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16/02/2016 | FRANCE | N°13/00684

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 16 février 2016, 13/00684


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N lg/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 00684.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 08 Février 2013, enregistrée sous le no 11/ 00097

ARRÊT DU 16 Février 2016

APPELANTE :
Madame Evelyne X... épouse Y... ... 53100 ST GEORGES BUTTAVENT
représentée par Maître Pascal LANDAIS, avocat au barreau de LAVAL

INTIMEE :
La Société A PRO HYGIENE, SARL, prise en la personne de son représentant légal Monsieu

r Emmanuel A..., gérant 43 B rue des Chênes 53940 SAINT BERTHEVIN LES LAVAL
représentée par Maître Chris...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N lg/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 00684.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 08 Février 2013, enregistrée sous le no 11/ 00097

ARRÊT DU 16 Février 2016

APPELANTE :
Madame Evelyne X... épouse Y... ... 53100 ST GEORGES BUTTAVENT
représentée par Maître Pascal LANDAIS, avocat au barreau de LAVAL

INTIMEE :
La Société A PRO HYGIENE, SARL, prise en la personne de son représentant légal Monsieur Emmanuel A..., gérant 43 B rue des Chênes 53940 SAINT BERTHEVIN LES LAVAL
représentée par Maître Christelle VERDIER, avocat au barreau de NANTES en présence de Monsieur E. A..., gérant

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Octobre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Luis GAMEIRO, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Monsieur Luis GAMEIRO, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 16 Février 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 12 juin 1995 à effet au même jour, la société Gaume a engagé Madame Evelyne X... en qualité de VRP exclusif.
La société A. Pro Hygiène a acheté le fonds de commerce à la société Gaume le 1er janvier 2006 et est ainsi devenue le nouvel employeur de Madame Evelyne X....
Par avenant du 7 mars 2006, le secteur géographique de Madame Evelyne X... a été étendu aux départements de la Mayenne et de la Sarthe dans leur totalité. Par ailleurs, la rémunération de base de la salariée ainsi que le taux et le mode de calcul de ses commissions ont été modifiés.
La société A Pro Hygiène est spécialisée dans la distribution et la commercialisation, sur les départements de la Mayenne, de la Sarthe et de l'Orne, de produits et matériel d'hygiène et d'entretien destinés aux collectivités, industries et entreprises de propreté. Elle emploie moins de 11 salariés et la convention collective applicable à la relation de travail entre les parties était celle des voyageurs, représentants, placiers.
Dans le dernier état de la relation de travail, Madame Evelyne X... percevait un salaire brut de1600 euros.
Se plaignant de l'absence de versement de la totalité des commissions auxquelles elle avait droit, Madame Evelyne X... a saisi le 28 avril 2011 le conseil des prud'hommes de Laval d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et le versement de diverses indemnités afférentes à la rupture dudit contrat de travail.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 5 décembre 2011, Madame Evelyne X... a été licenciée pour faute.
Par jugement en date du 8 février 2013 le conseil de prud'hommes de Laval a :- rejeté les attestations produites par Madame Evelyne X..., non conformes à l'article 202 du code de procédure civile,- débouté Madame Evelyne X... de sa demande de " résolution judiciaire ",- dit que le licenciement de Madame Evelyne X... repose sur une cause réelle et sérieuse,- débouté Madame Evelyne X... de ses autres demandes,- ordonné à Madame Evelyne X... de restituer à la société A Pro Hygiène les fichiers clients papier de tous les clients sous astreinte de un euro par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement, le conseil se réservant la faculté de liquider l'astreinte,- débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au greffe le 6 mars 2013, Madame Evelyne X... a régulièrement interjeté appel de cette décision.

MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses dernières conclusions régulièrement communiquées et déposées au greffe le 9 octobre 2015, soutenues oralement à l'audience, Madame Evelyne X... demande à la cour de :
* à titre principal :- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté sa demande de résiliation judiciaire et statuant à nouveau, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société A Pro Hygiène avec effet au 5 décembre 2011, date de son licenciement ;
* à titre subsidiaire :- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que son licenciement était fondé et statuant à nouveau, dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;
* en toute hypothèse :- infirmer le jugement déféré en ce qu'il lui a ordonné de restituer à la société A Pro Hygiène les fichiers clients papier de tous les clients sous astreinte de 1 euro par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement ;- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les attestations qu'elle a produites comme étant non conformes à l'article 202 du code de procédure civile ;- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a validé les sanctions disciplinaires du " 6 mai, 15 juillet et 30 septembre " prononcées à son encontre ;- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité de 6500 euros présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
statuant a nouveau de ces chefs :- débouter la société A Pro Hygiène de ses demandes reconventionnelles ;- prononcer l'annulation des avertissements du " 6 mai et du 15 juillet 2011 " ;- prononcer l'annulation de la mise à pied de deux jours du 30 septembre 2011 ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui payer la somme de 1 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui payer la somme de 153, 59 euros bruts à titre de rappel de salaire afférent à la mise a pied prononcée à son encontre, outre 15, 36 euros bruts au titre des congés payés afférents ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui payer la somme de 54 000 euros nets pour rupture abusive du contrat de travail, assortie des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement à intervenir ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui payer la somme de 1 000 euros nets en réparation du préjudice lié à l'absence d'octroi de chèques cadeaux dont elle a été privée ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui remettre une attestation Pôle Emploi, bulletin de salaire correspondant aux condamnations et certificat de travail dans les 8 jours suivants la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;- condamner la société A Pro Hygiène à lui payer la somme de 3500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;- condamner la société A Pro Hygiène aux entiers dépens dont ceux relatifs à l'exécution.
Elle fait essentiellement valoir que :
* sur les attestations qu'elle produit :- les attestations qu'elle verse aux débats sont conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ; en tout état de cause l'employeur n'établit aucun grief de nature à écarter ces pièces ;
* sur la demande de résiliation judiciaire :- l'employeur a modifié unilatéralement le mode de calcul de ses commissions ; elle n'a jamais donné son accord à une telle modification ; l'employeur devait en tout état de cause modifier son contrat de travail par un écrit, ce qui n'a pas été fait au cas d'espèce ; l'employeur a reconnu ce manquement en finissant par lui verser l'intégralité des commissions auxquelles elle avait droit mais seulement après qu'elle ait saisi le conseil des prud'hommes ; en ne versant pas une partie importante de sa rémunération, l'employeur a manqué gravement à ses obligations ;- l'employeur a fait preuve d'une grande déloyauté en lui adressant, sur une période restreinte, une avalanche de courriers de reproches parfaitement injustifiés dans le seul dessein d'obtenir sa démission ;- l'employeur a falsifié le listing de son chiffre d'affaires en faisant figurer une vente au mois d'août 2011 alors que celle-ci n'a été effective qu'à la livraison, soit au cours du mois de septembre 2011 ; cette falsification volontaire et frauduleuse a eu pour objet de diminuer le montant de sa rémunération ; ce manquement justifie l'octroi d'une somme de 1000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail ;
* sur les avertissements des 6 mai 2011 et 15 juillet 2011 et sur la mise à pied du 30 septembre 2011 :- ces sanctions ne sont pas justifiées par l'employeur alors que la charge de la preuve lui incombe ;
* sur le licenciement :- les faits qui lui sont reprochés ne sauraient être constitutifs d'une faute ; il importe peu qu'elle n'ait pas mentionné de manière exacte l'heure de ses rendez-vous dès lors qu'il n'est pas contesté que ceux-ci ont été effectivement réalisés ;- elle réalisait son travail de manière consciencieuse, contrairement à ce qu'affirme l'employeur ;- elle a pu utiliser son téléphone professionnel à des fins personnelles mais de manière extrêmement limitée dans le temps, la fréquence et la durée ;
* sur les chèques cadeaux :- elle percevait depuis plusieurs années des chèques cadeaux, tout comme l'ensemble des autres salariés de la société ; elle a cessé de percevoir de tels chèques en 2010 et 2011 et ce, de manière discriminatoire ;
* sur la demande de la restitution de fiches clientèle sous astreinte :- elle n'est pas en possession de tels documents ; elle affirme que les fichiers clientèle sont informatisés depuis plusieurs années.
Dans ses dernières conclusions régulièrement communiquées et déposées au greffe le 4 juin 2015, soutenues oralement à l'audience, la société A Pro Hygiène demande à la cour de :- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Laval le 8 février 2013 ;- rejeter les attestations produites par Madame Evelyne X... comme étant non conformes à l'article 202 du code de procédure civile ;- ordonner à Madame Evelyne X... la restitution de tous les fichiers clients papier, propriété de la société A Pro Hygiène, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, " à compter du 30ème jour de la notification du jugement du conseil de prud'hommes " ;- condamner Madame Evelyne X... à lui payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;- condamner Madame Evelyne X... aux entiers dépens.
La société soutient en substance que : * sur les attestations de Madame Evelyne X... :- ces attestations ne respectent pas les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile en ce qu'elles comportent pas de copie recto-verso d'une pièce d'identité des attestants ; elles doivent par conséquent être écartées des débats ;
* sur la demande de résiliation judiciaire :- Madame Evelyne X... a donné son accord verbal pour la modification des éléments de sa rémunération, comme le confirme Monsieur B..., ancien salarié de la société ; il appartient à l'appelante d'établir que son employeur a voulu lui imposer unilatéralement une modification de son contrat de travail ; toute proposition acceptée par un salarié, vaut avenant contractuel même si elle n'est pas matérialisée par un écrit ; il a été versé, en définitive, à Madame Evelyne X... le montant des commissions réclamés mais uniquement dans un but d'apaisement, sans que cela ne vaille reconnaissance de la demande de la salariée ;- elle conteste avoir falsifié les listings afin de minimiser les commissions de Madame Evelyne X... ; contrairement à ce qu'affirme cette dernière, son contrat de travail ne prévoit pas que les commissions étaient dues à la facturation ;- elle conteste avoir poussé Madame Evelyne X... à démissionner en lui adressant de nombreux reproches sur une courte période ; les reproches qui lui ont été adressés étaient justifiés ;

