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16/02/2016 | FRANCE | N°13/02164

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 16 février 2016, 13/02164


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02164.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 01 Juillet 2013, enregistrée sous le no

ARRÊT DU 16 Février 2016

APPELANT :
Monsieur Dominique X...... 49100 ANGERS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 009685 du 13/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
représenté par Maître Arnaud BARBE, avocat au barreau d'ANGERS
>INTIMEE :
LA SARL F. M. D. M 19 rue des Poëliers 49100 ANGERS
représentée par Maître Gilles PEDRO...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02164.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 01 Juillet 2013, enregistrée sous le no

ARRÊT DU 16 Février 2016

APPELANT :
Monsieur Dominique X...... 49100 ANGERS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 009685 du 13/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
représenté par Maître Arnaud BARBE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
LA SARL F. M. D. M 19 rue des Poëliers 49100 ANGERS
représentée par Maître Gilles PEDRON, avocat au barreau d'ANGERS en présence de Monsieur Y..., gérant de la SARL F. M. D. M.

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Décembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 16 Février 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCÉDURE
La SARL FMDM dont M. Y... est le gérant, exploite un fonds de commerce à usage de bar sous l'enseigne " Le Gainsbar " à Angers depuis le mois d'avril 2008. L'établissement emploie un effectif de moins de 11 salariés (2) et applique la convention collective de l'hôtellerie. M. Dominique X... a été recruté le 4 février 2009 par la société FMDM dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée en qualité de serveur en extra entre le 7 et le 14 février 2009. Ce contrat a été suivi le 20 avril 2009 de plusieurs avenants à durée déterminée à temps partiel (20 heures par semaine) les 3 juin 2009, 15 août 2009, 17 août 2009, 7 septembre, 30 octobre 2009 et 14 décembre 2009. Il s'agissait d'un emploi de serveur échelon 1 niveau 1 prévu par la convention collective applicable. Par avenant en date du 2 janvier 2010, les parties ont convenu d'une nouvelle période de travail du 2 janvier au 31 janvier 2010 sur la base de 35 heures par semaine. Des avenants ont été signés les 1er février 2010 et 1er mars 2010. Le 20 avril 2010, les relations contractuelles se sont transformées en un contrat à durée indéterminée à compter du 1er mai 2010 sur la base de 35 heures de travail par semaine. En dernier lieu, le salarié occupait le poste moyennant un salaire brut de 1393. 85 euros par mois.
A la suite des plaintes de la clientèle à propos du manque de rigueur, d'amabilité et d'efficacité de son salarié, le gérant de la société FMDM a convoqué M. X... le 8 juillet 2011 en vue d'une mise au point. Le 10 juillet 2011, le salarié a adressé à son employeur un courrier libellé en ses termes : " Vous m'avez fait par de votre volonté de me licencier aux motifs suivants : manque d'amabilité auprès de certains clients, manque de rigueur dans l'entretien du bar, manque d'efficacité, malhonnêteté d'après les dires de certains clients. Vous m'avez fait part que du fait de l'altération de nos rapports, il nous serait désormais impossible de travailler ensemble ce qui effectivement me paraît préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise. Vous m'avez donc proposé une procédure de rupture conventionnelle et de me verser une indemnité, solution à laquelle à priori je ne vois aucun inconvénient. (..) Vous m'avez fait part de mes changements d'horaires de travail (..) A l'issue de l'entretien sur votre demande, j'ai procédé à la restitution des clefs en ma possession depuis le début de notre collaboration. "
M. X... a été placé en arrêt maladie le 11 juillet et jusqu'au 19 juillet 2011, prolongé au 30 juillet 2011. Lors de la visite de reprise le 2 août 2011, le médecin du travail a déclaré M. X... apte à son poste et a demandé à le revoir le 23 août suivant. Le salarié a écrit le 2 août 2011 à la société FMDM pour lui demander de signer une rupture conventionnelle. L'employeur a répondu le 4 août qu'il devait attendre le retour de son comptable en vacances avant de faire une proposition. Par courrier recommandé du 25 août 2011, la société FMDM a mis en demeure M. X... de reprendre son poste en l'absence de justificatif de son absence depuis le lundi 22 août 2011.
