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22/09/2015 | FRANCE | N°13/01671

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 22 septembre 2015, 13/01671


COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N
ic/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01671.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 15 Mai 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00969

ARRÊT DU 22 Septembre 2015

APPELANT :

Monsieur Tony X...
...
72680 SAINT MARS LA BRIERE

comparant-assisté de Maître Thierry PAVET de la SCP PAVET-BENOIST-DUPUY-RENOU-LECORNUE, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :

LA SAS REV HABITAT CHOLE

T
4 rue de gutenberg
49280 LA SEGUINIERE

représentée par Maître Valérie BURGAUD, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
...

COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N
ic/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01671.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 15 Mai 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00969

ARRÊT DU 22 Septembre 2015

APPELANT :

Monsieur Tony X...
...
72680 SAINT MARS LA BRIERE

comparant-assisté de Maître Thierry PAVET de la SCP PAVET-BENOIST-DUPUY-RENOU-LECORNUE, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :

LA SAS REV HABITAT CHOLET
4 rue de gutenberg
49280 LA SEGUINIERE

représentée par Maître Valérie BURGAUD, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne JOUANARD, président
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller
Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT :
prononcé le 22 Septembre 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS et PROCÉDURE

M. Tony X... a été recruté le 7 septembre 1999 en qualité de Voyageur Représentant Placier (VRP) exclusif par la société REV Habitat Cholet dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Il était chargé de proposer et de vendre les articles suivants : véranda, article de survitrage, double vitrage, volets roulants, portes de garage, menuiseries PVC, stores.

La société Rev Habitat Cholet emploie un effectif de plus de 11 salariés.

Le contrat de travail prévoyait une rémunération fixe de 4 500 francs brut et une commission de base sur le chiffre d'affaires HT supérieur à 50 000 francs dont le taux était variable selon les produits (véranda 6. 5 à 5. 5 %, survitrage 8 %, volet roulant 6 %, store 5 %, menuiserie 5 à 6 %, Tisol et Microbilles 10 %) et un avantage en nature relatif à l'utilisation d'un véhicule de fonction.
Il stipulait pour les frais professionnels, que " le taux de commission comprend le remboursement au représentant de la totalité de ses frais professionnels, que ces frais professionnels seront donc intégralement à la charge du représentant ".

Un avenant du 21 décembre 1999 a porté le salaire fixe de M. X... à 6 000 francs et le seuil minimum du chiffre d'affaire mensuel à 100 000 francs HT.

Le 3 novembre 2005, M. X... rattaché à l'agence d'Angers (Saint Sylvain d'Anjou) a rejoint l'agence de Sablé sur Sarthe sous la direction de M. Y....

En raison d'une baisse des résultats commerciaux, l'agence de Sablé sur Sarthe a été fermée à la fin du mois d'avril 2009, M. X... étant réintégré dans l'agence d'Angers.

Dans un courrier du 5 avril 2007, l'inspecteur du travail a invité la société Rev Habitat Cholet à régulariser un avenant au contrat de travail des VRP précisant " quel taux de commission constitue la rémunération et quel taux supplémentaire vient couvrir les frais professionnels engagés " afin de respecter les dispositions réglementaires et jurisprudentielles applicables.

Dans des courriers du 30 mai 2008 puis du 20 avril 2010, l'employeur a alors proposé à M. X... un avenant à son contrat de travail prévoyant :
- un salaire fixe de 914. 72 euros brut,
- une commission brute suivant les taux fixés dans le barème QRC correspondant pour partie au carburant pour le montant réel sur présentation de justificatifs dans la limite de 2 860 euros annuels, pour l'autre partie à la commission nette.
M. X... a refusé de signer ledit avenant.

Le 19 mars 2010, la direction de l'entreprise a adressé à M. X... un rappel à l'ordre sur une nette baisse de son chiffre d'affaires depuis 3 mois.
M. X... a contesté ce courrier soulignant ses bons résultats à titre personnel et expliquant ses difficultés par le manque de moyens nécessaires pour alimenter les rendez-vous clients.

