COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02793.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 18 Septembre 2013, enregistrée sous le no 22 822
ARRÊT DU 01 Mars 2016
APPELANTS :
Monsieur Christophe X...... 72170 BEAUMONT SUR SARTHE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 0010702 du 13/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
Maître Pierre Y..., es-qualité de mandataire liquidateur de Mr christophe X...... 72015 LE MANS
représentés par Maître Luc LALANNE de la SCP HAY-LALANNE-GODARD-HERON-BOUTARD-SIMON-VILLEMONT, avocats au barreau du MANS
INTIMEE :
LE REGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS DES PAYS DE LOIRE 44952 NANTES CEDEX 9
représenté par Maître Agnès EMERIAU la SELAS ORATIO AVOCATS, avocats au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2016 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 01 Mars 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
M. Christophe X... a exercé pendant plusieurs années, en nom personnel, une activité de plombier-chauffagiste-électricien lui imposant d'être affilié à la caisse du régime social des indépendants conformément aux dispositions des articles L. 133-6, L. 133-6-1 et L. 622-3 du code de la sécurité sociale.
Au début du mois de mars 2011, il a subi, au niveau du coude droit, une intervention chirurgicale au cours de laquelle il a contracté un staphylocoque doré. Cette complication a rendu nécessaires plusieurs interventions chirurgicales, dont une dernière en décembre 2012, ainsi que des séances de rééducation. La caisse RSI des Pays de la Loire a donc été amenée à lui verser des indemnités journalières. M. Christophe X... n'a jamais pu reprendre son activité professionnelle.
Par lettre recommandée du 23 janvier 2013, ce dernier a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable qui a confirmé la décision de la caisse, d'une part, de fermer son droit aux prestations en espèces pour la période antérieure au 13 décembre 2011 pour non paiement des cotisations, d'autre part, de notifier un indu pour prestations indûment versées au titre de la période du 15 janvier au 11 février 2012 compte tenu de la stabilisation de son état de santé.
Par jugement contradictoire du 18 septembre 2013, le tribunal a :
- rejeté le recours de M. Christophe X... s'agissant de la fermeture de ses droits à prestations et confirmé la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la Caisse RSI Pays de la Loire sur ce point ;- constaté que cette dernière ne justifiait pas de la notification de la décision de stabilisation de l'état de santé de son assuré ;- dit en conséquence que la Caisse RSI Pays de la Loire ne pouvait pas lui opposer la forclusion du délai d'un mois pour solliciter une expertise médicale ;- dit que M. Christophe X... pouvait demander dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement le recours à l'expertise médicale prévue par l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale au Médecin conseil régional 44 952 Nantes Cédex 9- par lettre recommandée avec accusé de réception à laquelle doit être joint un certificat médical sous pli cacheté du médecin traitant justifiant du recours ;- dit qu'en cas de contestation, le tribunal serait à nouveau saisi sur requête de la partie la plus diligente.
La Caisse RSI Pays de la Loire et M. Christophe X... ont reçu notification de ce jugement respectivement le 24 et le 25 septembre 2013. M. Christophe X... en a régulièrement relevé appel général par lettre recommandée postée le 14 octobre suivant.
Par jugement du 29 avril 2014, le tribunal de commerce du Mans a prononcé une mesure de liquidation judiciaire à l'égard de M. Christophe X... et désigné M. Pierre Y... en qualité de liquidateur judiciaire.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 19 janvier 2016 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
M. Pierre Y... agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. Christophe X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ;- de condamner la Caisse RSI Pays de la Loire à liquider entre ses mains les droits à indemnités journalières de M. Christophe X... du chef de la période du 14 janvier 2012 au 13 juillet 2013 ;- de la condamner à lui payer la somme de 5 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour comportement abusif outre une indemnité de procédure de 1 500 ¿.
