ces appels téléphoniques depuis plusieurs mois grâce aux factures qu'il reçoit, il ne peut pas soutenir que des faits qu'il connaissait depuis longtemps et qu'il a tolérés constituaient une faute grave ;- le licenciement est injustifié dans la mesure où, en l'absence de précision des griefs dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, il n'a pas pu se défendre équitablement ;- son contrat de travail ne comporte aucune information au titre d'appels téléphoniques qui auraient été interdits ; l'employeur qui recevait ses factures de téléphone mobile professionnel chaque mois ne lui a jamais adressé de remarques ou mises en garde au sujet des appels qu'il passait ; la plupart des appels argués de fautifs ont été passés en dehors de ses horaires de travail ; les appels étant de très courte durée, ils ne permettent pas de caractériser un abus ;- aucun abus dans l'usage de son téléphone mobile professionnel n'est caractérisé à son égard ;- les appels téléphoniques qui lui sont reprochés ont été passé lors de déplacements professionnels ; compte tenu de l'autonomie dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, l'employeur ne peut pas lui reprocher une utilisation excessive de son téléphone ;- il n'a jamais téléphoné à l'entreprise concurrente visée par l'employeur mais seulement à M. A... qui avait été son supérieur hiérarchique au sein du Groupe E. V. S et avec lequel il avait noué des relations personnelles ;- l'employeur affirme que les appels téléphoniques argués de fautifs auraient eu pour objet de fournir des informations professionnelles confidentielles à la société concurrente sans toutefois rapporter la preuve du contenu de ces échanges téléphoniques ;- dans la mesure où il n'était plus responsable de production depuis plusieurs années, il n'était plus en possession des informations qui auraient pu être utiles à la société concurrente ;- l'employeur ne rapporte nullement la preuve de ses accusations selon lesquelles il aurait participé à une politique de débauchage des salariés du Groupe E. V. S au profit de la société concurrente dirigée par M. A....
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 8 décembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société Technique Service Formation demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : ¿ rejeté la prescription des faits invoqués dans la lettre de licenciement ; ¿ débouté M. James X... de ses demandes indemnitaires formées au titre du forfait en jours et du travail dissimulé, du licenciement injustifié et du préjudice moral ;- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a écarté la faute grave ;- en conséquence, de condamner M. James X... à lui rembourser la somme nette de 21 399, 23 ¿ y compris la prime de fonction et à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- subsidiairement, de confirmer que le licenciement repose bien sur une cause réelle et sérieuse ;- de le condamner aux entiers dépens.
L'employeur fait valoir en substance que :

sur le forfait en jours :
- l'accord d'entreprise répond aux exigences légales, les garanties dues ont été respectées, la convention de forfait en jours est parfaitement licite ;- le salarié n'étaye pas sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires ; les relevés d'horaires produits ont été établis pour les besoins de la cause ; les temps de trajet qui ne constituent pas du temps de travail effectif doivent être écartés ;

sur la prime de fonction :
- le versement de la prime de fonction étant soumis à la réalisation d'objectifs, lesquels n'ont pas toujours été atteints, c'est à juste titre que la prime de fonction n'a pas été réglée au cours des trois mois litigieux ;

sur le licenciement :
- au cours du premier semestre 2012, il a constaté la perte récurrente de clients au profit de la société Presta Breizh dont le directeur général est M. A..., lequel a exercé des fonctions de responsable de production au sein du Groupe E. V. S ;- bon nombre de ses salariés lui ont appris que la société Presta Breizh avait une politique de débauchage particulièrement intense de salariés du Groupe E. V. S ;- c'est dans ces circonstances qu'il a décidé de contrôler les communications téléphoniques professionnelles de ses salariés ayant eu des responsabilités et ayant travaillé sous l'autorité de M. A... ;- la facture téléphonique de mai 2012 de M. James X... ayant révélé 9 appels en direction de M. A..., il a décidé d'exploiter les factures antérieures ;- aucune déclaration à la CNIL n'était nécessaire ; aucune entrave à la vie privée de M. James X... n'a été commise ;- le moyen tiré de la prescription n'est pas fondé ; c'est le rapprochement entre les pertes de marchés et les démissions au profit de la société Presta Breizh et le constat, sur la facture arrivée le 12 juin 2012, de 9 appels téléphoniques de M. James X... vers M. A... qui a déclenché le contrôle des factures antérieures, lequel a confirmé que, chaque mois, le salarié passait de nombreux appels téléphoniques au directeur de la société concurrente ;- la lettre de convocation à l'entretien préalable n'a pas à énoncer les motifs du licenciement ;- il n'est pas reproché à M. James X... d'avoir utilisé son téléphone mobile professionnel à des fins personnelles ;- il lui est reproché un manquement à l'obligation de confidentialité et l'intention de favoriser une société concurrente, en l'occurrence, la société Presta Breizh, par le biais d'échanges téléphoniques réguliers, longs et récurrents avec le directeur de cette société qui se trouve être un ancien collègue de travail et ce, pendant les horaires de travail ;- le salarié n'a pas exécuté de bonne foi le contrat de travail et a nui à son employeur en lui faisant perdre des marchés et une main d'oeuvre spécialement formée par ses soins ;- les nombreux appels téléphoniques en direction de M. A... caractérisent un abus ;- la connaissance par le personnel des sociétés du Groupe E. V. S de la perte de marchés associée aux départs massifs de collègues de travail vers la société concurrente dont le directeur était un ancien responsable de production au sein du Groupe E. V. S, a créé un trouble sur les sites de travail sur lesquels les anciens salariés d'E. V. S devenus salariés de Presta Breizh continuaient à côtoyer leurs anciens collègues toujours salariés d'E. V. S ;- la faute grave est caractérisée ; il ne s'agit pas de simples allégations.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
1o) Sur la convention de forfait en jours :
Le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles. Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
Au cas d'espèce, c'est l'avenant no 1 à l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail du 9 novembre 2001 conclu le 15 avril 2003 entre la société T. S. F et l'organisation syndicale CGC qui prévoit la possibilité de conclure des conventions de forfait en jours pour les cadres et certains agents de maîtrise autonomes parmi lesquels les formateurs.