Le 13 juillet 2010, l'employeur a notifié à M. X... un premier avertissement pour manque de résultat en raison de l'insuffisance du chiffre d'affaires au cours des trois derniers mois (avril 2010/ juin 2010) malgré les moyens mis en place (salons, foires, PO, formations).

Le 4 mars 2011, l'employeur a notifié à M. X... un nouvel avertissement en raison d'un " chiffre d'affaires extrêmement préoccupant (septembre 2010 CA HT 18 419 euros, octobre 2010 CA HT 6 687 euros, novembre 2010 HT 1991 euros, décembre 2010 8 294 euros, janvier 2011 HT 14 914 euros et février CA HT 11 210 euros) soit une moyenne de 10 300 euros mensuel. Malgré les moyens mis en place depuis le début de l'année afin de vous redonner de l'activité (publicité, opérations mailing), les résultats ne sont pas à hauteur des attentes. A ce jour, nous ne pouvons que constater une réelle difficulté à exercer votre travail. Nous vous reprochons un manque d'implication personnelle quant à la prospection en clientèle Nous vous rappelons que votre statut de VRP vous oblige à démarcher les clients. il vous appartient d'aller décrocher les rendez-vous et ne pas attendre qu'ils vous soient attribués.
Vos résultats sont insuffisants et préjudiciables au bon fonctionnement de l'entreprise.
Un nouveau point sera fait courant avril afin de mesurer vos résultats.
Cependant si dans l'intervalle, la situation devenait encore plus préoccupante, l'entreprise se réserve le droit de rompre sans plus attendre votre contrat de travail ".
Le 11 mai 2011, le salarié a contesté l'avertissement rappelant les bons résultats obtenus par rapport à son objectif et le manque de moyens et outils mis à disposition par l'employeur pour développer le chiffre d'affaires.

Par courrier en date du 28 avril 2011, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 10 mai 2011.

Par courrier du 20 mai 2011, il a reçu notification de son licenciement pour insuffisance professionnelle ainsi motivé :

" Vous avez été embauché le 7 septembre 1999 en qualité de VRP à l'agence d'Angers.
Courant de l'année 2005, vous avez eu l'opportunité de développer un secteur en intégrant l'agence de Sablé mais qui malheureusement s'est soldée par une fermeture de l'établissement en avril 2009 (chiffre d'affaires trop faible, départ de 3 collaborateurs, agence non viable économiquement). Vous avez donc réintégré l'agence d'Angers.
A ce jour, malgré les différents courriers du 19 mars 2010 et les avertissements du 13 juillet 2010 et 4 mars dernier, votre chiffre d'affaires n'a pas progressé de façon régulière. Nous ne pouvons que constater une réelle difficulté dans l'exercice de votre travail.
En effet, il est stipulé dans votre contrat que le représentant s'engage à réaliser un chiffre d'affaire mensuel minimum de 15 245 euros (chiffre de janvier 2000 porté à 18000 euros minimum pour 2011 selon la hausse du coût de la vie).
Sur le début d'année 2010 et malgré la foire du Mans, en mars 2010, les chiffres étaient largement insuffisants (janvier 2010 CA HT 40 euros, février 2010 CA HT 26 114 euros, Mars 2010 CA HT 21 238 euros, Avril 2010 CA HT 3 791 euros, pas de chiffre sur Mai et Juin 2010, Juillet 2010 CA HT 6 186 euros) soit une moyenne mensuelle de 8 200 euros.
A ce jour, sur les 7 derniers mois, les objectifs n'ont pas été atteints (Septembre 2010 CA HT 18 418 euros, Octobre 2010 CA HT 6 687 euros, Novembre CA HT 7 156 euros, Décembre CA HT 20 565 euros, janvier 2011 CA HT 13 253 euros, Février 2011 309 euros, Mars 2011 CA HT 9 744 euros) soit une moyenne mensuelle de 10 876 euros ce qui est largement insuffisant.
Cette insuffisance de résultats résulte d'un manque d'implication de votre part pour prospecter des nouveaux clients ce qui se traduit par très peu de visites en clientèle, une absence évidente de nouveaux clients, une absence évidente d'implication dans les fichiers, un manque d'assiduité au phoning pour attirer les clients.
Lors de l'entretien du 11 mai avec M. Z...et en présence de M. A..., vous affirmez que sur votre contrat est indiqué que les rendez-vous vous sont fournis !
Nous vous rappelons que l'objet même de votre fonction repose sur la prospection commerciale alors que vous, vous attendez que les prospects vous soient apportés sans prendre la peine d'aller les chercher.
Par ailleurs, vous devez assurer plutôt 5 à 7 RDV pour une vente quand la moyenne de vos collègues est de 2 à 3 RDV.
Dans ce contexte, nous nous voyons contraints de procéder à votre licenciement pour les motifs susvisés.. ".
Le salarié a effectué son préavis de trois mois jusqu'au 23 août 2011.