* sur les chèques cadeaux :- la société ne s'est jamais engagée à remettre des chèques cadeaux à Madame Evelyne X... ni à d'autres salariés ;
* sur les avertissements des 6 mai 2011 et 15 juillet 2011 et sur la mise à pied du 30 septembre 2011 :- les faits visés par ces sanctions sont établis par les pièces versées aux débats et caractérisent effectivement des fautes fondant ces différentes sanctions ; * sur le licenciement :- Madame Evelyne X... a commis de nombreux manquements dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, notamment en établissant des rapports de visite de clients erronés, en ne renseignant pas le kilométrage parcouru, en n'effectuant pas de visites régulières auprès de ses clients et en utilisant son téléphone professionnel à des fins personnelles et ce, malgré les sanctions précédemment prononcées à son encontre ;
* sur la demande de la restitution de fiches clientèle sous astreinte :- contrairement à ce qu'indique Madame Evelyne X..., celle-ci est bien en possession des fichiers clients papier qui appartiennent à la société.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur la recevabilité des attestations produites par Madame Evelyne X... :
Il résulte de l'article 202 du code de procédure civile que l'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés. Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles. Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales. L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature.
Les premiers juges ont écarté les attestations produites aux débats par Madame Evelyne X... au motif qu'elles ne répondaient pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile, sans plus de précisions.
Toutefois, les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité. Une attestation ne peut être écartée que si l'irrégularité constatée constitue l'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public faisant grief à la partie qui l'attaque. Le juge apprécie souverainement si l'attestation non conforme à l'article 202 présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction. Au cas d'espèce, la société A. Pro Hygiène sollicite le rejet des attestations produites par Madame Evelyne X... au motif qu'elles ne comportent pas de copie d'une pièce d'identité recto-verso. Pour autant, ce seul manquement aux dispositions de l'article 202 précité ne permet pas d'écarter les attestations ainsi communiquées. Il est relevé que les témoins mentionnent leurs identités respectives dans les documents litigieux ainsi que leur qualité. Ainsi, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les attestations produites par Madame Evelyne X... au motif de leur non-conformité à l'article 202 du code de procédure civile. Il appartiendra néanmoins à la cour d'en apprécier leur valeur et leur portée, à l'instar des autres éléments de preuve produits par les parties.
Sur la demande d'annulation des avertissements des 6 mai 2011, 15 juillet 2011 et de la mise à pied du 30 septembre 2011 :
Aux termes de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
L'article L. 1333-2 du même code énonce que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Au cas d'espèce, Madame Evelyne X... sollicite, sans plus de précisions, l'annulation de ces trois sanctions disciplinaires en rappelant qu'il appartient à l'employeur d'établir la réalité des faits sanctionnés.
Ces sanctions seront analysées successivement.
* L'avertissement du 6 mai 2011 :
Cet avertissement est ainsi libellé : « Madame, Nous revenons vers vous concernant le chiffre d'affaires réalisé au moins d'avril 2011. Nous tenons en effet à vous indiquer que celui-ci est en recul de 28 % par rapport au mois d'avril 2010. Nous vous avions pourtant en cours de mois alertée et fait part de nos inquiétudes, notamment après avoir attiré votre attention sur le fort recul de votre chiffre d'affaires du mois de mars 2011. Nous attendons pour le mois de mai, et les mois suivants, une réaction réelle de votre part et que vous vous remettiez au travail. Par ailleurs, nous avons eu à nouveau votre rapport d'activité pour la semaine 17 en retard. Pour rappel, ils doivent nous parvenir avec la liste des rendez-vous pour la semaine en cours au plus tard le Lundi avant midi.
Et si nous avons eu cette liste prévisionnelle pour la semaine 17 écoulée, force est constater qu'elle ne comprenait que trois rendez-vous (un le 28/ 04 et deux le 29/ 04) ce qui est bien peu... Nous vous rappelons vous avoir déjà fait observer que début avril (semaine 14) vous n'aviez que deux rendez-vous de programmés. En outre, les différents rapports remis ne sont toujours pas intégralement remplis (numéros de semaines, kilométrages, etc...), malgré nos demandes précédentes. Nous relevons également sur des fiches de prospection, par exemple celle du 21 avril 2011 pour la mairie de Sacé, que vous remettez le catalogue dans la boîte aux lettres. Nous nous étonnons fortement que malgré vos années d'expérience vous ne vous assurez pas même de l'ouverture des mairies avant de passer sur place... Nous vous avons pourtant déjà demandé de veiller à votre bonne organisation.
Enfin, nous avons encore sur le relevé de votre téléphone portable des communications personnelles. Manifestement, vous ne tenez que bien peu compte de nos observations et demandes quant à l'exercice de vos fonctions. Nous ne pouvons admettre ce comportement. Nous vous notifions donc par la présente un nouvel avertissement... ».
L'employeur ne communique aucune pièce évocatrice des différents faits sanctionnés de sorte que cet avertissement, non justifié, sera annulé. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

