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30/06/2015 | FRANCE | N°13/01328

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 30 juin 2015, 13/01328


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N 256 ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01328.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 25 Avril 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00462

ARRÊT DU 30 Juin 2015
APPELANTES :
La Société ESIP SECURITE 60 rue Albert Camus 68200 MULHOUSE
La SARL ESIP 60 rue Albert Camus 68200 MULHOUSE
représentées par Maître Catherine MENANTEAU, avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :
Monsieur Vincent Y...... 49610 JUIGNE SUR L

OIRE
comparant-assisté de Maître André FOLLEN, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA CO...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N 256 ic/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01328.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 25 Avril 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00462

ARRÊT DU 30 Juin 2015
APPELANTES :
La Société ESIP SECURITE 60 rue Albert Camus 68200 MULHOUSE
La SARL ESIP 60 rue Albert Camus 68200 MULHOUSE
représentées par Maître Catherine MENANTEAU, avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :
Monsieur Vincent Y...... 49610 JUIGNE SUR LOIRE
comparant-assisté de Maître André FOLLEN, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mai 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 30 Juin 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCÉDURE,
La société ESIP est une société de prévention et de sécurité, dont le siège social est situé à Mulhouse (68). Elle employait au 31 décembre 2011 un effectif de 17 salariés.
Répondant à une offre déposée à Pôle Emploi par la société ESIP, M. Vincent Y... a postulé à un emploi d'inspecteur dans le magasin BABOU sur le site d'Atoll à Angers et a été reçu pour un entretien le 29 mars 2012 par M. X..., gérant de la société ESIP.
Selon M. Y..., il a reçu le même jour une promesse d'embauche en qualité de responsable secteur au coefficient 275, niveau 2, échelon 3 en référence à la convention collective nationale des entreprises de gardiennage, pour une durée indéterminée à compter du 30 mars 2012 : " M. Y... aura pour tâches principales le recrutement et la mise en place d'agents, leur planification et la prospection de nouveaux clients. Il sera rémunéré sur une base forfaitaire de 2 001. 50 euros brut par mois et percevra une prime sur le chiffre d'affaire de tout nouveau client dans le département d'Angers. " Il s'est vu confier par le gérant le recrutement de plusieurs agents de sécurité sur le site.
Alors que le magasin BABOU a ouvert ses portes le 4 avril 2012, M. Y... a reçu le 11 avril 2012 un courriel de M. X... lui transmettant à la fois son contrat de travail et une notification de la rupture de ce contrat durant la période d'essai. Ce courriel a été confirmé par une lettre recommandée du 9 avril reçue le 12 avril 2012 : " Vous avez intégré notre entreprise ESIP sécurité, en tant qu'agent de prévention et de sécurité depuis le 4 avril 2012. Nous sommes au regret de vous informer que votre période d'essai de 30 jours n'est pas concluante. Par conséquence, nous avons décidé de mettre fin à votre contrat. La date effective de fin de contrat sera le 10 avril 2012 ".
Le contrat de travail adressé à M. Y... mentionnait que le salarié était recruté, non pas comme responsable en charge de la sécurité du magasin BABOU mais en qualité de simple agent de prévention depuis le 4 avril 2012 avec une période d'essai de 30 jours.
Contestant les conditions de formation, d'exécution et de rupture de son contrat de travail, M. Y... a saisi, par requête du 24 avril 2012, le conseil de prud'hommes d'Angers en indemnisation du licenciement abusif, en paiement d'un rappel de salaire, d'indemnités de rupture du contrat de travail et de dommages-intérêts pour absence de visite médicale à l'embauche et pour préjudice moral du fait des circonstances de la rupture.
Le 15 février 2012, M. X... a déposé plainte avec constitution de partie civile à l'encontre de M. Y... pour faux et usage de faux en soutenant que ce dernier avait établi de sa propre initiative et pour les besoins de la procédure prud'homale, la promesse d'embauche en imitant la signature de M. X..., gérant de la société ESIP.