Par requête reçue le 8 mars 2012, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers pour contester son licenciement, obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamner l'employeur au paiement de frais de déplacements et d'un rappel de commissions.

Par jugement en date du 15 mai 2013, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- dit que le licenciement de M. X... était motivé par une cause réelle et sérieuse
-débouté M. X... de l'ensemble des demandes,
- rejeté les demandes de la société Rev Habitat,
- condamné le salarié aux dépens.
Les parties ont reçu notification de ce jugement le 24 mai 2013.

M. X... en a régulièrement relevé appel général par courrier électronique de son conseil le 24 juin 2013.

PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES

Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 9 octobre 2013, complétées le 3 juin 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles M. X... demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la société Rev Habitat Cholet à lui verser les somme suivantes :
-11 462. 90 euros correspondant à son manque à gagner depuis le début de l'année 2009,
-45 527. 16 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-20 415. 07 euros au titre du remboursement de ses frais professionnels
-3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
- débouter la société Rev Habitat Cholet de ses demandes,
- condamner la société Rev Habitat Cholet à lui remettre les documents de fin de contrat conformes à la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 30 ème jour suivant la notification,

Il fait valoir en substance que :

- sur le licenciement :
- l'insuffisance de résultat caractérise une cause réelle et sérieuse d'un licenciement si elle est due à une carence du salarié et à son incapacité à atteindre les objectifs réalistes fixés par l'employeur ;
- déjà sanctionné par un avertissement du 4 mars 2011 en raison de son insuffisance de résultats au cours des 6 derniers mois, le salarié ne peut pas être sanctionné une seconde fois dans le cadre du licenciement notifié le 20 mai 2011 sur la base du chiffre d'affaires insuffisant sur la période de janvier 2010 à mars 2011 ;
- l'employeur ne peut pas motiver sa décision de licencier sur le seul chiffre d'affaires du mois de mars 2011 (9 743. 61 euros) pour un objectif non atteint de 15 245 euros ;
- il ne lui pas laissé le temps nécessaire pour rétablir la situation alors qu'il a réalisé un excellent chiffre d'affaires le mois suivant (avril 2011) de 26 090. 34 euros ;
- les données de l'employeur ne sont pas fiables sur la moyenne mensuelle de son chiffre d'affaires de entre septembre 2010 et mai 2011, évaluée soit à 4 761 euros (pièce 34) soit à 11 549. 77 euros ;
- ses résultats ne peuvent pas être comparés avec ceux de ses collègues, M. A...et M. B..., dont les conditions d'exécution et les moyens mis à disposition ne sont pas identiques ;
- la baisse du chiffre d'affaires constatée en 2011 dans son secteur est liée à des circonstances extérieures et notamment au manque de moyens de publicité et de communication mis en oeuvre par la société ;
- il appartenait, non pas au VRP mais à la société Rev Habitat Cholet, selon les termes du contrat de travail, de faciliter la prospection de nouveaux clients au travers des procédés habituels, de la publicité, des animations et des événements ;
- ses collègues et anciens collègues ont confirmé qu'ils n'effectuaient ni porte à porte, ni téléprospection ni envoi de mailings ;
- à partir du début de l'année 2009, l'employeur a réduit de manière notable les animations commerciales, la publicité et la promotion qu'il lui appartenait de mettre en oeuvre dans son secteur sarthois :
- la baisse du chiffre d'affaires réalisée par lui à partir de cette période ne lui est pas imputable mais résulte d'une diminution importante des moyens mis en oeuvre (-23 % en 2009/ 2010 et-38 % en 2010/ 2011) par la société Rev Habitat Cholet pour permettre aux VRP d'obtenir des rendez-vous clients ;
- il se trouvait dans une situation plus difficile que ses collègues VRP à la suite de la fermeture de l'agence de Sablé et d'une baisse des moyens commerciaux dans son secteur sarthois,

