La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2015 | FRANCE | N°13/03122

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 27 octobre 2015, 13/03122


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 27 Octobre 2015

ARRÊT N clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 03122.
Ordonnance Référé, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 19 Novembre 2013, enregistrée sous le no R 13/ 00038

APPELANTS :
Monsieur Jean-Claude X... ... 53940 SAINT BERTHEVIN
SYNDICAT CFE-CGC-BTP 15 rue de Londres 75009 PARIS
représentés par Maître LONG, avocat substituant Maître Eve DREYFUS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :
La Société EI

FFFAGE ENERGIE MAINE BRETAGNE anciennement dénommée Société EIFFAGE ENERGIE ANJOU MAINE Zone Industriell...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 27 Octobre 2015

ARRÊT N clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 03122.
Ordonnance Référé, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 19 Novembre 2013, enregistrée sous le no R 13/ 00038

APPELANTS :
Monsieur Jean-Claude X... ... 53940 SAINT BERTHEVIN
SYNDICAT CFE-CGC-BTP 15 rue de Londres 75009 PARIS
représentés par Maître LONG, avocat substituant Maître Eve DREYFUS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :
La Société EIFFFAGE ENERGIE MAINE BRETAGNE anciennement dénommée Société EIFFAGE ENERGIE ANJOU MAINE Zone Industrielle EST 4, rue des Charmilles 35510 CESSON SEVIGNE
représentée par Maître Olivia GUILHOT, avocat au barreau de PARIS en présence de Madame Y..., directrice des ressources humaines

