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05/01/2016 | FRANCE | N°13/02304

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 05 janvier 2016, 13/02304


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02304.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 14 Août 2013, enregistrée sous le no 12/ 01026
ARRÊT DU 05 Janvier 2016
APPELANTE :
Madame Arlette X...... 49540 AUBIGNE

comparante-assistée de Maître Pascal LAURENT de la SELARL AVOCONSEIL, avocats au barreau d'ANGERS-No du dossier 110035
INTIMEES :
SAS DS Smith PACKAGING DISPLAY et SERVICES143 avenue Charles de Gaulle9

2521 NEUILLY SUR SEINE

représentée par Maître Sophie UETTWILLER de la SCP UGGC et associés, a...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02304.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 14 Août 2013, enregistrée sous le no 12/ 01026
ARRÊT DU 05 Janvier 2016
APPELANTE :
Madame Arlette X...... 49540 AUBIGNE

comparante-assistée de Maître Pascal LAURENT de la SELARL AVOCONSEIL, avocats au barreau d'ANGERS-No du dossier 110035
INTIMEES :
SAS DS Smith PACKAGING DISPLAY et SERVICES143 avenue Charles de Gaulle92521 NEUILLY SUR SEINE

représentée par Maître Sophie UETTWILLER de la SCP UGGC et associés, avocats au barreau de PARIS
SAS DS Smith PACKAGING MEHUN Route de Marmagne 18500 MEHUN SUR YEVRE

représentée par Maître Marie-Aimée PIRIOU, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Octobre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 05 Janvier 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant lettre d'embauche du 7 mai 1986 à effet au 20 mai suivant, Mme Arlette X... a été engagée en qualité de comptable par la société Anjou Emballages, ayant son siège social à Thouarcé (49), qui avait pour activité la fabrication des cartonnages et des découpes pour les équipementiers automobiles, les spécialistes de la climatisation-chauffage et l'agro-alimentaire.
A compter du 1er octobre 1987, son contrat de travail a été transféré à la société Financière de Gestion d'Emballage et Conditionnement (ci-après : la société SOFIGEC) ayant son siège social à Thouarcé. Ce transfert a donné lieu à la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée du 30 mars 1988 aux termes duquel la salariée était désignée comme responsable du service comptabilité.
Par avenant du 22 décembre 1993 à effet au 1er janvier 1994, une voiture de fonction lui a été attribuée dans le cadre de sa " mission de " Responsable Comptable et Financier des Stés Anjou et la CIM Emballages ".
Par avenant du 12 juin 1997 établi sur papier à entête de la société Anjou Emballages, mentionnant que Mme Arlette X... occupait le poste de directeur comptable et financier, il a été convenu qu'à compter de " l'exercice 1997 ", cette dernière percevrait, " en plus de sa rémunération contractuelle, un additif représentant 1 % du résultat avant impôts de l'exercice de la société Anjou Emballages ".
Le 23 décembre 1998, la société CIM Emballages et Mme Arlette X... ont conclu un contrat de travail à durée indéterminée aux termes duquel il a été convenu qu'à compter du 1er janvier 1999, " le poste de directeur comptable et financier occupé par Mme X... à la Sté Anjou Emballages est prolongé à la Sté CIM SA. pour les mêmes missions et responsabilités sous les conditions suivantes : le contrat de travail entre la Sté CIM et Mme X... peut être aménagé, modifié ou résilié sans remettre en cause son contrat de travail avec la Sté Anjou Emballages. RÉMUNÉRATION : 6. 500 francs/ forfaitaire + Intéressement sur résultats avant impôts et participation 1 %. Frais déplacement : remboursés sur présentation des frais réels ou forfaitaires suivant le barème légal. Le présent contrat bénéficiant de tous les avantages accordés au personnel de la Sté CIM et est rattaché à la convention des Papiers et Cartons pour tous les autres points ou litiges s'y rapportant ".

Par lettre du 5 septembre 2000, l'employeur a fait connaître à Mme Arlette X... qu'à compter du 1er janvier 2002, son intéressement de 1 % sur les résultats avant impôts et participation sur les sociétés Anjou Emballages et CIM Emballages serait porté à 2 %.
Par avenant conclu le 14 février 2006 entre la société Anjou Emballages et Mme Arlette X..., il a été convenu qu'à compter du 1er janvier 2006, en contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, la salariée percevrait une rémunération brute mensuelle de 6 269, 69 ¿ bruts intégrant la prime de fin d'année et la prime de vacances auparavant versées en juin et en décembre, ainsi que la prime exceptionnelle auparavant versée en décembre.
Il était également convenu qu'à compter de l'exercice 2006, d'une part, la salariée pourrait prétendre " à une réévaluation annuelle de son salaire en fonction du système actuel MERCER " étant précisé que cette réévaluation ne serait pas acquise de plein droit chaque année mais serait fonction de divers critères, d'autre part, elle ne bénéficierait plus de l'augmentation annuelle générale des salaires en vigueur dans la société.
De même, par avenant conclu le 21 février 2006 entre la société CIM et Mme Arlette X..., il a été convenu qu'à compter du 1er janvier 2006, en contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, la salariée percevrait une rémunération brute mensuelle de 2 396 ¿ bruts intégrant la prime de fin d'année et la prime de vacances auparavant versées en juin et en décembre, ainsi que la prime exceptionnelle auparavant versée en décembre. Il était également convenu qu'à compter de l'exercice 2006, d'une part, la salariée pourrait prétendre " à une réévaluation annuelle de son salaire en fonction du système actuel MERCER " étant précisé que cette réévaluation ne serait pas acquise de plein droit chaque année mais serait fonction de divers critères, d'autre part, elle ne bénéficierait plus de l'augmentation annuelle générale des salaires en vigueur dans la société.

Les deux contrats de travail de Mme Arlette X... étaient soumis à la convention collective des Papiers et Cartons.
A compter du 1er juin 2011, la société Anjou Emballages, la société Norembal située à Vervins (fabrication de produits de publicité sur le lieu de vente (PLV) pour le secteur de l'industrie automobile et de l'ameublement) et la société Cartonneries du Jura située à Marnoz (fabrication de produits de publicité sur le lieu de vente avec impression de qualité pour les secteurs de la cosmétologie, pharmacie, boissons) ont été fusionnées pour former la SAS SCA Display et Services.
La société CIM Emballages restait, quant à elle, autonome.
Par courrier de son conseil du 13 mai 2011, Mme Arlette X... a fait connaître à son employeur qu'au regard de la fusion qui était envisagée elle était amenée à l'interroger sur l'avenir de son « bonus » et sur sa position quant au versement de ce « bonus » qu'elle ne percevait plus alors qu'il lui était auparavant versé trimestriellement.
Par lettre du 30 mai 2011, le directeur des ressources humaines de la société SCA Packaging France lui a répondu que :- en raison de la fusion-absorption à intervenir le 1er juin 2011, le calcul de son bonus pour l'année 2011 ne serait pas possible dans la mesure où il correspondait à 2 % du résultat avant impôts de l'exercice de la société Anjou Emballages ;- cette réorganisation juridique la conduisait à envisager une modification de sa rémunération sans qu'il soit question de la priver de toute rémunération variable ;- compte tenu de la disparition inévitable du bonus sur les résultats en raison du mode de calcul, elle envisageait, d'une part, de rendre la salariée éligible au « management bonus » du groupe SCA, d'autre part, d'augmenter rétroactivement sa rémunération à compter du 1er janvier 2011.