- sur les demandes indemnitaires :
- sur le manque à gagner :
- il a connu une baisse importante de sa rémunération à partir du début de l'année 2009 à la suite de la réduction des moyens mis en oeuvre par son employeur en matière de publicité et de promotion ;
- il a évalué son préjudice à la somme de 11 462. 90 euros correspondant à son manque à gagner ;
- sur les dommages-intérêts pour licenciement abusif :
- à l'issue d'une période de chômage et d'un contrat précaire, il n'a pas retrouvé d'emploi stable, son préjudice lié à la rupture abusive de son contrat de travail doit être évalué à la somme de 45 527. 16 euros sur la base de son salaire moyen perçu en 2008 ;

- sur les frais professionnels :
- la clause de son contrat de travail selon laquelle les frais professionnels seront intégralement à la charge du VRP n'est pas conforme aux dispositions de l'article L 7311-3 du code du travail et doit être réputée non écrite faute pour l'employeur d'avoir fixé à l'avance une somme forfaitaire au titre du remboursement de ces frais ;
- si la société Rev Habitat Cholet a effectivement proposé de régulariser la situation en lui soumettant un projet d'avenant en mai 2008 puis en avril 2010 qu'il a refusé de signer, les autres dispositions desdits avenants lui apparaissant désavantageuses ;
- il appartenait à l'employeur de tirer toute conséquence de son refus, ce qu'il n'a pas fait ;
- la clause contractuelle concernant les frais professionnels étant illicite et réputée non écrite, il est bien fondé à demander le remboursement de ses frais professionnels (gasoil, entretien véhicule, péages, repas, portables,..) sur la base de 20 415. 07 euros au cours de la période 2007/ 2010.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 24 mars 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles la société Rev Habitat Cholet demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter le salarié de ses autres demandes et le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'employeur soutient essentiellement que :

- sur la cause du licenciement :
- il a pris la peine d'alerter M. X... sur la faiblesse des chiffres d'affaires réalisés, en moyenne de 10 300 euros par mois au lieu de l'objectif mensuel de 15 245 euros, au cours de la période (septembre 2010/ février 2011) précédant l'avertissement du 4 mars 2011 ;
- compte tenu de la baisse inexorable des résultats au cours des mois de février (309 euros) et de mars 2011 (9 744 euros), il était fondé à engager la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle ;
- les commandes réellement enregistrées par M. X... se sont élevées au mois d'avril 2011 à la somme de 1 045 euros HT et non pas de 26 090. 34 euros correspondant seulement à des hypothèses de commande ;
- elle a maintenu sa participation à des foires et animations commerciales même après la fermeture de l'agence de Sablé mais le salarié n'a pas satisfait aux objectifs par manque d'implication et d'ardeur au travail ;
- M. X... bénéficiait d'une assistance téléphonique tout comme ses collègues commerciaux d'Angers ;
- l'insuffisance de résultats du salarié est la résultante de son manque d'implication pour prospecter de nouveaux clients contrairement aux autres commerciaux vérandas de l'agence d'Angers, travaillant dans les mêmes conditions et bénéficiant des mêmes animations ;
- le budget des manifestations publicitaires de l'agence d'Angers a progressé passant de 20 023. 17 euros en 2003 à 26 760. 76 euros en 2010/ 2011 ;
- les animations dans des surfaces commerciales ont été privilégiées par rapport aux foires plus onéreuses et peu productives en prises de contact (Foire du Mans en septembre) :
- les témoignages des collègues de M. X... (M. C..., H..., D..., F...) ne suffisent pas à accréditer sa version des faits, s'agissant d'anciens salariés ayant créé leur propre structure commerciale concurrente en 2009.