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT : prononcé le 27 Octobre 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :
Sous-groupe du groupe Eiffage, Eiffage Energie est composé d'une soixantaine de sociétés opérant dans des secteurs divers, tels l'éclairage, l'énergie, le génie mécanique et climatique, les infrastructures de transport et les réseaux de communication.
La société Eiffage Energie Maine Bretagne qui, depuis le 1er octobre 2014, vient aux droits de la société Eiffage Energie Anjou Maine suite à une opération de fusion-absorption, est est une filiale du groupe Eiffage Energie.
Le 12 octobre 1993, le tribunal d'instance d'Aulnay a reconnu l'existence d'une unité économique et sociale (UES) entre les sociétés composant le groupe Eiffage Energie.
Cette UES a conduit à mettre en place :- un comité central d'entreprise et les délégués syndicaux centraux communs ;- des comités d'établissement au niveau de chacune des filiales.
Les dernières élections réalisées dans ce cadre le 6 juin 2011 ont mis en place des institutions représentatives du personnel pour une durée de mandats fixée à quatre ans.
M. Jean-Claude X..., salarié de la société Eiffage Energie Anjou Maine en qualité de technicien automaticien, a alors été élu membre du comité d'établissement. Il a par ailleurs été désigné par le syndicat CFE-CGC-BTP en qualité d'administrateur salarié d'un organisme paritaire du BTP, Constructys Pays de Loire.
Le 5 mars 2012, le comité d'établissement Eiffage Energie Rhône-Alpes, le comité d'établissement Eiffage Energie TÉLÉCOM, le syndicat CGT Eiffage Energie et le syndicat Sud Eiffage IDF ont saisi le tribunal d'instance de Saint-Denis afin de voir constater la disparition de l'UES Eiffage Energie et la nullité de plein droit de tous les accords relatifs à l'UES ou signés en application des accords cadres de l'UES dans chacune des filiales.
Par jugement du 1er février 2013 qualifié en " dernier ressort ", le tribunal d'instance de Saint-Denis a :- constaté que les critères de reconnaissance d'une unité économique et sociale n'étaient plus réunis et, en conséquence, a mis fin à l'UES Eiffage Energie ;- constaté de ce fait que les accords relatifs à l'UES ou signés en application des accords cadres de l'UES étaient caducs et n'avaient donc plus vocation à s'appliquer.
Cette qualification de « dernier ressort » a donné lieu à une saisine du tribunal d'instance aux fins de rectification d'erreur matérielle. Par jugement du 24 mai 2013, le tribunal s'est déclaré incompétent pour statuer sur cette requête.
Certaines parties ont, d'une part, relevé appel de ce jugement, d'autre part, saisi le premier président de la cour d'appel de Paris en référé d'une demande de suspension de l'exécution provisoire.
Par ordonnance du 15 mai 2013, le premier président de la cour d'appel de Paris s'est déclaré incompétent pour statuer en référé sur la demande de suspension de l'exécution provisoire formulée en application de l'article 957 du code de procédure civile.
En vertu du jugement du 1er février 2013, les sociétés membres de l'UES ont considéré que les instances représentatives du personnel et les mandats avaient disparu de sorte que les heures de délégation ont cessé d'être payées à compter de cette date.
Par ordonnance du 5 juillet 2013, le conseiller de la mise en état près la cour d'appel de Paris a déclaré que le jugement du 1er février 2013 était rendu en premier ressort, que les appels étaient recevables et il a dit que le jugement frappé d'appel ne pourrait pas être exécuté et la nouvelle unité économique et sociale mise en place avant que la cour n'ait statué sur le litige.
En vertu de cette décision, la société Eiffage Energie Anjou Maine qui, le 20 février 2013, avait engagé un nouveau processus électoral ayant donné lieu à des contestations et recours, a remis en place les institutions représentatives du personnel antérieures.
Le 17 mai 2013, M. Jean-Claude X... a pris 7 heures de délégation au titre de son mandat d'élu au comité d'établissement. Sur son bulletin de salaire du mois de mai 2013 lui a été déduite la somme de 115, 38 ¿ correspondant à ces 7 heures avec la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » (absences autorisées non payées).
Le 10 octobre 2013, ce salarié et le syndicat CFE-CGC-BTP ont saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Laval afin d'obtenir le paiement de la somme de 115, 38 ¿, la rectification du bulletin de paie du mois de mai 2013 par suppression de la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et le paiement de la somme de 2 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
L'employeur a payé la somme de 115, 38 ¿ en même temps que le salaire du mois d'octobre 2013 en portant la mention suivante : « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ ».
Dans le dernier état de la procédure de première instance, le salarié et le syndicat demandaient à la formation de référé :- d'ordonner à la société Eiffage Energie Anjou Maine de remettre à M. Jean-Claude X... un bulletin de paie pour le mois de mai 2013 conforme en supprimant la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » ;- de lui ordonner de lui remettre un bulletin de paie pour le mois d'octobre 2013 conforme en supprimant la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et en la remplaçant par la mention « RÉGULARISATION RETENUE SUR SALAIRE » ;- de la condamner à payer à chacun d'eux la somme de 2000 ¿ à titre de dommages et intérêts.
Par ordonnance du 19 novembre 2013 qualifiée " en dernier ressort " à laquelle le présent renvoie pour un ample exposé, la formation de référé du conseil de prud'hommes de Laval a :- renvoyé les parties à se pourvoir le cas échéant au fond ;- débouté M. Jean-Claude X... de sa demande de rectification de son bulletin de salaire du mois de mai 2013 et de sa demande de modification de son bulletin de salaire du mois d'octobre 2013 ;- débouté M. Jean-Claude X... et le syndicat CFE-CGC-BTP de leurs demandes de dommages et intérêts et d'indemnité de procédure ;- débouté la société Eiffage Energie Anjou Maine de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.
M. Jean-Claude X... et le syndicat CFE-CGC-BTP ont régulièrement relevé appel de cette décision par lettre recommandée postée le 29 novembre 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 8 septembre 2015 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 8 septembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles M. Jean-Claude X... et le syndicat CFE-CGC-BTP demandent à la cour de :
- dire que l'ordonnance entreprise a été qualifiée par erreur comme rendue « dernier ressort » et de déclarer l'appel recevable ;- d'infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;- d'ordonner à la société Eiffage Energie Maine Bretagne venant aux droits de la société Eiffage Energie Anjou Maine de : ¿ lui remettre un bulletin de paie pour le mois de mai 2013 conforme en supprimant la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » ; ¿ lui remettre un bulletin de paie pour le mois d'octobre 2013 conforme en supprimant la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et en la remplaçant par « régularisation retenue sur salaire » ;- de condamner la société Eiffage Energie Maine Bretagne à leur payer la somme de 2000 ¿ à titre de dommages et intérêts et une indemnité de procédure de même montant ;- de la condamner aux entiers dépens.