* L'avertissement du 15 juillet 2011 :
Cette sanction est ainsi libellée : « Madame, pour faire suite à l'entretien du 11 mai 2011, au cours duquel vous n'étiez pas assistée, nous vous informons avoir pris la décision de prononcer à votre encontre un avertissement pour les fautes que vous avez commises fondées sur :
Utilisation du téléphone professionnel à des fins personnelles ; Mauvaise exécution de votre poste de travail.
Utilisation du téléphone professionnel à des fins personnelles
En effet, alors même que la Société, dans le cadre de l'exécution de vos tâches de travail, vous a fourni un téléphone mobile, celui-ci est à usage exclusivement professionnel. Or, force est de constater, à la réception de la facture relative à ce téléphone du mois d'avril, reçue au cours du mois de mai 2011, que, malgré des avertissements et de nombreux rappels à ce titre, vous utilisez toujours ce matériel à des fins personnelles. En effet, nous constatons des appels, tant à des particuliers qu'à des entreprises, ne concernant aucun de nos clients. De même, selon la dernière facture reçe pour les communications du mois de mai 2011, il apparaît à nouveau des appels personnels que vous avez passés et notamment alors que vous étiez en congés. Et ce, au total mépris des consignes données et des sanctions d'ores et déjà intervenues à ce titre.
Mauvaise exécution de votre poste de travail
1) Malgré des consignes claires et répétées, vous ne respectez pas les ordres concernant les rapports d'activité à remplir avec précisions étant relevé qu'ils nous sont communiqués avec retard (derniers exemples : ceux des semaines 25 et 26). D'une manière générale, vous ne renseignez ni les kilomètres parcourus, ni le nom de la personne visitée. Et ce, alors qu'à maintes reprises, nous vous avons alertée et même sanctionnée. En sus, récemment, compte tenu de l'absence de communication d'un document dûment rempli, vous avez eu un entretien à ce titre. Or, il s'est avéré, à cette occasion que, pour un certain nombre de vos clients, vous ne connaissiez pas le nom et/ ou prénom des interlocuteurs habituels. Pour exemple : FOYER LOGEMENT/ CHAILLAND LA LONGERE/ COULANS SUR GEE CANTINE FRATELLINI/ MESLAY DU MAINE MAIRIE DE MENIL MFR LA PIGNERIE/ LAVAL MAIRIE DE LA BAZOGE MAIRIE DE SAINT SUR ERVE L'AMPHORA/ SABLE CREPERIE LE BLE NOIR/ MAYENNE MFR/ PORT BRILLET CANTINE LOUVERNE SMC/ MONTSURS...
2) D'autre part, à la lecture de votre rapport d'activité pour le 21 avril 2011, vous faites mention pour la matinée de « relance clients ¿ prise RDV ». Or, quel fût notre étonnement lorsqu'à la réception de la facture de téléphone concernant le mois d'avril 2011, de constater qu'en fait un seul appel professionnel vers un client a été passé ce jour-là. D'ailleurs, les rendez-vous que vous avez notés avoir le 21 avril 2011 n'ont pas été honorés.