En son article 2. 11, cet accord prévoit : " Les cadres et agents de maîtrise concernés organisent librement leur temps de travail dans le cadre du forfait annuel en jours, sous réserve toutefois du respect sous leur propre responsabilité des dispositions relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et au nombre de jours travaillés dans la semaine. En conséquence, les cadres et agents de maîtrise bénéficient d'un repos quotidien d'une durée minimale de 11 heures consécutives, d'un repos hebdomadaire d'une durée de 24 heures consécutives auquel s'ajoute le repos quotidien précité. Ils ne peuvent travailler plus de six jours par semaine ".
Cette disposition qui fait peser sur le salarié la responsabilité du respect des règles légales relatives au repos quotidien, au repos hebdomadaire et au nombre de jours travaillés dans la semaine n'est pas conforme aux exigences de la loi qui fait peser sur l'employeur l'obligation de garantir la santé et la sécurité des travailleurs et donc, d'assurer ou de faire veiller au respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.
En second lieu, aux termes de l'article L. 3121-46 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi no 2008-789 du 20 août 2008, " Un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié. ". Ce texte s'applique à tous les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours que ce soit avant ou après l'entrée en vigueur de la loi du 20 août 2008.
L'accord d'entreprise du 15 avril 2003 prévoit lui aussi en son article 2. 13 l'obligation d'un entretien annuel entre le salarié et son supérieur hiérarchique afin de " permettre, éventuellement, une adaptation de la charge de travail de chaque cadre et agent de maîtrise concerné, à la nouvelle organisation du travail ".
Force est de constater que le compte rendu d'entretien professionnel de l'année 2011 et l'entretien de deuxième partie de carrière réalisé le 26 mars 2012, seuls produits par l'employeur, ne répondent ni au contenu exigé par l'article L. 3121-46 du code du travail ni même à celui prévu par l'article 2. 13 de l'accord d'entreprise en ce qu'ils ne font nullement ressortir qu'aient été abordées les questions relatives à la charge de travail de M. James X..., à l'équilibre entre sa charge de travail et sa vie personnelle et familiale, et à sa rémunération.
Il suit de là que la société Technique Service Formation n'a pas observé, d'une part, les stipulations légales, d'autre part, les stipulations de l'accord collectif du 15 avril 2003 dont le respect est de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours. En conséquence, la convention de forfait en jours doit être déclarée privée d'effet à l'égard de M. James X... qui peut ainsi prétendre à l'application des règles du droit commun en matière de durée du travail et de décompte du temps de travail et au paiement d'heures supplémentaires dont la cour doit vérifier l'existence et le nombre à compter de la 36ème heure.
Le fait pour M. James X... d'avoir été soumis à une convention de forfait en jours ne respectant pas les dispositions légales et celles de l'accord collectif du 15 avril 2003 a été pour lui à l'origine d'un préjudice qui sera, au regard des éléments soumis à l'appréciation de la cour, justement réparé par l'octroi d'une somme de 500 ¿ à titre de dommages et intérêts.

2o) Sur la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires :
S'il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies il appartient toutefois au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
A l'appui de sa demande, M. James X... verse aux débats :
- un tableau récapitulant ses journées de travail du 3 janvier 2011 au 23 novembre 2011 et comportant, pour chaque jour, l'indication du déplacement géographique effectué (lieu de départ et lieu d'arrivée), du nombre de kilomètres accomplis, du temps de trajet, du lieu de travail, de la " mission " réalisée (nature du travail accompli : exemple : " bureau ", " recrutement ", " formation "), des horaires effectués (à savoir, soit : " 8 h-17 h 50 " avec parfois mention d'une heure de pause, soit " horaires du pôle ", soit " horaires de production " sans autre précision), du temps de travail (à savoir : 8 h 50, 7 h ou 4 h), du " temps de rédaction informatique " (à savoir : 1 heure ou néant) et du total cumulé " temps de travail effectif + temps de trajet " (sa pièce no 15) ;- un tableau récapitulant mois par mois de janvier à décembre 2011, le temps de travail total et le temps de trajet total étant précisé que le mois de décembre 2011 ne comporte aucun temps de travail ni aucun temps de trajet avec indication du nombre de jours de RTT, de congés payés ou de formation (une feuille de sa pièce no 15) ;- les mêmes tableaux pour la période écoulée du 2 janvier au 29 juin 2012 (sa pièce no 16) ;- un tableau récapitulant pour l'année 2011 et pour le premier semestre 2012, semaine par semaine, le nombre d'heures de travail accomplies sans les temps de trajet, le nombre d'heures supplémentaires en ressortant et le montant de la rémunération due (sa pièce no 17).