Les appelants font valoir en substance que :
Sur la fin de non-recevoir soulevée par l'intimée en vertu des dispositions de l'article R. 1462-1 du code du travail :- dès lors qu'il est demandé à la formation de référé de supprimer une mention et de la remplacer par une autre, la demande ne peut pas être assimilée à une simple demande de remise d'un bulletin de salaire non susceptible d'appel en application du texte susvisé mais elle s'analyse en une demande de modification des bulletins de paie en cause qui ouvre la voie de l'appel ;- c'est donc par erreur que l'ordonnance de référé a été rendue en dernier ressort ;
Sur la demande de modification des bulletins de salaire :- c'est à tort que la société Eiffage Energie Anjou Maine a, ensuite du jugement rendu par le tribunal d'instance de Saint-Denis le 1er février 2013, considéré que les instances représentatives du personnel n'étaient plus en place et que les mandats avaient disparu ; en effet, non seulement, le jugement ne pouvait pas être considéré comme exécutoire en ce qu'il avait été qualifié par erreur de rendu en dernier ressort, mais, en tout état de cause, même une décision exécutoire n'aurait pas permis la suppression des mandats en cours ; seuls les mandats directement rattachés au périmètre de l'UES auraient pu être impactés par le jugement du 1er février 2013 s'il avait été exécutoire à l'exclusion de ceux relatifs aux IRP mises en place au niveau des entreprises composant l'UES ; les mandats électifs des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel se poursuivaient donc obligatoirement au minimum jusqu'aux nouvelles élections ; il s'agit là d'un principe constant du droit électoral nécessaire pour garantir la continuité de la représentation du personnel ;- ne pas payer les heures de délégation constituait donc de la part de l'employeur le délit d'entrave ;- la retenue de la somme de 115, 38 ¿ constituait un trouble manifestement illicite ;- certes, ces heures ont finalement été payées mais les heures de délégation étant considérées comme du temps de travail effectif, aucune mention du bulletin de salaire ne doit permettre d'établir une distinction entre les heures travaillées et les heures de délégation ; a fortiori ces heures ne doivent-elles pas apparaître comme des absences ; en lui payant la somme susvisée sous l'intitulé « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ », la société Eiffage Energie Anjou Maine a identifié la prise d'heures de délégation ;- son refus de modifier son bulletin de paie constitue un trouble manifestement illicite et il est révélateur dans la mesure où la modification matérialiserait le délit d'entrave ;
- faire apparaître des heures de délégation comme des absences est, non seulement illicite, mais discriminatoire ;- l'argument tiré d'une prétendue impossibilité matérielle d'établir des bulletins de paie conformes au motif que la paie de l'année 2013 est close ne correspond pas à la réalité car l'employeur a été en mesure d'établir de nouveaux bulletins de paie pour certains salariés ; par ailleurs, les éventuelles difficultés d'ordre pratique ne lui sont pas opposables ;
Sur la demande de dommages et intérêts :- la privation pendant cinq mois de la somme de 115, 38 ¿ et le refus d'établir un bulletin de paie conforme sont pour le salarié à l'origine d'un préjudice ;- le syndicat CFE-CGC-BTP a intérêt à agir en application de l'article L. 2132-3 du code du travail dans la mesure où la problématique relative aux heures de délégation concerne l'ensemble de la profession et met en jeu des intérêts collectifs ;- le fait de porter atteinte au droit syndical dans l'entreprise est générateur d'un préjudice subi par la profession à laquelle l'entreprise appartient.
Vu les conclusions dites " récapitulatives " enregistrées au greffe le 15 décembre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société Eiffage Energie Maine Bretagne venant aux droits de la société Eiffage Energie Anjou Maine demande à la cour de :
- à titre principal, déclarer les appels de M. Jean-Claude X... et du syndicat CFE-CGC-BTP irrecevables au motif que l'ordonnance entreprise, rendue en dernier ressort, n'est pas susceptible d'appel ;
- subsidiairement au fond, de confirmer cette décision sauf en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;- de débouter les appelants de toutes leurs prétentions et de les condamner à lui payer la somme de 1 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'intimée fait valoir en substance que :
Sur la recevabilité des appels :- en application de l'article R. 1462-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort sur la demande non chiffrée de remise de divers documents, notamment, d'un bulletin de paie ; les demandes de M. Jean-Claude X... tendant à la remise de bulletins de paie conformes pour les mois de mai et d'octobre 2013 ne sont donc pas susceptibles d'appel ; en outre, aucune des demandes chiffrées du salarié ou du syndicat n'excède le taux du ressort ;
Sur la demande de modification des bulletins de paie :- en considération de l'ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 5 juillet 2013, les instances représentatives du personnel ont été rétablies et les retenues opérées au titre des heures de délégation prises ont été régularisées et les sommes dues payées ;- la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » ne contrevient pas aux dispositions de l'article R. 3243-4 du code du travail ;- les heures de délégation ont bien été prises en compte comme du temps de travail effectif au titre de l'année 2013 et elle a tenu compte de la somme de 115, 38 ¿ pour calculer le montant de la participation et de l'intéressement dus au salarié ;- techniquement, dès lors que la paie 2013 est clôturée, son logiciel de paie ne permet pas de refaire des bulletins de salaire ;
Sur la demande de dommages et intérêts :- les appelants ne rapportent ni la preuve d'une faute ni celle d'un préjudice ;- compte tenu de la contestation sérieuse qui existe par rapport à la demande de modification sollicitée, la demande de dommages et intérêts outre qu'elle n'est pas fondée ne saurait relever du juge des référés.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la recevabilité des appels :
S'il exact qu'aux termes de l'article R. 1462-1 2o du code du travail, le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort lorsque la demande tend à la remise, même sous astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer, les demandes qui, comme en l'espèce, tendent à obtenir la rectification de bulletins de paie par suppression d'une mention et remplacement de cette mention par une autre afin que les heures de délégation n'apparaissent pas comme des heures d'absence ne peuvent pas être assimilées à la simple demande de remise d'un bulletin de paie concernée par le texte susvisé.
Les demandes de M. Jean-Claude X... formées aux fins de modification de ses bulletins de paie des mois de mai et octobre 2013 présentent donc un caractère indéterminé de sorte que c'est à tort que l'ordonnance entreprise a été qualifiée en " dernier ressort " et que les appels formés par M. Jean-Claude X... et le syndicat CFE-CGC-BTP sont bien recevables.