Par courrier recommandé du 11 octobre 2011 établi à l'entête de la SAS SCA Display et Services, le directeur des ressources humaines de la SCA Packaging France a fait connaître à Mme Arlette X... que, pour compenser la disparition de son bonus, l'employeur lui proposait pour l'année 2011 un bonus d'un montant de 13 273 ¿ correspondant à la moyenne des bonus versés au cours des cinq années précédentes (2006 à 2010). Il précisait que, s'agissant d'une modification du contrat de travail qui ne lui était pas inhérente, l'employeur appliquait la procédure de modification du contrat de travail pour motif économique avec délai de réflexion d'un mois, l'absence de réponse dans ce délai valant acceptation des nouvelles conditions.
Par courrier recommandé du 27 octobre 2011, Mme Arlette X... a répondu qu'elle refusait cette proposition consistant à abandonner la part variable de sa rémunération et à arrêter pour 2011 un bonus forfaitaire. Elle ajoutait que la lecture du plan d'action " Cash Client " lui avait permis de constater que ses fonctions seraient totalement modifiées puisque, de " directrice du service Finance et Comptabilité ", elle deviendrait " Crédit manager ".
En réponse, par lettre du 7 décembre 2011, l'employeur a fait connaître à Mme Arlette X... que, s'agissant de son bonus, il prenait en considération ses remarques pour les années ultérieures à 2011 mais que, pour cette année-là, il lui opposait de convenir d'un bonus de 13 273 ¿ et attendait son accord sur ce point. Il ajoutait qu'il se rapprocherait d'elle au début de l'année 2012 pour convenir des modalités de rémunération variable à partir de cette année-là, en précisant que la réorganisation juridique interne intervenue ne permettrait plus de calculer sa rémunération variable comme stipulé antérieurement. Il précisait enfin qu'il n'avait pas évoqué l'évolution de ses fonctions dans la mesure où il en était toujours au stade de l'étude des conditions d'une évolution, indispensable compte tenu du contexte économique et concurrentiel, de l'organisation Finance et Gestion en France. Il concluait qu'il lui proposerait à bref délai les conditions d'une modification plus pérenne de son contrat de travail devant prendre effet à compter du début de l'année 2012.

Par courrier du 16 décembre 2011, le conseil de Mme Arlette X... a confirmé à l'employeur que cette dernière refusait la modification de son contrat de travail aboutissant à la suppression de la part variable de sa rémunération. Il faisait observer que, si la modification du contrat de travail ne consistait pas en la suppression de la part variable, il incombait à l'employeur de lui soumettre, par avenant, une nouvelle clause déterminant les modalités de celle rémunération. Il faisait sommation à l'employeur de faire connaître à la salariée sa position quant à la modification de son contrat de travail et à la place qu'elle occuperait à l'avenir au sein de l'entreprise. Il ajoutait qu'en l'état actuel des choses, et en l'absence d'autre réponse de la part de l'employeur, la salariée poursuivrait l'exécution de son contrat de travail en percevant ce que ce dernier avait estimé juste de lui reverser au titre de sa part variable pour 2011.
Par courrier électronique du 21 décembre 2011, l'employeur a autorisé Mme Arlette X... à se verser la somme de 13 273 ¿ bruts au titre de sa part variable pour 2011.
Par courrier du 17 juillet 2012, la SCA Display et Services a convoqué Mme Arlette X... à une entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 27 juillet suivant.
La salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie.
Par courrier posté le 2 août 2012, elle a saisi le conseil de prud'hommes en dirigeant son action contre la société SCA Display et Services venant aux droits de la société Anjou Emballages et contre la société Cartonnages Industriels Mehunois (CIM Emballages) afin de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail contre la société SCA Display et Services pour manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles constitutives, si ce n'est d'une déloyauté dans l'exécution du contrat, d'un harcèlement moral. Elle formait une demande de rappel de salaire au titre de la part variable de sa rémunération, d'une part, contre la société SCA Display et Services, d'autre part, contre la société Cartonnages Industriels Mehunois.

Par courrier recommandé du 14 septembre 2012, la société SCA Display et Services a notifié à Mme Arlette X... son licenciement pour motif économique dans les termes suivants : « Madame, Vous ne vous êtes pas présentée à l'entretien préalable fixé le 27 août 2012 alors que votre arrêt maladie prévoyait des sorties libres et que l'entretien avait déjà été reporté du 26 juillet au 27 août. Dans ces conditions, nous vous indiquons que nous sommes contraints de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour motif économique pour les motifs suivants : Suppression du poste de Directrice administrative et Financière, que vous occupiez au sein de la société Anjou Emballages. Cette suppression de poste est consécutive à la fusion juridique des sites industriels de la division Display et Services en une seule entité, rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de ce secteur d'activité du groupe. Vous aviez par ailleurs refusé les modifications proposées de vos conditions de rémunération variable, dont l'ancien mode de calcul était rendu impossible en l'absence de comptes sociaux à partir de 2011 sur le site de Thouarcé où vous exercez vos responsabilités.

La fusion, effective en juin 2011, fait suite à la réorganisation de l'activité Display et Services en France, rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de ce secteur, gravement fragilisé par la délocalisation des clients industriels, la crise financière et une augmentation des prix de revient qui ne peuvent pas être répercutés au client sous peine de continuer à perdre des marchés, compte tenu de la forte pression sur les prix maintenus par la concurrence. Pour enrayer la dégradation constante de ses résultats et assurer sa compétitivité en maintenant une capacité d'investissement et de modernisation, la division Display et Services a été contrainte de se réorganiser et d'adapter sa capacité de production, en réduisant le nombre des sites et en fusionnant les sociétés juridiquement distinctes qui exploitaient chaque site au profit d'une entité unique, la société SCA Display et Services SAS. Nous vous avions indiqué, en décembre 2011 que l'évolution de l'organisation Finance et Gestion en France n'était pas suffisamment aboutie pour nous permettre de vous fixer sur l'évolution de vos fonctions, étant relevé que depuis la fusion vous n'exercez plus les responsabilités et les missions qui ressortaient du poste de Directrice Administrative et Financière, en particulier l'établissement des comptes de résultat et bilan, d'une société qui est devenue un simple établissement. Cette fusion ayant aussi rendu impossible le calcul de votre rémunération variable assise sur les résultats nets de l'exercice de la société Anjou Emballages, devenue un simple établissement de la Société SCA Display et Services SAS, nous vous avions proposé de nouvelles modalités de calcul pour le salaire variable, que vous avez formellement refusées par lettre du 27 octobre 2011 en nous interrogeant sur les modifications envisagées de vos fonctions. Depuis juillet 2012, l'activité Emballage de SCA a été cédée à DS Smith , Groupe dont la dimension apportera un appui fort aux activités Display et Services pour répondre à la forte pression sur les prix et permettre la mise en oeuvre de synergies commerciales et le financement des investissements indispensables au maintien de la compétitivité dans ce secteur très concurrentiel. Cette cession est sans impact sur la réalité de la suppression du poste de Directrice Administrative et financière dont vous êtes la seule titulaire de telle sorte qu'il n'y a pas lieu à application des critères d'ordre. Le différé de votre licenciement ne résulte que de notre espérance de pouvoir vous proposer dans la perspective de la cession du groupe, un poste alternatif comparable à vos anciennes fonctions, ce qui n'a malheureusement pas été possible. Par lettre RAR du 27 juillet 2012, nous vous avons transmis une proposition de reclassement au poste de contrôleur de gestion au coefficient 410, statut cadre, pour une rémunération brute mensuelle de 3500 euros, et un questionnaire de mobilité relative au reclassement à l'étranger. Par lettre RAR du 3 juillet 2012, vous avez décliné le poste de reclassement proposé en nous indiquant que vous n'envisagiez pas de reclassement à l'étranger. Les recherches entreprises n'ont pas permis d'identifier d'autres possibilités de reclassement dans un poste en France qui soit compatible avec vos qualifications, ce qui rend inévitable votre licenciement pour motif économique.... ».