Le 24 août 2011, le salarié a fait l'objet d'un arrêt de travail jusqu'au 9 septembre, prolongé au 24 septembre 2011. Le 26 septembre 2011, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte temporaire avec une nouvelle visite fixée au 13 octobre 2011. La société FMDM a interrogé le 30 septembre 2011 le médecin du travail sur les possibilités de reclassement. Une étude de poste a été effectuée le 12 octobre 2011. Le 13 octobre 2011, le médecin du travail a établi une fiche d'inaptitude du salarié au poste et à tout poste dans l'entreprise.

Par courrier du 20 octobre 2011, l'employeur a indiqué à M. X... que " les postes de travail existants au sein de l'établissement étant limités à un poste de serveur et un poste administratif, il était dans l'impossibilité de le reclasser dans un emploi compatible avec le certificat du médecin du travail et n'avait aucune possibilité pour le muter, aménager ou transformer le poste occupé. "
Par courrier en date du 21 octobre 2011, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 2 novembre suivant. Par courrier du 7 novembre 2011, M. X... a reçu notification de son licenciement selon les termes suivants : " Nous vous informons que nous avions décidé de vous licencier en raison de son inaptitude constatée par le médecin du travail en date du 26 septembre 2011 puis de façon définitive le 13 octobre 2011 à son poste et à tout poste dans l'entreprise... votre reclassement dans l'entreprise s'est révélé impossible, aucune mutation, transformation ou aucun aménagement de poste n'est réalisable au sein de notre entreprise. Votre préavis d'une durée de deux mois débutera à la présentation de cette lettre. Votre état de santé ne vous permet pas de travailler pendant une durée couvrant celle du préavis qui en conséquence ne donnera pas lieu à une indemnité compensatrice de préavis.. ; (..) ".
Par requête du 20 mars 2012, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers afin de voir dire qu'il relève d'une classification plus élevée à l'échelon V niveau 3 de la convention collective et obtenir le paiement d'un rappel de salaires au titre de la nouvelle classification et au titre d'heures supplémentaires.
Par jugement en date du 1er juillet 2013, le conseil de prud'hommes d'Angers a :- dit que les fonctions de M. X... correspondent à l'échelon 1 niveau 1,- dit qu'il n'y a pas lieu à procéder à la requalification de son contrat de travail,- débouté M. X... de ses demandes et notamment du rappel de salaires d'heures supplémentaires,- condamner M. X... à verser à la société FMDM la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Les parties ont reçu notification de ce jugement les 17 juillet et 5 août 2013. M. X... en a régulièrement relevé appel général par courrier électronique du 5 août 2013 de son conseil.

PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES,
Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 25 novembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles M. X... demande à la cour de :- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- dire que le salarié exerçait des fonctions relevant du niveau IV échelon 2 de la convention collective de l'hôtellerie,- condamner la société FMDM à lui verser les sommes suivantes :-5 904. 50 euros à titre de rappel de salaires avec la nouvelle classification,-590. 45 euros pour les congés payés y afférents,-6 317. 50 euros à titre de rappel de salaires d'heures supplémentaires,-631. 75 euros pour les congés payés y afférents,-10 479 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,-10 479 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- condamner la société FMDM à payer à Me Barbé, avocat de la partie bénéficiaire de l'aide, la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi qu'aux dépens.
Subsidiairement, il limite sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires à la somme de 5 278. 43 euros outre les congés payés ya afférents.