Par ces éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés auxquels l'employeur peut répondre en ce que, notamment, il connaît l'amplitude horaire des journées de bureau et des journées sur site de production, M. James X... étaye sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires.
La société Technique Service Formation critique les pièces versées aux débats par le salarié sans fournir quant à elle le moindre élément. Il ressort des bulletins de paie de M. James X... qu'aucune heure supplémentaire ne lui a jamais été réglée. Il convient toutefois de déduire des heures supplémentaires alléguées les 10 jours de RTT représentant 70 heures dont il a bénéficié en 2011 et les 8 jours de RTT représentant 56 heures dont il a bénéficié au cours du premier semestre 2012.
En l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour, il apparaît que ce dernier a donc, hors temps de trajet, accompli 51, 50 heures supplémentaires au cours de l'année 2011 et aucune heure supplémentaire au cours du premier semestre 2012. En considération du taux horaire applicable en 2011 et de la majoration de 25 % à laquelle il peut prétendre, la société Technique Service Formation sera condamnée à lui payer à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires la somme de 1188, 62 ¿ outre 118, 86 ¿ de congés payés afférents au titre de l'année 2011 et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2012, date de réception par l'employeur de sa convocation à comparaître devant le bureau de conciliation. M. James X... sera débouté de sa demande formée au titre de l'année 2012.

3o) Sur la demande de contrepartie relative aux temps de déplacement :
L. 3121-4 du code du travail, tel qu'issu de la loi no 2005-32 du 18 janvier 2005, dispose que : " Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière, déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'ils existent. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail ne doit pas entraîner de perte de salaire ".
Au cas d'espèce, M. James X... habitait Les Sorinières dans le département de la Loire Atlantique. Cette commune est distante de 105 kilomètres du siège social de la société Technique Service Formation, situé à Saint-Sylvain d'Anjou en Maine-et-Loire. Le temps de trajet d'1 h 25 avancé par le salarié pour un aller entre ces deux communes est parfaitement compatible avec le temps de trajet le plus rapide d'1 h 10 indiqué par Via Michelin. Il ressort du contrat de transfert conclu le 26 janvier 2011 qu'à compter du 1er janvier 2011, le salarié était affecté au lieu du siège social de l'entreprise, soit à Saint-Sylvain d'Anjou, et que, compte tenu de ses fonctions, il serait amené à effectuer des " déplacements professionnels fréquents y compris de longue durée ", ce qui requérait de sa part " une grande mobilité géographique nationale en fonction des impératifs de la société. ".
Il résulte des éléments fournis par le salarié et non discutés par l'employeur qu'il a en effet accompli des missions à Loudéac (22), Guingamp (22), Tremorel (22), Quimperlé (29) Feignies (59), Villefranche (03), Cholet (49), Montluçon (03), Caen (14), Villers Bocage (14), Vitré (35), La Guerche de Bretagne (35), Chateaubriand (35), Rennes (35), Fougères (35), Cuiseaux (71), Migennes (89), Auch (32).
Compte tenu du choix de lieu d'habitation fait par M. James X..., le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu de travail doit être fixé à 1 h 25. En application du texte susvisé, contrairement à ce qu'il revendique, d'une part, les trajets entre son domicile et le siège social de l'entreprise et retour n'ouvrent droit à aucune contrepartie (il s'agit des jours où il est allé travailler au siège social de l'entreprise), d'autre part, en cas de déplacement ailleurs qu'au lieu du siège social avec départ du domicile le matin et retour au domicile le soir, seule la partie de trajet quotidien excédant 2 h 50 lui ouvre droit à contrepartie.
La société Technique Service Formation ne discute ni les lieux de déplacement mentionnés par le salarié dans ses tableaux, ni les temps de déplacement lesquels apparaissent d'ailleurs conformes aux trajets effectués. En l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour et en considération des seuls temps de déplacement excédant 2, 50 heure par jour, il apparaît que M. James X... a accompli 161 heures de déplacement en 2011 et non 517 heures comme revendiqué et 172 heures de déplacement au cours du premier semestre 2012 et non 268 heures comme revendiqué. L'employeur n'allègue pas de façon circonstanciée, ni ne prouve, avoir accordé une quelconque contrepartie sous forme d'indemnité financière ou de repos et les bulletins de salaire ne mentionne aucune contrepartie.
Le salarié est en conséquence bien fondé à solliciter une contrepartie financière équivalent à 25 % du salaire horaire. En l'absence de convention ou d'accord collectif et de décision unilatérale de l'employeur, au titre de l'année 2011 et du premier semestre 2012, la société T. S. F sera donc condamnée à lui payer la somme de 1 539, 40 ¿ à titre de contrepartie de ses temps de déplacement. Cette contrepartie n'ouvre pas droit à l'incidence de congés payés. Elle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

4o) Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect des temps de repos quotidiens :
Aux termes de l'article L. 3131-1 du code du travail, " Tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives. ".
C'est à l'employeur, redevable au titre du contrat de travail d'une obligation de sécurité de résultat, qu'il incombe de prouver, lorsque cela est contesté qu'il a respecté les seuils et plafonds quotidiens prévus en matière de temps de travail.
Au cas d'espèce, la société T. S. F qui ne répond pas à ce chef de prétention et ne prétend pas même avoir respecté ce temps de repos, ne produit aucun élément permettant de vérifier que le salarié a bénéficié d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives.
