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19/01/2016 | FRANCE | N°13/02932

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 19 janvier 2016, 13/02932


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02932.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 15 Octobre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 01585

ARRÊT DU 19 Janvier 2016

APPELANT :

Monsieur Khaled X...... 49000 ANGERS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 010409 du 06/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)

représenté par Maître Sarah TORDJMAN, avocat au ba

rreau d'ANGERS
INTIMES :
Maître Odile Z... ès qualité de liquidateur judiciaire de MAURICIO A... don...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02932.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 15 Octobre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 01585

ARRÊT DU 19 Janvier 2016

APPELANT :

Monsieur Khaled X...... 49000 ANGERS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 010409 du 06/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)

représenté par Maître Sarah TORDJMAN, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMES :
Maître Odile Z... ès qualité de liquidateur judiciaire de MAURICIO A... dont le siège social est Le Moulin de Couton 49750 CHANZEAUX... BP 30222 49002 ANGERS CEDEX 02

L'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par L'UNEDIC CGEA DE RENNES Immeuble Le Magister 4 cours Raphaël Binet-CS 96925 35069 RENNES CEDEX

représentés par Maître CREN, avocat de la SELARL LEXCAP-BDH, avocats au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Novembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Monsieur Luis GAMEIRO, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT :
prononcé le 19 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

FAITS ET PROCÉDURE,

Par contrat à durée indéterminée en date du 3 mai 2010 M. Khaled X... a été embauché par M. A... exerçant sous l'enseigne MDA Couverture, en qualité d'ouvrier couvreur niveau 1 coefficient 150 de la convention collective nationale du bâtiment.
L'entreprise emploie 4 salariés.
Le 6 février 2012 M. X... a été victime d'un accident avec la voiture de l'entreprise donc les conséquences (douleurs cervicales) ont été prises en charge au titre de la législation sur les accidents du travail. Le 27 mars 2012 il a été déclaré inapte à son poste et à tous postes dans l'entreprise par le médecin du travail en une seule visite (article R. 4624-31 du code du travail).

Dans le dernier état de la relation de travail la rémunération mensuelle de M. X... s'élevait à 1 021, 35 ¿.
Par courrier en date du 5 avril 2012 le salarié a été informé par son employeur que son reclassement dans l'entreprise était impossible et qu'une procédure de licenciement serait engagée. Par lettre recommandée du 11 avril 2012 M. X... a été convoqué à un entretien préalable et, le 26 avril suivant, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 28 mai M. X... a sollicité de son employeur un certain nombre de documents puis a saisi le conseil de prud'hommes en référé qui, par ordonnance du 3juillet 2012, a ordonné à son employeur de lui verser à titre de provision les sommes de 1 759, 32 ¿ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 1 330 ¿ au titre de l'indemnité légale de licenciement et à lui remettre un solde de tout compte.
Contestant son licenciement et arguant de ce qu'il lui était dû des rappels de salaire le 29 novembre 2012 M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de demandes subséquentes en paiement de diverses sommes.
Par jugement du 30 janvier 2013 M. A... exerçant sous l'enseigne MDA Couverture a été mis en redressement judiciaire et Me Z... désigné comme représentant des créanciers. Par jugement du 24 juillet 2013 la liquidation judiciaire a été prononcée et Me Z... mandataire liquidateur a été maintenu dans ses fonctions

Par jugement en date du 15 octobre 2013 le conseil de prud'hommes d'Angers :
- a dit le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de recherche de reclassement,- a fixé la créance de M. X... à la somme de 2 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- a débouté M. X... de ses autres demandes,- a dit que le jugement déclaratif de redressement judiciaire suspend le cours des intérêts,- a donné acte à l'AGS CGEA de Rennes de son intervention et dit que la condamnation lui sera opposable dans les limites et plafonds prévus par le code du travail,- a ordonné à M. A... de délivrer au salarié son solde de tout compte,- a condamné solidairement l'employeur et Me Z... à verser au conseil de M. X... la somme de 500 ¿ en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique,- a condamné M. A... aux dépens.