Par courrier du 14 septembre 2012, la société CIM Emballages s'est étonnée auprès de Mme Arlette X... de ce qu'elle avait opéré sur sa paie du mois de juillet 2012 un versement d'un montant de 6 000 ¿ à titre d'" acompte sur variable ", non autorisé par la hiérarchie qui n'en avait même pas été informée, et non comptabilisé sur le compte " normal " de bilan 425, mais sur le compte 421 " qui ne fait pas ressortir le montant de l'acompte après paiement ". Elle sollicitait des explications en faisant observer que cet " acompte " était d'autant plus incompréhensible qu'en 2011, la salariée avait perçu la somme de 3 500 ¿ pour toute l'année.
Par lettre recommandée du 24 septembre 2012, le conseil de Mme Arlette X... a répondu à la société CIM Emballages que la somme en cause était due à la salariée en vertu de son contrat de travail, précisant que sa part variable devait être assise sur les résultats de la société sans déduction des charges patronales et que c'est sur ce fondement qu'elle avait saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de rappel de salaire au titre de la part variable de sa rémunération. Il mettait l'employeur en demeure de cesser de réclamer cette somme à sa cliente.
Par courrier du 12 octobre 2012, la société CIM Emballages s'est offusquée auprès de Mme Arlette X... de ce qu'elle puisse prétendre, en quelque sorte, se faire justice à elle-même et elle lui a indiqué que sa volonté d'éluder toute discussion la confortait dans sa décision de retenir le montant en cause sur son prochain salaire.
Par lettre recommandée du 18 octobre 2012, Mme Arlette X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail auprès de la société Cartonnages Industriels Méhunois (la société CIM Emballages) dans les termes suivants : « Monsieur Le Directeur, Je fais suite à la lettre de mon avocat du 24 septembre dernier par laquelle il vous demandait de rétablir le paiement de la part variable de ma rémunération, et de revoir également mon salaire. En effet, j'ai engagé une procédure devant le conseil de prud'hommes concernant un rappel de salaire pour la part variable de ma rémunération. Dans ce cadre, il vous est donc demandé de me verser ce rappel de salaire eu égard à un calcul de cette part variable qui n'est pas conforme à la législation en vigueur et à la jurisprudence selon laquelle les charges patronales ne peuvent impacter la rémunération variable des salariés. Malgré ces demandes, je n'ai toujours pas été payée de mon arriéré de salaire. Et, plus grave, vous remettez en cause aujourd'hui le paiement de cette part variable qui a été fait cette fois en respectant les règles de droit applicables. Ces dans ce sens que nous avons saisi le Conseil de Prud'hommes et que nous vous avons mis en demeure de respecter la Loi. Qui plus est, vous n'êtes pas sans savoir également qu'à la suite de mon licenciement économique de la société Anjou Emballages devenue DS Smith Packaging Display et Services, j'ai également fait part de la nécessité du réalignement de mon salaire au niveau antérieur (c'est à dire au niveau des rémunérations brutes additionnées de mes deux contrats, celui me liant à votre société n'étant que le prolongement de celui que j'avais conclu à l'origine avec Anjou Emballages), d'autant plus qu'à défaut mon salaire brut serait inférieur à celui de mon assistante ce qui pourrait constituer une forme de discrimination. Mais, je n'ai reçu aucune réponse, pas plus que mon avocat. Je considère donc que vous ne souhaitez pas apporter de réponse positive à l'ensemble de ces éléments, et qu'en conséquence il existe un manquement grave de votre part à vos obligations contractuelles. C'est pourquoi par la présente je prends acte de la rupture de mon contrat de travail à compter de ce jour. Vous voudrez bien me faire parvenir mon solde de tout compte avec le règlement des sommes qui me sont dues. Mon avocat va par ailleurs compléter les demandes présentées contre votre société devant le Conseil de Prud'hommes, pour faire juger que la présente rupture de mon contrat de travail vous est imputable et qu'elle a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. ».

Dans le dernier état de la procédure de première instance, Mme Arlette X... demandait au conseil de prud'hommes :
- à titre principal, de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamner la société SCA Display et Services à lui payer diverses sommes à titre de solde d'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (200 500 ¿) et de frais de carburant ;- à titre subsidiaire, de déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de lui allouer de ce chef la somme de 200 500 ¿ à titre de dommages et intérêts ;

- de juger que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail avec la société CIM Emballages doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner cette dernière à lui payer les indemnités de rupture ainsi que la somme de 50 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- de condamner la société SCA Display et Services à lui payer la somme de 117 065, 30 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la part variable de sa rémunération ainsi que celle de 33 562, 18 euros à titre de dommages-intérêts en compensation de la part variable de sa rémunération pour 2012 ;- de condamner la société Cartonnages Industriels Méhunois à lui payer la somme de 80 465, 22 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la part variable de sa rémunération ainsi que celle de 32 500 ¿ à titre de dommages-intérêts en compensation de la part variable de sa rémunération pour 2012.

Par jugement du 14 août 2013 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- jugé que les faits invoqués par Mme Arlette X... à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Display et Services n'étaient pas établis ;- en conséquence, jugé que son licenciement pour motif économique était bien fondé ;- jugé que les faits invoqués par Mme Arlette X... à l'appui de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail avec la société Cartonnages Industriels Méhunois (CIM Emballages) ne sont pas établis ;- dit qu'en conséquence la rupture de ce contrat de travail produisait les effets d'une démission ;- débouté Mme Arlette X... de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamnée aux dépens.