3) D'autres données renseignées sur vos compte rendus s'avèrent inexactes. Pour exemple, votre rapport d'activité pour le 6 juin dernier, indique un rendez-vous au CIF à 13 heures 30 alors que vous ne vous y êtes présentée qu'à partir de 15 heures. Alors que vous avez contesté ces faits lors de notre entretien, votre interlocutrice au Centre de Formation de la Mayenne, nous les a confirmés. Ce qui signifie que les autres rendez-vous indiqués à 14 heures 30 et 15 heures 15 n'ont pu se tenir à ces horaires.
4) De plus, il apparaît que certain de vos clients ne sont pas régulièrement visités par vous-même et plusieurs nous ont fait part de leur mécontentement. Le risque pour la Société est de perdre ces clients. Votre fonction consiste notamment a être en contact régulier avec notre clientèle. L'ensemble de ce comportement est fautif ».
Pour prouver la réalité des appels téléphoniques personnels passés par la salariée à partir de son téléphone professionnel, la société produit la facture détaillée du numéro de téléphone professionnel de Madame Evelyne X... du mois d'avril 2011. Des annotations manuscrites sont portées en marge de six numéros de téléphone appelés. Cette seule pièce apparaît insuffisante pour établir le grief en ce que l'identité des personnes appelées n'est pas déterminée. S'agissant du grief relatif à la rédaction de rapports qui se sont avérés inexacts, l'employeur se contente de produire des comptes-rendus d'activité journaliers établis par Madame Evelyne X... sans fournir de pièces permettant de contredire utilement les mentions qui y sont portées. Ce grief ne sera pas davantage retenu.
Contrairement à ce qu'indique l'employeur, Madame Evelyne X..., dans son rapport du 21 avril 2011, a décrit avoir fait " des relances client-prise de rendez-vous " pendant la matinée mais également un déplacement à la cantine de Candé et à l'association Revivre. Aussi, le fait qu'elle n'ait effectué que deux communications téléphoniques ce jour-là n'apparaît pas fautif, en l'absence de tout autre élément pertinent.
S'agissant du grief relatif à l'absence visite régulière des clients, l'employeur produit deux courriers de clients qui lui ont été adressés. Ainsi, un responsable de la société Mutualité française a écrit le 7 juin 2011 pour indiquer qu'il déplorait le fait que leur représentante, Madame X..., ne l'ait rencontré que trois fois en trois ans. Il sollicitait une reconsidération de la politique commerciale de la société avec deux visites minimum par an. L'employeur produit ensuite un courrier du cabinet immobilier des minières en date du 31 mai 2011. Ce document est inexploitable en ce qu'il n'est fait aucunement mention à Madame Evelyne X.... Le courrier du responsable de la Mutualité Française est insuffisant pour caractériser la faute alléguée, dès lors qu'il n'est pas justifié que l'employeur avait demandé à sa salariée de visiter ses clients à une fréquence d'au moins deux fois par an.
S'agissant du grief relatif aux comptes-rendus renseignés de manière incomplète, l'employeur produit des comptes-rendus d'activités journalières des semaines 25 et 26. A la lecture de ces différents documents, il apparaît effectivement que Madame Evelyne X... ne mentionne pas de manière précise et complète les informations qui lui sont demandées. Ainsi, à titre d'exemple, elle a écrit le 30 juin 2011 à 15 h30 " le pilori Cde " alors qu'elle devait faire figurer le nom du client visité, l'adresse complète, le nom de la personne et sa fonction. Il est relevé que sur chaque compte-rendu est rappelé l'ensemble des informations devant être renseignées par le VRP. Or, Madame Evelyne X... avait signé le 4 mars 2011 un document par lequel elle s'engageait auprès de l'employeur à renseigner, dans leur totalité, les documents relatifs à son activité professionnelle, notamment en ce qui concerne les informations sur le client, les RDV pris et la prospection en cours. Au surplus, elle a déjà été avertie pour des faits identiques le 17 mars 2011, sanction dont elle n'a pas demandé l'annulation et qui est par conséquent définitive.
Les autres griefs évoqués par l'employeur dans son avertissement du 15 juillet 2011 ne sont étayés par aucune pièce. En définitive, seul le grief relatif à la rédaction incomplète des comptes-rendus d'activité est prouvé. Le fait pour Madame Evelyne X... de ne pas avoir renseigné l'ensemble des informations demandées dans ses comptes-rendus d'activité à plusieurs reprises constitue une faute, qui est en l'espèce aggravée par la circonstance qu'elle avait déjà été sanctionnée pour des faits identiques le 17 mars 2011. La sanction prise par l'employeur apparaît tout à fait proportionnée à ces faits de sorte que Madame Evelyne X... sera déboutée de sa demande d'annulation de cette sanction. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
* sur la mise à pied du 30 septembre 2011 :
Cette sanction est ainsi libellée : « Pour faire suite à l'entretien du 23 septembre 2011, au cours duquel vous n'étiez pas assistée, nous vous informons avoir pris la décision de prononcer à votre encontre une mise à pied disciplinaire de 2 jours pour les fautes que vous avez commises fondées sur * Utilisation du téléphone professionnel à des fins personnelles ; * Mauvaise exécution de votre poste de travail ; * Insubordination à l'égard de votre hiérarchie.
Utilisation du téléphone professionnel à des fins personnelles
En effet, alors même que vous avez fait l'objet d'un avertissement, le 15 juillet dernier, notamment pour une utilisation du téléphone professionnel à des fins personnelles, force est de constater, que cet avertissement ne vous a nullement permis de changer votre comportement et vous continuez malgré celui-ci à appeler à titre personnel avec le téléphone qui a été mis à votre disposition dans un cadre strictement professionnel. Et ce, de nouveau au total mépris des consignes et sanctions d'ores et déjà intervenues à ce titre.
Mauvaise exécution de votre poste de travail