Par jugement en date du 25 avril 2013, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- rejeté la demande de sursis à statuer formulée par la société ESIP dans l'attente de l'issue de sa plainte pour faux et usage de faux à l'encontre de M. Y...,- dit que la mesure de licenciement prise à l'encontre de M. Y... qui est intervenue le 12 avril 2012 n'est fondée sur aucune cause réelle et sérieuse et doit être considérée comme un licenciement abusif,- condamné la société ESIP à verser à M. Y... les sommes suivantes :-1 352. 30 euros bruts au titre du rappel de salaires, congés payés inclus,-779. 90 euros brut au titre de l'indemnité de préavis, congés payés inclus,-7 500 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-2 500 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil,-500 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de visite médicale d'embauche sur le fondement de l'article R 4624-10 du code du travail,-1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné la société ESIP à remettre à M. Y... les documents rectifiés, bulletins de salaire, certificat de travail et attestation Pôle Emploi sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement,- condamné la société ESIP aux dépens.
Les parties ont reçu notification de ce jugement les 30 avril et 3 mai 2013.
La société ESIP en a régulièrement relevé appel général par courrier de son conseil posté le 14 mai 2013. L'employeur ayant formé un second appel le 17 mai 2013, les procédures ont fait l'objet d'une jonction dans l'intérêt d'une meilleure administration de la justice suivant ordonnance du 27 juin 2013.

PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES,
Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe le 16 avril 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la société ESIP demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- débouter M. Y... de ses demandes,- condamner M. Y... à lui verser la somme de 3 000 euros pour manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail, outre la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir en substance que :
- sur les conditions de recrutement et d'exécution du contrat de travail de M. Y... :- elle n'a pas établi en faveur de M. Y... une promesse d'embauche qui constitue un faux document,- si l'instruction a abouti à une ordonnance de non-lieu le 8 avril 2015, elle rapporte la preuve qu'elle avait besoin de recruter, non pas un responsable départemental, mais plusieurs agents de sécurité dans un nouveau magasin BABOU sur le site Atoll à ANGERS,- la prise de service était fixée le 4 avril 2012, jour d'ouverture du magasin, et non pas le 29 mars,- M. Y... a obtenu des attestations auprès de témoins ne présentant pas de garantie d'objectivité (Mme Z... son épouse) ou bien au moyen de tentatives d'intimidation (M. B...- M. C...),- le salarié ne dispose d'aucun mail du gérant de la société ESIP permettant de déduire qu'il a pu agir sur ordre de son employeur,- sur l'absence de preuve du préjudice allégué :- elle a déclaré M. Y... en qualité d'agent de sécurité à compter du 4 avril 2015 à 8 heures,- en l'absence d'un contrat écrit, elle ne peut pas imposer une période d'essai à M. Y... de sorte que le contrat de travail est réputé avoir été conclu dès le 4 avril 2012,- M. Y... ne justifie pas de son préjudice, au regard de sa faible ancienneté (4 avril au 12 avril 2012) ni des circonstances vexatoires alléguées,- l'indemnité de préavis ne peut pas être calculée en fonction du salaire d'un responsable de secteur, qualité que M. Y... n'a jamais endossée.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 11 mai 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles M. Y... demande à la cour de :- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,- débouter la société ESIP de toutes ses demandes.
Il soutient essentiellement que :
- sur les conditions de recrutement :- la promesse d'embauche est un document réel et sincère, ce qui a été confirmé par l'instruction pénale et l'ordonnance de non-lieu du 8 avril 2015,- la réalité de sa relation de travail avec la société ESIP n'est pas contestée au regard des éléments précis et concordants permettant de confirmer qu'il a été recruté en tant que responsable de secteur chargé du recrutement de l'équipe des agents de surveillance, de la planification des emplois du temps et des modalités d'organisation du travail pour le compte de la société ESIP,- en l'absence d'un contrat de travail écrit, il ne peut pas se voir opposer une période d'essai de sorte que la rupture du contrat à l'initiative de l'employeur doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,- sur les demandes financières :- le rappel de salaires est calculé sur une période de 15 jours sur la base du coefficient 275 en qualité de responsable de secteur et du salaire conventionnel correspondant de 2 836 euros par mois,- il a droit à un rappel de congés payés sur la base d'un préavis d'une semaine prévu par la convention collective,- le comportement désinvolte de l'employeur et méprisant pour les droits des salariés justifie les dommages-intérêts justement évalués à 7 500 euros,- des dommages-intérêts résultant des circonstances vexatoires du licenciement sont sollicités en réparation du préjudice moral.- l'employeur doit également l'indemniser en l'absence d'une visite médicale d'embauche.

MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'existence des relations de travail,
Il y a contrat de travail lorsqu'une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la subordination d'une autre personne moyennant une rémunération. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Pour preuve de ce qu'il a réalisé un travail à compter du 29 mars 2012 en qualité de responsable de secteur pour le compte de la société ESIP avant l'ouverture du magasin BABOU le 4 avril 2012, M. Y... produit :
- une promesse d'embauche non datée de l'employeur,- des copies d'écran de son ordinateur personnel avec un intitulé " planification agents " créé le 30 mars 2012,- un mail adressé à la société ESIP le lundi 2 avril 2012 " plannings et nombre d'agents " : " j'ai vu M. A... (responsable du magasin BABOU) durant une heure cet après-midi, nous avons abordé de nombreux points dont les horaires d'ouverture, les procédures d'ouverture et de fermeture, ils ouvrent tous les jours du lundi au dimanche de 10 heures à 20 heures. J'ai rencontré les trois premiers agents qui me semblent bien, ils demandent quand leurs contrats seront donnée, ils demandent aussi le taux horaire. En ce qui me concerne, je ne souhaite pas travailler les week-end. Du moins, je ne souhaite pas être planifié. Je veux bien être d'astreinte mais pas plus. "- un mail adressé le 2 avril 2012 à la société ESIP : " je vous joins ma proposition de planning pour la première semaine. Les agents sont environ à 35 heures. J'aimerais si possible que vous me fassiez parvenir un contrat par mail dès que possible. Afin que je puisse vous le renvoyer signé avant ma prise de service de mercredi (4 avril). "- un mail adressé le vendredi 6 avril 2011 à la société ESIP : " Sur le site, il n'y a pas de soucis à part que tous les agents se demandent quand ils vont recevoir leur contrat de travail. Je dispose d'une équipe quasiment stable avec 5 CDI à temps plein. D'autres entreprises recrutent sur le site actuellement et je crains qu'ils nous quittent si leur contrat n'arrive pas rapidement. Pour ma part, j'aimerais aussi recevoir rapidement le contrat me concernant. Vu que vous en avez déjà réalisé sur d'autres départements, il vous suffirait de me faire parvenir une copie. J'aimerais aussi que vous réfléchissiez à l'achat d'un logiciel. J'ai un devis chez with time à 1291 euros comprenant l'achat du logiciel et la maintenance. Je suis formé sur ce logiciel et j'ai travaillé avec, c'est le meilleur qui se fait. Il me permettrait ne pas me tromper au niveau de la législation ".
Il ne fait pas débat que M. Y... a été recruté le 29 mars 2012 par la société ESIP dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée pour y exercer dans un magasin BABOU dont l'ouverture a été fixée le mercredi 4 avril 2012. Les parties sont en désaccord sur la date de départ des relations de travail et sur la nature des fonctions confiées à M. Y....
M. Y..., qui a subi son entretien d'embauche le 29 mars 2012, ne fournit aucun élément concret sur ses horaires de travail et sur les prestations réalisées pour le compte de son employeur dès le 29 mars 2012. La création par M. Y... des plannings d'agents de sécurité sur son ordinateur personnel et sa présence lors du recrutement de certains agents de sécurité réalisé par le gérant de l'entreprise ne suffit pas à caractériser l'existence d'un lien de subordination et d'une situation de dépendance dans l'exercice du travail Le salarié reconnaît lui-même dans son mail du 2 avril qu'il doit prendre son service le 4 avril 2012, date d'ouverture du magasin. Le début de l'activité salariée sera en conséquence fixé au 4 avril 2012, conformément à ce prétend l'employeur.
S'agissant de la nature de ses fonctions, le contenu des mails échangés entre M. Y... et le gérant de la société ESIP permet de confirmer les allégations du salarié revendiquant la qualification de responsable de secteur :- mail du 6 avril 2012 de M. X... : " Veuillez trouver les contrats des agents à signer et à renvoyer à l'entreprise par vos soins. J'espère que tout va bien, je vous fais confiance, pour votre contrat je vous l'enverrai la semaine prochaine, les bureaux du comptable sont fermés pour cause du jour férié en Alsace plus le pont ".- mail du 12 avril 2012 de M. X... : ".. Vous avez demandé s'il y avait la possibilité d'évoluer dans l'entreprise, ma réponse était oui, c'est à vous de montrer vos compétences si vous voulez prendre le poste de responsable de secteur et ses avantages (salaires, primes). Vous m'avez proposé de vous occuper de l'équipe en place pour me prouver vos compétences et de vous faire confiance ".