Il fait valoir en substance que :
- sur la prétendue prescription :- les demandes indemnitaires présentées dans les nouvelles conclusions en appel du 22 juillet 2015 sont régies par les dispositions antérieures à la loi du 14 juin 2013, en ce que l'instance initiale a été engagée avant le 17 juin 2013, date de la loi nouvelle réduisant le délai de prescription ;- elles sont recevables comme non prescrites dans le délai quinquennal interrompu par la saisine du 20 mars 2012 du conseil des prud'hommes d'Angers ;- la fin de non recevoir doit être rejetée ;
- sur la requalification des contrats à durée déterminée en CDI :- les relations contractuelles doivent être requalifiées en CDI à compter du mois d'avril 2009 en ce que le contrat d'extra n'a pas été formalisé par écrit, que les contrats à durée déterminée ne comportent aucun motif de recours légal ;- il est donc fondé à obtenir une indemnité de requalification en application de l'article L1245-1 du code du travail d'un montant de 3 000 euros ;
- sur la classification conventionnelle :- il incombe au salarié de rapporter la preuve de la réalité des fonctions exercées et d'établir la corrélation avec la classification revendiquée,- l'appelant, titulaire d'une licence de droit et d'une licence d'anglais et justifiant d'une expérience professionnelle, n'aurait jamais accepté le poste de simple serveur compte tenu des tâches confiées si l'employeur ne lui avait pas fait des promesses d'évolution ;- son projet de reprise d'un fonds de commerce " Le Tibor " n'est pas contemporain des difficultés apparues avec l'employeur,- il assumait des tâches multiples au sein de l'établissement qu'il ouvrait, fermait et exploitait chaque jour dont il prenait en charge la tenue des caisses, le service en salle et en terrasse : il était même considéré par la clientèle comme le responsable par défaut de l'établissement ;- il peut prétendre à tout le moins au niveau I échelon 2 statut agent de maîtrise, sur la base de 1. 40 euros l'heure ;- sa demande de rappel de salaires s'élève à 5 409. 50 euros outre les congés payés de 540. 95 euros ;
- sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé :- il produit un tableau récapitulatif des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées (475) représentant 5 278. 43 euros sur la base d'un taux de 8. 89 euros ;- ces éléments suffisent à caractériser l'infraction de travail dissimulé de l'article L 8221-5 du code du travail et sanctionnée par l'article L 8223-1 du même code ;
- sur le licenciement :- son inaptitude est la conséquence directe des conditions de travail imposées par l'employeur à savoir un maintien abusif dans une classification minimale, le non-respect des promesses tenues, une campagne d'acharnement et de dénigrement avec des accusations infondées d'alcoolisme, des heures supplémentaires imposées et impayées ;- il a développé à la suite un syndrome anxio-dépressif sévère, ce qui l'a amené dans un premier temps à solliciter une rupture conventionnelle ;- il a été victime d'insultes et de brimades de la part du gérant en présence des clients, qui le confirment dans des attestations ;- le licenciement sera donc déclaré sans cause réelle et sérieuse.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 24 septembre 2015 régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles la SARL FMDM demande à la cour de :- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,- déclarer irrecevables les demandes nouvelles présentées hors le délai de prescription pour la première fois en cause d'appel par voie de conclusions déposées le 23 juillet 2015,- à titre subsidiaire, dire que ces demandes nouvelles sont infondées et doivent être rejetées,- condamner M. X... au paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et de celle de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'employeur soutient essentiellement que :
- s'agissant de demandes nouvelles en cause d'appel :- le contrat d'extra a été régularisé par écrit entre les parties contrairement aux allégations de M. X...,- la demande de requalification des contrats à durée déterminée, présentée par voie de conclusion du 22 juillet 2015, est irrecevable comme prescrite en application de l'article L 1471-1 du code du travail fixant à deux ans le nouveau délai de prescription applicable à compter du 16 juin 2013 ;- il en est de même pour la demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé et la demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, atteintes par la prescription biennale ;
- sur la demande de classification conventionnelle :- le salarié revendique en appel la classification au niveau IV échelon 2 correspondant à un poste d'agent de maîtrise, responsable de l'organisation du travail et des collaborateurs et participant en grande partie aux activités de gestion ;- il ne justifie ni de ses diplômes ni de son expérience professionnelle dans le domaine de la restauration ;- il ne rapporte pas la preuve du contenu de ses activités ni qu'il ait participé à la gestion de la société ;- le fait qu'il ait disposé des clés de l'établissement est indifférent, l'ensemble des collaborateur ayant ces clés ;- les tâches décrites par l'appelant, de réassort des boissons et produits nécessaires à l'activité, de rangement des tables de la terrasse et les ressortent des fonctions de serveur ;
- sur la demande d'heures supplémentaires :- le salarié a réduit ses demandes à la somme de 6 317. 50 euros en principal pour les heures supplémentaires ;- il se prévaut d'un agenda-livre de caisse et d'un tableau récapitulatif de ses heures travaillées mais ces éléments ne sont pas suffisamment précis ;- si le salarié a pu travailler au-delà de 2 heures du matin de façon très exceptionnelle dans le bar, il a reçu la rémunération correspondante avec une majoration conformément aux déclarations des autres salariés ;- l'indemnité pour travail dissimulé est réclamée s'agissant d'heures supplémentaires effectuées et non payées.
