COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N al/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02762.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 02 Octobre 2013, enregistrée sous le no F12/ 01165
ARRÊT DU 12 Janvier 2016
APPELANTE :
La Société LABORATOIRE D'INNOVATION VEGETALE Zone artisanale de Champgrand 26270 LORIOL SUR DROME
représentée par Maître Annie THERET, avocat au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur Julien X... ... 49070 ST JEAN DE LINIERES
comparant, assisté de Maître Sarah TORDJMAN avocat de la SCP ACR, avocats au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne LEPRIEUR, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 12 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
M. Julien X... a été engagé par la société Laboratoire d'Innovation Végétale (ci-après dénommée LIV) en qualité d'assistant qualité selon contrat à durée déterminée conclu pour la période du 9 juillet 2007 au 8 avril 2008. Il a par la suite été engagé en qualité de " responsable qualité matières premières et sourcing ", statut cadre, selon contrat à durée indéterminée prenant effet le 9 avril 2008 et mentionnant que le lieu de travail était fixé dans l'établissement d'Angers. En dernier lieu, il percevait un salaire brut mensuel de 2 847 ¿.
La convention collective applicable était celle des industries chimiques.
A la suite de la décision de fermer l'agence commerciale d'Angers, il a été proposé au salarié par la société LIV, selon courrier du 3 mars 2012 se référant aux dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail, une modification de son contrat de travail, constituée par le transfert du lieu de travail sur Loriol sur Drôme (26), commune d'implantation du siège social. Le salarié a refusé cette proposition par courrier du 3 avril 2012.
Par courrier du 16 avril 2012 à laquelle il n'a apporté aucune réponse, il lui a été proposé deux postes de reclassement au sein du laboratoire GEFA à Chateaugiron (35), soit un poste d'opérateur de fabrication pour un salaire mensuel brut de 1 439 ¿ et un poste d'opérateur de conditionnement pour un salaire mensuel identique.
Le salarié a été convoqué par lettre du 21 mai 2012 à un entretien préalable fixé au 5 juin 2012 et dispensé d'activité à compter du 24 mai 2012 au soir " dans l'attente de l'issue de la procédure ", avec maintien de sa rémunération. Il a été licencié pour motif économique le 14 juin 2012 dans les termes suivants : " A la suite de notre entretien préalable du 05 juin 2012, nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique. Comme nous vous l'avons expliqué lors de cet entretien, nous avons dû envisager la fermeture de l'agence commerciale d'Angers et le transfert de l'activité sur le site de Loriol sur Drôme. Ce projet que nous avons décidé de mettre en ¿ uvre, se justifie pour plusieurs raisons : * D'un point de vue économique et financier, avec un chiffre d'affaires de 9. 2 millions d'euros en 2011, l'entreprise enregistre des pertes de l'ordre de 327 000 ¿, ce qui a pour conséquence directe la nécessité de réduire les charges de structure et les coûts fixes (loyer, électricité, serveur informatique, assurances...) liés notamment à l'existence d'un site secondaire avec uniquement des activités supports et non directement liées à l'exploitation et ce, alors que rien ne justifie la localisation de ces activités sur Angers. Il serait de mauvaise gestion de conserver des locaux surdimensionnés comprenant bureaux et garages tout comme il serait inopportun de multipilier géographiquement l'installation d'une GPAO et la formation adéquate du personnel. * D'un point de vue organisationnel, eu égard à l'effectif actuel, se pose clairement la justification d'un encadrement permanent sur Angers et les difficultés d'un management à distance de l'équipe. S'ajoute à cela le besoin de créer des synergies nouvelles, de regrouper tous les services de la société sur un même lieu, l'éclatement des différentes fonctions, mais également au sein d'un même département tel que la qualité par exemple, étant préjudiciable au bon fonctionnement général. De ce fait, le travail d'équipe n'est pas assez développé, le remplacement en cas d'absence est difficile et le niveau de polyvalence faible. De plus, les échanges entre les deux sites sont restreints. * D'un point de vue des relations extérieures, LlV souffre d'un manque de lisibilité de par la multiplicité d'interlocuteurs, eu égard à la coexistence des deux sites. * Enfin, afin d'améliorer la compétitivité, il est impératif de concentrer tous les efforts d'investissement sur un site unique en terme de modernisation de l'outil de production quelque peu vétuste, mais aussi d'informatisation et de rationalisation des interfaces entre d'une part l'exploitation et d'autre part les activités support. Ce motif nous a conduit à modifier votre contrat de travail dans les conditions qui vous ont été proposées le 13 mars 2012.