- subsidiairement sur les indemnités :
- la demande au titre d'un hypothétique manque à gagner de 11 462. 90 euros est injustifiée ;
- le salarié réclame des dommages-intérêts à hauteur de 24 mois de salaires sans justifier du moindre préjudice ni de la date de son embauche par une société concurrente.

- sur les frais de déplacement :
- pour les frais professionnels, le contrat de travail prévoit que le taux des commissions comprend le remboursement de la totalité des frais professionnels du VRP ;.
- l'employeur a proposé à M. X... de régulariser un avenant le 20 avril 2010 pour isoler la part représentative des frais dans le taux de commission mais s'est heurté au refus injustifié du salarié ;
- cet avenant conforme aux préconisations de l'inspecteur du travail comportait des dispositions favorables au VRP sur la prise en charge par l'employeur des frais d'entretien du véhicule et la mise à disposition d'un téléphone portable et d'un ordinateur portable ;
- un précédent arrêt du 28 janvier 2014 de la cour de céans a rejeté la demande de rappel de frais de déplacement présentée par un autre salarié de la société Rev Habitat, qui avait refusé de signer l'avenant ;
- les justificatifs de M. X... à l'appui de la demande de remboursement des frais professionnels pour la période 2007/ 2010 concernent des dépenses personnelles incombant au salarié, telles que les déplacements entre son domicile dans la Sarthe et son agence de Sablé jusqu'en avril 2009 puis son agence à Angers, le téléphone fixe de son domicile privé ;
- l'employeur a toujours remboursé les notes de frais présentés par M. X..., particulièrement minutieux pour conserver les justificatifs dans ce domaine.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement,

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L 1235-1 du même code, en cas de litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Si l'employeur est juge des aptitudes professionnelles de son salarié et son adaptation à l'emploi et si l'insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle doit, tout comme l'insuffisance de résultats susceptibles d'en découler, être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables.
En outre, les objectifs fixés par l'employeur doivent être raisonnables et compatibles avec l'état du marché.

M. X... a été licencié pour insuffisance professionnelle suivant courrier du 20 mai 2011 lui reprochant :
- une insuffisance de résultats depuis janvier 2010, se manifestant par un chiffre d'affaires mensuel inférieur au minimum contractuel fixé à 15 245 euros par mois,
- un manque d'implication pour prospecter de nouveaux clients se traduisant par très peu de visites en clientèle, une absence évidente d'implication dans les fichiers, un manque d'assiduité au phoning pour attirer les clients, en dépit du rappel à l'ordre du 19 mars 2010 et des avertissements des 13 juillet 2010 et 4 mars 2011.

Il est ainsi patent que le licenciement de M. X... a été exclusivement motivé par une insuffisance de résultat ayant pour origine une insuffisance professionnelle, ce dernier n'ayant d'ailleurs jamais soutenu qu'il ait eu un caractère disciplinaire.

Il convient alors de rappeler que les dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail qui prévoit qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ne peuvent trouver application à l'espèce.

M. X... est conséquence mal fondé, dans le cadre d'une procédure pour insuffisance professionnelle, à invoquer le moyen tiré de la prescription en matière de faute disciplinaire.

Les objectifs de M. X... étaient fixés contractuellement et il était prévu un objectif mensuel de 15 245 euros de chiffre d'affaires non revalorisé depuis 2000 qui, contrairement aux allégations du salarié, s'appréciait au regard des commandes effectivement enregistrées et financées.

Il est établi par les documents produits que les résultats commerciaux de M. X... ont chuté pendant de nombreux mois : le relevé des chiffres d'affaires mensuels réalisés par chaque VRP de l'entreprise, au cours de la période de septembre 2010 à juillet 2011 (pièce 34) confirme les mauvais résultats de M. X... : 6 050 euros en moyenne par mois.
M. X... lui-même dans son courrier du 11 mai 2011 a admis que " ses résultats étaient insuffisants ". (Pièce 10).

La société Rev Habitat Cholet justifie avoir mis en demeure son salarié d'améliorer ses résultats en lui adressant un rappel à l'ordre le 19 mars 2010 puis des avertissements les 13 juillet 2010 et du 4 mars 2011 de sorte que le salarié était informé des objectifs à atteindre à court délai.