Sur les demandes de modification des bulletins de paie des mois de mai et octobre 2013 :
Aux termes de l'article R. 1455-6 du code du travail, " La formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite. ".
L'article L. 2325-7 du même code qui édicte une présomption de bonne utilisation des heures de délégation et impose à l'employeur de les rémunérer avant d'en contester l'utilisation dispose quant à lui que " Le temps passé en heures de délégation est de plein droit considéré comme temps de travail et payé à l'échéance normale. L'employeur qui entend contester l'utilisation faite des heures de délégation saisit le juge judiciaire. ".
L'article R. 3243-4 du code du travail énonce : " Il est interdit de faire mention sur le bulletin de paie de l'exercice du droit de grève ou de l'activité de représentation des salariés. La nature et le montant de la rémunération de l'activité de représentation figurent sur une fiche annexée au bulletin de paie qui a le même régime juridique que celui-ci et que l'employeur établit et fournit au salarié. ".
En vertu de ce texte, aucune mention du bulletin de paie ne doit permettre d'établir une distinction entre les heures travaillées et les heures de délégation, la rémunération des heures de délégation utilisées pendant le temps de travail devant, sur le bulletin de paie, être confondue avec celle des heures travaillées.
Au cas d'espèce, les mentions qui font apparaître, sur les bulletins de salaire, les heures de délégation utilisées pendant le temps de travail en les identifiant comme des heures d'absence autorisées constituent des mentions illicites en ce qu'elles contreviennent tant aux dispositions de l'article L. 2325-7 du code du travail qu'à celles de l'article R. 3243-4 du même code.
L'attitude consistant à refuser de modifier les bulletins de paie des mois de mai et octobre 2013 en supprimant la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » caractérise de la part de l'employeur un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser. La société Eiffage Energie Maine Bretagne ne produit aucune pièce pour tenter de justifier de l'impossibilité technique qu'elle invoque de délivrer à l'appelant des bulletins de paie conformes. C'est à juste titre que ce dernier fait valoir que ces éventuelles difficultés techniques ne lui sont pas opposables, étant observé qu'à supposer établi que le logiciel de paie utilisé par la société Eiffage Energie Maine Bretagne ne permette pas d'éditer un bulletin de paie conforme, rien ne paraît pouvoir empêcher l'établissement d'un bulletin de paie rectificatif manuscrit.
Il convient en conséquence d'ordonner à la société Eiffage Energie Maine Bretagne de remettre à M. Jean-Claude X... :- un bulletin de paie pour le mois de mai 2013 ne comportant plus la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et de remplacer cette mention par la mention " RETENUE SUR SALAIRE " ;- un bulletin de paie pour le mois d'octobre 2013 ne comportant plus la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et de remplacer cette mention par la mention " RÉGULARISATION RETENUE SUR SALAIRE ".

