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19/01/2016 | FRANCE | N°13/02530

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 19 janvier 2016, 13/02530


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02530.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 09 Septembre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00156

ARRÊT DU 19 Janvier 2016

APPELANTE :
Société JIGAM CONSEIL Le Village 34210 AIGNE
représentée par Maître ASTRUC, substituant Maître Pascale DELL'OVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
Madame Brigitte X... ... 72100 LE MANS (bénéficie d'une aide juridi

ctionnelle Totale numéro 2013/ 09782 du 20/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANG...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02530.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 09 Septembre 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00156

ARRÊT DU 19 Janvier 2016

APPELANTE :
Société JIGAM CONSEIL Le Village 34210 AIGNE
représentée par Maître ASTRUC, substituant Maître Pascale DELL'OVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
Madame Brigitte X... ... 72100 LE MANS (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 09782 du 20/ 12/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
présente, assistée par Maître Bruno LAMBALLE, de la SCP NOBILET-LAMBALLE, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Novembre 2015 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Monsieur Luis GAMEIRO, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 19 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE,
Mme Brigitte X... a été embauchée le 8 mai 2008 par la société Jigam Conseil en contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'auditeur-conseil à compter du 1er juin 2008.
La société Jigam Conseil exerce une activité d'accompagnement des entreprises dans leur organisation. Elle emploie plus 11 salariés et la convention collective applicable à la relation de travail entre les parties était celle des bureaux d'études techniques dite Syntec.
Mme X... a été licenciée par la société Jigam Conseil, en la personne de son administrateur gérant, pour cause réelle et sérieuse le 14 avril 2009.
Dans le dernier état de la relation de travail, Mme X... percevait une rémunération mensuelle brute de 2 500 ¿.
Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été rémunérée à hauteur de ses compétences et en tout cas comme sa collègue en application du principe " à travail égal salaire égal ", le 10 avril 2012 Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes de rappel de salaire et d'indemnisation.
Par jugement en date du 9 septembre 2013 le conseil de prud'hommes du Mans a :- dit que le licenciement de Mme X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse,- en conséquence condamné la société Jigam Conseil Sophia Antipolis à lui verser les sommes de 16 800 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 300 ¿ au titre de rappel de salaires sur le principe " travail égal/ salaire égal ", 1330, 71 ¿ au titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires effectuées sur les temps de trajet et 700 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté Mme X... du surplus de ses demandes,- ordonné la remise des bulletins de salaire rectifiés ainsi que de l'attestation Pole emploi,- dit que les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2012 et les créances indemnitaires à compter du jugement,- condamné la société Jigam Conseil Sophia Antipolis aux dépens ;
Par déclaration au greffe reçue le 30 septembre 2013 la société Jigam Conseil a régulièrement relevé appel de ce jugement.
Par lettre recommandée reçue au greffe le 10 octobre 2013 Mme X... a régulièrement relevé appel de ce jugement.