L'insuffisance de résultats au regard des objectifs fixés est donc avérée.

Les chiffres d'affaires réalisés par M. X... de 2002 à 2007 (16 000 à 26 000 euros par mois et le tableau comparatif de ses résultats avec ceux de ses collègues exerçant au sein de l'agence d'Angers et dans le même domaine (véranda) permettent d'établir que l'objectif mensuel de 15 245 euros fixé contractuellement et non revalorisé depuis 2000 était raisonnable et compatible avec l'état du marché.

Il est ainsi démontré qu'au cours du dernier exercice 2011 M. A...a atteint un chiffre d'affaires moyen de plus de 25 000 euros sur 12 mois (septembre 2010/ août 2011) et M. B...un chiffre d'affaires moyen de plus de 27 000 euros sur 8 mois (janvier 2011/ août 2011).

M. X... argue par ailleurs, comme il l'a dénoncé, notamment dans son courrier du 11 mai 2011, du " manque cruel d'outils et de moyens mis à disposition pour développer correctement son secteur, dépourvue de l'agence (de Sablé) ".

S'agissant de la " disparition " de l'agence de Sablé, rien ne démontre que cette fermeture intervenue fin avril 2009 ait eu un impact sur les mauvais résultats commerciaux enregistrés par M. X... rattaché à son agence d'origine à Angers dès la fin du mois d'avril 2009 (CA 175 000 euros en 2009).

Il résulte au surplus des pièces produites que l'agence sarthoise rencontrait des difficultés persistantes bien avant sa fermeture et que le chiffre d'affaires de M. X... avait déjà chuté au cours de l'année 2008 (151 000 euros) par rapport à celui obtenu l'année précédente (247 000 euros).

S'agissant des outils de commercialisation qui lui auraient été retirés pour expliquer la baisse de ses résultats, le salarié verse aux débats :
- le courrier de M. Y..., ancien directeur de l'agence de Sablé et d'Angers, en date du 30 avril 2009 : " plus de budget pub pour alimenter en rendez-vous et j'ai été moi-même mis devant le fait accompli " lors de la fermeture de l'agence de Sablé en avril 2009,
- les attestations de M. E..., M. A..., M. F..., M. G..., M. D..., M. I..., M. C..., anciens collègues VRP ayant constaté une baisse du budget publicitaire dans le secteur Sarthe et le recours limité à des hôtesses commerciales.

Pour preuve de ce qu'il a mis en oeuvre les moyens nécessaires pour permettre au VRP d'atteindre les objectifs, l'employeur produit :
- un récapitulatif des animations commerciales mises en oeuvre au cours de la période de février 2009 à avril 2011 (pièce 27), notamment à la Foire du Mans en septembre 2009, en mars 2010 et en mars 2011, à la foire de La Flèche en avril 2009 et en 2010
- le compte rendu de l'entretien du 12 novembre 2009 (pièce 15) de M. Z...avec M. X... selon lequel l'employeur s'est engagé à organiser des animations avec hôtesse au début de l'année 2010 dans des hypermarchés Leclerc et Super U dans la Sarthe,
- un historique des dépenses de la société Rev Habitat Cholet en matière d'animations durant l'année 2003/ 2004 (20 023. 17 euros), 2004/ 2005 (18 115. 96 euros), 2009/ 2010 (27 272. 31 euros) et 2010/ 2011 (26 760. 76 euros) (pièce 104).

Ces documents comptables permettent de contredire les seules allégations des anciens collègues de M. X... sur le budget publicitaire de l'entreprise.

Contrairement aux allégations de M. X..., l'employeur justifie de ce qu'il avait continué à financer des animations dans le secteur de la Sarthe et dans celui d'Angers, auquel M. X... était rattaché administrativement. Les dépenses publicitaires ont connu une hausse significative (+ 33 %) entre 2003 et 2010.

La participation de M. X... à ces manifestations commerciales est confirmée au travers ses demandes de remboursement de frais à la foire du Mans (4 jours septembre 2009), salon Habitat au Mans (3 jours en mars 2010 et en mars 2011), foire de La Flèche (3 jours en avril 2010), la foire d'Angers (8 jours en avril 2010).

