COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 20 Octobre 2015
ARRÊT N aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 00503.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 15 Janvier 2013, enregistrée sous le no 13/ 00031
APPELANTE :
Madame Martine X...... 49220 VERN D'ANJOU
représenté par Maître Gérard MAROT, avocat au barreau d'ANGERS-No du dossier 11047
INTIMES :
Appelée en intervention L'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant L'UNEDIC CGEA DE RENNES Immeuble Le Magister 4 Cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître TOUZET, avocat substituant Maître CREN, avocat au barreau D'ANGERS
La SAS ELCO PCB 347 Avenue Patton 49000 ANGERS
Maître Bernard Y..., es-qualite de mandataire judiciaire de SAS ELCO PCB ... 49018 ANGERS CEDEX 01
représentés par Maître DE LOGIVIERE avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 l4du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Septembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 20 Octobre 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE,
Mme Martine X... a été embauchée le 24 mars 1974 par le société Bull en qualité d'agent technique atelier.
Le département circuits imprimés auquel Mme X... était affectée a été filialisé en 2000 sous la dénomination sociale BCS puis MCI et, le 1er janvier 2009, la société MCI a été reprise par la société Elco PCB.
L'entreprise employait et emploie toujours plus de 50 salariés et la relation de travail entre les parties était soumise à la convention collective de la métallurgie du Maine et Loire.
Dans le dernier état de la relation de travail entre les parties Mme X... occupait un poste d'empileuse et percevait une rémunération mensuelle brute de 1 845 ¿.
A compter du 7 octobre 2008 Mme X... a fait l'objet d'arrêts de travail délivrés par le docteur Z... son médecin traitant renouvelés tous les 8 jours, puis tous les mois, pour maladie non professionnelle.
Mme X... a été examinée par le médecin conseil le 24 décembre 2009 et la CPAM lui a demandé de reprendre son travail en mi-temps thérapeutique à compter du 5 janvier 2010.
Dans le cadre de la visite de reprise de son poste dans l'entreprise, Mme X... a été examinée par le médecin du travail les 15 et 29 janvier 2010 qui a conclu à son " inaptitude à la reprise du travail sur son poste antérieur. A affecter à un poste de type tertiaire, support, magasin (sans port de charges) ".
Ce même jour 29 janvier 2010 la CPAM a reçu un certificat médical du docteur Z... daté du 8 octobre 2008 prescrivant des soins à Mme X... jusqu'au 30 avril 2010 et ce pour maladie professionnelle " douleurs épaule droite résultant d'efforts répétés " dont la première constatation est indiquée comme ayant été faite le 8 octobre 2008.
Le 3 février 2010 Mme X... a déclaré à la CPAM trois maladies professionnelles : épaule droite douloureuse, épicondylite gauche et droite, déclaration qu'elle a confirmée le 4 mars 2010.
Interrogée par l'employeur le 3 février 2010, le médecin du travail a répondu le 5 février 2010 en confirmant que l'état de santé de Mme X... contre-indiquait de manière définitive son affectation à son poste habituel, que compte tenu des importantes limitations fonctionnelles qu'elle présentait et de sa connaissance de ce poste, il était illusoire d'envisager un aménagement ou une transformation de celui ci ; que concernant le reclassement de Mme X..., seuls pouvaient être éventuellement envisagés des postes de type tertiaire (travail administratif) et, qu'en tout état de cause, étaient contre indiqués le port de charges lourdes (plus de 5 kg), le port de charge répété quelque soit le poids ainsi que la réalisation de gestes répétitifs des membres supérieurs.
Le 11 février 2010 la société Elco PCB a convoqué Mme X... à un entretien préalable à licenciement.
Mme X... a alors écrit à son employeur qu'elle était en arrêt de travail pour affection d'origine professionnelle de sorte que la procédure ne pouvait se poursuivre avant que n'intervienne un nouvel avis du médecin du travail à l'issue de cette période.
La société Elco PCB lui a manifesté son désaccord par courrier du 24 février mais a pour autant suspendu la procédure et une nouvelle visite de reprise a eu lieu le 8 mars 2010 à l'issue de laquelle le médecin du travail a " confirmé l'inaptitude prononcée lors de la 2ème visite du 29 janvier 2010 et qui lors de la 2ème visite de reprise du 29 mars 2010 a à nouveau indiqué " inaptitude à la reprise du travail sur son poste antérieur. A affecter à un poste de type tertiaire, support, magasin (sans port de charges).
