COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01965.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 19 Juin 2013, enregistrée sous le no F 11/ 00990
ARRÊT DU 19 Janvier 2016
APPELANTE :
LA SARL X... BERTRAND RESTAURATION Rue du Paon 49124 SAINT-BARTHELEMY-D'ANJOU
représentée par Maître Gérard SULTAN, avocat au barreau d'ANGERS
INTIME :
Monsieur Pascal Y... ... 42600 MONTBRISON
représenté par Maître CAO de la SCP IN-LEXIS, avocats au barreau de SAUMUR
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Novembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Monsieur Luis GAMEIRO, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 19 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE,
M. Pascal Y... a été embauché en contrat de travail à durée déterminée en date du 21 août 2009 en qualité de directeur d'exploitation niveau IV échelon 2 statut agent de maîtrise à compter du 24 août et jusqu'au 30 novembre 2009 par la société X... Bertrand Restauration.
Il s'est vu confier les fonctions de directeur du restaurant La Boucherie Café à Angers moyennant un salaire de 2 658, 94 ¿ brut pour 169 heures de travail effectif, majorations pour heures supplémentaires incluses.
Cette société exploite ce restaurant en franchise, le franchiseur étant le groupe La Boucherie ; elle emploie plus de dix salariés et est soumise à la convention collective des hôtels cafés, restaurants.
La société X... Bertrand Distribution est une SARL ayant pour associé unique la société Gestbouch dont le gérant est M. X....
Par décision de la société Gestouch en date du 1er décembre 2009, M Y... a été nommé cogérant de la société X... Bertrand Restauration, ce dernier ayant porté et signé en bas du PV de la décision de l'associé unique, qui précise que sa rémunération de gérant est fixée à 2 100 ¿ sur 12 mois avec remboursement des frais de déplacement et de représentation sur justificatifs, la mention " bon pour acceptation des fonctions de cogérant ".
M. Y... a continué à exercer ses fonctions dans le restaurant d'Angers.
Le 27 septembre 2011, il a été révoqué de ses fonctions de cogérant par la société Gestbouch en sa qualité d'associé unique de la société X... Bertrand Restauration.
M. Y... a alors saisi le conseil de prud'hommes de demandes de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, rappels de salaire et indemnités consécutives à son licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement en date du 19 juin 2013 le conseil de prud'hommes d'Angers a :- condamné la société X... Bertrand Restauration à verser à M Y... la somme de 3 000 ¿ au titre de l'indemnité de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,- condamné la société X... Bertrand Restauration à verser à M Y... un rappel de salaire de 45 146, 09 ¿ brut incidence des congés payés incluse pour la période du 1er décembre 2009 au 30 septembre 2011,- dit que M. Y... avait fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse condamné la société X... Bertrand Restauration à lui verser les sommes de 10156, 28 ¿ brut à titre d'indemnités de préavis incidence des congés payés incluse, 839, 49 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et 15 630 e à titre de dommages et intérêts,- dit que les condamnations de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter du jugement,- condamné sous astreinte la société X... Bertrand Restauration à remettre à M. Y... des bulletins de salaire se réservant le droit de liquider l'astreinte,- condamné la société X... Bertrand Restauration à verser à M Y... la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 605, 50 ¿,- condamné la société X... Bertrand Restauration à rembourser à Pole emploi les indemnités de chômage versées dans la limite de six mois,- débouté la société X... Bertrand Restauration de ses demandes.