La jonction des procédures a été ordonnée à l'audience du 30 novembre.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 10 août 2015 et à l'audience la société Jigam Conseil demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et :- après avoir dit et jugé que le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail ne constitue pas, en application de l'article L. 3121-4 du code du travail, du temps de travail effectif et qu'il ne saurait en conséquence générer le paiement d'heures supplémentaires, de débouter Mme X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires à ce titre,- après avoir dit et jugé que les contreparties qui ont été accordées à la salariée dans le cadre d'un temps de trajet inhabituel résultant de l'accord d'aménagement du temps de travail du 20 août 2001 respectaient les dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail, de dire et juger que Mme X... a été remplie de ses droits au titre du temps de trajet,- de dire et juger que le licenciement de Mme X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de ses demandes à ce titre,- de débouter Mme X... de sa demande de rappel de salaire, sa différence de rémunération avec celle de Mme Y... étant justifiée par des éléments objectifs,- de condamner Mme X... à lui verser la somme de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle fait essentiellement valoir :- que la demande en paiement d'heures supplémentaires au titre d'un temps de trajet n'est pas fondée dès lors que le temps de trajet n'est pas du temps de travail effectif ; qu'il peut seulement, s'il excède le temps normal de trajet entre domicile et lieu de travail, donner lieu à contrepartie-soit financière soit sous forme de repos-négociée dans le cadre d'un accord collectif ;- que l'accord collectif négocié dans l'entreprise prévoit en son article 5 que les temps de déplacement excédant un rayon de 200 kms autour du domicile du salarié génèrent une prime de 25 ¿ ; que Mme X... ayant perçu 28 fois cette prime et bénéficié en outre de repos compensateurs (5 jours entiers soit 35 heures) n'est pas fondée à obtenir une indemnisation de ce chef, notamment à hauteur de la somme allouée par le conseil de prud'hommes ;- que le licenciement de la salariée est parfaitement justifié au regard des documents produits, la lettre de licenciement comportant des motifs matériellement vérifiables ; qu'elle justifie par des éléments objectifs tenant à l'ancienneté et l'expérience professionnelle voire à leurs qualités professionnelles, la différence de salaire entre Mme X... et Mme Y....
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 10 août 2015 et à l'audience Mme X... demande à la cour :- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré qu'elle était fondée en sa demande de rappel de salaire sur le fondement du principe travail égal/ salaire égal mais de l'infirmer sur le montant de la somme allouée et de condamner la société Jigam Conseil à lui verser la somme de 3 450 ¿,- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Jigam à lui verser la somme de 1 330, 71 ¿ à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires correspondant à ses temps de trajet et, à titre subsidiaire, de la condamner à lui verser cette somme à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice du fait des heures de dépassement qu'elle a effectuées pour se rendre de son domicile à ses lieux de mission ;- de confirmer le jugement en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société Jigam Conseil à lui verser la somme de 25 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;- de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise des bulletins de salaire rectifiés ainsi que de l'attestation Pole emploi mais de l'infirmer en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à astreinte et de prévoir une astreinte de 50 ¿ par jour de retard passé le délai de 8 jours de la notification de l'arrêt à intervenir ;- de condamner la société Jigam Conseil à lui verser la somme de 3 000 ¿ en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle soutient en résumé :- que la société Jigam Conseil ne justifie pas de la différence de salaire mensuel de 300 ¿ entre elle et Mme Y... dès lors qu'elle était plus diplômée et avait une plus grande expérience au regard du poste d'auditrice conseil qu'elles occupaient toutes les deux dans les mêmes conditions, de sorte qu'elle est fondée en sa demande de rappel de salaire correspondant à la différence sur toute la période pendant laquelle elle a perduré ;- que le fait de ne pas rémunérer les temps de déplacements inférieurs à 200 kms relève d'une décision de l'employeur, que la société Jigam Conseil fait une mauvaise interprétation des dispositions législatives applicables ; qu'elle est ainsi fondée à demander à percevoir la somme de 25 ¿ lorsqu'elle se trouvait à plus de 200 kms de chez elle " que ce soit pour une mission d'une journée entière chez un client ou pour deux missions le même jour fractionné en deux demi-journées et pas forcément chez le même client mais à plus de 200 kms de son domicile " ; qu'à titre subsidiaire elle est fondée à demander paiement de la somme de 1 330, 71 ¿ à titre de dommages et intérêts ;- que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse parce que la lettre de licenciement ne comporte pas de griefs matériellement vérifiables et que sa demande indemnitaire à hauteur de 25 000 ¿ est justifiée.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 24 novembre 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Il convient au préalable pour la cour de constater que Mme X... a été embauchée, et d'ailleurs licenciée, par la société Jigam Conseil qui défend à l'instance et non la société Jigam Conseil Sophia Antipolis dont la mention figure dans le jugement du conseil de prud'hommes.
Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail,
Sur la demande de rappel de salaire par application du principe à travail égal salaire égal,
L'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que les salariés en cause se trouvent dans une situation identique.
S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe " à travail égal salaire égal " de soumettre au juge des éléments susceptibles de caractériser une inégalité de rémunérations, il incombe à l'employeur d'établir que la disparité de traitement est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La différence de rémunération entre salariés exerçant des fonctions identiques doit reposer sur des raisons objectives qu'il appartient à l'employeur de démontrer et dont il appartient au juge de contrôler concrètement la réalité et la pertinence.
Il est établi par les bulletins de salaire produits que, lors de son embauche et pendant toute la durée de la relation de travail, Mme X... a été rémunérée sur une base mensuelle brute de 2 500 ¿ alors que Mme Y... a été rémunérée jusqu'en décembre 2007 sur une base mensuelle brute de 2 800 ¿ puis 2 923, 78 ¿ en janvier et février 2008 puis de 3 123, 78 ¿.
Cette différence de salaire n'est pas contestée par la société Jigam Conseil qui soutient qu'elle était justifiée par l'ancienneté et l'expérience professionnelle et, subsidiairement, qu'elle était justifiée par la différence de qualité du travail.
La société Jigam Conseil ne produit pas le contrat de travail de Mme Y.... Aucune fiche de poste n'est produite aux débats et il résulte des intitulés de leurs bulletins de salaire que les deux salariées occupaient toutes les deux un poste d'auditeur conseil ayant donc de facto les mêmes responsabilités.
Mme Y... a été embauchée le 9 octobre 2007 et Mme X... 1er juin 2008 soit une différence d'ancienneté de 8 huit mois qui, en elle même et à elle seule, n'est pas pertinente pour justifier une différence de salaire, au surplus à hauteur d'une somme mensuelle supérieure à 300 ¿.
Par ailleurs, l'employeur ne produit pas le contrat de travail de Mme Y... qui permettrait de connaître le montant de son salaire lors de son embauche et pendant les huit premiers mois de sa collaboration avec la société ; il ne prétend pas et a fortiori ne justifie pas que Mme Y... ait bénéficié d'une augmentation de salaire aux termes des huit mois de son embauche. Il ne donne aucun élément de comparaison avec les autres salariés de l'entreprise.
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la société Jigam n'est pas fondée à justifier une différence de salaire entre les deux salariées au cours de l'année 2008/ 2009 par cette seule différence d'ancienneté.
Si les diplômes et l'expérience peuvent justifier une différence de salaire, encore faut il que ces diplômes et expériences soient en relation avec les exigences du poste et des responsabilités exercées effectivement.
Les deux salariées exerçaient effectivement des fonctions de conseil dans les entreprises clientes de leur employeur en vue d'améliorer leurs organisations respectives.
S'agissant des diplômes annoncés :- Mme Y... est titulaire d'un bac STI génie électrotechnique, d'un BTS mécanique automatisme industriel et d'une formation manager système qualité à l'Ifocop niveau 1 avec mention bien et est trinlingue (espagnol, portugais, anglais)- Mme X... est titulaire d'un diplôme de technicien supérieure en organisation et gestion de la qualité niveau 3 reconnu état, a fait une formation d'animation et de pilotage de la sécurité au Cesi de Caen, a un diplôme international de responsable d'audit de système de management de la qualité inscrite IRCA ;
S'agissant de l'expérience professionnelle avant embauche :- Mme Y... a été 11 mois technicienne soudure encollage chez PSA à Aulnay sous bois, 23 mois responsable qualité production chez Lear Corporation à Cergy, 14 mois responsable qualité, sécurité environnement chez Bosquet à Paris (certification Iso), 5 mois responsable site logistique chez Renosol à Rouen et 8 mois responsable qualité et environnement chez Mercedes-Mme X... a été pendant 5 ans hôtesse d'accueil standardiste à la Mission local de rennes, 6 mois responsable de recrutement chez Adia, 18 mois responsable de lignes de configuation des téléphones chez Philips, 1 an responsable client contrôleur qualité chez Valéo, 4 mois en formation en entreprises mise en place certification Iso 9001, 8 mois au service qualité lignes fortes fusées chez Auto Chassis International ACI et deux ans responsable qualité chez Anfray Gioria scop entreprise d'électricité générale.