Par lettre recommandée reçue au greffe le 4 novembre 2013, M. X... a relevé appel de ce jugement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,

Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 24 juillet 2015 et à l'audience M. X... demande à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse,- de l'infirmer en ce qu'il a fixé sa créance de dommages et intérêts à la somme de 2 500 ¿ nets et de fixer sa créance à ce titre à la somme de 15 000 ¿ nets,- de condamner Me Z... en qualité de mandataire liquidateur à verser à la SCP ACR la somme de 1 500 ¿ nets en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et aux dépens.

Il fait essentiellement valoir :- que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que l'employeur a manqué à son obligation d'une recherche effective, sérieuse et suffisante de reclassement ; qu'il l'est également dès lors qu'il résulte du courrier du 5 avril 2012 et de la lettre de licenciement que c'est son état de santé qui a motivé son licenciement ce qui caractérise une violation de l'article L. 1132-1 du code du travail qui prohibe les discriminations et interdit le licenciement à raison de l'état de santé du salarié ;- qu'au regard de l'importance de son préjudice sa demande d'indemnisation est justifiée.

Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 30 novembre 2015 et à l'audience Me Z... ès qualité de mandataire liquidateur de M. A... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse et de le confirmer en ses autres dispositions,- subsidiairement, de réduire les prétentions de M. X...,- de condamner M. X... à lui verser la somme de 1 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle soutient en résumé :- que l'employeur a rempli son obligation de recherche de reclassement alors que le médecin du travail, auquel elle a écrit ensuite de l'avis d'inaptitude du 29 mars, lui a indiqué que M. X... restait apte à un poste de travail sans travail en hauteur sans manutention lourde à répétition et que son état de santé ne permettait aucun reclassement dans l'entreprise et que c'était la raison pour laquelle il confirmait l'inaptitude à tout poste dans l'entreprise ; que l'obligation de recherche de reclassement s'apprécie au regard de la taille de l'entreprise et, qu'au cas d'espèce, elle était composée d'une secrétaire, d'un chef d'équipe et de deux couvreurs de sorte qu'aucun poste n'était disponible et qu'aucune solution compatible avec les indications du médecin du travail n'était envisageable ;- qu'il est inexact de prétendre que son salarié a été licencié en raison de son état de santé, aucun des courriers visés ne reliant le licenciement à l'état de santé de M. X..., seul son reclassement ayant été rendu impossible de ce fait ;- que la demande d'indemnisation est excessive.

Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 30 novembre 2015 et à l'audience, l'AGS Unedic CGEA de Rennes demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse et de le confirmer en ses autres dispositions,- subsidiairement de dire et juger que la créance du salarié ne sera garantie que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

L'AGS reprend à son compte des moyens soulevés par Me Z... ès qualité.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 30 novembre 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