- sur le licenciement :- elle conteste les accusations du salarié à propos de la dégradation de ses conditions de travail et invoque le comportement agressif de M. X... à l'égard de la clientèle ;- la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre les manquements allégués et l'altération de l'état de santé n'est pas établie par M. X... alors que :- ce dernier n'ayant pas repris son activité professionnelle entre le 2 août et le premier avis d'inaptitude du 26 septembre 2011, l'employeur ne peut pas se voir reprocher une faute quelconque, les arrêts de travail sont sans lien avec une maladie professionnelle,- les observations formulées par le gérant en juillet étaient justifiées à l'encontre de M. X... mais ont été mal supportées par ce dernier, qui avait tendance à se considérer comme le co-gérant de l'établissement ;- le salarié avait un projet de reprise d'un restaurant avec trois associés (A...- E... et Z...) dont il a obtenu des attestations dans le cadre de ce litige.
- sur les dommages et intérêts :- l'appelant a abusé de son droit de former appel alors qu'il a modifié ses demandes par rapport à celles présentées devant les premiers juges.

MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur la prescription des demandes nouvelles,
La société FMDM soulève en cause d'appel la prescription des demandes nouvelles de M. X... présentées par voie de conclusions du 23 juillet 2015 en se fondant sur l'article L 1471-1 du code du travail qui réduit à deux ans le délai de prescription de toute action portant sur l'exécution et la rupture du contrat de travail à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Le nouvel article L 1471-1 du code du travail issu de la loi du 14 juin 2013 est entré en vigueur à compter du 16 juin 2013. Selon l'article 21- V de la loi, les dispositions nouvelles s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la promulgation de la nouvelle loi sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. Lorsqu'une instance a été introduite avant le 17 juin 2013, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. La loi s'applique également en appel.
M. X... ayant engagé son action judiciaire le 20 mars 2012, ses demandes sont régies par la prescription quinquennale applicable avant la loi du 14 juin 2013. Le délai de prescription ayant été interrompu par la saisine du conseil de prud'hommes du 20 mars 2012, il est recevable à présenter des demandes nouvelles en appel :- au titre de la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,- au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,- au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le rappel de salaires au titre de la classification,
Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle supérieure dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu'il assure dans le cadre de ses fonctions, des tâches et des responsabilités relevant de la classification revendiquée.
M. X... a bénéficié comme serveur d'une classification au niveau 1 échelon 1 catégorie employé durant l'exécution de son contrat de travail. Il revendique en cause d'appel la classification au niveau IV échelon 2, catégorie agent de maîtrise correspondant selon la convention collective à :- un emploi de niveau BTS ou Bac, acquis par voie scolaire, formation interne ou expérience confirmée et réussie,- réalisant des travaux d'exploitation complexe faisant appel au choix des modes d'exécution, à la succession des opérations et nécessitant des connaissances professionnelles développées ou étendues en raison du nombre et de la complexité des produits ou services vendus et/ ou des moyens et méthodes employés,- recevant des instructions à caractère général portant sur le domaine d'activité,- organisant le travail de collaborateurs et participant à la gestion du matériel, des matières et du personnel.
Le contrat de travail ne définit pas les tâches confiées au salarié.