En l'état des pièces soumises à l'appréciation de la cour, il convient d'allouer au salarié la somme de 500 ¿ en réparation du préjudice subi.

5o) Sur la demande en paiement de la prime de fonction :
Au point 2 de son article 5 afférent à la " Rémunération ", le contrat de transfert prévoit qu'" Une prime de fonction d'un montant brut pouvant atteindre 420, 00 ¿ par mois sera versée à Monsieur James X... à condition que les objectifs tels que définis avec son responsable soient atteints. En cas d'absence, le montant de cette prime sera calculé au prorata temporis du temps de présence. ".
Il résulte des bulletins de salaire de M. James X... que, comme il l'indique, à l'exception des mois de novembre 2011, juin et juillet 2012, il a, en effet, perçu chaque mois une somme à titre de prime de fonction, dont le montant s'élevait à 420 ¿ les mois intégralement travaillés et dont le montant était, en cas d'absences, proratisé au nombre de jours travaillés.
La société Technique Service Formation ne justifie pas avoir défini des objectifs à M. James X.... Pour tenter de justifier du non-paiement de la prime de fonction au cours des trois mois litigieux, elle verse aux débats trois fiches constituant sa pièce no 35, portant l'intitulé " Technique service formation primes mensuelles " suivi de l'indication du mois concerné, signées par MM. B... et F... et comportant en marge de chacune des cases suivantes " envoi des documents administratifs ", " faire évoluer les programmes et catalogues ", " évaluation globale des formations " la lette " N " signifiant " non " et en marge de la case " montant attribué " la mention " 0 ". Comme l'ont exactement retenu les premiers juges, ces tableaux renseignés de façon parfaitement arbitraire sans qu'aucun élément objectif permette d'établir, d'une part, que le salarié se serait vu fixer des objectifs précis antérieurement aux mois concernés, d'autre part, qu'il ne les aurait pas atteints au cours de ces mois, ne permettent pas de justifier le défaut de paiement de la prime de fonction dont il apparaît qu'elle lui a été versée au cours de tous les autres mois.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il lui a alloué de ce chef la somme de 1 067, 16 ¿ outre 106, 72 ¿ dont le montant n'est pas discuté.

6o) Sur le licenciement :
La lettre de licenciement adressée à M. James X... le 26 juillet 2012, et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée :
" Monsieur,
Nous faisons suite à notre entretien préalable du 19 juillet 2012, au cours duquel vous étiez assisté de M. Marc G..., conseiller extérieur à l'entreprise choisi sur une liste dressée à cet effet par le Préfet de Maine-et-Loire. Malgré vos explications, nous sommes dans l'obligation de procéder à votre licenciement pour faute grave.
En effet, suite à l'arrivée de l'entreprise Presta Breizh, entreprise de prestations de services concurrente des sociétés du groupe EVS, constitué notamment des sociétés Euroviande Service, Techni Desoss et T. S. F, chez deux clients des sociétés du groupe EVS, nous avons effectué une enquête interne qui nous a amené à constater que vous utilisez votre téléphone portable professionnel pendant vos heures de travail pour appeler ledit concurrent. Le contrôle interne effectué le 6 juillet 2012 a permis de découvrir que notamment depuis le 1er janvier 2011, vous avez téléphoné à de très nombreuses reprises, dans le cadre de vos heures de travail, avec votre téléphone portable professionnel à Monsieur Patrice A..., se présentant comme Directeur Général de l'entreprise Presta Breizh. Ainsi, vous avez appelé Monsieur Patrice A... 79 fois au cours de l'année 2011, puis 27 fois entre le 1er janvier et le 31 mai 2012, soit plus de 5 appels en moyenne par mois. Certains appels sont également d'une durée significative, tels que, par exemple, celui du 10 novembre 2011 d'une durée de 1 heure, 3 minutes et 12 secondes, celui du 17 janvier 2012 d'une durée de 25 minutes et 42 secondes, celui du 21 mai 2012 d'une durée de 16 minutes et 20 secondes, celui du 29 mai 2012 d'une durée de 9 minutes et 20 secondes, ou encore celui du 30 mai 2012 d'une durée de 8 minutes et 24 secondes. Vous justifiez, aujourd'hui, ces échanges téléphoniques avec M. Patrice A... en indiquant qu'il est une de vos connaissances proches, puisqu'il était votre ancien directeur d'exploitation au sein de la société Techni Desoss, notamment lorsque vous étiez Responsable de Production sur le chantier du client SOCOPA VIANDES situé à la Roche-sur-Yon. Outre le fait que vous n'avez pas à passer d'appels téléphoniques personnels, il s'avère que depuis le début de l'année 2012, l'entreprise Presta Breizh, dont M. Patrice A... est présenté comme directeur général, a pris aux sociétés du groupe EVS, dont fait partie la société T. S. F, le chantier d'ELIVIA situé au Lion d'Angers ainsi que la moitié du chantier de SOCOPA VIANDES situé à la Roche-sur-Yon. De ce fait, toute information que vous donnez à Monsieur Patrice A... revêt un caractère stratégique pour ce concurrent. En effet, vous connaissez l'ensemble du fonctionnement du groupe de par votre ancienneté au sein des entreprises du groupe EVS : 11 ans au sein de Techni Desoss en tant que Technicien Boucher puis chef d'équipe et responsable de production sur la Roche-sur-Yon, puis 3 ans au sein d'Euroviande Service en tant que Responsable Recrutement, puis au sein de T. S. F en tant que Recruteur-Formateur depuis le 1er janvier 2011. Vous êtes donc parfaitement informé des modes opératoires spécifiques et systèmes d'organisation des sociétés du groupe EVS ainsi que de l'activité technique et commerciale des différents chantiers, des rémunérations pratiquées et ce, dans un contexte extrêmement concurrentiel.