Si l'employeur avait l'obligation d'organiser les tournées de ses salariés, le salarié ne rapporte pas la preuve de la carence de la société Rev Habitat Cholet à son égard.

Dans ces conditions, la preuve est rapportée que la dégradation des résultats du salarié ne provient pas du fait de l'employeur ou de circonstances extérieures à l'entreprise mais d'une insuffisance professionnelle de M. X... depuis le mois de janvier 2010.

Le licenciement étant motivé par une cause réelle et sérieuse, le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur les frais professionnels,

Il est de principe que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due à moins qu'il ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au minimum garanti.

Le contrat de travail de M. X... prévoit dans la partie " frais professionnels " article VII que :
" Le taux des commissions fixé comprend le remboursement au VRP de la totalité de ses frais professionnels. Ces frais professionnels seront donc intégralement à la charge du représentant "

M. X... invoque la non-conformité de cette clause contractuelle au regard de la jurisprudence applicable dans le cadre de l'article L7311-3 du code du travail selon laquelle la clause mettant à la charge du salarié les frais engagés par lui pour les besoins de son activité professionnelle doit être réputée non écrite.

Or contrairement à l'analyse de M. X..., la clause de son contrat de travail prévoit, non pas que les frais professionnels seront supportés par lui, mais qu'ils seront remboursés par l'employeur sous la forme d'une fraction des commissions perçues par le salarié.

L'absence de précision dans le contrat de travail de la quote-part dans le taux de commissions correspondant à ces frais, ne signifie pas pour autant que les frais professionnels n'ont pas été pris en charge par l'employeur.

M. X... qui présente une demande de remboursement à hauteur de la somme de 20 415. 07 euros pour la période 2007/ 2011, ne verse aux débats aucun justificatif des frais restés à sa charge (pièces visées dans le bordereau Justificatifs no33 à 37 manquants).
Il se borne à fournir un tableau intitulé " détail sur la construction du montant souhaitable en dédommagement des différents préjudices subis " (pièce appelant numérotée 33) et détaillant le coût des déplacements (gasoil, entretien véhicule, péages), des communications (portable, fixe utilisé à 50 %), divers (repas, fournitures bureau) au cours de la période 2007 à 2010 pour un montant total de 20 415. 07 euros mais ne produit aucune pièce justificative à l'appui.

Ces pièces sont insuffisantes à établir que l'employeur lui serait redevable de frais quelconques qui, au surplus, n'auraient pas été remboursés par les commissions perçues par le salarié qui n'allègue pas par ailleurs que, frais professionnels déduits, son salaire aurait été inférieur au Smic.

L'employeur produit par ailleurs diverses demandes de remboursement de frais professionnels transmises par M. X... entre le mois de septembre 2009 et le mois de mars 2001 (pièce 99 intimée) et qui ont été manifestement acquittées par la société Rev Habitat Cholet au vu des mentions apposées " OK, payé le par chèque BNP ".

Au surplus dans sa demande M. X... inclut les frais de déplacements entre son domicile dans la Sarthe et sa nouvelle agence de rattachement à Angers. qu'il estime devoir lui être rembourser par son employeur à la suite de la fermeture de l'agence de Sablé.

Or, en l'absence de toute stipulation contractuelle, les dépenses engagées par le salarié pour se rendre de son domicile sur son lieu de travail, en l'espèce son agence de rattachement, ne répondent pas à la qualification de frais professionnels définis comme des frais " exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur.

Ainsi M. X... qui échoue à rapporter la preuve qui lui incombe de ce que les frais professionnels qu'il a effectivement supportés ont été supérieurs à l'avantage qui lui a été consenti compris dans les commissions perçues doit être débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement des frais professionnels de M. X....

Sur les autres demandes,

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la société Rev Habitat Cholet les frais non compris dans les dépens. M. X... sera condamné à payer à la somme de 700 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant, publiquement et contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Et y ajoutant :

CONDAMNE M. X... à payer à la société Rev Habitat Cholet la somme de 700 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE M. X... aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODINAnne JOUANARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01671
Date de la décision : 22/09/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-09-22;13.01671 ?
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