Au regard de leurs expériences professionnelles et de leurs diplômes tels que ressortant de leur CV ci dessus repris dans leur grandes lignes (pièces 8 et 9 de l'employeur), ni ces expériences ni ces diplômes ne justifiaient une différence de salaire.
Dans la mesure où elle ne produit aucun document sur les missions dont étaient chargées les salariées, ni sur les clients de la société et leurs activités, la société Jigam Conseil ne peut arguer d'une expérience plus étendue de la part de Mme Y... dans le secteur de l'automobile pour justifier la différence de salaire.
Enfin la seule allégation portant sur la différence de qualité du travail entre Mme Y... et Mme X..., au surplus non objectivée, est inopérante.
L'inégalité injustifiée de salaire dont Mme X... a été victime justifie la condamnation de la société Jigam Conseil à lui verser la somme de 3 450 ¿ brut qu'elle demande à titre de rappel de salaire.
Sur les heures supplémentaires,
La demande de Mme X... à ce titre porte sur son temps de déplacement, soit de son domicile du Mans jusqu'au lieu de sa mission, soit entre deux lieux de mission dans la même journée qu'elle considère comme des heures supplémentaires.
S'agissant des trajets domicile-lieu de mission, il résulte des dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif.
Or ainsi que le soutient à bon droit la société Jigam Conseil, il résulte des dispositions des articles L. 3121-22, L. 3121-10 et L. 3121-4 du code du travail que le temps de travail qui ouvre droit à paiement des heures correspondantes-qui peuvent être des heures supplémentaires-est le temps de travail effectif et que le temps de trajet ne constitue pas du temps de travail effectif.
Il ne peut alors ouvrir droit à salaire et donc à paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires ; Mme X... ne peut ainsi prétendre à paiement de rappel de salaire à ce titre
S'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel du travail, Il ouvre droit à contrepartie soit sous forme de repos soit financière qui est déterminée par convention ou accord collectif ou à défaut par décision unilatérale de l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou délégué du personnel s'il en existe ;
Il résulte de l'accord d'entreprise du 20 août 2001 qu'il y était prévu " Les heures supplémentaires seront récupérées ou payées selon la législation en vigueur. A ce sujet il est précisé que seules les heures supplémentaires effectuées à la demande de la direction pourront ouvrir droit à indemnisation. Les temps de déplacement effectués hors des plages horaires d'ouverture seront récupérés au 1/ 1, sauf pour les salariés qui dépendent des modalités de réalisation de missions et de missions avec autonomie complète qui bénéficieront d'une prime de 25 euros par jour de déplacement à plus de 200 kms de leur domicile pour une prestation facturée ".
Mme X... ne discute pas avoir perçu cette somme de 25 ¿ chaque fois qu'elle a été en déplacement à plus de 200 kms de son domicile. Elle a donc perçu une contrepartie financière au dépassement d'un temps normal de trajet entre son domicile et le lieu d'exécution de sa prestation facturée.
En revanche le temps de déplacement entre plusieurs clients dans la même journée est du temps de travail effectif.
Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
Le tableau produit par Mme X... pour étayer sa demande reprend, jour après jour, les trajets effectués-lieu de départ et d'arrivée-avec leur objet, les coordonnées des clients et la durée du trajet correspondant, et pour certains l'horaire par la précision " à midi ".
Il est suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, ce qu'il ne fait pas, considérant à tort qu'il s'agit du temps de trajet ne constituant pas du temps de travail effectif.
