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08/12/2015 | FRANCE | N°13/02668

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 08 décembre 2015, 13/02668


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02668.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 26 Septembre 2013, enregistrée sous le no F 13/ 00010

ARRÊT DU 08 Décembre 2015

APPELANTE :
LA SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE " Le Clos des Sources " 61420 LA FERRIERE BOCHARD
représentée par Monsieur B..., responsable juridique muni d'un pouvoir

INTIME :
Monsieur Denis X... ... 72100 LE MANS
comparant-a

ssisté de Maître Laurence PAPIN ROUJAS, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
En appl...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02668.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 26 Septembre 2013, enregistrée sous le no F 13/ 00010

ARRÊT DU 08 Décembre 2015

APPELANTE :
LA SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE " Le Clos des Sources " 61420 LA FERRIERE BOCHARD
représentée par Monsieur B..., responsable juridique muni d'un pouvoir

INTIME :
Monsieur Denis X... ... 72100 LE MANS
comparant-assisté de Maître Laurence PAPIN ROUJAS, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Octobre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 08 Décembre 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE,
M. Denis X... a été embauché par la société d'exploitation des sources Roxane le 19 juin 1990 en qualité de conducteur de groupe ; il travaillait sur une fardeleuse embarquetteuse.
Le 12 février 2005 il a été victime d'un accident du travail au cours duquel il s'est sectionné plusieurs doigts de la main droite, la déclaration d'accident du travail précisant qu'il a glissé d'un escabeau sur lequel il était monté et, qu'en se rattrapant, il s'est sectionné les doigts de la main droite à la tôle de carrelage du bol à bouchon.
Il a subi plusieurs interventions chirurgicales en 2005, 2006 et 2007 et, la date de consolidation a été fixée par la caisse primaire d'assurance maladie au 1er février 2008 avec taux d'IPP de 35 %.
Le 3 janvier 2008 le médecin du travail a établi un avis d'aptitude " visite du poste effectuée le 20 décembre 2007 Apte à la reprise du travail à son poste. A revoir pour bilan dans un mois ou avant si nécessaire "
M. X... a ainsi repris le travail en janvier 2008.
A partir de juin 2008 il a été en arrêt de travail continu pour maladie non professionnelle jusqu'en juillet 2009 et, le 3 juillet 2009, le médecin du travail l'a déclaré inapte à tous les postes dans l'entreprise en une seule visite.
Il a été licencié le 5 août 2009 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Dans le dernier état de la relation de travail le salaire brut de M. X... s'élevait à 1 955, 46 ¿.
Arguant de ce que son inaptitude à l'origine de son licenciement avait une origine professionnelle et que les délégués du personnel n'avaient pas été consultés avant son licenciement de sorte que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, le 11 janvier 2013 M. Denis X... a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement d'une indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'une indemnité de licenciement doublée et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement en date du 26 septembre 2013 le conseil de prud'hommes du Mans :
- a dit que l'inaptitude de M. X... était bien consécutive à l'accident du travail du 12 février 2005,- a condamné en conséquence la société d'exploitation des sources Roxane à lui verser les sommes de 21 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse du fait de l'absence de consultation des délégués du personnel avant son licenciement, 3 910, 92 ¿ à titre d'indemnité de préavis, de 391, 09 ¿ au titre des congés payés sur préavis, 9 862, 04 ¿ au titre du doublement de l'indemnité de licenciement et de 450 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- a débouté la société d'exploitation des sources Roxane de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,- a ordonné l'exécution provisoire,- a condamné la société d'exploitation des sources Roxane aux dépens.
Par courrier de son conseil en date du 2 octobre 2013 la société d'exploitation des sources Roxane a régulièrement relevé appel de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 13 octobre 2015 et à l'audience la société d'exploitation des sources Roxane demande à la cour :- de réformer le jugement entrepris et statuant à nouveau :- de débouter M. X... de toutes ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle expose que, si M. X... a été victime d'un accident du travail en 2005, il a repris son travail en janvier 2008 ; qu'il a été par la suite été en arrêt de travail pour maladie à compter du 17 juin 2008 jusqu'au 30 juin 2009 ; que le 3 juillet 2009 il a été déclaré inapte par le médecin du travail à tous postes dans l'entreprise en une seule visite ; qu'en raison de l'impossibilité de le reclasser elle a procédé à son licenciement pour inaptitude le 5 août 2009, sans avoir à aucun moment été informé directement ou indirectement d'un quelconque lien entre l'accident du travail et l'inaptitude constatée le 3 juillet 2009.