M. X..., considérant qu'il occupait un poste de chef barman au sein de l'établissement, verse aux débats :- l'attestation de M. A..., client selon lequel " durant les périodes de congés du gérant, M. X..., ou un autre employé, assurait la réception des commandes, passait les commandes de dépannage, ouvrait et fermait l'établissement, clôturait la caisse. A ma connaissance, il n'y a jamais eu plus de deux personnes travaillant la même semaine (..) "- l'attestation de Mme B... : " Cliente régulière de l'établissement, j'ai pu constater à de nombreuses reprises le professionnalisme de M. X... qui gérait l'établissement en l'absence de son gérant, que ce soit à l'occasion des vacances de celui-ci mais aussi en semaine normale où M. X... me semblait être seul à assurer le fonctionnement du bar sur une journée complète. J'ai pu aussi remarquer que durant les absences du gérant pour vacances, M. X... n'hésitait pas à revenir au bar pour répondre aux problèmes auxquels pouvaient être confrontés les employés. "- l'attestation de Mme C... précisant que : " M. X... assurait le fonctionnement du bar les lundis et mardis de l'ouverture à la fermeture ; pendant les périodes de vacances du gérant, M. X... avait la responsabilité de l'établissement et des extras qui travaillaient au bar ; étant une cliente assidue des lieux, j'ai pu voir à plusieurs reprises M. X... venir à l'appel de la serveuse et en dehors de ses heures de présence, pour faire face à des problèmes techniques. "- l'attestation de M. Z..., reprenant le témoignage de Mme C... dans des termes quasiment identiques.- l'attestation de M. D... : " Je connais M. X... depuis plus de 15 ans et fréquente l'établissement depuis 1994... (. ;) j'ai pu constater que lorsque le gérant était absent (coupure, temps de repas, congé hebdomadaire ou vacances) était de toute évidence responsable du bar. "- l'attestation de M. E... " J'ai vu M. X... travailler seul plusieurs fois notamment le lundi et le mardi et pendant les vacances du gérant, où il encadrait à ces moments un autre serveur ".
Toutefois, si M. X... bénéficiait de la confiance de son employeur pour assurer ses fonctions durant l'absence du gérant, force est de constater que les tâches effectivement accomplies et décrites par les témoins s'inscrivent dans les attributions simples et répétitives d'un serveur conformément aux consignes données par le gérant d'un établissement de taille réduite. M. X..., qui indique sans en justifier être titulaire d'une licence d'anglais et d'une licence de droit, ne fournit aucun élément sur une expérience antérieure dans le domaine de la restauration. Le fait de disposer des clés de l'établissement, d'assurer certains jours l'ouverture et la fermeture du bar, de procéder au réassort des boissons, correspond aux attributions d'un serveur comme le confirment les salariés ou anciens salariés du bar (M. F..., M. G..., Mme H..., M. I...). De même, l'encadrement d'un serveur en extra pendant les périodes de congés du gérant ne permet pas d'en déduire que M. X... assurait " la direction " des salariés en extra au regard de l'effectif limité à deux salariés dans ce commerce. Des fournisseurs habituels de la société FMDM, notamment en boissons, ont confirmé que le gérant était leur seul interlocuteur lors des commandes et des réassorts, M. Y... anticipant les commandes avant ses congés.
Contrairement à ses allégations, M. X... ne rapporte pas la preuve qu'il s'occupait de la comptabilité de l'employeur et qu'il était " responsable de la caisse ". Les extraits de l'agenda personnel du salarié et le décompte intitulé " versements bancaires " établi de la main de M. X... ne correspondent à aucun document comptable de type livre de caisse (pièces 15 et 16).
La société FMDM justifie au travers de l'attestation de son conseiller bancaire Crédit Mutuel qu'il n'avait accordé aucune procuration à M. X... sur le compte professionnel (pièce 78). L'employeur ajoute que les tâches administratives et le suivi de caisse sont confiées à Mme J..., à la fois employée administrative et serveuse de la société FMDM depuis le mois de novembre 2009.
Au vu de ces éléments d'appréciation, le salarié n'établit pas, au regard de ses compétences, de la nature de son activité, de son degré d'autonomie et de ses responsabilités, avoir exercé effectivement des fonctions dévolues à un agent de maîtrise au sens des textes conventionnels. Il sera donc débouté de sa demande de rappels de salaires au titre de la classification par voie de confirmation du jugement.

Sur la demande d'indemnité de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.
Selon l'article L 1242-12 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif ainsi que les mentions énumérées dans ce texte. A défaut, le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée. Selon l'article L 1245-1 du même code, tout contrat conclu en méconnaissance des dispositions de l'article L 1242-12 alinéa 1 du même code, est réputé à durée indéterminée. Aux termes de l'article L 1245-2 alinéa 2 du code du travail, en cas de requalification, il est accordé au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire correspondant au dernier salaire mensuel perçu avant la saisine de la juridiction.