Vous n'avez donc pas respecté les dispositions de votre convention de transfert de la société Euroviande Service à la société T. S. F, que vous avez signé le 26 janvier 2011, qui stipule dans son article 10, intitulé « clause de discrétion et de confidentialité » : « Monsieur James X... déclare se considérer comme lié par une obligation de discrétion absolue en ce qui concerne toutes les informations, tous les documents, tous les contrats, tous les fichiers, etc... dont la divulgation serait de nature à défavoriser les intérêts concurrentiels de l'employeur. Il en va de même pour tous les renseignements confidentiels dont il pourrait avoir connaissance. Tout manquement à cette obligation au cours du contrat autoriserait la société a procédé au licenciement immédiat de l'intéressé. Tout manquement à cette obligation après la cessation du contrat de travail entraînera le versement de dommages et intérêts au profit de l'employeur. ».
L'envoi d'appels personnels répétés et de longue durée pendant vos heures de travail et avec votre téléphone portable professionnel d'une part, et des échanges au cours de ces appels téléphoniques avec le Directeur Général d'une entreprise concurrente de notre groupe d'autre part, constituent un manquement grave à vos obligations professionnelles, particulièrement en matière de discrétion et de confidentialité, ce qui a participé à de graves conséquences pour notre groupe. En effet, l'arrivée de ce concurrent a fait perdre à la société Euroviande Service le chantier d'ELIVIA situé au Lion d'Angers, soit 21 postes de production, équivalent à l'emploi de 26 salariés, et la société Techni Desoss a perdu 18 postes de production sur le chantier de SOCOPA VIANDES situé à La Roche sur Yon, équivalents à l'emploi de 22 salariés. En conséquence, nous vous confirmons que nous avons décidé de vous licencier pour grave.... ».
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.
Au cas d'espèce, l'employeur reproche à M. James X... d'avoir gravement manqué à ses obligations professionnelles, particulièrement en violant ses obligations de discrétion et de confidentialité, en adressant, au moyen de son téléphone mobile professionnel, pendant ses heures de travail des appels " personnels " répétés et de longue durée au directeur général d'une entreprise concurrente avec lequel il a ainsi échangé, ce qui a contribué pour les sociétés Euroviande Service et Techni Desoss à la perte d'un chantier et demi.
Il résulte des pièces versées aux débats que :
- c'est par lettre du 3 février 2012 que la société Euroviande Service a appris de son client Elivia sa décision de résilier le marché les liant sur la chaîne de production du Lion d'Angers pour une date d'effet au 4 mai suivant et que c'est début juin 2012 que la société Techni Desoss s'est vue confirmer la perte, au profit de la société Presta Breizh, de la moitié du chantier SOCOPA VIANDES de la Roche sur Yon ;- les démissions de 8 salariés de la société Techni Desoss sont intervenues entre le 15 mai et le 14 juin 2012 et celles de 8 salariés de la société Euroviande Service sont intervenues entre le 6 février et le 21 mai 2012 ;- à réception, le 12 juin 2012, de la facture téléphonique du mois de mai 2012 afférente au téléphone mobile professionnel de M. James X..., la société T. S. F a constaté que, pendant le mois concerné, ce dernier avait passé 9 appels téléphoniques en direction d'un numéro correspondant au téléphone mobile de M. Patrice A..., directeur général de la société Presta Breizh, directement concurrente des sociétés du groupe EVS, ces 9 appels représentant une durée de conversation de 45'46 ".
C'est à partir de ce constat effectué à la mi-juin 2012 de la conjonction de pertes de marchés au profit de la société Presta Breizh, de démissions de salariés des sociétés Euroviande Service et Techni Desoss et d'un nombre d'appels téléphoniques non négligeable, au cours du mois de mai 2012, à partir de son téléphone mobile professionnel, de M. James X... vers M. Patrice A..., directeur général de la société Presta Breizh et ancien salarié des sociétés Euroviande Service et Techni Desoss que la société T. S. F a eu un intérêt et a décidé d'exploiter toutes les factures du téléphone mobile de son salarié depuis le mois de janvier 2011. L'employeur n'a donc eu la connaissance de l'ensemble des appels téléphoniques passés par son salarié, de janvier 2011 à mai 2012, au moyen de son téléphone mobile professionnel en direction de celui de M. Patrice A... qu'au cours de la seconde quinzaine du mois de juin 2012. La procédure de licenciement ayant été engagée le 9 juillet 2012, il a parfaitement respecté le délai de deux mois imparti par l'article L. 1332-4 du code du travail et c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la prescription n'était pas encourue.
Il convient de rappeler que l'activité principale des sociétés Euroviande Service et Techni Desoss consiste à affecter ses salariés sur les sites d'exploitation de ses clients (par exemple : la société SOCOPA à La Roche sur Yon, la société Elivia au Lion d'Angers) afin que les travaux de découpe, de désossage et d'emballage des viandes soient réalisés sur les lignes de production qui lui sont exclusivement réservées au sein de ces entreprises.