Elle fait essentiellement valoir :- que M. X... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d'un lien entre l'inaptitude constatée en 2009 qui a motivé son licenciement et l'accident du travail dont il a été victime en 2005 ; que si par la suite en avril et mai 2011 il a présenté des séquelles de l'accident et subi une nouvelle intervention, ces faits se sont produits plus de deux ans après son licenciement pour inaptitude non professionnelle ayant conduit à son licenciement ;- qu'elle n'a pas pu soupçonner l'existence d'un tel lien alors que M. X... avait été déclaré apte à reprendre le travail le 3 janvier 2008 et que ses arrêts de travail ininterrompus à compter du 17 juin 2008 soit six mois après sa reprise de poste ont été délivrés pour maladie non professionnelle ; qu'elle n'a à aucun moment été informé des maux et affections justifiant les arrêts de travail de son salarié à compter de juin 2008, le médecin du travail n'en ayant jamais fait mention et M. X... ne l'en ayant jamais avisé ;- que contrairement à ce qu'indique le premier juge qui n'a pas pris la peine de l'interroger sur ce point, elle avait consulté les délégués du personnel sur le projet de licenciement de M. X..., ce qui par ailleurs ne suffit pas à considérer qu'elle avait connaissance du caractère professionnel allégué de l'inaptitude de son salarié.
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 12 octobre 2015 et à l'audience M. X... demande à la cour :- de confirmer le jugement entrepris, en définitive, en toutes ses dispositions,- y ajoutant de condamner la société d'exploitation des sources Roxane à lui verser la somme de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il indique que, parallèlement à sa saisine du conseil de prud'hommes il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale qui, par jugement du 25 juin 2014 frappé d'appel, a reconnu la faute inexcusable de son employeur dans la survenance de l'accident dont il a été victime en 2005.
Il soutient en résumé, après un rappel des règles de droit en la matière et plus particulièrement de la protection spécifique des salariés victimes d'accident et/ ou de maladies professionnels et de ce que c'est à la date de la rupture du contrat qu'il faut se situer pour déterminer si l'employeur pouvait avoir connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude :- qu'en l'espèce il ressort des pièces médicales produites aux débats que l'inaptitude à l'origine de son licenciement était la conséquence de son accident du travail du 12 février 2005 ;- que, contrairement à ce qu'il soutient, son employeur avait nécessairement connaissance de l'origine professionnelle de son inaptitude ayant motivé son licenciement au regard de son absence prolongée du 12 février 2005 au 4 janvier 2008 ;- que la société ne verse aux débats aucun document relatif à la consultation des délégués du personnel.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 13 octobre 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION,
Dans le cas d'une inaptitude d'origine professionnelle, en application de l'article L. 1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 1234-6 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.
Par ailleurs dans cette hypothèse, en application de l'article L. 1226-10 du même code, l'employeur a l'obligation de consulter les délégués du personnel après que l'inaptitude ait été définitivement constituée et avant de proposer au salarié un reclassement, un manquement à cette obligation ouvrant doit pour le salarié, en application de l'article L. 1226-15, à une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire.
Ces règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors :- que l'inaptitude du salarié, quelque soit le moment ou elle est constatée ou invoquée a, au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie ;- que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