En l'espèce, il apparaît que l'employeur n'a pas mentionné dans le contrat d'extra du 4 février 2009 les raisons pour lesquelles il recourait à cet emploi temporaire et n'a pas davantage justifié du motif des recours aux multiples contrats à durée déterminée conclus par les parties entre le 20 avril et le 1er mars 2010. M. X... est en conséquence bien fondé à se prévaloir de la méconnaissance par l'employeur de ses obligations légales au sens de l'article L1242-1 du code du travail et à réclamer l'indemnité de requalification correspondante.
M. X... percevait un salaire moyen brut de 1 805. 07 euros par mois au cours du premier semestre 2011. La relation de travail ayant pris fin le 7 novembre 2011, il sera alloué à M. X... à ce titre, compte tenu du montant de son dernier salaire, de son ancienneté (33 mois) et des circonstances de l'espèce, une indemnité de 2 000 euros.
Sur les heures supplémentaires,
Si aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, la preuve des heures effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salariés, il appartient toutefois au salarié, en cas de litige, d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments.
M. X... soutient qu'il a travaillé une heure supplémentaire par jour, accomplie pour moitié à l'embauche lors de la mise en place du bar et pour l'autre moitié lors du rangement à la fermeture du bar à 2 heures du matin, ce qui représente en cumul 475heures supplémentaires au cours de la période litigieuse.
Pour étayer ses prétentions, le salarié produit :- un décompte des heures supplémentaires accomplies chaque mois, sur la base de 7 à 21 heures supplémentaires mensuelles, représentant un total de 475 heures supplémentaires au cours de la période de février 2009 à juillet 2011 (pièce 22)- ses bulletins de salaire (pièce 14) mentionnant le paiement d'heures supplémentaires ou complémentaires,- des extraits de ses agendas personnels (pièce 15) sans mention des années concernées, comportant quelques annotations manuscrites en fin de semaine : HS : 6 pour la semaine du 11 février (année ignorée), HS : 1 pour la semaine du 10 avril (année ignorée), HS : 4 pour la semaine du 14 avril (année ignorée).
L'employeur conteste les allégations du salarié en s'appuyant sur les attestations de ses salariés et anciens salariés (Mme H..., M. I... et M. G...) selon lesquels ils s'occupent, sur leur temps de travail, des travaux de mise en place de la terrasse et de rangement en fin de service, que le ménage est fait le lendemain matin par le gérant. Les bulletins de salaire témoignent de ce que le salarié a été rémunéré régulièrement pour des heures supplémentaires : 28 heures en mars 2010, en avril 2010, en juin 2010, en septembre 2010, en octobre 2010, en novembre 2010, 35 heures en juillet 2010, 40 heures en mai 2010, 10 heures en août 2010, 21 heures en janvier 2011, 32 heures en février 2011, en mars 2011, en avril 2011, 28 heures en mai 2011, 22 heures en juin 2011. Il s'ensuit que M. X... ne fournit pas des éléments de fait suffisants de nature à étayer sa demande au titre des heures supplémentaires. Sa demande doit être rejetée par voie de confirmation du jugement.
Sur le travail dissimulé,
L'article L 8221-5 du code du travail dispose : " Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :... 2o- de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou de mentionner un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ". Selon l'article L 8223-1 du même code, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 du même code a droit à une indemnité égale à 6 mois de salaire.