Or dans le délai d'un mois qui vous était imparti, vous nous avez fait part de votre refus quant au changement définitif de votre lieu de travail sur Loriol sur Drôme. Aussi, préoccupés de sauvegarder votre emploi, nous vous avons proposé par lettre recommandée en date du 16 avril 2012 un reclassement au sein du laboratoire GEFA, ZA de Bas Rocomps à Chateaugiron (35410) à l'un des postes suivants :- un poste d'opérateur de fabrication, niveau 2, échelon 1, salaire brut mensuel de 1439, 61 ¿, Convention Collective des Biscotteries, biscuiteries, chocolateries, confiseries, aliments de l'enfance et de la diététique, préparations pour desserts,- un poste d'opérateur de conditionnement, niveau 2, échelon 1, salaire brut mensuel de 1439, 61 ¿, Convention Collective des Biscotteries, biscuiteries, chocolateries, confiseries, aliments de l'enfance et de la diététique, préparations pour desserts. Nous vous avons demandé de bien vouloir nous faire part de votre intérêt pour ce poste dans un délai de huit jours, ce à quoi vous n'avez pas répondu, votre absence de réponse étant assimilée à un refus de votre part. En conséquence, nous vous avons convoqué le 21 mai 2012 pour un entretien sur une éventuelle mesure de licenciement pour motif économique. Entre temps, le 10 mai 2012, la Délégation Unique du Personnel a été dûment informée et consultée sur le projet de licenciement pour motif économique. A l'occasion de cet entretien, vous avez confirmé votre refus d'accepter notre proposition de reclassement. Ainsi que nous vous l'avons indiqué au cours de cet entretien préalable, vous avez la possibilité d'intégrer le Contrat de Sécurisation Professionnelle pour lequel nous vous avons remis une documentation. (...) " ;
Le salarié a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé lors de l'entretien préalable et le contrat a été rompu le 26 juin 2012.
Par courrier du 5 juillet 2012, le salarié a confirmé à l'entreprise qu'il souhaitait bénéficier de la priorité de réembauche.
M. X... a saisi la juridiction prud'homale le 10 septembre 2012 de demandes en paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, non-respect de la priorité de réembauche, indemnité compensatrice de congés payés et indemnité pour frais irrépétibles.
Par jugement du 2 octobre 2013, le conseil de prud'hommes d'Angers a condamné la société au paiement de la somme de 25 000 ¿ de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de celle de 1 500 ¿ par application de l'article 700 du code de procédure civile mais a débouté le salarié de ses demandes au titre de la priorité de réembauche et des congés payés. Il a également ordonné le remboursement par la société à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de deux mois d'indemnités. Il a enfin débouté la société de sa demande d'indemnité au titre des frais irrépétibles et condamné celle-ci aux dépens.
La société a régulièrement interjeté appel.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La société, dans ses dernières conclusions intitulées " conclusions no2 " régulièrement communiquées et parvenues au greffe le 7 septembre 2015, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a jugé le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et l'a condamnée au paiement de dommages-intérêts, à sa confirmation pour le surplus, au débouté du salarié de toutes ses demandes et à sa condamnation au paiement d'une somme de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. A titre subsidiaire, il sollicite que l'indemnisation du chef du licenciement sans cause réelle et sérieuse soit limitée à la somme de 16 249, 98 ¿.
Au soutien de ses prétentions, elle expose que si la décision de fermer le site d'Angers était nécessairement prise avant que le transfert à Loriol ne soit notifié au salarié, ce n'est pas pour autant que son contrat de travail était déjà rompu. Jusqu'au dernier jour, les salariés d'Angers ont disposé de tout le matériel nécessaire à l'exécution de leurs fonctions. Une dispense de travail dans le cadre d'une procédure de licenciement n'a rien d'irrégulier et de fautif.
La nécessité de fermer l'établissement d'Angers ne saurait être sérieusement contestée, la localisation de 5 salariés à Angers dans des locaux de près de 150 m ² générant une charge de près de 40 000 ¿ annuels n'était en rien justifiée et était au contraire source de dysfonctionnements. En effet, un encadrement ne peut se concevoir à distance, sachant que le siège social, la production et l'essentiel des salariés se trouvaient dans la Drôme. Le coût de ce site était d'autant plus insupportable que la société connaissait des pertes significatives, ayant subi une perte d'exploitation de 277375 ¿ en 2011. Si la société n'avait pas mis un terme à ces dépenses injustifiées, elle aurait dû déposer son bilan ; sa compétitivité était bien menacée puisque c'est la concurrence qui a bénéficié de la croissance.