Au cas d'espèce il résulte des documents produits et des débats :- que M X... a été victime d'un accident du travail le 12 février 2005 qui a eu pour conséquences le sectionnement de quatre doigts de la main droite ;- qu'ensuite de cet accident du travail il a été en arrêt de travail de façon continue du 12 février 2005 au 5 janvier 2008 ;- qu'en janvier 2008 il a été déclaré consolidé par la caisse primaire d'assurance maladie et apte par la médecine du travail à reprendre son poste, comme l'indique le médecin, " sans aucune restriction " sauf à revoir pour bilan dans un mois ou avant si nécessaire ;- qu'il a repris son poste entre janvier 2008 et juin 2008 ;- qu'à compter de juin 2008 il a été de nouveau en arrêt de travail ininterrompu jusqu'en juin 2009, arrêts de travail qui lui ont été délivrés pour maladie non professionnelle et dont il n'est pas allégué qu'ils aient été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie comme pouvant être une conséquence de l'accident de 2005 ;- que c'est au terme de cette période d'arrêts de travail successifs que le 3 juillet 2009 le médecin du travail a déclaré M. X... inapte à tout poste dans l'entreprise en une seule visite en raison d'un danger immédiat ;- que c'est ensuite de cet avis d'inaptitude et de l'impossibilité de le reclasser que M. X... a été licencié.
Pour imputer son inaptitude ayant justifié son licenciement à son accident du travail M. X... produit aux débats :- tout son dossier médical faisant suite à son accident du travail et notamment tous les arrêts travail qui lui ont alors été délivrés par le docteur Y... le chirurgien orthopédique qui l'a opéré et suivi ;- la notification de sa consolidation du 1er février 2008 ;- les documents médicaux relatifs à sa rechute après le 27 avril 2011.
Aucun de ces documents ne permet de relier l'inaptitude qui a motivé son licenciement à son accident du travail.
Ses arrêts de travail entre le mois de juin 2008 et l'avis d'inaptitude du 3 juillet 2009 qui sont versés aux débats par le seul employeur font apparaître qu'ils ont été délivrés pour maladie non professionnelle par le docteur Joel Z... puis, à compter du 1er juillet 2008, par le docteur A... du centre médico psychologique du Mans, M X... souffrant d'un syndrome anxiodépressif.
Les documents médicaux établis à compter d'avril 2011 et qui sont postérieurs de près de deux ans à son licenciement le 5 août 2009 n'évoquent que les conséquences de ses blessures de la main en constatant une impotence fonctionnelle globale de la main droite, un suivi depuis le mois de mai 2011 en raison de douleurs chroniques à la main droite et une rechute de l'accident du travail constatée le 16 janvier 2013.
X... n'a pas saisi la caisse primaire d'assurance maladie d'une demande de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de ses arrêts de travail entre juin 2008 et juillet 2009 qui ont conduit à son inaptitude comme pouvant être une conséquence de son accident du travail.
Ainsi, en l'état des éléments soumis à la cour, le lien même partiel entre l'inaptitude de M X... et son accident du travail n'est pas établie.
La recherche par M X... d'une faute inexcusable de son employeur dans la survenue de son accident du travail du 12 février 2005 est sans incidence sur ce point.
En tout état de cause rien ne permet d'établir que l'employeur ait seulement pu penser-et a fortiori ait eu connaissance-au moment du licenciement de ce que l'inaptitude de M. X... ait pu être en lien avec son accident du travail.
En effet :- M. X... a repris son poste en février 2008 après un avis du médecin du travail en date du 3 janvier 2008 le déclarant, après visite du poste effectuée le 20 décembre 2007 " Apte à la reprise du travail à son poste. A revoir pour bilan dans un mois ou avant si nécessaire " ;- les arrêts de travail qui lui ont été délivrés à compter de juin 2008 et qui ont été reçus par l'employeur ont été établis par docteur Joel Z... et non par le médecin qui le suivait dans cadre de son accident du travail, puis, à compter du 1er juillet 2008, par docteur A... médecin au centre médico psychologique du Mans et les attestations de paiement de la caisse primaire d'assurance maladie font apparaître qu'il était en " maladie " ; M. X... ne soutient pas avoir plus précisément et d'une façon ou d'une autre avisé son employeur de sa pathologie et ne produit pas le moindre élément permettant d'établir que cet employeur ait pu penser qu'il puisse exister un lien entre son inaptitude-dont il est avérée qu'elle était liée à son état dépressif-et son accident du travail et il ne s'est pas présenté à l'entretien préalable pour expliquer sa situation.
Le seul fait que les délégués du personnel ait été consulté le 23 juillet 2009 sur le projet de licenciement et le reclassement éventuel de M. X... ne permet pas de considérer que l'employeur ait pu penser que l'inaptitude de son salarié puisse avoir un lien avec son accident du travail.
Il s'ensuit que, par voie d'infirmation du jugement, M. X... doit être débouté de toutes ses demandes.
L'équité commande le rejet des demandes des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
STATUANT à nouveau et y AJOUTANT,
DÉBOUTE M. X... de toutes ses demandes.
DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes.
CONDAMNE M. X... aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/02668
Date de la décision : 08/12/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-12-08;13.02668 ?
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