Cette dernière est régulièrement appelante de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 5 octobre 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 15 juillet 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles Mme Arlette X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;- de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu entre elle et la société DS Smith Packaging Display et Services aux torts de l'employeur au motif qu'il a manqué à ses obligations contractuelles ce qui caractérise de sa part une déloyauté dans l'exécution du contrat de travail et en raison du harcèlement moral dont il a fait preuve à son égard ;- de juger que cette résiliation judiciaire emportera les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de condamner la société DS Smith Packaging Display et Services à lui payer la somme de 200 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ;- à titre subsidiaire, de déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif, d'une part, que la société DS Smith Packaging Display et Services ne justifie pas de la réalité du motif économique invoqué, d'autre part, qu'elle n'établit pas avoir satisfait à son obligation de reclassement à son égard ;- en conséquence, de condamner la société DS Smith Packaging Display et Services à lui payer la somme de 200 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ;

- de juger que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Mehun doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- en conséquence, de condamner cette dernière à lui payer les sommes suivantes : ¿ 11 624, 45 ¿ bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 1162, 44 ¿ bruts d'incidence de congés payés, ¿ 37 624, 79 ¿ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ¿ 50 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ;- de condamner solidairement la société DS Smith Packaging Display et Services et la société DS Smith Packaging Mehun à lui payer la somme de 5 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

La salariée fait valoir en substance que :
sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail conclu entre elle et la société DS Smith Packaging Display et Services :
- compte tenu de la fusion intervenue entre les sociétés Anjou Emballages, Packaging Norembal et Cartonneries du Jura et du regroupement d'activités qu'impliquait cette fusion, elle a naturellement interrogé son employeur sur l'avenir de son contrat de travail et du complément variable de sa rémunération dont l'assiette se trouvait nécessairement modifiée par la fusion réalisée ;- les entretiens qu'elle a eus lui ont laissé penser que son employeur envisageait une modification de son contrat de travail par la disparition de la partie variable de sa rémunération ;- elle avait pensé que la société DS Smith Packaging Display et Services souhaitait une rupture de son contrat de travail puisqu'en décembre 2010, le directeur des ressources humaines lui a indiqué, d'une part, qu'il ne pourrait pas y avoir de licenciement pour motif économique s'agissant du contrat conclu avec elle et qu'il faudrait trouver une solution transactionnelle avec paiement d'une indemnité, d'autre part, que le contrat conclu avec la société CIM Emballages devrait également donner lieu à une rupture conventionnelle ;- au vu des documents de présentation des nouveaux organigrammes de la SCA Display et Services, elle a constaté qu'elle était placée sur un nouveau poste dénommé « crédit manager » avec des fonctions totalement différentes de celles qu'elle occupait en qualité de directrice administrative et financière ;- à réception de la grille des augmentations des cadres en 2011, elle a constaté que, pour la première fois, aucune augmentation de salaire ne lui serait attribuée alors que contractuellement elle était « intégrée » dans un système de réévaluation annuelle de sa rémunération intitulée MERCER qui lui avait permis d'obtenir chaque année une augmentation de son salaire tant dans le cadre de son contrat de travail conclu avec Anjou Emballages que dans le cadre de son contrat de travail conclu avec CIM emballages ;- elle était la seule cadre à ne pas obtenir d'augmentation sans qu'aucune explication ne lui soit fournie en dépit de ses demandes même formulées par écrit ;- l'employeur lui a proposé une modification de la partie variable de sa rémunération mais cette proposition ne lui permettait pas de prendre une décision éclairée en raison de son caractère incomplet et imprécis ;- après ce faux dialogue, l'employeur est de nouveau entré dans une phase de mutisme total en s'abstenant pendant plusieurs mois de lui fournir une quelconque information au sujet de son poste et de sa rémunération ;- peu à peu, elle a vu s'opérer la préparation d'un transfert de ses missions à la société holding ; en effet, il lui était demandé de transmettre toutes les informations dont elle disposait sur son poste et la conduite de celui-ci, ainsi que son savoir-faire, à des collègues du groupe manifestement en vue d'un transfert de compétences vers l'entité holding du groupe, la SCA Packaging France ;- elle ne disposait plus d'aucun accès à certaines informations importantes nécessaires à l'accomplissement de son contrat de travail ;

- ce défaut d'information, ce mutisme confinant au mépris, la suppression de la part variable de sa rémunération, la réduction de ses responsabilités et le transfert d'une partie de ses fonctions qui caractérisent une modification de son contrat de travail constituent, de la part de la société DS Smith Packaging Display et Services, une attitude de harcèlement moral qui a eu des répercussions sur sa santé, étant observé que seul son contrat de travail a été affecté par cette prétendue restructuration ;- à tout le moins, ces faits constituent une déloyauté dans l'exécution du contrat de travail ;- il s'agit de faits suffisamment graves qui justifient la résiliation de son contrat de travail aux torts de la société DS Smith Packaging Display et Services ;

sur le licenciement :
- aux termes de la lettre de rupture, son licenciement est motivé par la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité Display et Service du groupe et non par des difficultés économiques ; l'employeur ne peut donc pas invoquer de telles difficultés dans le cadre de la présente instance ;- son poste n'a pas disparu puisque, dans le cadre d'une décision de centralisation de certaines missions, il a été transféré à une autre société du groupe ;- la recherche et les offres de reclassement n'étaient ni loyales ni sérieuses ;

sur les demandes de rappel de salaire :
- en violation des dispositions de l'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale, tant la société DS Smith Packaging Display et Services que la société DS Smith Packaging Mehun ont calculé la part variable de sa rémunération après abattement des charges patronales de l'assiette de calcul de cet élément de rémunération ;
sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail la liant à la société DS Smith Packaging Mehun :
- le contrat de travail conclu avec la société DS Smith Packaging Mehun était expressément la prolongation de celui conclu avec la société DS Smith Packaging Display et Services ; la rémunération constituait donc un ensemble unique (conditions de rémunération variable identiques, avenant relatif au véhicule de fonction identique) ;- ces deux contrats de travail ne font donc qu'un en ce sens que les conditions contractuelles doivent être appréciées globalement comme formant un tout ;- en conséquence, sous peine de discrimination en ce qu'elle aurait été moins bien payée que ses subalternes, après la rupture de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Display et Services, la société DS Smith Packaging Mehun devait lui verser une rémunération correspondant au montant global qu'elle percevait des deux sociétés, elle-même devant revenir à temps plein au sein de la société CIM Emballages ;- cette dernière a donc manqué à son obligation de lui payer son salaire intégral et de lui régler l'intégralité de ce qu'elle lui devait au titre de la part variable, c'est à dire sans déduction des charges patronales de l'assiette de cette rémunération.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 28 septembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société DS Smith Packaging Display et Services venant aux droits de la société Anjou Emballages demande à la cour :
- de débouter Mme Arlette X... de son appel et de toutes ses prétentions et de confirmer purement et simplement le jugement entrepris ;- en tout état de cause, de constater que le rappel de salaire de 2007 à 2011 ne peut pas excéder 4 538 ¿ ;- de condamner l'appelante aux entiers dépens.

L'employeur fait valoir en substance que :
sur la demande de résiliation du contrat de travail :
- la salariée n'établit pas de faits laissant présumer un harcèlement moral et elle ne rapporte pas la preuve d'une attitude propre à caractériser une attitude déloyale dans l'exécution du contrat de travail ;- contrairement à ce qu'elle soutient, il a apporté des réponses à ses interrogations relatives à la part variable de sa rémunération et au devenir de ses fonctions ;- elle ne démontre pas qu'elle aurait été la seule à ne pas bénéficier d'une augmentation de son salaire fixe en 2011 ;- elle ne peut pas sérieusement lui reprocher d'avoir tardé à engager la procédure de licenciement alors qu'elle a été informée, en décembre 2011, de l'absence d'organisation arrêtée au sujet du service des finances et de la gestion, ce différé lui ayant permis de justifier des trimestres nécessaires pour liquider sa retraite à taux plein dès le mois de janvier 2013 ;