Sur le périmètre d'appréciation du motif économique, le licenciement du salarié trouve sa cause dans sa décision de ne pas suivre son poste à Loriol comme dans son refus de tout reclassement. L'argumentation du salarié sur le périmètre d'appréciation du motif économique est en conséquence sans intérêt. Si la société appartient bien à un groupe, les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du secteur d'activité dont elle relève. Or, la société Biolandes a des activités dans un secteur distinct, en l'espèce dans les parfums. Ainsi, seule la référence à la société GEFA pourrait être pertinente s'il s'était agi de procéder à des suppressions de poste mais tel n'a pas été le cas. La société LIV démontre que la réunion de ses services sur un même site avait bien pour objet d'améliorer sa compétitivité.
Ont été faites au salarié des offres de reclassement correspondant aux possibilités existantes au sein du groupe à l'époque du licenciement, toutes les sociétés du groupe Biolandes ayant été consultées et aucun poste n'étant disponible dans les Landes ou à l'étranger. L'employeur n'a pas manqué à son obligation de reclassement.
Sur l'ordre des licenciements, la société n'a pas supprimé le poste.
Le licenciement est donc fondé sur une cause réelle et sérieuse.
A titre subsidiaire, le salarié ne justifie que d'un préjudice réel d'environ 6 500 ¿, soit la différence entre les indemnités de chômage reçues et le salaire qu'il aurait perçu dans la société LIV ; il a depuis lors retrouvé un travail. La cour devra limiter l'indemnisation à six mois de salaire, soit 16 249, 98 ¿.
Sur la priorité de réembauchage, celle-ci ne s'exerce qu'à l'égard de l'entreprise ayant prononcé le licenciement et pour les postes compatibles avec la qualification du salarié. En l'espèce, le salarié ne présentait pas les qualités requises pour prétendre au poste d'assistant commercial pourvu au mois d'octobre 2012 par la société LIV.
Le salarié a bien été réglé de ses congés payés sur la période du 1er au 26 juin 2012.
Le salarié, dans ses dernières conclusions intitulées " conclusions de l'intimé no 2 " régulièrement communiquées et parvenues au greffe le 28 octobre 2015, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et, formant appel incident, à son infirmation pour le surplus et à la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes :
-45 000 ¿ nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par le licenciement ;-8 543, 67 ¿ bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 854, 37 ¿ bruts d'incidence de congés payés ;-6 000 ¿ d'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage ;-244, 10 ¿ au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés pour la période du 1er au 26 juin 2012 ;-3 000 ¿ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de ses prétentions, le salarié fait valoir que l'employeur a procédé à une rupture de fait du contrat de travail puisque dès le mois d'avril 2012, les locaux de l'agence d'Angers ont été vidés sur injonction de la direction. Le salarié a donc été placé dans l'impossibilité de travailler puisqu'il a été privé de ses outils de travail. Après qu'il ait été dispensé de toute prestation de travail, il a été privé de tout accès à l'entreprise et de tout moyen de communication avec celle-ci. Il a été jugé que la dispense d'activité rémunérée imposée au salarié dans l'attente de la procédure de licenciement pour motif économique s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En l'espèce, en cessant de fournir du travail au salarié à compter du 24 mai 2012 alors qu'aucune situation contraignante extérieure à sa volonté ne l'y obligeait, l'entreprise a nécessairement rompu son contrat.
En tout état de cause, la société ne justifie pas par la production de pièces comptables des difficultés économiques actuelles qu'elle allègue, étant observé que le chiffre d'affaires en 2011 a progressé en dépit de la perte invoquée, laquelle n'était que passagère. L'existence d'une menace pesant sur sa compétitivité n'est pas plus établie.
Les motifs économiques ont été par ailleurs appréciés exclusivement au niveau de l'entreprise, alors même que celle-ci appartient au groupe Biolandes. En effet, les dirigeants des sociétés Bioalandes, LIV et GEFA sont pour partie identiques et il existe une permutabilité entre le personnel de ces trois sociétés, ensuite les sociétés LIV et Biloandes disposent de biens immobiliers communs, tandis que les sociétés LIV et GEFA interviennent dans le même secteur d'activité. Or, aucune difficulté économique n'était caractérisée au niveau du groupe dont la situation était florissante ; le même constat doit être fait s'agissant de la prétendue menace sur la compétitivité.