L'appelant fait valoir en substance que :
- le 14 octobre 2013, M. Christophe X... a saisi le médecin conseil régional et que, aux termes du rapport d'expertise qu'il a établi le 14 janvier 2014, le docteur Z... a conclu que son arrêt de travail était justifié pour toute la période du 2 mars 2011 au 13 juillet 2013 ;- contrairement à ce qu'elle lui a annoncé par courrier du 23 janvier 2014, en dépit de l'avis par l'expert, la Caisse RSI Pays de la Loire n'a pas régularisé sa situation en lui payant les indemnités journalières dues ; au contraire, elle a continué à émette des contraintes qu'il a frappées d'opposition ;- à la date du 2 mars 2011, il était à jour de ses cotisations ; si les cotisations n'ont pas été payées pendant la période de mai à novembre 2011, c'est parce qu'il était en arrêt de toute activité ;- dans la mesure où il est désormais acquis que son arrêt de travail était justifié jusqu'au 13 juillet 2013, la Caisse RSI Pays de la Loire doit lui payer les indemnités journalières auxquelles il a droit ;- dès lors qu'en raison de l'ouverture de la liquidation judiciaire, la loi lui fait interdiction de payer son arriéré de cotisations, la Caisse RSI Pays de la Loire ne peut pas, pour refuser de lui régler le rappel d'indemnités journalières, lui opposer le défaut de paiement des cotisations ; les cotisations litigieuses seront payées dans le cadre de la procédure collective.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 5 mars 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la caisse du régime social des indépendants des Pays de Loire demande à la cour de débouter M. Christophe X... de son appel et de ses prétentions et de confirmer le jugement entrepris.
Elle fait valoir en substance que :
- dans la mesure où, pour l'année 2011, M. Christophe X... restait redevable des cotisations de mai, juin, juillet et novembre pour un montant de 13 037 ¿, c'est à juste titre qu'en application des articles L. 613-8 et D. 613-16 du code de la sécurité sociale, elle a refusé de lui payer les indemnités journalières pour les arrêts de travail prescrits à compter du 18 juin 2011 ;- à la demande de l'assuré, elle a mis en place un échéancier d'une durée de 22 mois afin de lui permettre de solder ses cotisations 2011 par des paiements commençant en février 2012 ; son directeur a alors accordé à titre exceptionnel à M. Christophe X... le rétablissement de ses droits à indemnités journalières à compter du 13/ 12/ 2011, soit pour les arrêts de travail prescrits à compter de cette date sous réserve du respect de cet échéancier et du paiement des cotisations en cours ;- il s'ensuit que, pour les arrêts de travail prescrits antérieurement au 13/ 12/ 2011, l'assuré ne pouvait pas prétendre au bénéfice des indemnités journalières ; c'est donc à bon droit qu'elle a refusé d'indemniser les arrêts de travail prescrits du 15 juin 2011 au 13 décembre 2011 ;- dans la mesure où l'échéancier a été rompu le 5 juin 2013, date à laquelle l'assuré restait devoir les cotisations des mois de juin, juillet et novembre 2011 pour un montant de 4 627 ¿ hors majorations ainsi que les cotisations de janvier à mars 2012, de septembre à décembre 2012 et de février à mai 2013, son droit aux indemnités journalières a été de nouveau fermé pour tous les arrêts de travail postérieurs au 13 décembre 2011 et ce, conformément aux articles L. 613-8 et D. 613-16 du code de la sécurité sociale ;- dans la mesure où le docteur Z..., expert commis en application de l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale, a conclu que l'état de santé de l'assuré n'était pas stabilisé au 14 janvier 2012, ce dernier peut médicalement prétendre au paiement des indemnités journalières à compter de cette date sous réserve toutefois de remplir les conditions administratives, c'est à dire, d'être à jour du paiement des cotisations dues ; or, dans la mesure où il reste redevable des cotisations de novembre 2011, de février et mars 2012, de septembre à décembre 2012, d'avril à août 2013, d'octobre 2013 et de mars 2014, son droit au paiement des indemnités journalières est de nouveau fermé depuis décembre 2011 et les arrêts de travail prescrits ne peuvent pas être indemnisés.
A la demande de la cour, la caisse a, en cours de délibéré, communiqué le montant des indemnités journalières auxquelles M. Christophe X... aurait pu prétendre s'il avait été à jour du paiement de ses cotisations :- du 14 janvier 2012 au 3 décembre 2012 : 325 jours à 33, 98 ¿ soit 11 043, 50 ¿- du 4 décembre 2012 au 13 juillet 2013 : 222 jours à 37, 60 ¿ soit 8 347, 20 ¿.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
En application des dispositions combinées des articles L. 613-8 et D. 613-16 du code de la sécurité sociale, pour bénéficier du règlement des prestations en espèces pendant une durée déterminée, l'assuré doit être à jour de ses cotisations annuelles de base et supplémentaires à la date du constat médical de l'incapacité de travail.
L'article L. 613-8 dispose encore que " Le défaut de versement des cotisations ne suspend le bénéfice des prestations qu'à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la date d'échéance. Cependant, en cas de paiement plus tardif, il peut, dans un délai déterminé, faire valoir ses droits aux prestations, mais le règlement ne peut intervenir que si la totalité des cotisations dues a été acquittée avant l'expiration du même délai. ". Ce texte prévoit également que lorsque la commission de recours amiable accorde à l'assuré un étalement du paiement de ses cotisations, ce dernier est rétabli dans ses droits aux prestations à compter du prononcé de la prise de décision à condition qu'il s'acquitte régulièrement des cotisations dues selon l'échéancier prévu ainsi que des cotisations en cours.