Au vu du tableau produit et en ne prenant en considération que les temps de déplacement qui ne sont pas ceux domicile-lieux d'exécution du travail, la cour a acquis la conviction et dispose des éléments d'évaluation suffisants pour fixer à 500 ¿ la somme due à Mme X... au titre des heures supplémentaires effectuées pendant toute la durée de la relation de travail.
Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail,
La lettre de licenciement est ainsi motivée : " Ainsi que nous vous l'avons exposé lors de cet entretien, les motifs de ce licenciement sont les suivants :- Après la convocation du 24 février 2009, nous n'avions pas pris de sanction immédiate mais nous vous avions demandé de vous reprendre et d'adopter un comportement en adéquation avec la philosophie de l'entreprise. Nous pensons que vous n'avez pas profité de notre indulgence et que votre comportement lors de la formation des 23 et 24 mars a démontré une fois encore que vous ne souhaitiez pas vous remettre en question. Parce que votre comportement nuit à la bonne marche de notre entreprise, nous avons décidé de vous licencier pour les motifs évoqués lors de l'entretien préalable et détaillés ci-dessus. Votre licenciement prendra donc effet dès la première présentation par les services postaux de cette lettre recommandée, avec un préavis d'un mois. Nous avons décidé de vous dispenser de l'exécution de votre préavis qui vous sera toutefois payé. "
Le licenciement de Mme X... est donc de nature disciplinaire ainsi d'ailleurs que le confirme la société Jigam Conseil dans le cadre de la procédure.
Or comme l'a justement considéré le premier juge, cette lettre ne contient aucun motif précis matériellement vérifiables ; la référence faite à un " comportement " lors des 23 et 24 mars, qui n'est pas même qualifié par l'employeur, ne saurait être suffisant à cet égard, s'agissant d'un licenciement ayant un fondement disciplinaire, pas plus que la référence à une philosophie de l'entreprise non définie et/ ou à une absence de remise en question non objectivée.
Il suit de là que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement de Mme X... était sans cause réelle et sérieuse.
Lors de son licenciement, Mme X... avait moins d'un an d'ancienneté dans l'entreprise et aurait dû percevoir un salaire mensuel brut de 2 800 ¿ ; elle a, dans les semaines qui ont suivies son licenciement, monté sa propre société de conseil auprès des entreprises, dénommée BC consultant. Son préjudice sera ainsi justement réparé par l'allocation d'une somme de 9 000 ¿.
Le jugement sera confirmé en ses dispositions sur la remise des documents sans qu'il apparaisse nécessaire de prévoir une astreinte.
En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement à Pôle emploi des allocations qu'elle a versées à Mme X... du licenciement à ce jour, dans la limite de trois mois.
Il est justifié que Mme X... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ; Mme X... au profit de laquelle est présentée la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ne justifie pas avoir exposé des frais excédant l'indemnité allouée dans le cadre de l'aide juridictionnelle. La demande du bénéfice de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doit être faite au bénéfice de l'avocat ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Il s'ensuit que Mme X... sera déboutée de ses demandes de ces chefs ;
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Jigam Conseil Sophia Antipolis à verser à Mme X... les sommes de :-300 ¿ au titre de rappel de salaires sur le principe " travail égal/ salaire égal ",-1330, 71 ¿ au titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires effectuées sur les temps de trajet-16 800 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
STATUANT à nouveau de ces chefs et y AJOUTANT
CONDAMNE la société Jigam Conseil à verser à Mme X... les sommes de :-3 450 ¿ brut à titre de rappel de salaires sur le principe " travail égal/ salaire égal ",-500 ¿ brut à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires,-9 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
ORDONNE le remboursement par la société Jigam Conseil à Pôle emploi des allocations qu'elle a versées à Mme X... du licenciement à ce jour, dans la limite de trois mois.
CONFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions.
DÉBOUTE Mme X... de sa demande fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et la JUGE irrecevable en sa demande du bénéfice de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
CONDAMNE la société Jigam Conseil aux dépens d'appel


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02530
Date de la décision : 19/01/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-01-19;13.02530 ?
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