Par lettre recommandée de son conseil reçue au greffe le 25 juillet 2013 la société X... Bertrand Restauration a régulièrement relevé appel de ce jugement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 25 août 2015 et à l'audience la société X... Bertrand Restauration demande à la cour :- d ¿ annuler le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- de dire et juger qu'en acceptant sa nomination en qualité de gérant M Y... s'est soumis aux statuts de la société dont les articles 11 et 12 prévoient qu'il avait les pouvoirs les plus étendus pour faire tous les actes de gestion dans l'intérêt de la société et qu'il était tenu d'assurer la bonne marche des affaires sociales en consacrant à celles ci tout son temps et les soins nécessaires à la bonne exécution du mandat qui lui était confié,- en conséquence de renvoyer les parties devant le tribunal de commerce d'Angers,- de condamner M. Y... à lui verser la somme de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle fait essentiellement valoir :- que nommé cogérant, que il a accepté, que décidé qu'à compter du 1er décembre 2009 rémunération en qualité de cogérant de 2 100 ¿ sur 12 mois et remboursement frais déplacement et de représentation sur justificatif ;- que dans rapports entre associés : pouvoir gérant L. 122-4 code de commerce... statuts, JAL, RCS il est gérant-et donc litige entre société et son gérant travailleur non salarié est de la compétence du tribunal de commerce et pas de L. 1411 du code du travail-jugement est nul parce que le conseil de prud'hommes n'a pas statué sur sa compétence alors que moyen soulevé et a statué au fond sans avoir mis la société en demeure de conclure au fond : violation article 76 du code de procédure civile ;- le conseil de prud'hommes et donc la cour en chambre sociale est incompétent au profit du tribunal de commerce, M. Y... ne lui étant pas lié par un contrat de travail, ses conditions de révocation par l'AG des associés relevant de l'examen de ce tribunal (L. 223-29 du code de commerce) ; absence de lien de subordination au regard de son mandat social et de ses fonctions de gérant ; il ne cumulait pas mandat social et contrat de travail ;- la validité du cumul suppose 4 conditions cumulatives : le contrat de travail doit correspondre à un emploi effectif, les fonctions salariées doivent être nettement distinctes de la gérance et rémunérées séparément, l'intéressé doit être subordonné à la société dans l'exercice de ses fonctions de salarié et enfin le contrat de travail doit être approuvé selon les dispositions de l'article L. 223-19 du code de commerce ; que la dimension réduite d'une SARL constitue un obstacle à la validité du cumul ; au cas d'espèce il n'existe aucun contrat de travail et l'actionnaire n'a pas autorisé le cumul ; en qualité de cogérant il gérait, administrait en effectuant notamment la gestion des commandes, le visa et le règlement des factures, le suivi des fournisseurs et le recrutement du personnel, pas de bulletins de paie et affiliation RSI ; il reconnaît cette confusion.
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 8 octobre 2015 et à l'audience M. Y... demande à la cour :- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- y ajoutant d'ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner la société X... Bertrand Restauration à lui verser la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il soutient en résumé :
- que demande nullité du jugement est sans intérêt du fait effet dévolutif de l'appel, le refus de la société de conclure au fond n'étant que dilatoire ;
- au fond, que le contrat de travail à durée déterminée ne portant pas le nom du salarié doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée de sorte qu'il est fondé en sa demande d'indemnité de requalification et à des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au titre de l'échéance du contrat de travail à durée déterminée requalifié " si jamais la cour ne jugeait pas que la relation entre l'appelante et l'intimé pour la période du 1er décembre 2009 au 30 septembre 2011, était bien une relation de travail "- que la relation entre les parties à compter du 1er décembre 2009 relevait d'un contrat de travail au regard du lien de subordination clairement matérialisé en l'espèce indépendamment de la qualification donnée ou même d'une immatriculation au RCS ; qu'il a exercé ses fonctions dans les mêmes conditions avant et après le 1er décembre 2009 ; que ce lien de subordination résulte des instructions données (dates de réunion, injonction d'organisation, instructions, envoi de lettre de sanction d'avertissement) ; qu'il n'était pas associé ; que sa situation juridique a été travestie ;- que sa demande en rappel de salaire en qualité de directeur d'établissement est justifiée sur la base niveau 5 échelon 1 à hauteur de 45 146, 09 ¿ incidence des congés payés incluse ainsi que toutes le sommes qui lui ont été allouées au titre des conséquences de la rupture de son contrat de travail.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 30 novembre 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur la nullité du jugement,
Parce que le conseil de prud'hommes n'a pas statué sur sa compétence alors que moyen soulevé et a statué au fond sans avoir mis la société en demeure de conclure au fond : violation article 76 du code de procédure civile ;
Il résulte des pièces de la procédure :- que par requête reçue au greffe le 21 octobre 2011 M Y... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers d'une demande en paiement de salaire et d'indemnisation ensuite de la rupture de sa relation de travail avec la société X... Bertrand Restauration, demande qu'il a par la suite développée ;- que la société X... Bertrand Restauration contestant l'existence d'un contrat de travail entre les parties a exclusivement conclu à l'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de commerce d'Angers ;- que c'est dans ces conditions que, sans avoir mis en demeure la société X... Bertrand Restauration de conclure au fond, par jugement en date du 19 juin 2013, le conseil de prud'hommes d'Angers a statué au fond et condamné la société X... Bertrand Restauration à verser diverses sommes à M. Y....