Ensuite d'une nouvelle convocation le 9 avril à un entretien préalable pour le 19 avril, par courrier en date du 23 avril 2010 Mme X... a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Parallèlement, après avoir notifié à Mme X... le 1er septembre 2010 son refus de prise en charge de ses pathologies au titre de la législation professionnelle, le 6 juillet 2011 la CPAM a reconnu l'origine professionnelle des pathologies déclarées.
Contestant alors son licenciement-en ce que son employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement-et soutenant qu'il lui était dû les indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail, le 16 décembre 2011 Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de demandes subséquentes d'indemnisation.
Par jugement en date du 15 janvier 2013 le conseil de prud'hommes d'Angers :- a constaté que l'inaptitude de Mme X... avait pour origine une ou plusieurs maladies professionnelles et que la société Elco PCB en avait connaissance,- en conséquence a condamné, sur le fondement de l'article L. 1226-14 du code du travail, la société Elco PCB à verser à Mme X... les sommes de 3 890 ¿ à titre d'indemnité compensatrice égale à l'indemnité de préavis et de 16 170, 53 ¿ au titre du complément d'indemnité de licenciement,- a dit que la société Elco PCB avait contrevenu à l'article L. 1226-12 du code du travail absence de notification écrite des motifs s'opposant au reclassement et en conséquence l'a condamné à verser à Mme X... la sommes de 1 500 ¿ à titre de dommages et intérêts,- a ordonné l'exécution provisoire sur la totalité du jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,- a rappelé que les condamnations de nature salariale étaient assorties des intérêts au taux légal à compter de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement,- a débouté la société Elco PCB de toutes ses demandes et l'a condamné à verser à Mme X... la somme de 1 535 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par courrier électronique de son conseil en date du 18 février 2013, Mme X... a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a considéré que la société Elco PCB avait satisfait à son obligation de reclassement.
La société Elco PCB a fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire le 17 décembre 2014 puis d'une liquidation judiciaire le 10 juin 2015 et Me Y... a été désigné en qualité de mandataire liquidateur.
L'AGS a été régulièrement appelée à la cause.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 11 août 2015 et à l'audience Mme X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement et, statuant à nouveau de ce chef, de dire et juger que l'employeur a manqué à cette obligation et de fixer au passif de sa procédure collective sa créance de dommages et intérêts à la somme de 30 000 ¿- subsidiairement, de confirmer le jugement au titre de l'indemnité pour violation de l'article L. 1226-12 du code du travail,- de confirmer le jugement pour le surplus et de condamner Me Y... es qualité à lui verser la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d'appel,- de déclarer la présente décision opposable au CGEA de Rennes.
Elle fait essentiellement valoir :- que son inaptitude avait au moins pour partie une origine professionnelle ce dont l'employeur avait connaissance à la date de la rupture du contrat de travail de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il l'a condamné au paiement des indemnités prévues par les articles L. 1226-10 et 14 du code du travail ;- que la société Elco PCB ne justifie pas avoir respecté son obligation de reclassement notamment par permutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail et ce alors qu'elle employait plus de 50 salariés et faisait partie d'un groupe international ayant des établissements en Italie, Espagne, USA, Chine, Mexique et Inde ;- que son préjudice justifie l'indemnisation qu'elle demande.
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 10 septembre 2015 Me Y... en qualité de mandataire liquidateur de la société Elco PCB et à l'audience demande à la cour :- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit partiellement aux demandes de Mme X... et de la débouter de toutes ses demandes,- de la condamner à lui verser la somme de 3 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société stigmatise le comportement de Mme X... dont les arrêts de travail n'étaient pas d'origine professionnelle, qui, âgée de 56 ans, n'a jamais eu l'intention de reprendre son travail et qui a alors initié une procédure de reconnaissance de maladie professionnelle pour éviter toute reprise d'emploi, se faire délivrer un arrêt de travail professionnel et en prendre prétexte pour ne pas se rendre à entretien préalable ; elle expose qu'à compter du 1er avis d'inaptitude du 15 janvier 2010 elle a cherché des solutions de reclassement pour sa salariée en interne et en externe, a interrogé le médecin du travail, a convoqué les délégués du personnel pour les informer de la situation de Mme X... et sollicité leur avis ; que Mme X... a joué la montre en demandant un nouvel examen médical sur son aptitude qui a eu lieu le 8 mars 2010 suivie d'une seconde le 29 mars tout en faisant parvenir le 4 avril 2010 sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle ; qu'elle n'a pas contesté le licenciement intervenu le 23 avril 2010 et a attendu plus d'un an pour, de mauvaise foi, venir reprocher à son employeur de ne pas avoir respecté la procédure de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle.