sur le licenciement pour motif économique :
- il est justifié ;- la nécessité de sauvegarder la compétitivité de la division Display et Services qui constitue un secteur particulier dans le métier de l'emballage, consistant en la mise à la disposition des clients d'un service complet de cartonnage qui était auparavant atomisé entre différents sites indépendants, ressort de la dégradation constante des résultats enregistrés ;- la fusion opérée en juin 2011 a permis de réduire les frais fixes, d'optimiser et de rationaliser l'outil de production, de mettre en oeuvre une politique de relance commune pour réduire les encours clients ;- la suppression du poste de directrice administrative et financière basé à Thouarcé était parfaitement logique dans la mesure où ce site est devenu un simple établissement de sorte qu'il n'y avait plus de compte de résultat et de bilan à établir ;- il a respecté son obligation de reclassement ; si ce n'est le poste de contrôleur de gestion refusé par la salariée, aucun autre poste de reclassement correspondant à ses compétences n'était disponible sur un site de la division au moment de la rupture ;

sur la demande de rappel de salaire au titre de la part variable :
- la salariée ne peut pas sérieusement prétendre que la part variable de sa rémunération aurait été à tort amputée en raison de la prise en compte d'une assiette erronée alors qu'elle établissait elle-même le montant de cette part variable ainsi que ses bulletins de salaire et qu'elle a signé sans réserve son solde de tout compte ;- aucun décompte précis n'est produit pour expliquer et justifier du chiffrage " astronomique " du montant qu'elle réclame ; à supposer qu'il y ait lieu de déduire les charges patronales de l'assiette de calcul de la part variable, le montant dû serait très notablement inférieure à la somme réclamée ;- en raison de la fusion intervenue, aucun variable ne pouvait être calculé pour l'année 2011 ; la demande de rappel formulée au titre de cette année là est donc particulièrement mal fondée.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 5 octobre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société DS Smith Packaging Mehun venant aux droits de la société Cartonnages Industriels Méhunois (CIM Emballages) demande à la cour :
- de débouter Mme Arlette X... de son appel et de toutes ses prétentions et de confirmer purement et simplement le jugement entrepris ;- de condamner l'appelante aux entiers dépens.

Cet employeur fait valoir en substance que :
sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail :
- dans la mesure où, en sa qualité de directrice des services comptables et finances, la salariée calculait elle-même la part variable de sa rémunération, elle ne peut pas prétendre fonder sa prise d'acte sur une prétendue mauvaise détermination de l'assiette servant de base au calcul de cette part variable ; elle a toujours calculé sa part variable en déduisant des 2 % applicabls sur le résultat net les charges sociales patronales payées sur le salaire qui lui a été versé au cours de l'exercice concerné ; contester ces modalités de calcul reviendrait à mettre en cause toutes les formes de rémunération issues des accords collectifs d'intéressement ;- la salariée interprète de façon erronée la jurisprudence qu'elle invoque ;- sa réclamation est exorbitante et elle refuse de produire le calcul qu'elle a effectué pour aboutir au montant réclamé ; à supposer que le mode de calcul dont elle se prévaut soit le bon, le solde dû serait de 2 821 ¿ ;- la salariée est mal fondée à soutenir que la perte de son contrat de travail au sein de la société DS Smith Packaging Display et Services du fait du licenciement économique imposait à la société DS Smith Packaging Mehun de lui payer l'équivalent des deux salaires convenus aux termes de ses deux contrats de travail au motif que ceux-ci auraient été liés ;- la discrimination invoquée est tout aussi injustifiée dans la mesure où le montant du salaire qu'elle percevait au sein de la société DS Smith Packaging Mehun s'expliquait par sa faible intervention pour cette entreprise, à savoir, d'abord, deux fois par mois, puis, une seule fois par mois ;- la prise d'acte est donc mal fondée et, en outre, l'appelante a commis des erreurs dans le chiffrage des indemnités de rupture qu'elle réclame.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
SUR LES DEMANDES FORMÉES CONTRE LA SOCIÉTÉ DS Smith PACKAGING DISPLAY et SERVICES :
1o) sur les demandes de rappel de salaire au titre de la rémunération variable et de dommages et intérêts :
Mme Arlette X... soutient à ce titre qu'elle a été privée d'une partie du montant de la part variable qui lui était dû au motif qu'en violation des dispositions de l'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale, l'employeur calculait cette part variable " après abattement des charges patronales ". L'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale dispose que " La contribution de l'employeur reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit. ". En vertu de ce texte, les cotisations sociales dues par l'employeur restent exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit. Sont dès lors nulles de plein droit les dispositions d'un contrat de travail en vertu desquelles la rémunération d'un salarié est déterminée déduction faite des cotisations sociales à la charge de l'employeur.

L'avenant conclu le 12 juin 1997 entre Mme Arlette X... et la société Anjou Emballages stipule : " Poste occupé : directeur comptable et financier-A compter de l'exercice 1997, Madame X... Arlette percevra en plus de sa rémunération contractuelle un additif représentant 1 % du résultat avant impôt de l'exercice de la Sté ANJOU EMBALLAGES ". Par avenant du 5 septembre 2000, le taux de cette part variable a été porté à 2 % à compter du 1er janvier 2002.

Le résultat courant avant impôt correspond à la somme des produits d'exploitation et des produits financiers déduction faite des charges d'exploitation, parmi lesquelles les charges sociales patronales, et des charges financières.
La base de calcul de la part variable de la rémunération de Mme Arlette X... correspondant à la différence entre, d'une part, le total des produits d'exploitation et des produits financiers de l'entreprise, d'autre part, le total des charges d'exploitation et des charges financières qu'elle supporte, en vertu du texte susvisé, il y a lieu, comme le soutient l'appelante, d'ordonner à l'employeur de réintégrer le montant de l'ensemble des charges sociales patronales dans l'assiette de calcul de cette part variable et non pas seulement, comme il propose de le faire à titre subsidiaire, le montant des charges patronales qu'il a réglées au titre de la seule rémunération de la salariée.
Au regard des documents comptables relatifs aux exercices 2007 à 2010 inclus versés aux débats par la salariée (pièces no 16 à 18) et du décompte qu'elle produit (pièce no 49), il convient de condamner la société DS Smith Packaging Display et Services à lui payer les sommes suivantes, à titre de rappels de rémunération variable :
- année 2007 : 21 423, 86 ¿- année 2008 : 20 195, 48 ¿- année 2009 : 27 571, 10 ¿- année 2010 : 25 376, 90 ¿.

En l'absence de document comptable produit du chef de la société DS Smith Packaging Display et Services au titre de l'année 2011 et eu égard à l'impossibilité, compte tenu de la fusion intervenue le 1er juin 2011, de déterminer le résultat courant avant impôt de cette société et les charges patronales qu'elle aurait supportées pour l'année 2011, Mme Arlette X..., qui ne sollicite pas de la cour la production de pièces et qui a perçu, au titre de l'année 2011, un bonus de 13 273 ¿ sera, faute pour elle de rapporter la preuve de la créance qu'elle invoque, déboutée de sa réclamation formée à hauteur de 22 497, 96 ¿ du chef de cet exercice.
Par voie d'infirmation du jugement déféré, la société DS Smith Packaging Display et Services sera en conséquence condamnée à lui payer la somme totale de 94 567, 34 ¿ à titre de rappel de rémunération variable.
Mme Arlette X... n'a perçu aucune somme au titre sa rémunération variable pour 2012. Aux termes du contrat de travail le versement de la part variable de la rémunération n'était soumis à aucune condition. En l'absence de versement d'une quelconque somme de ce chef pour 2012, la salariée est bien fondée à solliciter le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. En l'état des éléments soumis à son appréciation, notamment des montants de rémunération variable perçus au titre des précédents exercices, de la proposition formulée par l'employeur au titre de l'année 2011 de retenir la moyenne des cinq années précédentes et de la durée d'emploi pendant l'année 2012, la cour est en mesure de fixer à la somme de 13 000 ¿ le montant des dommages et intérêts propres à réparer le préjudice subi.