L'article 76 du code de procédure civile stipule que le juge peut dans un même jugement mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, sauf à mettre préalablement les parties en demeure de conclure au fond.
Ces dispositions sont applicables à toutes les procédures mêmes orales et elles ressortent du nécessaire respect du principe du contradictoire édicté par les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile desquelles il ressort que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui même ce principe.
Le conseil de prud'hommes d'Angers en statuant au fond sans avoir mis en demeure préalablement la société BBR de conclure au fond a de ce fait violé de principe du contradictoire.
Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être annulé.
L'effet dévolutif de l'appel saisit la cour du litige.
Sur la compétence,
Il y a contrat de travail lorsqu'une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la subordination d'une autre moyennant rémunération. Le lien de subordination est l'élément déterminant du contrat de travail. Il se caractérise par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; l'existence d'une relation de travail salarié dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle ; la qualification donnée au contrat est indifférente.
Il appartient à M. Y..., qui se prétend salarié de la société X... Bertrand Restauration d'en rapporter la preuve.
Il est établi et ne fait pas débats-que M. Y... a été salarié de la société X... Bertrand Restauration en vertu d'un contrat de travail à durée déterminée en date du 21 août 2009 en qualité de directeur d'exploitation, ce contrat étant conclu pour la période allant du 24 août au 30 novembre 2009 ;- que le 1er décembre 2009 il a été nommé, non pas gérant, mais cogérant de la société X... Bertrand Restauration par la société Gestbouch son associé unique dont le gérant est M X..., fonctions qu'il a acceptées ;- que M. Y... n'a jamais été associé de la société X... Bertrand Restauration.
Il n'est pas soutenu par M. Y... l'existence d'un cumul contrat de travail/ mandat social ; il revendique seulement mais clairement un statut de salarié en soutenant que la relation de travail salarial a été travestie sous la forme d'un mandat social. Il écrit qu'il " était en réalité un salarié dont la situation juridique a été travestie afin d'épargner à la société BBR le paiement de nombreuses cotisations et charges sociales et l'application des règles impératives du code du travail " ; qu'il " exerçait des fonctions qui n'ont rien à voir avec celles d'un gérant et surtout que les éléments déjà produits illustrent l'existence d'un lien de subordination ". Il s'ensuit que, comme ceux afférents aux conditions de révocation d'un gérant, les développements de la société X... Bertrand Restauration sur les conditions du cumul mandat social/ contrat de travail sont sans intérêt sur la solution du litige.
Le mandat est : " l'acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ".
La distinction entre mandat social rémunéré et contrat de travail se trouve dans le caractère plus ou moins étroit du lien de dépendance existant entre celui qui commande le travail et celui qui l'exécute.
Il appartient à la cour de rechercher la nature exacte du lien juridique à travers les notions de subordination et de service organisé qu'il appartient à M. Y... d'établir. Est donc inopérant le fait que M Y... ait été inscrit RCS comme gérant et/ ou qu'il ait eu le statut " social " de travailleur non salarié et/ ou que sa nomination ait été publiée et/ ou que ses actes aient pu engagé la société envers les tiers.