Elle soutient en résumé :- que Mme X... ne peut se prévaloir des règles sur l'inaptitude d'origine professionnelle pour obtenir paiement, sur le fondement des articles L. 1226-14 et 16 du code du travail d'une indemnité équivalente à l'indemnité de préavis et l'indemnité de licenciement doublée :
- parce qu'en droit :- à la date de son licenciement elle n'avait pas connaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme X... prononcée par la CPAM ;- son droit à indemnité est né le jour de son licenciement de sorte que, si le caractère professionnel de la maladie n'est reconnue que postérieurement, elle ne peut revendiquer le paiement des indemnités spéciales de rupture ;
- parce qu'en fait :- la maladie de Mme X... n'a été reconnue d'origine professionnelle que le 6 juillet 2011 soit de nombreux mois après le licenciement ;- que Mme X... ne peut se prévaloir du caractère professionnel de son inaptitude parce qu'elle n'en rapporte pas la preuve qui lui incombe ; que ses arrêts de travail qui ont précédé l'avis d'inaptitude ont tous, et ce depuis 2008, été établis pour motifs non professionnels, que la demande de reconnaissance d'origine professionnelle est postérieure à l'avis d'inaptitude du médecin du travail de janvier 2010 ; que le recours contre la décision de refus de prise en charge de la CPAM lui a été caché ; que la décision de prise en charge par la CPAM de juillet 2011 lui a été déclarée inopposable en raison de l'absence de contradictoire ; que cette décision non contradictoire a été prise alors que Mme X... a produit un faux certificat médical daté du 8 octobre 2008 et que la fraude corrompt tout ;- qu'elle même a scrupuleusement respecté son obligation de reclassement ; que cette obligation ne lui impose pas de former le salarié ni de lui proposer des postes qui ne correspondent ni à ses compétences ni à son expérience ; qu'elle justifie par les documents qu'elle produit avoir fait son possible pour reclasser Mme X... en interne comme en externe dans le cadre des prescriptions du médecin du travail ; que les délégués du personnel consultés en ont convenu ;- que la salariée ne justifie pas de son préjudice.
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 11 septembre 2015 et à l'audience, l'AGS-CGEA de Rennes demande à la cour :- réformant le jugement entrepris, de dire et juger irrecevable et non fondée Mme X... en ses demandes et de l'en débouter,- subsidiairement, au cas où une créance serait fixée au profit de Mme X... au passif de la société, de dire et juger que l'AGS ne lui devra garantie que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code,- de condamner Mme X... aux dépens.
Elle reprend à son compte les moyens soulevés par la société Elco PCB.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 14 septembre 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur l'application des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail,
Dans le cas d'une inaptitude d'origine professionnelle, en application de l'article L. 1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 12346 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.
Au cas d'espèce, il résulte de la chronologie des faits reprise par la cour dans son exposé ci dessus :- que Mme X..., qui travaillait depuis 34 ans dans un atelier et occupait en dernier lieu un poste d'empileuse, a été en arrêt de travail ininterrompu à compter du 8 octobre 2008 ;- qu'aucun des certificats médicaux de son médecin traitant ne fait mention de ce que sa pathologie justifiant ces arrêts de travail était d'origine professionnelle ; qu'alors que le 5 janvier 2010 la CPAM lui a demandé de reprendre son travail dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique, lors de l'examen médical de reprise, le médecin du travail a établi le 15 janvier 2010 un premier certificat médical d'inaptitude et le 29 janvier suivant un second certificat duquel il résulte " une inaptitude à la reprise du travail sur son poste antérieur. A affecter à un poste de type tertiaire, support, magasin (sans port de charges) " ;- que Mme X... s'est alors vu délivré, par un certificat médical ¿ initial " de soins sans arrêt de travail jusqu'au 30 avril 2010 pour maladie professionnelle avec pour précision : " douleurs épaule droite résultant d'efforts répétés " et dont la première constatation est indiquée comme datant du 8 octobre 2008, certificat médical comportant une date inexacte ;- qu'ayant fait parvenir à la CPAM le 3 février 2010 une déclaration-réitérée dans les formes le 4 mars 2010- de maladie professionnelle pour une épaule droite douloureuse, pour une épicondylite droite et une épicondylite gauche, l'employeur en a été régulièrement avisé par la caisse, ce qu'il ne conteste pas ;- que dans le cadre de la visite de reprise faisant suite au certificat médical initial de soins pour une pathologie d'origine professionnelle jusqu'au 30 avril 2010, deux visites de reprise ont été organisées les 8 et 29 mars 2010, le médecin du travail ayant conclu dans les mêmes termes que lors de ses avis des 15 et 29 janvier 2010 ;- que c'est dans cet état que le 9 avril 2010 la société Elco PCB a convoqué Mme X... à un entretien préalable et qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 23 avril 2010, l'employeur lui ayant versé les indemnités dues en cas d'inaptitude d'origine non professionnelle.
Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quelque soit le moment ou elle est constatée ou invoquée a, au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ;
Il est ainsi sans conséquence à cet égard :- que la CPAM ait postérieurement au licenciement et le1er septembre 2010 notifiée un refus de prise en charge motivée au demeurant par le seul fait que l'instruction était toujours en cours,- que la décision définitive de prendre en charge au titre de la législation professionnelle des trois pathologies déclarées par Mme X... le 4 mars 2010 soit intervenue le 6 juillet 2011,- que par une décision du 3 janvier 2012 la commission de recours amiable de la CPAM ait admis que cette prise en charge inopposable à l'employeur, au demeurant du seul fait du caractère définitif de la décision de refus de prise en charge notifiée le 1er septembre 2010 faute pour elle de l'avoir retirer dans le délai de 4 mois.
Ceci posé, il est tout d'abord établi par les documents produits que l'inaptitude qui a justifié le licenciement de Mme X... était effectivement en lien avec les pathologies qui ont été reconnues comme d'origine professionnelle-et qu'en tout cas l'employeur n'en rapporte pas la preuve contraire-dès lors :- que les avis d'inaptitude de la médecine du travail précisent tous " inaptitude à la reprise du travail sur son poste antérieur. A affecter à un poste de type tertiaire, support, magasin (sans port de charges) et que, dans ses réponses à l'employeur, le médecin du travail confirme que l'état de santé de Mme X... contre-indique de manière définitive son affection à son poste habituel, que compte tenu des importantes limitations fonctionnelles qu'elle présentait et de sa connaissance de ce poste il était illusoire d'envisager un aménagement ou une transformation de celui ci, que concernant le reclassement de Mme X..., seuls pouvaient être éventuellement envisagés des postes de type tertiaire (travail administratif) et, qu'en tout état de cause, étaient contre indiqués le port de charges lourdes (plus de 5 kg), le port de charge répété quelque soit le poids ainsi que la réalisation de gestes répétitifs des membres supérieurs ;- que ces avis médicaux sur l'état de santé de Mme X... et ses conséquences en terme de handicap sont parfaitement cohérents avec les affections déclarées et reconnues comme d'origine professionnelle à savoir : douleur de l'épaule droite, épicondylite droite et épicondylite gauche qui sont des affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail (Mme X... travaillait depuis plus de 35 ans dans l'entreprise sur des postes de nature à entraîner, avec le temps, ce type de lésions).
Il est ensuite également établi que, lorsqu'elle a procédé au licenciement de Mme X... le 23 avril 2010, la société Elco PCB avait connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude dès lors :- que dès le 11 mars 2010 la déclaration de maladie professionnelle faite par sa salariée qui était en arrêt de travail ininterrompu depuis octobre 2008 lui a été transmise ;- qu'elle a eu connaissance des avis d'inaptitude de Mme X... à la reprise du travail à son poste antérieur et de la nécessité de l'affecter à un poste de type tertiaire, support, magasin (sans port de charges) et des précisions qui lui ont été données afin d'envisager son reclassement (importantes limitations fonctionnelles) ;- qu'elle savait que la salarié travaillait depuis 35 ans dans un poste de nature à générer le type de lésions dont elle était atteinte et qui ont été déclarées et reconnues comme d'origine professionnelle ;- que sa connaissance avérée de la cause médicale de l'inaptitude de Mme X... ressort d'un mail de la DRH du 19 janvier 2010 dans le cadre d'une recherche de reclassement, dans lequel elle évoque les " gros problèmes d'articulations douloureuses " de la salariée.
L'employeur a d'ailleurs pris la précaution de consulter les délégués du personnel.
La circonstance que les arrêts de travail de Mme X... aient d'abord été prescrits au titre d'une maladie de droit commun est sans conséquence, étant observé qu'il ne revient pas au médecin prescripteur d'apprécier l'existence ou non d'une maladie professionnelle, l'essentiel étant que les lésions aient été médicalement constatées, ce qui, au cas d'espèce, n'est pas contestable.
Le fait que ce médecin ait ensuite établi un certificat médical prescrivant des soins pour pathologies d'origine professionnelle avec une date d'apparition des lésions remontant au premier arrêt de travail prescrit au titre d'une maladie de droit commun en l'antidatant est également sans conséquence sur la solution du litige et ne peut en toute hypothèse caractériser une fraude de la salariée.