2o) Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :
Le salarié peut poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur si elle apparaît justifiée par des manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
Le licenciement pour motif économique de Mme Arlette X... étant intervenu postérieurement à l'engagement, par cette dernière, d'une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de manquements imputés à l'employeur, il convient d'examiner en premier lieu cette demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.
La salariée ne produit aucune pièce, aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles :
- à la faveur d'entretiens, l'employeur lui aurait laissé entendre qu'il envisageait de modifier son contrat de travail par suppression de la part variable de sa rémunération ; cette affirmation est d'ailleurs contredite par les lettres des 30 mai, 11 octobre et 7 décembre 2011 aux termes desquelles l'employeur, d'une part, lui a indiqué que, si en raison de la fusion intervenue le 1er juin 2011, son bonus 2011 ne pouvait plus être calculé selon la formule convenue dans son contrat de travail, il n'était pas question de supprimer la part variable de sa rémunération mais seulement d'en modifier le mode de détermination, d'autre part, lui a soumis une proposition de modification, dans un premier temps, pour la seule année 2011, en s'engageant à revenir vers elle au début de l'année 2012 pour convenir des nouvelles modalités de détermination de la part variable de sa rémunération à partir de cette année là ; cette affirmation est également contredite par le fait que, pour l'année 2011, la salariée a bien perçu une part variable d'un montant de 13 273 ¿ ; aux termes de son courrier du 16 décembre 2011, son conseil avait indiqué à l'employeur que Mme Arlette X... ne " rejetait " pas le principe de se voir verser un bonus pour l'année 2011, pas plus qu'elle ne rejetait d'emblée le montant qui lui était proposé et résultait de calculs sur lesquels elle n'avait pas à se prononcer ;- en décembre 2010, le directeur des ressources humaines lui aurait indiqué que la fusion à intervenir imposerait d'envisager la rupture conventionnelle de ses deux contrats de travail ;- le système " MERCER " lui aurait, antérieurement à 2011, permis de bénéficier systématiquement d'une augmentation de salaire et qu'elle aurait été la seule cadre à ne pas bénéficier d'une telle augmentation à compter de 2011.

La matérialité de ces griefs n'est donc pas établie.
La salariée est également mal fondée à soutenir que la proposition de modification de la part variable de sa rémunération que l'employeur lui a soumise par courriers des 11 octobre et 7 décembre 2011aurait été incomplète et imprécise et ne lui aurait pas permis de prendre position. En effet, étant rappelé que, par courrier recommandé du 30 mai 2011, l'employeur avait assuré Mme Arlette X... du fait qu'il n'était pas question de supprimer la part variable de sa rémunération mais seulement d'en modifier le mode de détermination en raison de la disparition de la société Anjou Emballage par voie de fusion/ absorption, il ressort clairement des courriers des 11 octobre et 7 décembre 2011 que l'employeur lui a soumis une proposition de rémunération variable tout à fait précise et ce, pour la seule année 2011, en lui indiquant qu'il lui soumettrait ultérieurement une nouvelle proposition de rémunération variable à appliquer à compter de l'année 2012. Par l'intermédiaire de son conseil, la salariée a d'ailleurs répondu, le 16 décembre 2011, que ce qu'elle refusait était la modification de son contrat de travail aboutissant à la suppression de la part variable de sa rémunération mais qu'elle ne rejetait pas d'emblée la proposition de versement d'une somme de 13273 ¿ qui lui était faite pour l'année 2011, somme qu'elle a d'ailleurs perçue, à sa demande, à la fin du mois de décembre 2011.
Par contre, en l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour, la salariée établit que la société DS Smith Packaging Display et Services a modifié unilatéralement ses fonctions en la privant, dès le mois de juin 2011, au moins d'une partie non négligeable de ses attributions de directrice comptable et financière de la société Anjou Emballages, en particulier de la tenue et de l'établissement des comptes de cette société et qu'elle n'a reçu aucune réponse à ses demandes, formulées par lettre des 27 octobre et 16 décembre 2011, d'être fixée sur cette autre modification de son contrat de travail constituée par la modification de ses fonctions.
Cette modification unilatérale des fonctions de la salariée caractérisant une modification unilatérale du contrat de travail est reconnue par l'employeur lui-même aux termes de la lettre de licenciement quand il indique : "... Nous vous avions indiqué, en décembre 2011 que l'évolution de l'organisation Finance et Gestion en France n'était pas suffisamment aboutie pour nous permettre de vous fixer sur l'évolution de vos fonctions, étant relevé que depuis la fusion vous n'exercez plus les responsabilités et les missions qui ressortaient du poste de Directrice Administrative et Financière, en particulier l'établissement des comptes de résultat et bilan, d'une société qui est devenue un simple établissement.... Depuis juillet 2012, l'activité Emballage de SCA a été cédée à DS Smith , Groupe dont la dimension apportera un appui fort aux activités Display et Services pour répondre à la forte pression sur les prix et permettre la mise en oeuvre de synergies commerciales et le financement des investissements indispensables au maintien de la compétitivité dans ce secteur très concurrentiel. Cette cession est sans impact sur la réalité de la suppression du poste de Directrice Administrative et financière dont vous êtes la seule titulaire de telle sorte qu'il n'y a pas lieu à application des critères d'ordre. Le différé de votre licenciement ne résulte que de notre espérance de pouvoir vous proposer dans la perspective de la cession du groupe, un poste alternatif comparable à vos anciennes fonctions, ce qui n'a malheureusement pas été possible.... ".

Il ressort de cette lettre de licenciement que Mme Arlette X... s'est vue dépossédée de ses fonctions de directrice administrative et financière (selon les termes du contrat de travail : directrice comptable et financière) dès l'opération de fusion intervenue le 1er juin 2011 ; que, dans les faits, ce poste a été supprimé dès cette date et non en juillet 2012 et que la société DS Smith Packaging Display et Services a différé son licenciement pendant un an uniquement dans le prétendu espoir de lui proposer un poste comparable au sein du groupe.
Par la production du document intitulé " SCA Display et Services-Plan d'action : Cash Client " établi en vue de la fusion, Mme Arlette X... démontre que le projet de la société DS Smith Packaging Display et Services était, dès fin 2010/ début 2011, de lui attribuer, à compter du 10 octobre 2011, un poste de " crédit manager " chargé de la gestion des impayés. Elle indique sans être utilement contredite que, dans le cadre du transfert de ses missions de directrice comptable et financière à la société holding, elle a dû, à la demande de la société DS Smith Packaging Display et Services, son employeur, transmettre à des salariés de la société holding son savoir faire et toutes les informations dont elle disposait pour accomplir sa mission, de sorte qu'elle s'est trouvée privée de l'accès aux informations nécessaires à l'exécution de son contrat de travail.