Ceci posé, pour preuve de ce qu'il était lié à la société BBR par un contrat de travail M. Y... :- fait état de son contrat de travail à durée déterminée du 21 août 2009 jusqu'au 30 novembre 2009, qui induisait donc lien de subordination, et de la poursuite sans interruption et sans modification dans ses tâches de son activité au sein du même établissement de restauration ;- produit des documents et notamment des courriels qui établissent selon lui le lien de subordination dans lequel il se trouvait.
Le fait que M. Y... ait été lié par un contrat de travail à durée déterminée à la société BBR du 24 août au 30 novembre 2009 inclus entraînant donc de facto un lien de subordination n'est pas discutable. Ce contrat de travail à durée déterminée a d'ailleurs été conclu " pour le remplacement du directeur " sans autre précision et notamment sans que soit indiqué le nom et la qualification de la personne remplacée. Il comporte, ce qui est pour le moins étonnant s'agissant d'un contrat de travail à durée déterminée, des clauses prévoyant des possibilités de remplacements dans d'autres établissements du groupe expressément indiquées comme constituant des éléments essentiels du contrat de travail, et des possibilités de mutation dont le refus était susceptible d'entraîner son licenciement. Il y est également précisé que la salarié pouvait être amené à effectuer toute tâches relevant de sa qualification sans que cela puisse justifier une modification substantielle de son contrat de travail et que son poste étant par nature évolutif, il s'engageait à accomplir toute formation que lui demanderait la société.
Le fait que M. Y... ait continué à travailler pour le compte de cette société au terme de ce contrat de travail à durée déterminée-dont le terme était fixé au lundi 30 novembre inclus-, et ce sans interruption, dans le même établissement de restauration n'est pas sérieusement contesté.
Il n'est pas allégué et a fortiori établi qu'il ait été remplacé dans le poste de directeur pour lequel il avait été embauché par le contrat de travail à durée déterminée du 21 août 2009, pas plus qu'il n'est soutenu que ses fonctions elle même, c'est à dire les tâches d'exécution qu'il effectuait alors qu'il était salarié, aient été modifiées à compter du 1er décembre 2009.
Le seul document produit pour justifier de la gestion par M. Y... de la société BBR est un rapport de gestion de l'exercice clos le 31 décembre 2010 sur lequel son nom apparaît mais qui n'est pas signé par lui.
Il résulte ensuite des documents qu'il produit :
- que le 8 décembre 2009 par lettre remise en mains propres à M. Y... la société BBR lui a écrit par l'intermédiaire de M. Z... directeur des exploitations : " Objet : mise en garde Pour faire suite à l'audit qui a été réalisé sur votre établissement le vendredi 27 novembre 2009, nous souhaitons faire une mise au point puisque nous avons été amenés à constater un certain nombre d'irrégularités en cuisine au sein du restaurant, particulièrement inacceptables et incompatibles avec la réglementation en vigueur relatives principalement, aux conditions d'hygiène et de sécurité alimentaire. Nous avons constaté les faits suivants : non respect des procédures HACCP puisque certains produits étaient en DLC dépassée, à savoir Nous vous rappelons qu'en qualité de directeur d'exploitation, vous êtes le garant du respect de la législation et notamment à celle relative à l'hygiène des produits. Tout manquement peut entraîner de graves conséquences pour notre restaurant et notamment précipiter sa fermeture. Nous souhaiterions que vous soyez plus rigoureux dans la gestion de votre restaurant et dans votre comportement quotidien, afin d'assurer Ie développement et la bonne marche de notre établissement. Nous pensons qu'il s'agit d'un écart de comportement tout à fait inhabituel, aussi le présent courrier a pour objet de vous sensibiliser et de prendre conscience des responsabilités qui vous sont attribuées. Il s'agit donc d'une simple mise en garde ".