Malgré des consignes claires et répétées et un avertissement récent, en date du 15 juillet 2011, la situation ne s'améliore pas. Vos rapports d'activités, malgré une consigne et un délai que nous vous demandons de respecter, pour la bonne marche de l'entreprise, nous sont adressés en retard. Pour exemple, nous avons trouvé les rapports de la semaine 35 dans la boite aux lettres de la Société le 9 septembre dernier alors que nous vous les réclamions depuis le 5 septembre 2011. De même, vous clamez que votre employeur est un menteur, car vous prétendiez les avoir déposés le 6 septembre 2011. Ce qui matériellement est inexact puisque la boite aux lettres est relevée chaque jour et il est mis en place un relevé journalier du courrier. De plus, la liste des rendez-vous pour la semaine en cours (semaine 36) était manquante et les rapports des semaines 36 et 37 incomplets (nombre de kilomètres non renseignés en totalité). D'autre part, le 19 juillet dernier, surpris de l'absence de contacts par notre Société, un de nos clients de votre secteur, la Mairie d'ASTILLE, nous a appelé pour nous faire part de la visite à plusieurs reprises de la concurrence. Ce client nous a fait part de votre manque de suivi régulier à son égard et, afin de ne pas mettre fin à nos relations, nous avons dû effectuer une remise de prix en direct. Nous vous rappelons d'ailleurs, que de nombreux clients, nous ont également rendu compte de votre défaut de suivi régulier auprès d'eux alors même que certains relèvent ne vous avoir jamais rencontrée alors qu'ils font partie de votre fichier clients.
Insubordination envers votre hiérarchie
Le 19 juillet également, un second client, la, mairie de SAINT JEAN SUR ERVE, souhaitait un devis dans la journée et lorsque nous vous avons demandé de vous rendre au bureau, rédiger ce devis afin de pouvoir lui transmettre ensuite directement par fax ou mail, alors que vous étiez à votre domicile, vous avez refusé, prétextant que nous étions des menteurs. Vous avez même « raccroché au nez » de Madame A... salariée de la Société et en charge de ces points, relevant une agressivité certaine. Nous vous demandons plus de retenue tant à l'égard de vos supérieurs hiérarchiques qu'à l'égard des consignes qui vous sont demandées. Ce comportement totalement irrespectueux, relève d'une insubordination caractérisée qui ne peut être sous-estimée. L'ensemble de votre comportement met en cause la bonne marche du service, d'autant plus que certains des faits sont une réitération d'un comportement inacceptable et pour lesquels nous vous avions déjà alertée et même sanctionnée. Cette conduite et les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 23 septembre 2011 n'ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. Pour ces motifs, nous prononçons à votre égard une sanction de mise à pied de deux jours consécutifs avec retenue correspondante de salaire... ».
Pour prouver la réalité des appels téléphoniques personnels passés par la salariée à partir de son téléphone professionnel, l'employeur produit la facture détaillée du numéro de téléphone professionnel de Madame Evelyne X... du mois de septembre 2011 avec des annotations manuelles. Ce seul document est insusceptible de démontrer le grief allégué en ce que l'identité des personnes appelées n'est pas déterminée.
L'employeur communique les comptes-rendus d'activité de Madame Evelyne X... au cours des semaines 36 et 37. Il apparaît effectivement que celle-ci n'a pas renseigné systématiquement le nombre de km effectués pour la journée et ce, à plusieurs reprises. Ce grief est par conséquent établi.
S'agissant du grief d'insubordination, l'employeur produit une attestation de Monsieur C... qui témoigne que Madame A..., épouse du gérant de l'entreprise et également salariée, a appelé Madame Evelyne X... afin de lui faire part d'une demande urgente d'un client. Il ajoute que Madame X... n'a cessé de mettre en doute au téléphone les dires de Madame A..., allant jusqu'à la traiter de menteuse et pour au final lui raccrocher au nez. Il ajoute avoir ressenti que Madame Evelyne X... était de mauvaise foi et surtout très agressive. Les faits relatés par l'attestant sont circonstanciés. Néanmoins, il apparaît, à la lecture des conclusions respectives des parties que Madame A... n'était pas la supérieure hiérarchique de Madame Evelyne X.... Il n'en reste pas moins que le comportement adopté par Madame X... est particulièrement irrespectueux à l'égard de sa collègue, étant ajouté que la demande du client n'a ainsi pas pu être satisfaite, au mépris des intérêts de l'employeur. Le comportement irrespectueux de Madame X... envers un autre salarié est ainsi établi. Les autres griefs évoqués par l'employeur ne sont pas utilement corroborés par des pièces de sorte qu'ils ne seront pas retenus.
Le fait pour Madame Evelyne X... d'avoir manqué de respect envers un autre salarié de la société et refusé de traiter une demande pressante d'un client a mis en cause la bonne marche du service. De plus, elle a une nouvelle fois omis de remplir ses comptes-rendus de manière exhaustive, malgré les avertissements des 17 mars 2011 et 15 juillet 2011 qui n'ont donc pas été utiles pour qu'elle améliore son travail. Ces deux comportement constituent des fautes qui ont été sanctionnées de manière proportionnée par l'employeur par une mise à pied disciplinaire de deux jours. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande de Madame Evelyne X... tendant à prononcer la nullité de cette mise à pied disciplinaire. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef. Par ajout au jugement, elle sera déboutée de sa demande indemnitaire consécutive à l'annulation de cette sanction.
Sur la rupture du contrat de travail :
A titre liminaire, il est rappelé que lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit rechercher d'abord si la demande de résiliation était justifiée. Ce n'est que dans le cas contraire qu'il doit ensuite se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