L'article R. 613-28 alinéa 3 du code de la sécurité sociale prévoit que " l'assuré qui n'est pas à jour de ses cotisations à la date des soins ne peut faire valoir ses droits aux prestations que dans le délai de 12 mois après la date d'échéance des cotisations impayées à condition que la totalité des cotisations dues soit acquittée avant la date d'échéance semestrielle se situant au terme de cette période de 12 mois. ".
Au cas d'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que M. Christophe X... a tout d'abord été placé en arrêt de travail du 14 au 29 mars 2011, période du chef de laquelle il a perçu des indemnités journalières puisqu'il était à jour de ses cotisations.
Il ne fait pas débat qu'il n'a pas réglé ses cotisations des mois de mai, juin, juillet et novembre 2011 pour un montant de 13 037 ¿.
En raison de cette dette, en application des articles L. 613-8 et D. 613-16 du code de la sécurité sociale, les arrêts de travail prescrits le 15 juin, le 21 juillet, le 1er septembre, le 24 octobre 2011 et du 1er/ 12/ 2011 au 14/ 01/ 2012 ne pouvaient pas donner lieu à paiement des indemnités journalières. Ce point n'apparaît plus être contesté puisque la demande présentée par l'assuré en cause d'appel est circonscrite à la période du 14 janvier 2012 au 13 juillet 2013.
Le 13/ 12/ 2011, la Caisse RSI Pays de la Loire a mis en place un échéancier d'une durée de 22 mois à compter du mois de février 2012 et l'assuré a bénéficié du rétablissement de ses droits aux indemnités journalières à compter du 13/ 12/ 2011 sous réserve du respect de l'échéancier et du paiement des cotisations courantes.
Par courrier du 5 juin 2013, la caisse a fait connaître à M. Christophe X... qu'elle ne pouvait pas maintenir l'échéancier dans la mesure où il ne l'avait pas respecté, restant redevable de la somme de 4 934 ¿ au titre des mois de juin, juillet et novembre 2011 et des cotisations courantes de janvier à mars 2012, de septembre à décembre 2012, de février à mai 2013 pour un montant de 12 834 ¿. Dans la mesure où l'assuré n'a pas respecté cet échéancier, c'est à juste titre qu'en vertu des textes susvisés, la caisse a refusé de lui accorder des indemnités journalières du chef des arrêts de travail postérieurs au 12/ 12/ 2011.
Ensuite, s'il est exact qu'en vertu des conclusions de l'expertise du 14/ 01/ 2014, l'assuré peut prétendre à un arrêt de travail médicalement justifié du 14/ 01/ 2012 au 13/ 07/ 2013, date à laquelle l'expert a estimé son état stabilisé, force est de constater qu'il ne peut toujours pas prétendre au paiement d'indemnités journalières du chef de cette période dans la mesure où, à la date du 14 janvier 2012 il n'était pas à jour du paiement de ses cotisations et où l'échéancier mis en place n'a pas été respecté.
Si la suspension des poursuites individuelles attachée au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire intervenu le 29 avril 2014 est de nature à interdire à la Caisse RSI Pays de la Loire de poursuivre le paiement de sa créance de cotisations en dehors du respect des règles attachées aux procédures collectives, elle ne permet pas de faire renaître au profit de l'assuré des droits qui lui étaient fermés au 14 janvier 2012 au motif qu'il n'était pas à jour du paiement de ses cotisations.
Quoique l'appel soit général, devant la cour, les dispositions du jugement relatives à la date de stabilisation de l'état de l'assuré ne sont pas discutées. La cour n'est saisie d'aucune demande ni d'aucun moyen de ce chef.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions et M. Pierre Y... pris en qualité de liquidateur judiciaire de M. Christophe X... sera débouté de sa demande en paiement des indemnités journalières au titre de la période du 14 janvier 2012 au 13 juillet 2013.
L'appelant succombant en sa demande en paiement des indemnités journalières, il n'est pas fondé à soutenir qu'en ne les réglant pas, la Caisse RSI Pays de la Loire aurait manifesté un comportement fautif à l'origine pour l'assuré d'un préjudice indemnisable. Il sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Déboute M. Pierre Y... pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. Christophe X... de sa demande en paiement des indemnités journalières au titre de la période du 14 janvier 2012 au 13 juillet 2013 ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour comportement abusif et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Dispense M. Pierre Y... ès qualités du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.