M. X... était ouvrier couvreur dans l'entreprise de M A... depuis le 3 mai 2010.

Ensuite d'un accident de voiture avec le véhicule de l'entreprise le 6 février 2012 qui lui a occasionné des douleurs cervicales, M. X... a été en arrêt de travail à compter de cette date puis déclaré définitivement inapte à son poste et à tous postes dans l'entreprise selon la procédure de danger immédiat suivant avis du médecin du travail du 27 mars 2012 en ces termes " inapte définitivement au poste. Procédure d'urgence en une seule visite pour danger immédiat (article 4624-31 du code du travail. Inapte à tous postes dans l'entreprise ".
Il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 26 avril 2012 dans les termes suivants : " A la suite de l'accident du travail dont vous avez été victime 06/ 02/ 2012 et à l'issue de l'arrêt de travail qui en est résulté, vous avez été déclaré inapte aux fonctions de Couvreur que vous exerciez précédemment par le docteur Y..., médecin du travail. Le Certificat d'inaptitude établi par ce dernier vous déclarait néanmoins apte à occuper un poste présentant les caractéristiques suivantes : un poste sans travail en hauteur et sans manutention lourde à répétition. Comme nous vous en avions informé par lettre du 05/ 04/ 2012, reçue par vous le 06/ 04/ 2012, ainsi que lors de l'entretien préalable du 18/ 04/ 2012, après de vaines recherches, nous avons conclu à l'impossibilité de vous reclasser dans l'entreprise pour les motifs suivants : Votre état de santé actuel ne permet aucun reclassement possible dans l'entreprise. Cette inaptitude à tout poste nous a été confirmée par la médecine du travail par courrier du 03/ 04/ 2012. Nous nous voyons donc dans l'obligation de vous licencier. En application de l'article L 1226-14 du Code du travail, vous percevrez une indemnité compensatrice de préavis d'un mois de salaire ainsi qu'une indemnité spéciale de licenciement égale à 1330 ¿ (mille trois cent trente euros). Au 26/ 04/ 2012, votre droit individuel à la formation (DIF) s'élève à 38 heures. Nous tenons à votre disposition un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et une attestation « employeur assurance chômage », ainsi que les sommes que nous restons vous devoir ".

Il doit tout d'abord être noté que si la lettre du 5 avril puis la lettre licenciement du 26 avril 2012 reçues par M. X... font référence à son état de santé, c'est seulement en référence à son inaptitude ; il n'en résulte en rien-ni dans la lettre ni dans l'esprit-qu'il ait été licencié en raison de son état de santé en infraction aux dispositions de l'article. L. 1132-1 du code du travail qui interdit toute discrimination et donc le licenciement d'un salarié à raison de son état de santé.
Son licenciement est clairement motivé par son inaptitude et l'impossibilité de son reclassement.
En second lieu, si l'inaptitude du salarié à tous postes dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur de son obligation de recherche de reclassement qui doit être loyale et sérieuse, cette recherche doit s'apprécier notamment en prenant en compte les démarches effectuées par l'employeur et la taille de l'entreprise.
Or au cas d'espèce, après avoir reçu l'avis d'inaptitude de son salarié M. A... a contacté par écrit le médecin du travail pour lui faire préciser sa position et, en réponse à cette demande, celui ci lui a indiqué par courrier du 3 avril 2012 qu'il confirmait l'avis d'inaptitude au poste de couvreur de M. X... vu la visite de reprise le 27 mars 2012, cette inaptitude faisant suite à l'accident du travail du 6 février, qu'il restait apte à un poste sans travail en hauteur et sans manutention lourde à répétition, que son état de santé actuel ne permettait aucun reclassement dans l'entreprise c'est pourquoi il confirmait son inaptitude à tout poste dans l'entreprise.
Il est par ailleurs évident que compte tenu de la taille de l'entreprise qui exerçait une activité de couverture et qui n'employait qu'une secrétaire, un chef d'équipe et deux ouvriers, aucun reclassement dans l'entreprise n'était possible au bénéfice de M. X... ouvrier couvreur qui ne pouvait plus monter sur les toits ni porter de charges lourdes
Il s'ensuit que, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, l'employeur n'a pas manqué à son obligation de reclassement.
Le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a jugé le licenciement de M. X... dépourvu de cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences indemnitaires
M. X... sera donc débouté de toutes ses demandes de ce chef.
L'équité commande le rejet de la demande de Me Z... ès qualité fondée l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :- dit le licenciement de M. X... sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de recherche de reclassement,- fixé la créance de M. X... à la somme de 2 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- condamné solidairement l'employeur et Me Z... à verser au conseil de M. X... la somme de 500 ¿ en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et M. A... aux dépens.

Statuant à nouveau :
Déboute M. X... de ses demandes au titre de son licenciement non dépourvu de cause réelle et sérieuse et son conseil de sa demande fondée sur l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Déboute Me Z... ès qualité de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. X... aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02932
Date de la décision : 19/01/2016
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-01-19;13.02932 ?
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