Ainsi, au cas d'espèce, Madame Evelyne X... ayant saisi le conseil de prud'hommes de sa demande de résiliation judiciaire avant d'être licenciée, cette demande sera examinée en premier lieu, la cour ne se prononçant sur la validité du licenciement notifié par l'employeur que si la demande de résiliation judiciaire est jugée infondée.
Il se déduit des dispositions de l'article L. 1231-1 du code du travail que le salarié peut demander au conseil de prud'hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement de l'employeur à ses obligations. Si cette demande est justifiée, elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Les manquements de l'employeur sont souverainement appréciés par les juges, qui peuvent tenir compte de toutes les circonstances intervenues jusqu'au jour du jugement. Les faits allégués doivent présenter une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail. C'est au salarié qui demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur de justifier des faits ou manquements invoqués à l'encontre de ce dernier et de ce qu'ils étaient d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Madame Evelyne X... sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur aux motifs que :- l'employeur de lui a pas réglé régulièrement et intégralement ses salaires,- l'employeur lui a adressé sur une période restreinte une avalanche de courriers de reproches injustifiés dans le seul dessein d'obtenir sa démission,- l'employeur a falsifié les listings de son chiffre d'affaires dans le seul dessein de diminuer sa rémunération variable.
Madame Evelyne X... reproche à l'employeur de lui avoir adressé sur une période restreinte une avalanche de courriers de reproches injustifiés dans le seul dessein d'obtenir sa démission. Elle ne précise pas quels sont les courriers incriminés et n'apporte aucun élément pertinent de nature à étayer cette affirmation qui ne sera par conséquent pas retenue.
Madame Evelyne X... reproche également à son employeur d'avoir falsifié les listings de son chiffre d'affaires d'août et de septembre 2011 dans le seul dessein de diminuer sa rémunération variable. Elle explique avoir vendu une auto-laveuse à la mairie de Daon le 30 août 2011qui n'a été livrée que le 7 septembre 2011. Elle fait grief à son employeur d'avoir comptabilisé volontairement cette vente sur le mois d'août 2011, mois durant lequel elle a pris ces congés d'été et pour lequel elle a réalisé un chiffre d'affaires peu important, alors que la vente aurait dû être comptabilisée au mois de septembre. Elle rappelle que le taux de ses commissions varie en fonction du chiffre d'affaires réalisé mensuellement et soutient qu'en application de son contrat de travail, ses commissions sont dues à facturation. Pour autant, contrairement à ce qu'indique Madame Evelyne X..., son contrat de travail ne prévoit pas de clause selon laquelle ses commissions sont dues à facturation. En outre, Madame Evelyne X... ne produit aucun élément de nature à établir que les ventes ne sont prises en compte qu'à compter de leur livraison et non à compter de leur commande. Enfin, elle n'évalue pas le montant du préjudice prétendument subi par le comportement de l'employeur. En l'absence de tout élément probant, ce grief n'apparaît pas établi. Madame Evelyne X... sera par conséquent déboutée de sa demande de condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Ce rejet sera ajouté au jugement entrepris puisque le conseil des prud'hommes ne s'est pas expressément prononcé sur cette question.
Madame Evelyne X... reproche enfin à la société A. Pro Hygiène d'avoir modifié de manière unilatérale sa rémunération, et plus précisément le taux de ses commissions, sans avoir obtenu préalablement son accord.
Il apparaît à la lecture des pièces et conclusions des parties que la société A. Pro Hygiène a modifié, à compter du début de l'année 2008, le mode de calcul des commissions des VRP, entraînant une diminution de leur montant.
La modification de cet élément du contrat de travail peut effectivement être verbal.
La société A. Pro Hygiène prétend que Madame Evelyne X... a donné son accord verbal pour cette modification, ce que conteste l'intéressée. L'employeur produit une attestation d'un de ses anciens salariés, Monsieur B..., qui atteste notamment que : « Madame X... et moi-même avions donc donné tout naturellement notre accord verbal à la mise en place de ce nouveau procédé de calcul pour une commission à effet début 2008 comprenant que la pérennisation de l'entreprise en dépendait ». Pour autant, Madame Evelyne X... conteste avoir donné un tel accord. Par courrier du 16 février 2011 cette dernière a demandé à son employeur de lui rappeler les conditions de sa rémunération conformément à l'avenant de son contrat de travail signé le 7 mars 2006. Elle demandait par ailleurs la transmission du détail du calcul de sa commission portée sur sa fiche de paie du mois de janvier 2011 qui ne semblait pas respecter son contrat de travail. N'ayant pas obtenu de réponse, elle a de nouveau écrit à son employeur le 2 mars 2011. Par courrier du 17 mars 2011, l'employeur affirmait que Madame Evelyne X... avait donné son accord pour la modification du calcul de ses commissions mais précisait qu'il n'entendait pas accepter qu'elle puisse le cas échéant se prévaloir contre lui du non-règlement de ses commissions et s'engageait à régulariser le montant de celles-ci avec le salaire du mois de mars 2011. La société ajoutait que le règlement ne lui parviendrait qu'avec les plus expresses réserves, envisageant très sérieusement de saisir le conseil des prud'hommes afin de faire trancher la difficulté.
Finalement l'employeur a versé à Madame Evelyne X..., à titre de rappel de commissions, les sommes suivantes :- au titre de l'année 2008 : 2144, 70 euros bruts et 214, 47 euros au titre des congés payés afférents,- au titre de l'année 2009 : 2509, 91 euros bruts et 250, 99 euros au titre des congés payés afférents,- au titre de l'année 2010 : 2264, 90 euros bruts et 226, 49 euros au titre des congés payés afférents, ce qui correspond à une somme totale de 7 611, 43 euros bruts.
La société A. Pro Hygiène a régularisé les versement de ces sommes, pour leur majeure partie, postérieurement à la saisine par Madame Evelyne X... du conseil des prud'hommes le 28 avril 2011. En effet, la société a réglé ces sommes par tranches, en mars 2011, mai 2011 et octobre 2011.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Madame Evelyne X... a réclamé le versement de ses commissions relativement tardivement. Au surplus, Monsieur B... témoigne que ce que celle-ci avait donné son accord verbal pour la modification du calcul des commissions. Pour autant, l'employeur, tout en contestant avoir modifié unilatéralement le calcul des rémunérations de l'intéressée a accepté de verser la totalité des sommes qui étaient réclamées. L'importance du montant des commissions versées (plus de 7 500 euros bruts) après la demande de la salariée conduit la cour à considérer que l'employeur avait modifié le calcul des commissions de celle-ci sans son accord et ce, bien qu'il s'en défende.
Si l'employeur a régularisé la situation, les sommes litigieuses représentent la somme conséquente de 7 500 euros bruts. Au surplus cette régularisation n'a été versée en totalité que plusieurs mois après la saisine du conseil des prud'hommes.
Il est rappelé que le versement intégral et régulier des salaires est une des principales obligations de l'employeur envers ses salariés. Madame Evelyne X... a ainsi été privée d'une partie non négligeable de sa rémunération sur une longue période. Ceci constitue une faute particulièrement grave de l'employeur rendant impossible la poursuite des relations de travail. Dans ces conditions il y a lieu de faire droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur. Cette résiliation judiciaire prendra effet au 5 décembre 2011, date du licenciement de Madame Evelyne X.... Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur les conséquences pécuniaires de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur :
La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour le salarié au paiement des indemnités de rupture.
La société A. Pro Hygiène employant habituellement moins de onze salariés, trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail selon lesquelles, en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi.
En considération de la situation particulière de Madame Evelyne X..., au regard notamment de son âge (48 ans) et de son ancienneté au moment de la rupture, de sa qualification et sa situation après la rupture, la cour dispose des éléments nécessaires pour condamner la société A. Pro Hygiène à payer à Madame Evelyne X... la somme de 25 000 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnisation du préjudice lié à l'absence d'octroi de chèques cadeaux :
En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de ontrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
L'article L. 1134-1 du même code dispose qu'en cas de litige relatif à l'application du texte précédent, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En l'espèce, Madame Evelyne X... reproche à son employeur de ne pas avoir reçu de bons cadeaux en 2010 et 2011 contrairement aux années précédentes. Elle précise que son employeur est adhérent au groupe Reso, fournisseur de produits d'hygiène professionnelle et que chaque année, ce groupe attribue des chèques cadeaux à ses adhérents. Elle ajoute qu'au sein de la société A. Pro Hygiène, il était d'usage que ces chèques soient distribués au salarié et ce, chaque année. Elle prétend qu'en 2010 et 2011, elle n'a pas bénéficié de chèques cadeaux à l'inverse de ses collègues. Elle communique une attestation de son ex-conjoint et père d'un enfant commun, qui affirme qu'elle recevait des chèques cadeaux en fin d'année depuis le rachat de la société par Monsieur A.... Elle produit également une facture d'un canapé deux places émis par la société D... où il est mentionné de manière manuscrite que l'achat a été réglé partiellement au moyen de chèques cadeaux distribués par le groupe RESO. Pour autant, cette mention manuscrite n'a pas été inscrite par un des salariés du magasin D... comme l'atteste son gérant, Monsieur D.... Cette facture ne constitue donc pas un élément de preuve pouvant être retenu.
L'employeur soutient que les chèques litigieux appartiennent aux adhérents RESO et non pas en tant que tel aux salariés alors même qu'ils sont versés en fonction des achats fournisseurs effectués par l'entreprise au cours de l'année. L'employeur affirme qu'il ne s'est jamais engagé à remettre des chèques cadeaux à Madame Evelyne X... ou à d'autres salariés.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Madame Evelyne X... n'étaye pas suffisamment sa demande en ne présentant pas d'éléments de fait de nature à supposer qu'elle a fait l'objet d'une discrimination. L'attestation de son ex-conjoint apparaît à cet égard peu précise, étant ajouté que sa crédibilité est sujette à caution du fait du lien qui les unit. La cour constate également que Madame Evelyne X... ne précise pas le nombre et le montant des chèques cadeaux reçus chaque année. A titre surabondant, il est constaté que l'octroi d'un tel avantage en nature ne figure pas sur son contrat de travail. Dans ces conditions, Madame Evelyne X... sera déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur la restitution sous astreinte des fiches clientèle :
L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Au cas d'espèce, la société A. Pro Hygiène réclame la restitution par Madame Evelyne X..., sous astreinte, des fichiers clients en version papier sur lesquels sont notamment précisés les coordonnées et les noms des interlocuteurs, les suivis clients, les devis établis et les prix convenus.
Madame Evelyne X... conteste avoir conservé en sa possession le moindre élément appartenant à la société A. Pro Hygiène. Indépendamment des connaissances réelles ou supposées de Madame Evelyne X... en matière informatique, l'employeur ne produit aucun élément permettant de prouver que la salariée aurait effectivement conservé ces fichiers clients litigieux. Dès lors, infirmant le jugement entrepris, il y a lieu de débouter la société A. Pro Hygiène de sa demande faite à ce titre.