Il est ainsi établi que l'inaptitude de Mme X... qui a justifié son licenciement avait au moins partiellement pour origine les maladies reconnues comme d'origine professionnelle et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a, par application des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail condamné la société Elco PCB à verser à Mme X... les indemnités qui lui étaient effectivement dues.
Sur l'obligation de reclassement,
En application des dispositions de l'article L1226-2 dans l'hypothèse d'une inaptitude d'origine non professionnelle à l'emploi précédemment occupé et L1226-10 dans l'hypothèse d'une inaptitude d'origine professionnelle, l'employeur propose au salarié un autre emploi approprié à ses capacités ; cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé au besoin par mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Les possibilités de reclassement sont à rechercher dans le périmètre de l'entreprise, y compris dans les établissements situés sur d'autres régions ou au sein de l'unité économique et sociale à laquelle elle appartient. En cas d'appartenance à un groupe de sociétés, cette recherche s'étend aux entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, éventuellement à l'étranger, sauf dans ce dernier cas à l'employeur de démontrer que la législation locale ne permet aucun reclassement.
L'obligation de reclassement dont la preuve doit et ne peut qu'être rapportée par l'employeur est une obligation de moyen renforcée.
Mme X... reproche à son employeur de ne pas avoir loyalement recherché des possibilités de reclassement dans les entreprises du groupe auquel la société Elco PCB appartient en intégrant dans ses recherches les mesures de mutation, transformation de poste ou aménagements du temps de travail impérativement prescrites par la loi.
Mme X..., qui était alors âgée de 56 ans, était employée depuis 34 ans dans la partie atelier de l'entreprise et, pour répondre aux prescriptions du médecin du travail, il ne pouvait lui être proposé qu'un poste dans le tertiaire-à savoir un poste administratif-ne nécessitant pas de port de charges de plus de 5 kg ou de port de charges répété et de gestes répétitifs des membres supérieurs. Elle ne peut donc reprocher à son employeur de ne pas avoir envisager une adaptation de son poste et/ ou des aménagement des horaires sur son poste qu'elle ne pouvait plus occuper.
Alors que l'employeur produit des échanges de courriels entre la DRH de les responsables français de la société évoquant très précisément sa situation de santé et les postes recherchés compte tenu des prescriptions du médecin du travail interrogé, Mme X... est mal fondée à soutenir qu'il n'a pas été recherché pour elle précisément un reclassement sur un poste dans le tertiaire qui, aurait d'ailleurs nécessité une formation de la salariée excédant l'obligation d'adaptabilité à l'emploi incombant à l'employeur et qui, au demeurant, n'était pas disponible dans l'entreprise qui était en situation de réduire ses effectifs et a fini par faire l'objet d'un redressement judiciaire en 2014 puis d'une liquidation judiciaire en 2015.
Il est enfin justifié de l'envoi d'un courrier du 19 mars 2010 au siège de la société en Italie expliquant précisément la situation de Mme X... et tous les postes susceptibles de lui convenir compte tenu la encore des prescriptions du médecin du travail et rappelant l'urgence d'une réponse, courrier auquel il a été répondu le 25 mars qu'aucun poste correspondant à la demande n'était disponible dans le groupe en Italie, Espagne ou Chine dans la mesure où le processus de restructuration entraînait une réduction globale des effectifs.
Les délégués du personnel ont été consultés le 9 avril 2010 en parfaite connaissance des éléments de la cause et ont convenu que l'examen commun des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise s'avérait négatif.
Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande en indemnisation pour non respect par son employeur de l'obligation de reclassement.
Sur le respect par l'employeur de son obligation de faire connaître par écrit à la salariée les motifs qui s'opposaient à son reclassement,
Aux termes de l'article L. 1226-12 du code du travail lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.
Dans la lettre de convocation du 9 avril 2010 convoquant Mme X... à un entretien préalable à son licenciement, la société lui indique qu'elle n'est pas en mesure après recherches de reclassement, en tenant compte des conclusions écrites du médecin du travail, de l'avis des délégués du personnel, de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités et la lettre de licenciement est particulièrement développée sur ce point.
Il s'ensuit que la société Elco PCB a effectivement fait connaître par écrit à Mme X... les motifs s'opposant à son reclassement.
Le jugement entrepris doit donc être infirmé et Mme X... déboutée de sa demande en dommages et intérêts de ce chef.
L'équité commande la confirmation du jugement de ce chef et le rejet des demandes des parties fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Elco PCB à verser à Mme X... la somme de 1 500 ¿ pour non respect des dispositions de l'article L. 1226-12 du code du travail
STATUANT à nouveau de ce chef DÉBOUTE Mme X... de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Y ajoutant :
DÉBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Mme X... aux dépens d'appel.