A l'appui de la faute grave qu'elle invoque, la société T. S. F verse aux débats :
- le courrier du 3 février 2012 par lequel la société Elivia a informé la société Euroviande Service de sa décision de mettre un terme au marché les liant à compter du 4 mai 2012, date d'expiration du préavis ;- les échanges de courriels des 1er et 4 juin 2012 (pièce no 46 de la société T. S. F) qui attestent de la perte par la société Techni Desoss d'une partie du marché de prestations (représentant deux équipes) au sein de la société SOCOPA VIANDES à La Roche sur Yon ;- les attestations établies à la mi-juillet 2012 par cinq bouchers, salariés de la société Techni Desoss, qui relatent en substance en des termes très voisins avoir constaté que leurs anciens collègues ayant démissionné de la société Techni Desoss avaient, dès la fin de leur préavis, repris leur travail sur les mêmes postes du site SOCOPA VIANDES de La Roche sur Yon au service de l'entreprise prestataire concurrente, certains témoins ajoutant que " du débauchage était effectué " auprès des salariés de la société Techni Desoss ;- les lettres de démission de 8 salariés de la société Techni Desoss intervenues entre le 14 mai et le 15 juin 2012 ;- les lettres de démission de 8 salariés de la société Euroviande Service intervenues entre la mi-février et le 23 mai 2012 ;- le témoignage du 10 février 2013 aux termes duquel M. Patrice A... relate que, courant 2012, en tant que responsable de la société Presta Breizh, il a contacté plusieurs personnes salariés de " DVV " (la société Desossage viandes volailles qui n'apparaît pas appartenir au groupe EVS) par le biais de son responsable pour qu'ils aillent travailler sur le site Elivia de Villers Bocage (14) et précise que les coordonnées des effectifs de la société DVV lui ont été transmis par le responsable de la société Elivia et qu'il a été demandé aux salariés de la société DVV de démissionner sans respect du préavis dû afin de permettre à Presta Breizh, à la demande d'Elivia, de remonter une ligne de production identique à celle de DVV ;- un encart publicitaire de la société Presta Breizh comportant les coordonnées téléphoniques de téléphone mobile de M. Patrice A... ;- les factures téléphoniques relatives à l'abonnement de téléphone mobile professionnel de M. James X... pour l'année 2011 et les cinq premiers mois de l'année 2012 ;- un courriel adressé par M. James X... à M. Patrice A... le 17 mai 2011 comportant en pièce jointe un modèle de convention de transfert anonymisé portant la date du 23 décembre 2010 ;- les pages no 1 et 29/ 33 de l'assignation délivrée le 10 janvier 2014 par les sociétés Techni Desoss, Euroviande Service, T. S. F et Groupe E. V. S. à la société Presta Breizh pour débauchage déloyal de salariés des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service, pour pratique d'une politique de prix abusivement bas au détriment de ces sociétés, et pour " espionnage " commercial caractérisant une concurrence déloyale.
Il convient de rappeler que l'activité des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service consiste à affecter ses salariés sur les sites d'exploitation de ses clients (tels Elivia et SOCOPA VIANDES) afin qu'ils réalisent, sur les lignes de production exclusivement réservées à leur employeur, les travaux de découpe, de désossage et d'emballage de viande. Les entreprises concurrentes des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service fonctionnent de la même façon. Il résulte des explications fournies par les parties et des pièces versées aux débats qu'il peut dès lors arriver que deux entreprises prestataires concurrentes de découpe, désossage et emballage de viandes interviennent concomitamment chez un même client au titre de marchés différents de sorte que les salariés de ces deux entreprises prestataires se trouvent en contact et au contact de la hiérarchie de l'entreprise concurrente.
Il ressort expressément du courrier adressé le 3 février 2012 par la société Elivia à la société Euroviande Service que c'est en raison, d'une part, de la décision unilatérale prise par cette dernière à l'automne 2011 d'augmenter ses tarifs dans une proportion jugée excessive par Elivia, d'autre part, de maintenir cette augmentation en dépit du désaccord manifesté par cette dernière oralement puis par écrit, qu'elle a décidé de résilier le contrat de prestation de service la liant à la société Euroviande Service.
Les termes des deux courriels constituant la pièce no 46 de la société T. S. F, dont celui du 4 juin 2012 est écrit par M. Sébastien C..., président de la société Techni Desoss, laissent apparaître que la décision d'arrêter deux équipes " Techni Desoss " sur le site SOCOPA VIANDES de La Roche sur Yon émane d'un certain " JL Comin " auquel M. Sébastien C... indique avoir demandé : " s'il croyait que c'était bien la période pour prendre cette décision = contexte difficile sur les marchés, situation économique dégradée sur des sites sur groupe... pas de réponse de sa part. " M. C... indique également avoir proposé à " H... " d'appeler un certain " I... " pour que tout le monde soit informé en raison des " risques éventuels sur capacités de production dans les semaines à venir " et il retranscrit cette réponse que lui a donnée " H... " au cours de l'entretien qu'il relate : " non, non, cela ne le regarde pas, cela concerne La Roche, j'ai pris cette décision. ". L'auteur du premier courriel, daté du 1er juin 2012 et qui a pour objet de rendre compte de la visite effectuée sur le site de la Roche sur Yon le jour même par un certain " Mr D... " accompagné du directeur commercial du groupe EVS, est M. Jacky E..., responsable d'exploitation au sein du groupe EVS. Ce dernier expose que cette visite " serait liée à la rentabilité du site de la Roche qui n'est plus au niveau attendu " et il relève que " quelques tensions se font sentir la date butoir approchant " ajoutant qu'une nouvelle démission devrait leur parvenir lundi.