Mme Arlette X... établit ainsi qu'après avoir diffusé un document projetant de la positionner, à compter du mois d'octobre 2011, sur un emploi de gestion des impayés, la société DS Smith Packaging Display et Services a modifié unilatéralement son contrat de travail en la dépossédant, dès le mois de juin 2011, date de la fusion, au moins d'une partie importante de ses fonctions consistant dans la tenue et dans l'établissement des comptes de la société Anjou Emballages devenue un simple établissement pour les transférer à la société holding et qu'elle a laissé sans réponse concrètes ses demandes, formulées en octobre et décembre 2011, d'être fixée sur la nature de son nouvel emploi et de ses nouvelles fonctions. En effet, la seule réponse qu'elle a obtenue a été celle du 7 décembre 2011 aux termes de laquelle l'employeur lui a indiqué en être " au stade de l'étude des conditions d'une évolution possible de l'organisation Finance et Gestion en France " et qu'il reviendrait " prochainement " vers elle pour lui proposer, à partir de 2012, " les conditions d'une modification plus pérenne de son contrat de travail ". Ensuite de quoi, l'employeur est resté taisant et a finalement engagé une procédure de licenciement pour motif économique en adressant à Mme Arlette X..., le 17 juillet 2012, une convocation en vue d'un entretien préalable fixé au 27 juillet suivant, entretien qui a été reporté au 27 août 2012.
Mme Arlette X... justifie avoir été placée en arrêt de travail du 25 juillet au 3 août 2012 pour " anxio-dépression réactionnelle " et du fait qu'à la date du 11 septembre 2012, elle consultait depuis le 25 juillet précédent son médecin généraliste pour un état anxio-dépressif.
Pris dans leur ensemble, ces faits répétés qui se sont déroulés sur plus d'une année (du premier semestre 2011, date de diffusion du document intitulé " SCA Display et Services-Plan d'action : Cash Client " à juillet 2012, date de l'engagement de la procédure de licenciement faisant suite au silence gardé par l'employeur au sujet des futures fonctions de la salariée) et qui ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits de la salariée, et d'altérer sa santé physique ou mentale permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral. La société DS Smith Packaging Display et Services ne produit aucune pièce pour tenter d'établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que son comportement était justifié par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Ces faits laissant présumer une attitude de harcèlement moral constituent de la part de l'employeur un manquement suffisamment grave à ses obligations de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail. Par voie d'infirmation du jugement déféré, il convient donc de prononcer, aux torts de la société DS Smith Packaging Display et Services, la résiliation du contrat de travail conclu le 7 mai 1986 entre Mme Arlette X... et la société Anjou Emballages en fixant la date d'effet de cette résiliation au 14 septembre 2012, date du licenciement.

Dans la mesure où il est fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, il n'y a pas lieu à examen de la demande tendant à voir déclarer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit pour la salariée au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, Mme Arlette X... peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 42 254, 77 ¿ bruts.
En considération de la situation particulière de la salariée, notamment de son âge (59 ans) et de son ancienneté (26 ans et 4 mois) au moment de la rupture, du fait qu'elle a dû faire valoir ses droits à la retraite auprès de la CARSAT à compter du 1er janvier 2013 et a perçu une retraite d'un montant net mensuel de 1257, 89 ¿, des circonstances de la rupture, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 100 000 ¿ le montant de l'indemnité propre à réparer le préjudice subi.
SUR LES DEMANDES FORMÉES CONTRE LA SOCIÉTÉ DS Smith PACKAGING MEHUN :
1o) sur les demandes de rappel de salaire au titre de la rémunération variable et de dommages et intérêts :
Mme Arlette X... soutient également à ce titre avoir été privée d'une partie du montant de la part variable qui lui était dû au motif qu'en violation des dispositions de l'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale, l'employeur calculait cette part variable " après abattement des charges patronales ".
L'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale dispose que " La contribution de l'employeur reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit. ". En vertu de ce texte, les cotisations sociales dues par l'employeur restent exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit.

Sont dès lors nulles de plein droit les dispositions d'un contrat de travail en vertu desquelles la rémunération d'un salarié est déterminée déduction faite des cotisations sociales à la charge de l'employeur.
Le contrat de travail conclu le 23 décembre 1998 entre Mme Arlette X... et la société CIM Emballages stipule : " RÉMUNÉRATION : 6 500 Francs/ Forfaitaire + Intéressement sur les résultats avant impôts et participation de 1 % ". Par avenant du 5 septembre 2000, le taux de cette part variable a été porté à 2 % à compter du 1er janvier 2002.

Le résultat courant avant impôt correspond à la somme des produits d'exploitation et des produits financiers déduction faite des charges d'exploitation, parmi lesquelles les charges sociales patronales, et des charges financières.
La base de calcul de la part variable de la rémunération de Mme Arlette X... correspondant à la différence entre, d'une part, le total des produits d'exploitation et des produits financiers de l'entreprise, d'autre part, le total des charges d'exploitation et des charges financières qu'elle supporte, en vertu du texte susvisé, il y a lieu, comme le soutient l'appelante, d'ordonner à l'employeur de réintégrer le montant de l'ensemble des charges sociales patronales dans l'assiette de calcul de cette part variable et non pas seulement, comme il propose de le faire à titre subsidiaire, le montant des charges patronales qu'il a réglées au titre de la seule rémunération de la salariée.
Au regard des documents comptables relatifs aux exercices 2007 à 2010 inclus versés aux débats par la salariée (pièces no 19 à 21) et du décompte qu'elle produit (pièce no 49), il convient de condamner la société DS Smith Packaging Mehun à lui payer les sommes suivantes à titre de rappels de rémunération variable :
- année 2007 : 17 153, 82 ¿- année 2008 : 15 411, 84 ¿- année 2009 : 17 669, 22 ¿- année 2010 : 17 960, 72 ¿.

En l'absence de document comptable produit du chef de la société DS Smith Packaging Mehun au titre de l'année 2011 permettant de vérifier le bien fondé de la demande quant à son montant, Mme Arlette X..., qui n'a pas sollicité de la cour qu'elle ordonne cette production, sera, faute pour elle de rapporter la preuve de la créance qu'elle invoque, déboutée de sa réclamation formée à hauteur de 13 269, 62 ¿ du chef de cet exercice.
Par voie d'infirmation du jugement déféré, la société DS Smith Packaging Mehun sera en conséquence condamnée à lui payer la somme totale de 68 195, 60 ¿ à titre de rappel de rémunération variable.
Mme Arlette X... n'a perçu aucune somme au titre sa rémunération variable pour 2012, l'acompte de 6 000 ¿ qu'elle s'était octroyé de ce chef sur sa rémunération du mois de juillet 2012 ayant été déduit de son solde de tout compte. Aux termes du contrat de travail le versement de la part variable de la rémunération n'était soumis à aucune condition. En l'absence de versement d'une quelconque somme de ce chef pour 2012 et de production par l'employeur des documents comptables permettant de déterminer quelle aurait dû être cette rémunération variable, la salariée est bien fondée à solliciter le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. En l'état des éléments soumis à son appréciation, notamment des montants de rémunération variable perçus au titre des précédents exercices et de la durée d'emploi pendant l'année 2012, la cour est en mesure de fixer à la somme de 10000 ¿ le montant des dommages et intérêts propres à réparer le préjudice subi.