Sur les demandes de dommages et intérêts :
L'intimée ne discute pas l'intérêt à agir du syndicat CFE-CGC-BTP.
Le fait pour l'employeur d'avoir payé les heures de délégation dues en les identifiant comme des absences autorisées alors qu'elles constituaient du travail effectif et devaient apparaître comme tel dans la rémunération, et d'avoir persisté dans le refus de supprimer cette mention pour la remplacer par une mention permettant de présenter la rémunération de ces heures de délégation comme confondue avec celle des heures travaillées constitue une attitude fautive à l'origine pour chacun des appelants d'un préjudice qui sera réparé par l'allocation, à chacun d'eux, de la somme de 250 ¿ à titre de dommages et intérêts.

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, en matière sociale et de référé, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Dit que l'ordonnance entreprise a été rendue en premier ressort et déclare recevables les appels formés contre elle par M. Jean-Claude X... et par le syndicat CFE-CGC-BTP ;
Infirme cette ordonnance en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a débouté l'employeur de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,
Dit que la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » portée par la société Eiffage Energie Anjou Maine aux droits de laquelle se trouve la société Eiffage Energie Maine Bretagne sur les bulletins de paie de M. Jean-Claude X... des mois de mai et octobre 2013 pour désigner des heures de délégation et le maintien de ces mentions constituent un trouble manifestement illicite ;
Ordonne à la société Eiffage Energie Maine Bretagne de remettre à M. Jean-Claude X... :- un bulletin de paie pour le mois de mai 2013 ne comportant plus la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et de remplacer cette mention par la mention " RETENUE SUR SALAIRE " ;- un bulletin de paie pour le mois d'octobre 2013 ne comportant plus la mention « ABS. AUTORISÉES NON PAYÉ » et de remplacer cette mention par la mention " RÉGULARISATION RETENUE SUR SALAIRE " ;
Condamne la société Eiffage Energie Maine Bretagne à payer à chacun de M. Jean-Claude X... et de le syndicat CFE-CGC-BTP la somme de 250 ¿ à titre de dommages et intérêts et celle de 800 ¿ au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Déboute la société Eiffage Energie Maine Bretagne de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/03122
Date de la décision : 27/10/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-10-27;13.03122 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award