- que le 27 décembre 2010 par lettre remise en mains propres à M. Y... la société BBR lui a écrit toujours par l'intermédiaire de M. Z... directeur des exploitations : " Objet : Avertissement Nous avons été amenés à constater un dysfonctionnement dans la gestion de l'établissement qui est préjudiciable pour l'image des restaurants La Boucherie. Le fait mentionné ci-dessous a été constaté par un client lors de la soirée du mercredi 22 décembre 2010. Des clients se sont présentés au restaurant La Boucherie d'Angers à 19h10. Ils ont trouvé le restaurant fermé avec une information affichée sur la porte d'entrée : « ouverture du restaurant à 19h30 ». Ces mêmes clients ont aperçu à travers la vitre une table où les employés du restaurant dînaient au vu de tout le monde. Après renseignement pris auprès de vous, vous aviez décidé de votre propre chef de reculer l'heure d'ouverture du restaurant sans nous en avertir pour organiser le repas de fin d'année du personnel. Nous vous rappelons qu'en qualité de directeur d'exploitation, vous êtes le garant de l'image de marque du Restaurant La Boucherie dont vous avez la responsabilité. Par ailleurs, vous auriez dû demander l'autorisation de retarder l'ouverture du restaurant à 19h30 au lieu de 19h00. Nous voulons que vous soyez plus consciencieux dans la gestion de votre restaurant afin d'assurer dans les meilleurs conditions le développement et la bonne marche de l'établissement. Cet avertissement a pour objet de vous sensibiliser et vous faire prendre conscience des responsabilités qui vous sont attribuées ".
- que dans le cadre d'échange de mails, il était convoqué à des réunions qui lui étaient imposées et au cours desquelles il devait produire des documents demandées (entretiens annuels des collaborateurs qui doivent être finis, cartes d'anniversaire récolté pour les stats et le contrôle du champagne, éléments sur le kilométrage réel des véhicules) ; il devait mettre en place des outils de contrôle comme le cahier mensuel d'enregistrement HACCP, il recevrait des instructions et les tarifs pour commander des étiquetages de couleur) ;
- que les contrats de travail de salariés embauchés par la société BBR étaient signés par M. X... " son gérant " (contrat de Mlle A... serveuse du 29 juillet 2011) et/ ou cosignés par M. Y... et M. B... directeur général délégué finances du groupe (contrat de M C... chef de partie du 1er novembre 2009 ; contrat de M. D... serveur du 3 février 2010 ; contrat de M. E... chef de partie du 1er juin 2011 ; contrat de M. F... chef de rang du 1er mai 2011 ; contrat de M. G... chef de rang du 8 septembre 2010) ; M. Y... devait en effet transmettre des fiches de demandes d'embauche au service des ressources humaines avant tout recrutement même pour un remplacement en contrat de travail à durée déterminée ;
Le fait que M Y... signait les bons de commandes pour le restaurant (marchandises et matériel) ne permet pas d'établir l'absence alléguée de lien subordination alors que de telles tâches relèvent de la fonction de directeur d'exploitation d'un restaurant.
Tous ces éléments réunis induisent le caractère salarial de l'activité de M Y...- lien de subordination-qui a perduré à compter du 1er décembre 2009 jusqu'à sa rupture par la société X... Bertrand Restauration.
Le lien salarial étant ainsi reconnu la compétence de la juridiction prud'homale et celle de la présente chambre sociale de la cour doit être retenue.
Il apparaît de bonne administration de la justice d'évoquer.
Il convient en conséquence de rouvrir les débats et d'inviter la société X... Bertrand Restauration à conclure au fond avant le 15 mars 2016 et de renvoyer l'examen de l'affaire au fond à l'audience du 20 juin 2016, la notification du présent arrêt valant convocation pour cette date.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
ANNULE le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers en date du 19 juin 2013.
EVOQUANT,
Se DÉCLARE compétente pour statuer.
MET en demeure la société BBR de conclure au fond pour le 15 mars 2016 et RENVOIE l'affaire à l'audience du 20 juin 2016 à 14H00, la notification du présent arrêt valant convocation.
RÉSERVE les dépens.