Sur la demande de remise des documents sociaux :
Il sera fait droit à la demande de Madame Evelyne X... tendant à ordonner à la société A. Pro Hygiène de lui remettre un certificat de travail, des bulletins de salaires et une attestation Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt. Il n'apparaît pas utile de donner à l'employeur un délai de 8 jours pour s'exécuter, en l'absence d'élément laissant à penser qu'il y aura des difficultés d'exécution sur ce point. Au bénéfice de ces mêmes observations, l'astreinte ne sera pas ordonnée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :
La société A. Pro Hygiène qui succombe au stade de l'appel sera condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile. En l'absence de demande sur ce point, le jugement sera confirmé en ce qu'il a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

L'équité commande d'accorder à Madame Evelyne X... la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles par elle exposés en première instance et au stade de l'appel. Il ne saurait être inclus dans les dépens de cette procédure les frais d'exécution, hypothétiques et futurs du présent arrêt, de sorte que la demande présentée en ce sens sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :- débouté Madame Evelyne X... de sa demande au titre du préjudice lié à l'absence de chèques cadeaux,- débouté Madame Evelyne X... de sa demande d'annulation de l'avertissement du 15 juillet 2011 et de la mise à pied du 30 septembre 2011,- débouté la société A. Pro Hygiène de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens,
INFIRME le jugement entrepris en ses autres dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
REJETTE la demande de la société A. Pro Hygiène tendant à voir écarter les attestations produites par Madame Evelyne X...,
PRONONCE l'annulation de l'avertissement du 6 mai 2011,
DÉBOUTE Madame Evelyne X... de sa demande de condamnation de la société A. Pro Hygiène à lui payer 153, 59 euros bruts à titre de rappel de salaire ainsi que 15, 36 euros bruts au titre des congés payés afférents au titre de la mise à pied prononcée le 30 septembre 2011,
PRONONCE la résiliation du contrat de travail entre les parties aux torts de l'employeur à effet au 5 décembre 2011,
CONDAMNE la société A. Pro Hygiène à payer à Madame Evelyne X... la somme de 25 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
CONDAMNE la société A. Pro Hygiène à remettre à Madame Evelyne X... un certificat de travail, des bulletins de salaires et une attestation Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt,
DIT n'y avoir lieu à prévoir de délai ni à prononcer d'astreinte quant à la remise des documents de fin de contrat et tous les bulletins de paie rectifiés,
DÉBOUTE la société A. Pro Hygiène de sa demande tendant à la restitution par Madame Evelyne X... des fichiers clients papier de la société sous astreinte,
DÉBOUTE Madame Evelyne X... de sa demande de condamnation de la société A. Pro Hygiène à lui payer la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
CONDAMNE la société A. Pro Hygiène à payer à Madame Evelyne X... la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel et la déboute elle-même de ce chef de prétention,
CONDAMNE la société A. Pro Hygiène aux dépens d'appel,
REJETTE le surplus des demandes des parties.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00684
Date de la décision : 16/02/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-02-16;13.00684 ?
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