Il n'a été justifié d'aucune recherche de reclassement au sein de la société LIV ni des autres sociétés du groupe Biolandes. Pourtant, dans les trois mois qui ont précédé le licenciement, la société LIV comme la société Biolandes ont procédé à des recrutements sur des postes correspondant au profil du salarié. L'entreprise n'a pas fourni tous les efforts de formation et d'adaptation possibles pour assurer le reclassement de l'intéressé au sein des entreprises du groupe. Celui-ci n'a pas été interrogé sur son éventuel souhait de partir à l'étranger, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-4-1 du code du travail.
Si le non-respect de l'ordre des licenciements n'est pas indemnisable de façon autonome lorsque le licenciement économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse, il convient d'observer que l'entreprise s'est largement affranchie des règles relatives à l'ordre des licenciements, les critères déterminant l'ordre des licenciements devant être mis en oeuvre à l'égard de l'ensemble du personnel de l'entreprise et non pas limités aux seuls salariés de l'établissement concernés par les suppressions d'emploi.
La perte de son emploi a plongé M. X... dans la précarité. La cour réévaluera le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par ailleurs, il a droit à une indemnité de préavis de 3 mois par application des dispositions conventionnelles.
La priorité de réémbauchage a été méconnue puisque deux postes d'assistant commercial ont été pourvus au mois d'octobre 2012, l'un par la société LIV et l'autre par la société Biolandes, et ce sans avoir été antérieurement proposés à M. X... alors même qu'ils étaient compatibles avec sa qualification professionnelle telle que résultant de son expérience professionnelle acquise au sein des sociétés GEFA et LIV.
La somme versée à titre d'indemnité de congés payés ne tient pas compte des congés acquis du 1er au 26 juin 2012.
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur l'existence d'une rupture de fait :
Si l'employeur a l'obligation de fournir le travail convenu, la seule dispense d'activité notifiée au salarié lors de sa convocation à un entretien préalable à un licenciement ne s'analyse pas en un licenciement verbal ou une rupture de fait du contrat de travail. En l'espèce, le salarié soutient que l'entreprise a rompu son contrat en cessant de lui fournir du travail à compter du 24 mai 2012. La cessation de la fourniture de travail à compter de cette date est avérée, mais s'analyse en une dispense d'activité avec maintien de la rémunération pendant la durée de la procédure de licenciement. L'existence d'un licenciement de fait ou d'un licenciement verbal suppose de caractériser un acte ou un comportement de l'employeur manifestant de manière claire et non équivoque sa volonté de mettre un terme définitif au contrat, en dehors de la procédure légale de licenciement. Or, le fait de demander à un salarié de ne plus exécuter sa prestation de travail à compter de l'engagement d'une procédure de licenciement et de le priver, à compter de cette date seulement (soit le 24 mai 2012), de ses moyens de travail (carte de parking, clé d'accès à la société, codes d'accès à l'outil informatique, etc..), ne caractérise pas une telle intention.
Il n'est pas demandé d'indemnité au titre d'une irrégularité de procédure qui serait constituée s'il était acquis que la décision de licenciement avait été prise avant la tenue de l'entretien préalable.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
- Sur le bien-fondé du licenciement prononcé pour motif économique :
Aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. Si la réalité de la suppression ou transformation d'emploi ou de la modification du contrat de travail est examinée au niveau de l'entreprise, les difficultés économiques doivent être appréciées au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée. Lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, une réorganisation ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité.
En l'espèce, la réalité de la modification du contrat de travail ne fait pas débat. La lettre de licenciement fait état, s'agissant de la cause de la modification, de la réorganisation de l'entreprise LIV en raison d'une part, de ses difficultés économiques, et, d'autre part, de la nécessaire " amélioration " de sa compétitivité.
Pour justifier des difficultés économiques alléguées, la société se borne à produire sur le plan comptable le bilan 2011 de la société LIV, lequel fait état d'une perte d'un montant de 365 020 ¿ pour l'exercice 2011 ; le chiffre d'affaires avait cependant augmenté durant cette période. Selon les écritures de l'employeur, la société LIV aurait été " rachetée " par la société GEFA le 10 janvier 2012, sans autre précision ; le salarié produit quant à lui une lettre d'information de la société LIV à ses clients en date du 7 mai 2012 faisant état de sa reprise par le laboratoire GEFA. Il n'est pas établi la persistance à la date de la rupture du contrat des difficultés économiques constatées auparavant.
Par ailleurs, la sauvegarde de la compétitivité ne se confond pas avec la recherche de l'amélioration des résultats.
