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12/01/2016 | FRANCE | N°13/01122

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 12 janvier 2016, 13/01122


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01122.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 28 Mars 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00057

ARRÊT DU 12 Janvier 2016

APPELANT :
Monsieur Tony X...... DONNEMAIN 28200 CHATEAUDUN
représenté par Maître Isabelle COUZINET, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMES :
La Société CHASTAGNER DELAIZE INDUSTRIELLE-venant aux droits de la SOCIETE FERTOISE 3M SA ZI du Joncher

ay Route de Mamers 72400 LA FERTE BERNARD
Maître Y...- commissaire à l'exécution du plan... 72000 L...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01122.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 28 Mars 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00057

ARRÊT DU 12 Janvier 2016

APPELANT :
Monsieur Tony X...... DONNEMAIN 28200 CHATEAUDUN
représenté par Maître Isabelle COUZINET, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMES :
La Société CHASTAGNER DELAIZE INDUSTRIELLE-venant aux droits de la SOCIETE FERTOISE 3M SA ZI du Joncheray Route de Mamers 72400 LA FERTE BERNARD
Maître Y...- commissaire à l'exécution du plan... 72000 LE MANS
représentés par Maître Cécile FROGER OUARTI de la SCP DE LUCA-PERICAT et FROGER-OUARTI, avocats au barreau du MANS

L'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par L'UNEDIC CGEA DE RENNES immeuble Le Magister 4 cours Raphaël Binet-CS 96925 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître Bertrand CREN, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Novembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 12 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCÉDURE,
La Société Fertoise Moules modèles Maquettes (SF3M) exerce une activité de conception, réalisation et études de modèles, maquettes, moules en bois, métal, résine et matériaux divers dans un site de production à La Ferté Bernard (72). Elle emploie un effectif de plus de 10 salariés. Elle fait partie du groupe Chastagner Delaize constitué par d'autres filiales :- la Société Mécanique des Batignolles (SMB),- la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI)
M. Tony X... a été recruté le 10 avril 1987 par la Société SF3M dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet. En dernier lieu, il occupait le poste de technicien d'atelier niveau III échelon 3 coefficient 240 moyennant un salaire brut de 2240. 41 euros par mois. La relation de travail est régie par la convention collective de la métallurgie de la Sarthe. Par courrier daté du 28 novembre 2011 et remis en mains propres deux jours plus tôt le 26 novembre, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique fixé au 6 décembre 2011. Le jour de l'entretien, il a reçu la documentation relative au Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP).
Le 19 décembre 2011, le salarié a reçu notification de son licenciement suivant un courrier daté du 15 décembre 2011 libellé comme suit : " Au cours de l'entretien du 6 décembre 2011, nous vous avons exposé les motifs économiques du licenciement envisagé. SF3M fait face depuis la fin d'année 2009 à d'importantes difficultés liées à un ralentissement majeur de ses activités dans les domaines de l'usinage/ outillage de matériaux tendres, la conception et la réalisation de modèles de fonderie. Cette dernière activité au sein de laquelle vous êtes employé a vu sa part d'activité passée de 63 % du chiffre d'affaires SF3M en 2008 à 55 % à ce jour, mettant ainsi en évidence la perte d'activité dudit domaine. Par ailleurs, compte tenu du niveau actuel d'activité et du niveau de facturation, les pertes d'exploitation de SF 3M qui s'élevaient à 290 000 euros à fin octobre 2011 devraient s'accentuer pour atteindre 350 000 euros au terme de l'année 2011. La baisse du niveau d'activité de ce secteur nécessitant par ailleurs la mise en place du chômage partiel, associée à des prix de vente toujours plus faibles des prestations de conception et réalisation de modèles de fonderie, imposent une réorganisation de l'entreprise et contraignent la société à supprimer deux postes dont celui de technicien d'atelier que vous occupez. Compte tenu de la suppression de postes pour motif économique et de l'application des critères d'ordre de licenciement, nous vous notifions votre licenciement pour motif économique. (..) ".

M. X... ayant adhéré le 13 septembre 2011 au dispositif du CSP, le contrat de travail a été rompu à l'expiration du délai de réflexion, le 27 décembre 2011.
Par requête reçue le 10 février 2012, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans pour contester le motif économique de son licenciement, obtenir le paiement de l'indemnité de préavis, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour non-respect des règles relatives aux critères d'ordre des licenciements et pour non-respect de la procédure.
Le 2 janvier 2013, la société SF3M a fait l'objet d'une absorption par la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI), société du groupe du même nom.
Par jugement en date du 28 mars 2013, le conseil de prud'hommes du Mans a :
- dit que le licenciement pour motif économique de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse,- débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes,- rejeté la demande de la société Chastagner Delaize Industrielle venant aux droits de la société SF3M au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné M. X... aux dépens.
Les parties ont reçu notification de ce jugement le 4 avril 2013. M. X... en a régulièrement relevé appel général par courrier de son conseil posté le 25 avril 2013.
Par jugement du tribunal de commerce du Mans en date du 1er juillet 2014, la société CDI, venant aux droits de la société SF3M, a fait l'objet d'une mesure de redressement judiciaire. Le 7 juillet 2015, le tribunal de commerce a homologué le plan de redressement de la société CDI et a désigné la SELARL Sarthe Mandataire (Me Y...), en qualité de commissaire à l'exécution du plan. Les fonctions de la SELARL Z... A... B... en qualité de mandataire au redressement judiciaire de la société CDI ont pris fin à la suite de ce jugement.

PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES,

Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 3 novembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles M. X... demande à la cour de :- dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,- condamner la société Chastagner Delaize Industrielle venant aux droits de la société SF3M à lui verser les sommes suivantes :-4 480. 82 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 448. 08 euros de congés payés y afférents,-80 655 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et subsidiairement au titre des dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives aux critères d'ordre de licenciement,- subsidiairement, 2 940. 41 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la la procédure de licenciement,-2 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- ordonner la remise sous astreinte de 75 euros par jour de retard des bulletins de salaire et un certificat de travail rectifiés,- dire que les sommes allouées produiront des intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande,- dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations et en cas d'exécution par voie extra-judiciaire, les sommes retenues par l'huissier en application des dispositions de l'article 10 du décret du 30 mars 2011 modifié devront être supportées par la partie adverse,- condamner la société CDI aux dépens.

Il fait valoir en substance que :
- sur l'absence d'information du motif économique lors de l'adhésion au CSP :- lorsque le salarié, dont le licenciement économique est envisagé, accepte la Convention de Reclassement Personnalisée (CRP) devenue Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP) depuis le 1er septembre 2011, le contrat de travail est considéré comme rompu d'un commun accord des parties ;- le salarié doit être informé du motif économique de son licenciement dans un document écrit remis ou adressé au plus tard lors de son acceptation du dispositif de la CRP ou de la CSP, sinon la rupture est considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- en l'espèce, il a adhéré au CSP par courrier reçu le 15 décembre 2011 par la société SF3M avant d'avoir eu connaissance des motifs économiques du licenciement contenus dans la lettre de licenciement datée du 15 décembre et notifiée le 16 décembre 2011 ;- à défaut d'information du salarié sur le motif économique au plus tard au moment de son acceptation, la rupture constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- sur l'absence de motivation de la lettre de motivation :- la lettre de licenciement du 15 décembre 2011 fait référence aux difficultés économiques de la société SF3M mais omet d'analyser la situation des sociétés du groupe Chastagner auquel l'employeur appartient ;- cette lettre n'est pas suffisamment motivée, les difficultés financières devant s'apprécier au niveau du groupe Chastagner, important groupe industriel de services technologiques avec 7 filiales réparties en france et en Roumanie ;
- subsidiairement, sur le fond du licenciement :- la lettre de licenciement fait mention d'un fort ralentissement des activités de la société SF3M depuis fin 2009 alors que le chiffre d'affaires a connu une très nette progression entre 2009 et 2010 ;- l'employeur ne justifie pas des conséquences et des mesures de réorganisation au travers de la suppression de son poste ;
- subsidiairement, sur le manquement à l'obligation de reclassement :- l'employeur ne rapporte pas la preuve des recherches de reclassement de son salarié en interne et au sein du groupe Chastagner, à l'exception de deux demandes stéréotypées adressées après la convocation à l'entretien préalable ;- les registres du personnel n'ont pas été produits ;
- sur les demandes indemnitaires :- l'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à deux mois de salaire, s'élève à la somme de 4 480. 82 euros outre les congés payés de 448. 08 euros ;- il est fondé à solliciter des dommages-intérêts en lien avec la rupture de son contrat de travail faute d'avoir pu retrouver un emploi stable depuis le licenciement ;
- subsidiairement, sur le non-respect des règles des critères d'ordre :- l'employeur a privilégié les critères d'ordre de licenciement subjectifs au détriment de l'ancienneté (22 ans) et de l'âge du salarié (50 ans) et de son expérience professionnelle ;- les éléments objectifs sur les qualités professionnelles n'ont pas été communiqués ;- le contrat de travail n'aurait pas dû être rompu au regard de l'âge et de l'ancienneté de M. X... qui subit un préjudice important,- subsidiairement, sur le non-respect de la procédure de licenciement,- le courrier de convocation à l'entretien préalable est daté du 28 novembre 2011 alors que ce dernier a été remis au salarié en mains propres le 26 novembre, soit deux jours plus tôt ;