Le courrier du 3 février 2012 concernant le site Elivia et les deux courriels susvisés laissent apparaître, d'une part, que la perte du chantier Elivia tient à une décision prise par la société Euroviande Service à l'automne 2011 d'augmenter ses tarifs de prestations dans une mesure qu'elle a refusé de réviser en dépit de l'indication donnée par Elivia qu'elle n'entendait pas l'accepter, d'autre part, que l'arrêt de deux équipes (un demi-marché) de la société Techni Desoss sur le site SOCOPA VIANDES de La Roche sur Yon procède d'une décision du président de la société Techni Desoss faisant suite à une visite du site de la Roche sur Yon effectuée le 1er juin 2012, notamment par le directeur commercial du groupe EVS, en raison du manque de rentabilité de ce site par rapport au niveau attendu. La société T. S. F ne produit pas de pièces permettant de caractériser une attitude de concurrence déloyale de la part de la société Presta Breizh dans le captage de ces deux marchés. Elle ne justifie pas de la suite qu'a eue l'assignation en concurrence déloyale qu'elle a fait délivrer à cette dernière le 10 janvier 2014 et ne fournit aucune indication à cet égard.

Les cinq bouchers salariés auteurs des attestations constituant les pièces no 13 à 17 de l'intimée ne mettent nullement en cause M. James X... pas plus que ne le fait M. Patrice A... dans son témoignage qui atteste seulement d'une pratique de débauchage dans le secteur industriel concerné. Les courriers de démission ne visent pas non plus M. James X.... Ces démissions n'ont concerné que 8 salariés sur 26 occupés sur la chaîne concernée sur le chantier Elivia et seulement 8 salariés sur les 22 concernés sur le site SOCOPA VIANDES. La société T. S. F n'allègue pas que de telles démissions ne se seraient pas produites à la faveur d'autres pertes de marchés étant observé que ce phénomène apparaît cohérent au regard de l'organisation du travail en cause et du souhait qui peut animer certains salariés de ne pas subir de déplacement géographique.
C'est à juste titre que M. James X... oppose que la société T. S. F ne fournit aucun élément relatif à la teneur des entretiens téléphoniques réguliers qu'il a pu avoir avec M. Patrice A... au cours de l'année 2011 et du premier semestre 2012. Il n'est pas contesté, la société intimée l'indique elle-même, que ce dernier a eu, selon ses termes, " un parcours professionnel important au sein du groupe EVS ", chez Euroviande Service et Techni Desoss, dont il a gravi les échelons hiérarchiques, de sorte qu'il avait une très bonne connaissance des sociétés de ce groupe, de leurs méthodes de travail, et qu'à cette occasion, il a travaillé avec M. James X... dont il a été le supérieur hiérarchique.
L'examen des factures de téléphone révèle les durées d'entretien téléphoniques suivantes entre M. James X... et M. Patrice A... :-2011 : janvier : 2'12, février : 42'20, mars : 24'33, avril : 0'28, mai : 33'72, juin : 2'99, juillet : 5'82, août : 0'47, septembre 5'31, octobre : 33'19, novembre : 12'79, décembre : 0'48, soit une moyenne de 13'64 par mois ;-2012 : janvier : 36'40, février : 0'30, mars : 2'57, avril : 2'61 et mai : 45'46, soit une moyenne de 17'46 par mois.
Il apparaît que :- la majeure partie des 79 appels effectués en 2011 et des 27 appels opérés en 2012 se situent en tout début de journée (entre 7 h 15 et 9 h) ou aux alentours de la pause méridienne (entre 12 h et 14 h) ou à partir de 17 h30/ 18 h le soir, c'est à dire à des moments ne correspondant pas à des temps de travail ;- au cours de 11 mois sur 17, la durée mensuelle des appels a été minime ;- les mois de février et mai 2011 comportent des durées d'appels similaires à celles des mois de janvier et mai 2012, sans que l'employeur allègue de quelconques pertes de marché intervenues à ces périodes au profit de la société Presta Breizh ou d'un autre concurrent.
Aucun élément objectif ne permet de retenir que M. James X... aurait fourni à M. Patrice A... des informations confidentielles au sujet des sociétés du groupe EVS en général et des marchés litigieux en particulier et qu'il aurait concouru à la perte des lignes de production litigieuses.
Au regard des éléments soumis à l'appréciation de la cour, la société T. S. F ne rapporte pas la preuve d'un manquement de M. James X... à ses obligations de discrétion et de confidentialité, ni même celle d'un abus dans l'usage du téléphone mobile professionnel mis à sa disposition.
Par voie d'infirmation du jugement déféré, le licenciement de M. James X... sera en conséquence déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

7o) Sur les conséquences financières du licenciement :
Il convient de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux sommes allouées par les premiers juges au salarié, dont les montants ne sont pas discutés, au titre du rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement.
M. James X... justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, il peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 19 254, 26 ¿.