2o) sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail :
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, les effets d'une démission. La prise d'acte ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'à la condition que les faits invoqués, non seulement, soient établis, la charge de cette preuve incombant au salarié, mais constituent un manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

Au cas d'espèce, à l'appui de sa prise d'acte, Mme Arlette X... reproche tout d'abord à la société DS Smith Packaging Mehun venant aux droits de la société CIM Emballages, de ne pas lui avoir réglé, à compter de la rupture de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Display et Services, une rémunération équivalente à la somme des rémunérations prévues à chacun de ses deux contrats de travail. Selon elle, cette obligation résultait du fait que son contrat de travail conclu avec la société CIM Emballages était la " prolongation " de celui conclu avec la société Anjou Emballages.

Le contrat de travail conclu entre la société CIM Emballages et Mme Arlette X... énonce : " Le poste de directeur comptable et financier occupé par Mme X... à la Sté Anjou Emballages est prolongé à la Sté CIM S. A pour les mêmes missions et responsabilités sous les conditions suivantes : Le contrat entre la Sté CIM et Mme X... peut être aménagé, modifié, ou résilié sans remettre en cause son contrat de travail avec la Sté Anjou Emballages.... ".

Il résulte clairement de ces énonciations que la conclusion du contrat de travail avec la société CIM Emballages avait pour objet que la salariée exerce au sein de cette société les mêmes missions et responsabilités que celles qu'elle remplissait au sein de la société Anjou Emballages mais que, pour autant, chacun des contrats était indépendant de l'autre. Contrairement à ce que soutient l'appelante, la circonstance que les mêmes qualification et ancienneté lui aient été reconnues dans le cadre des deux contrats de travail, le fait qu'aient été stipulés le bénéfice d'un véhicule de fonction et un bonus dans des conditions strictement identiques et, enfin, l'emploi du terme " prolongé " ne permettent pas de caractériser l'existence d'un contrat de travail unique. En effet, la salariée avait pour employeurs deux personnes morales parfaitement distinctes et indépendantes ; selon ses propres indications, elle n'intervenait au sein de la société CIM Emballages dont le siège est situé à Mehun-sur-Yèvre (18) que deux fois, puis une fois par mois, moyennant un salaire qui, étant à la mesure de cette intervention, a toujours été nettement inférieur à celui convenu entre elle et la société Anjou Emballages. Ce salaire était de 6 500 francs lors de la conclusion du contrat de travail, le 23 décembre 1998 tandis qu'elle percevait alors de la société Anjou Emballages un salaire mensuel de 32 706 francs. Dans le dernier état de la relation de travail, son salaire au sein de la société CIM Emballages était de 2 632 ¿ tandis qu'elle percevait de la société Anjou Emballages un salaire brut mensuel de 6 695 ¿. Les bulletins de salaire étaient émis par chacune des deux personnes morales employeurs.

Comme l'ont exactement retenu les premiers juges, Mme Arlette X... est en conséquence mal fondée à soutenir qu'après son licenciement par la société Anjou Emballages, la société CIM Emballages aurait eu l'obligation de lui régler une rémunération équivalente à la somme des rémunérations qu'elle recevait de ces deux employeurs. Ce premier grief est mal fondé.

En second lieu, Mme Arlette X... reproche à la société DS Smith Packaging Mehun de l'avoir privée d'une partie du montant de la part variable qui lui était dû en violant les dispositions de l'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale et de ne pas lui avoir réglé le rappel sollicité quand elle a saisi la juridiction prud'homale.
Si la cour a fait droit à la demande de rappel de rémunération formée de ce chef par la salariée, le défaut de paiement litigieux n'apparaît pas fautif. En effet, la somme versée à Mme Arlette X... au titre de la part variable de sa rémunération a toujours correspondu à la stricte application de la formule littérale mentionnée à son contrat de travail, à savoir à 1 %, puis 2 % du résultat de l'entreprise avant impôts. Or, lors de la conclusion du contrat de travail en cause, intervenue le 23 décembre 1998 et de celle de l'avenant du 5 septembre 2000 qui a porté le taux de l'intéressement à 2 % du résultat avant impôts, la Cour de cassation jugeait qu'il n'était pas illicite de convenir d'une rémunération proportionnelle au chiffre d'affaires déduction faite de différentes charges d'exploitation de l'employeur, y compris les charges sociales, cette convention n'étant pas contraire aux dispositions de l'article L. 241-8 du Code de la sécurité sociale (Cass. Soc. 10 novembre 1993 Bulletin 1993 V no 263 p 180). C'est seulement par un arrêt du 17 octobre 2000 (p no 98-45669, puis dans la ligne de ce revirement : Cass. Soc. 22/ 05/ 2002 p no 99-46306 et 14/ 09/ 2005 p no 03-43314) que la chambre sociale de la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en considérant qu'en vertu de ce texte, sont nulles de plein droit les dispositions d'un contrat de travail selon lesquelles la rémunération d'un salarié est déterminée déduction faite des cotisations sociales à la charge de l'employeur. La circonstance que l'employeur ait pu continuer à interpréter l'article L. 241-8 du code de la sécurité sociale selon la position ancienne de la jurisprudence n'apparaît pas fautive d'autant que c'est Mme Arlette X... elle-même qui, en sa qualité de directrice comptable et financière, était chargée de déterminer les sommes dues aux salariés à titre de rémunération et de veiller à la correcte application des textes en vigueur. C'est donc elle-même qui, chaque année, a calculé la part variable de sa rémunération en prenant comme assiette le résultat courant avant impôts tel que stipulé à son contrat de travail. Enfin, le fait pour l'employeur de ne pas avoir payé le rappel sollicité au vu de la demande formée en justice par la salariée mais d'avoir défendu à cette prétention sans abuser de son droit de se défendre en justice n'est pas fautif.

Le second grief n'est donc pas non plus fondé. En tout état de cause, à le supposer établi, il ne constituerait pas un manquement suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail dans la mesure où l'erreur est amplement imputable à la salariée.
Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a dit que la prise d'acte, par Mme Arlette X..., de la rupture de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Mehun devait produire les effets d'une démission et qu'il a débouté la salariée de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la prise d'acte, par Mme Arlette X..., de la rupture de son contrat de travail avec la société DS Smith Packaging Mehun devait produire les effets d'une démission et débouté la salariée de ses demandes en paiement des indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Le confirme également en ce qu'il a débouté Mme Arlette X... de ses demandes de rappel de rémunération variable formées au titre de l'année 2011 contre la société DS Smith Packaging Display et Services et contre la société DS Smith Packaging Mehun ;
L'infirme en toutes ses autres dispositions
Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,
Prononce aux torts de la société DS Smith Packaging Display et Services la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu entre cette dernière et Mme Arlette X... et ce, à effet au 14 septembre 2012 et dit que cette résiliation judiciaire emporte les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société DS Smith Packaging Display et Services à payer les sommes suivantes à Mme Arlette X... :
-94 567, 34 ¿ à titre de rappel de rémunération variable au titre des années 2007 à 2010 ;
-13 000 ¿ de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du défaut de paiement de la rémunération variable pour 2012 ;-100 000 ¿ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société DS Smith Packaging Mehun à payer les sommes suivantes à Mme Arlette X... :
-68 195, 60 ¿ à titre de rappel de rémunération variable au titre des années 2007 à 2010 ;-10 000 ¿ de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du défaut de paiement de la rémunération variable pour 2012 ;

Condamne solidairement la société DS Smith Packaging Display et Services et la société DS Smith Packaging Mehun à payer à Mme Arlette X... la somme de 3 500 ¿ au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Les condamne solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02304
Date de la décision : 05/01/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2016-01-05;13.02304 ?
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