- la remise de ce courrier n'ayant aucune date certaine, la procédure est irrégulière à défaut de pouvoir vérifier que le délai de cinq jours avant l'entretien du 6 décembre 2011 a bien été respecté.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 28 octobre 2015 régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI) venant aux droits de la société SF3M et Me Y..., commissaire à l'exécution du plan de la société CDI, demandent à la cour de :- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,- condamner le salarié au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La société CDI soutient essentiellement que :
- sur l'information du salarié sur le motif économique lors de l'adhésion au CSP :- dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle, le contrat de travail de M. X... n'a été rompu qu'à l'expiration du délai de réflexion de 21 jours, soit le 27 décembre 2011 ;- le contrat de travail étant toujours en cours lorsque le salarié a reçu la lettre de licenciement dûment motivée le 19 décembre 2011, l'intéressé ne peut pas se plaindre d'un défaut d'information sur le motif économique du licenciement ;
- sur la motivation de la lettre de licenciement :- les délégués du personnel ont été informés, dans une notice d'information transmise le 28 novembre 2011, des graves difficultés économiques et financières rencontrées par la société et par les autres sociétés du groupe Chastagner évoluant dans le secteur d'activités de la métallurgie et de leurs conséquences sur l'emploi avec la suppression de deux postes ;- les résultats comptables de la société étaient déficitaires en 2009 (-394 772 euros), légèrement bénéficiaires en 2010 (+ 16 856 euros) avant de chuter en 2011 (-365928 euros) tandis que le groupe Chastagner enregistrait des pertes successives depuis trois années successives (-690 886 euros en 2011).- les autres sociétés du groupe ont bénéficié d'une procédure collective, soit un redressement judiciaire avec un PSE pour la socité CDI le 1er juillet 2014 soit une liquidation judiciaire pour la société SMB et le société MOXCEN le 28 janvier 2014 ;- le salarié parfaitement conscient des difficultés de l'entreprise et du groupe, a préféré provoquer la rupture de son contrat avant même de recevoir la lettre de licenciement datée du 15 décembre 2011 ;
- sur le reclassement :- le reclassement de M. X... en interne s'est révélé impossible au regard de l'effectif et de la situation financière ;- les recherches au sein du groupe étaient infructueuses en décembre 2011 faute de poste disponible ;
- sur les critères d'ordre de licenciement :- les critères d'ordre de licenciement régulièrement discutés devant les délégués du personnel, ont privilégié les qualités professionnelles et notamment de la polyvalence des salariés ;- M. X... n'est pas fondé à invoquer le seul critère de l'ancienneté dans l'entreprise figurant parmi les critères légaux ;
- sur les demandes indemnitaires :- la demande d'indemnité de préavis doit être rejetée en cas de rupture du contrat de travail d'un commun accord dans le cadre d'un CSP ;- la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera également rejetée ;- les règles des critères d'ordre ayant été respectées, la demande à ce titre sera rejetée ;

- M. X... ne peut pas demander des dommages-intérêts pour non respect de la procédure alors qu'il est à l'origine de la mention de la date erronée lors de la remise de la convocation à entretien préalable.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 2 novembre 2015 régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des salariés intervenant par l'UNEDIC-CGEA de Rennes demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,- subsidiairement, dire que les éventuelles créances fixées au passif de la société Chastagner Delaize Industrielle ne seront garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code.
L'AGS intervenant par le CGEA expose que :
- le salarié est défaillant à rapporter la preuve qu'il a adhéré au CSP antérieurement à la réception de la lettre de licenciement en ce qu'il ne produit que la notice d'information et non pas le bulletin d'acceptation au CSP,- la lettre de licenciement du 15 décembre 2011 ne fait pas mention de la réception de la réception du bulletin d'adhésion-sur le fond, il suffit que la lettre de licenciement vise le motif économique de la réorganisation de l'entreprise pour satisfaire à l'obligation de la motivation, sans évoquer la situation du Groupe.
Le CGEA s'en rapporte aux explications de l'employeur sur le caractère sérieux du motif économique et sur les critères d'ordre de licenciement. Subsidiairement, il demande une diminution du montant des dommages-intérêts alloués au salarié au regard de leur caractère excessif.

MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur le licenciement pour motif économique,
L'article L 1233-16 du code du travail prévoit que la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur.
Lorsqu'une convention de sécurisation professionnelle est proposée au salarié, l'employeur doit lui adresser une lettre énonçant le motif économique de la rupture avant que le salarié n'accepte le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) et n'acquiesce en toute connaissance de cause à la rupture de son contrat de travail.
L'employeur doit énoncer le motif économique de la rupture soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.
En l'espèce, M. X... a accepté, le 13 décembre 2011, d'adhérer au dispositif de sécurisation professionnelle. Son bulletin d'adhésion a été reçu le 15 décembre 2011 par l'employeur. La lettre de licenciement datée du 15 décembre 2011 énonçant les motifs économiques du licenciement a été postée le lendemain et reçue le 19 septembre par le salarié. L'employeur ne justifie pas de l'envoi préalable à M. X... d'un document écrit exposant les motifs économiques du licenciement. Il n'est pas davantage démontré que le salarié ait été destinataire de la notice d'information, s'agissant d'un document confidentiel, remise aux délégués du personnel le 28 novembre 2011 dans le cadre de la consultation sur le projet de licenciement économique.
Il résulte de ces éléments que M. X... n'a pas reçu l'information nécessaire sur les motifs économiques de son licenciement avant son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. A défaut d'avoir reçu une telle information au plus tard au moment de l'acceptation de la CRP, la rupture de son contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement
Aux termes de l'article L 1235-3 du code du travail, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, il est alloué au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
A la date du licenciement, M. X... percevait une rémunération mensuelle brute moyenne de 2 240. 41 euros par mois, avait 51 ans et justifiait d'une ancienneté de 24 ans au sein de l'entreprise. Il n'est pas contesté que le salarié, malgré ses recherches actives, n'a pas retrouvé d'emploi stable et a connu des périodes de chômage. Il a trouvé plusieurs contrats à durée déterminée, et en dernier lieu en tant qu'agent technique territorial, jusqu'en mai 2017, avec un salaire de 1 523 euros brut par mois.
Compte tenu des circonstances de la rupture, de l'âge, de l'ancienneté du salarié et de sa capacité à retrouver un emploi stable au regard de sa formation et de son expérience professionnelle, il convient d'évaluer l'indemnité à la somme de 45 000 ¿ au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement doit être infirmé de ce chef.
Aux termes de l'article L 1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de salaire pour un salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté. Lorsque le licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre au paiement intégral de l'indemnité de préavis à laquelle il aurait eu droit s'il n'avait pas adhéré au CSP. M. X... est donc bien fondé à obtenir une somme de 4 480. 82 euros au titre de cette indemnité outre les congés payés y afférent de 448. 08 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point.
Le jugement d'ouverture d'une procédure collective suspendant le cours des intérêts légaux jusqu'au jugement arrêtant le plan en vertu de l'article L622-28 du code du commerce, les sommes fixées au profit du salarié porteront intérêt au taux légal à compter du 8 mars 2012 pour les créances salariales, avec une suspension du cours des intérêts entre le 1er juillet 2014 et le 7 juillet 2015, et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires.

Sur les autres demandes,
Les conditions d'application de l'article L 1235-4 du code du travail étant réunies, il convient de fixer au passif de la société CDI la créance de Pôle Emploi au titre du remboursement par l'employeur des indemnités de chômage payées au salarié du jour de son licenciement et ce à concurrence de trois mois.
Aux termes de l'article R 1234-9 du code du travail, l'employeur doit délivrer au salarié au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications lui permettant d'exercer son droit aux prestations sociales. Il convient en conséquence d'ordonner à l'intimée de délivrer à M. X... les

bulletins de salaires rectificatifs conformes aux dispositions du présent arrêt et ce au plus tard dans les deux mois de la notification du présent arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard pendant 40 jours délai au terme duquel il sera à nouveau fait droit.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais non compris dans les dépens. La somme de 2 500 euros sera mise à la charge de la société CDI venant aux droits de la société SF3M au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile. L'employeur, qui sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant, publiquement et contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :- dit que le licenciement pour motif économique de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse,- débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité de préavis et l'a condamné aux dépens.
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
DIT que le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
FIXE au passif de la société Chastagner Delaize Industrielle venant aux droits de la société SF3M les créances de M. X... à :-45 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-4 480. 82 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 448. 08 euros de congés payés y afférents,
CONFIRME le surplus des dispositions du jugement.
DIT que les sommes fixées porteront intérêt au taux légal à compter du 8 mars 2012 pour les créances salariales, avec une suspension du cours des intérêts entre le 1er juillet 2014 et le 7 juillet 2015, et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires.
ORDONNE à la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI), venant aux droits de la société SF3M, de délivrer à M. X... les bulletins de salaires rectificatifs conformes aux dispositions du présent arrêt et ce au plus tard dans les deux mois de la notification du présent arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard pendant 40 jours.
FIXE au passif de la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI) la créance de POLE EMPLOI au titre des indemnités de chômage versées au salarié au jour de son licenciement au jour de l'arrêt prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnités.
DIT que le présent arrêt est opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des salariés intervenant par l'UNEDIC-CGEA de Rennes et rappelle que les créances fixées au passif de la société Chastagner Delaize Industrielle ne seront garanties par l'AGS que dans les limites prévues par l'article L3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code

CONDAMNE la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI) à verser à M. X... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE la société Chastagner Delaize Industrielle (CDI) aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01122
Date de la décision : 12/01/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-01-12;13.01122 ?
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