Il n'est pas établi que l'employeur ait dissimulé de manière intentionnelle une partie du temps de travail de M. X... par l'inscription sur les bulletins de salaire d'un nombre d'heures inférieur à celui réellement effectué. La demande, nouvelle en cause d'appel, d'indemnisation à ce titre doit être rejetée
Sur le licenciement,
M. X... fait valoir que son inaptitude à l'origine du licenciement du 7 novembre 2011 est la conséquence directe des conditions de travail imposées par son employeur à savoir : un maintien abusif dans un niveau d'emploi inacceptable en termes de statut et de classification, le non-respect des promesses, une campagne d'acharnement et de dénigrement avec des accusations infondées d'alcoolisme, des heures supplémentaires imposées et non payées. Il en déduit que les manquements fautifs de son employeur à l'origine de la dégradation de son état de santé et d'un syndrome anxio-dépressif suffisent à dire que le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le salarié fonde sa demande sur :- l'attestation de Mme K... cliente selon laquelle " se rendant régulièrement au Gainsbar, elle a pu malheureusement constater le comportement humiliant du propriétaire de l'établissement à l'encontre de ses employés lors de ses débordements alcooliques fréquents, notamment en ce qui concerne M. X... qui gérait ces excès avec beaucoup d'humour et une grande humilité. "- l'attestation de M. A..., qui " a fréquenté assez régulièrement le Gainsbar et a vu le gérant avoir un comportement méprisant envers son personnel alors que M. Y... était alcoolisé, il accusait ses employés d'erreurs dans le service de commandes ou de comportement déplacé envers la clientèle alors que les employés ne faisaient que respecter les demandes de M. Y... ".
S'agissant de la classification et des heures supplémentaires impayées, le bien fondé des griefs ainsi formulés par le salarié n'a pas été retenu par la cour pour les motifs susvisés. S'agissant du comportement habituellement " humiliant " de l'employeur envers le salarié, la société intimée conteste la version de M. X... au travers de témoignages, émanant :- d'anciens salariés :- M. F... (octobre 2010- mars 2011) décrit une relation de confiance entre M. Y... et M. X... et Mme L... (avril 2011- novembre 2011) n'a jamais été témoin d'une quelconque humiliation de M. Y... envers M. X... ;- d'un commerçant voisin : M. M... client quotidien depuis 2008 " n'a jamais remarqué un comportement agressif de M. Y... envers M. X... et le personnel, tout au contraire, une grande convivialité, complicité qui règne dans l'établissement " ;- de multiples clients (20) décrivant notamment " M. Y... toujours très correct et courtois " (Mme N...) " j'ai toujours connu une ambiance très cordiale dans ce lieu, je n'ai pas remarqué de comportement déplacé de M. Y... dit " W... " envers M. X... dit " XX... ", (M. O... professeur), " il me semblait qu'il y avait une bonne entente et totale confiance entre M. Y... et son personnel. M. X... avait l'air épanoui sur son lieu de travail, " (M. P...), " M. Y... et M. X... semblaient bien soudés et unis, comme avec tous ses salariés, M. Y... n'a jamais été désobligeant " (M. Q...), " une ambiance professionnelle et conviviale qui règne entre les différents collaborateurs, atmosphère qui se transmet aux clients et qui fait la réputation de ce bar, à aucun moment, je n'ai constaté une quelconque tension verbale entre la direction et ses employés. " (M. R... artisan) " je n'ai vu que de la bienveillance et de l'égard de la part de Franck envers Dominique X..., il y avait même de l'amitié entre eux, ils se comportaient de manière complice et l'ambiance était détendue " (Mme V...- YY... conseillère à l'emploi).
La société FMDM ajoute que le gérant a longtemps fait preuve de tolérance à l'égard de M. X... et le soutenait même si ce dernier se montrait parfois désagréable, arrogant avec la clientèle, ce qui est confirmé par plusieurs clients : Mme S..., Mme T..., M. U... et M. V.... Aucune pièce médicale produite ne permet de considérer que le salarié a été placé en arrêt maladie pour un syndrome anxio-dépressif en lien direct avec des conditions de travail dégradées. Il s'ensuit que M. X... ne justifie pas de la réalité des manquements reprochés à son employeur ni du lien direct avec la dégradation de son état de santé. Il n'est donc pas fondé à présenter une demande nouvelle en cause d'appel de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les autres demandes,
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non compris dans les dépens. Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles d'appel et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné M. X... de ce chef.

PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant, publiquement et contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. X... à verser à la société FMDM la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens,
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
CONDAMNE la société FMDM à payer à M. X... la somme de 2 000 euros au titre de l'indemnité de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.
CONFIRME le surplus des dispositions du jugement du 1er juillet 2013.
DÉBOUTE M. X... de ses demandes au titre de l'indemnité pour travail dissimulé et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
DÉBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.
CONDAMNE la société FMDM aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridique.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02164
Date de la décision : 16/02/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-02-16;13.02164 ?
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