En considération de la situation particulière du salarié, notamment de son âge (52 ans) et de son ancienneté (environ 15 ans et 4 mois) au moment de la rupture, des circonstances du licenciement, de sa capacité à retrouver un emploi compte tenu de sa formation, du fait qu'il justifie avoir perçu de Pôle emploi l'allocation de retour à l'emploi du mois d'août 2012 au moins jusqu'au 31 octobre 2015, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer à la somme de 50 000 ¿ l'indemnité propre à réparer le préjudice subi par M. James X... du fait de son licenciement injustifié tant sur le plan économique que sur le plan moral.
Le salarié ne rapportant pas la preuve d'un préjudice moral distinct lié notamment au comportement, à l'attitude de l'employeur au moment du licenciement, il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral qu'il qualifie de " supplémentaire " dans ses écritures, étant observé que les accusations de divulgation d'informations confidentielles et stratégiques qu'il invoque à l'appui de ce chef de prétention procèdent directement du motif de son licenciement.

8o) Sur le travail dissimulé :
L'article L. 8223-1 du code du travail, relatif aux droits des salariés en cas de recours par l'employeur au travail dissimulé, dispose qu'" en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ".
La dissimulation d'emploi salarié prévue par ce texte n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle, preuve qui fait défaut en l'espèce compte tenu notamment du faible nombre d'heures supplémentaires omises. Le jugement déféré sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé.

9o) Sur la demande en paiement de la somme de 400 ¿ :
Il résulte du bulletin de paie afférent au mois de juillet 2012 établi par l'employeur en exécution du jugement entrepris qu'il a déduit des sommes dues à M. James X... un " acompte " de 2 617, 99 ¿ alors que la bulletin de paie établi en juillet 2012, au moment du licenciement du salarié, révèle que la somme nette versée s'est en réalité élevée à 2 217, 99 ¿. La société T. S. F sera en conséquence condamnée à lui payer la somme de 400 ¿ nette indûment déduite.

10o) Sur la délivrance d'un bulletin de paie et d'une attestation Pôle emploi rectifiée :
Il convient de condamner la société T. S. F à remettre à M. James X... un bulletin de paie récapitulatif des sommes allouées aux termes du présent arrêt ainsi qu'une attestation Pôle emploi rectifiée conformément aux dispositions de la présente décision.
Aucune circonstance ne vient justifier le recours à une mesure d'astreinte pour garantir l'exécution de cette disposition. Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a ordonné une mesure d'astreinte.
11o) Sur le cours des intérêts et la capitalisation des intérêts :
Comme en ont exactement décidé les premiers juges, il convient de dire que les intérêts courront, au taux légal, sur les sommes de nature indemnitaire, à compter du jugement ou du présent arrêt selon la décision qui les a allouées et à compter du 7 décembre 2012, date de réception par la société T. S. F de la convocation à comparaître à l'audience de conciliation, sur les sommes de nature salariale.
Les conditions de l'article 1154 du code civil étant réunies, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts.

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives :
- aux sommes allouées à M. James X... à titre de rappel de salaire du chef de la mise à pied conservatoire, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement, de rappel de prime de fonction, d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;- au cours des intérêts de retard au taux légal et à la capitalisation des intérêts ;- au montant du salaire des trois derniers mois ;- aux dépens ;
et en ce qu'il a débouté M. James X... de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral qu'il qualifie de " supplémentaire " au titre du licenciement, d'indemnité pour travail dissimulé ;
L'infirme en ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;
Déclare inopposable à M. James X... la convention de forfait en jours insérée au contrat de transfert conclu le 26 janvier 2011 et condamne la société Technique Service Formation à lui payer la somme de 500 ¿ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant pour lui d'avoir été soumis à une convention de forfait en jours ne respectant pas les dispositions légales et celles de l'accord collectif du 15 avril 2003 ;
Déclare le licenciement de M. James X... dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société Technique Service Formation à payer à M. James X... les sommes suivantes ;
-1 188, 62 ¿ de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de l'année 2011 outre 118, 86 ¿ de congés payés afférents et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 7 décembre 2012, date de réception par l'employeur de sa convocation à comparaître devant le bureau de conciliation ;-1 539, 40 ¿ à titre de contrepartie de ses temps de déplacement et ce, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;-50 000 ¿ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ce, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;-400 ¿ à titre d'acompte indûment retenu en exécution du jugement déféré ;-500 ¿ en réparation du préjudice résultant du non-respect des temps de repos quotidiens ;
Déboute M. James X... de ses demandes de :
- rappel de salaire pour heures supplémentaires formée au titre de l'année 2012 ;- d'incidence de congés payés sur la contrepartie allouée pour temps de déplacement ;
Condamne la société T. S. F à remettre à M. James X... un bulletin de paie récapitulatif des sommes allouées aux termes du présent arrêt ainsi qu'une attestation Pôle emploi rectifiée conformément aux dispositions de la présente décision ; Dit n'y avoir lieu à mesure d'astreinte pour garantir l'exécution de cette disposition ;
Dit que les intérêts courront, au taux légal, sur les sommes de nature indemnitaire, à compter du jugement ou du présent arrêt selon la décision qui les a allouées et à compter du 7 décembre 2012, date de réception par la société T. S. F de la convocation à comparaître à l'audience de conciliation, sur les sommes de nature salariale ;
Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;
Condamne la société Technique Service Formation à payer à M. James X... la somme de 2 000 ¿ au titre de ses frais irrépétibles d'appel et la déboute elle-même de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne la société Technique Service Formation aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/03085
Date de la décision : 08/03/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-03-08;13.03085 ?
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