En outre, il n'est pas contesté et il est établi (cf notamment pièces no 22, 23, 24 bis du salarié) que l'entreprise fait partie d'un groupe comprenant notamment les sociétés GEFA et Biolandes. L'employeur reconnait que la société GEFA exerce dans le même secteur d'activité que la société LIV. En tout état de cause, il résulte notamment des extraits K bis de ces sociétés que l'une et l'autre fabriquent et négocient des produits cosmétiques et diététiques et des compléments alimentaires. Or, il n'est fourni par l'employeur aucun élément relatif à la situation économique ou l'organisation de cette société dont le secteur d'activité est identique, n'étant ni allégué ni encore moins justifié que le secteur d'activité connaissait à l'époque des difficultés économiques ou que sa réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité. En réalité, il résulte des termes de la lettre de licenciement que les difficultés économiques et la compétitivité ont été appréciées exclusivement au niveau de l'entreprise LIV.
Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- Sur les conséquences de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement :
Faute de démonstration d'un préjudice plus ample que celui pris en compte par les premiers juges, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée sera purement et simplement confirmé.
S'agissant de la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, nouvelle en cause d'appel, en l'absence de motif économique de licenciement, le contrat de sécurisation professionnelle n'a pas de cause et l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés y afférents, sauf à tenir compte des sommes éventuellement versées au salarié à ce titre. Alors que la société ne se prévaut d'aucun versement au salarié à ce titre, il y aura donc lieu d'allouer à M. X... les sommes réclamées, qui ont été exactement calculées en l'état des pièces soumises à l'appréciation de la cour, sauf à ramener à 854, 36 ¿ bruts l'incidence de congés payés. Par ailleurs, en l'absence de motif économique, le contrat de sécurisation professionnelle devenant sans cause, l'employeur est tenu de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69- 1o du code du travail dans sa version en vigueur au moment de la rupture du contrat de travail. Le jugement sera par conséquent infirmé, l'employeur étant condamné au remboursement des indemnités de chômage dans la limite de 5 mois d'indemnités mais sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69- 1o du code du travail.
- Sur la demande en paiement d'un solde d'indemnité compensatrice de congés payés :
S'agissant de la demande en paiement d'un solde d'indemnité compensatrice de congés payés, comme exactement décidé par les premiers juges, l'employeur justifie de ce que l'indemnité d'un montant de 2 391, 78 ¿, versée le 26 juin 2012, comprenait l'indemnité de congés payés afférente au mois de juin 2012, soit 244, 10 ¿. Le jugement, qui a débouté le salarié de sa demande, sera confirmé de ce chef.
- Sur le non-respect de la priorité de réembauche :
Selon l'article L. 1233-45 du code du travail, il incombe à l'employeur d'informer le salarié licencié pour motif économique qui a manifesté le désir d'user de la priorité de réembauche, de tous les postes disponibles et compatibles avec sa qualification. La priorité de réembauche ne peut s'exercer qu'à l'égard de l'entreprise qui a licencié le salarié.
Il importe donc peu que la société Biolandes ait procédé à une embauche, le droit à priorité de M. X... ne pouvant s'exercer à l'égard de cette société qui n'était pas son employeur et n'a pas procédé à son licenciement.
S'agissant du poste disponible au sein de la société LIV et pourvu par l'embauche de Mme Y... le 2 octobre 2012, il s'agissait d'un poste d'assistant commercial. Or, M. X... était titulaire à l'époque d'un master professionnel en biochimie de l'alimentation et de la santé. S'il avait bien exercé du 18 septembre 2006 au 22 janvier 2007 en qualité d'ingénieur technico-commercial pour le compte de la société GEFA, son contrat avait été rompu en cours de période d'essai pour " inadaptation globale et récurrente au poste ". Il ne justifie d'aucune autre expérience en matière commerciale. Il convient donc de constater que le poste dont il s'agit n'était pas compatible avec sa qualification et par conséquent que l'employeur n'était pas tenu de le lui proposer. Le jugement sera encore confirmé de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,
Infirme le jugement en ses seules dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage ;
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Ordonne le remboursement par la société Laboratoire d'innovation végétale à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. Julien X... à compter du jour de son licenciement, sous déduction de la contribution prévue à l'article L. 1233-69- 1o du code du travail dans sa version en vigueur au moment de la rupture du contrat de travail et dans la limite de cinq mois d'indemnités de chômage ;
Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions ;
Et y ajoutant,
Condamne la société Laboratoire d'innovation végétale au paiement à M. Julien X... de la somme de 8 543, 67 ¿ bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 854, 36 ¿ bruts d'incidence de congés payés ;
Condamne la société Laboratoire d'innovation végétale au paiement à M. Julien X... de la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la déboute de sa demande formée sur le même fondement ;
Condamne la société Laboratoire d'innovation végétale au paiement des dépens d'appel.