Les autres éléments recueillis sont cohérents avec la version des faits du salarié :
- le courrier de candidature du 30 mars 2012 de M. Y... au poste de responsable département (pièce 1)- l'attestation de M. B..., agent de sécurité : " M. Y... s'est présenté comme le responsable secteur de l'entreprise ESIP,.. Il m'a été présenté le 4 avril par M. X... comme notre responsable et interlocuteur entre le terrain et le siège social. Le 5 avril, je suis venu travailler toute la journée, M. Y... m'a remis ma carte professionnelle signée de sa main. M. Y... a toujours été identifié comme le responsable secteur, il encadrait l'équipe sur le site de BABOU mais gérait aussi les plannings, le recrutement, la relation avec M. A.... "- le procès-verbal d'audition par la gendarmerie le 8 février 2014 de M. D..., agent de sécurité : " M. X... nous a présenté M. Y... comme étant notre chef de poste, car il nous avait dit qu'il était sur Mulhouse et ne pouvait pas toujours être présent. M. Y... serait notre interlocuteur.... le deuxième samedi, il ya eu beaucoup de monde, nous n'étions que deux agents. J'ai tenté d'appeler M. Y..... il m'a répondu qu'il allait trouver une solution ; "- le tableau des plannings de travail distinguant les agents de M. Y... (pièce 15).
Le fait que M. Y... se soit vu confier par l'employeur des cartes professionnelles vierges à remplir et remettre aux nouveaux agents tend à confirmer le rôle d'encadrement exercé par le salarié, ce qui est confirmé par :- la détention de cartes professionnelles vierges et de la carte de M. C... avec l'en-tête de l'entreprise ESIP (pièces 22 et 23)- le mail du 11 avril 2012 de l'employeur à M. Y... " veuillez à donner à M. C... les cartes professionnelles qui sont chez vous ".
L'employeur produit des témoignages de plusieurs agents de sécurité, M. C..., M. D..., M. E... (pièces 20, 22 23 et 25), salariés de la société ESIP, selon lesquels " M. Y... était un agent de sécurité comme les autres " et n'avait aucune responsabilité au sein de l'entreprise. Toutefois, ces attestations, rédigées dans un style et une écriture similaires, ne rapportent aucun fait précis et circonstancié. S'agissant du courrier de M. A... gérant du magasin BABOU, dactylographié et non accompagné d'une pièce d'identité (pièce 26), il a été établi dans des termes généraux et imprécis sur le comportement et l'implication de M. Y... au sein du magasin. Ces attestations ne présentent pas de caractère suffisamment pertinent pour remettre en cause la version de M. Y....
La promesse d'embauche établie par la société ESIP au profit de M. Y..., dont il n'est pas établi qu'elle soit un faux au terme de l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction du 8 avril 2015, est parfaitement cohérente avec les éléments établis par le salarié.
La qualification d'agent de maîtrise est reconnue par convention collective applicable au salarié ayant des qualités humaines et les capacités professionnelles nécessaires pour assumer des responsabilités d'encadrement (connaissances techniques et de gestion, aptitude au commandement) dans les limites de la délégation qu'il a reçue.
M. Y... qui justifie avoir accompli à la demande de la société ESIP des missions relevant d'un agent de maîtrise, rapporte ainsi la preuve de son recrutement en qualité de responsable de secteur.

Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences,
Il est établi que l'employeur a mis fin par courrier recommandé du 9 avril 2012 reçu le 12 avril au contrat de travail de M. Y... en invoquant la rupture de la période d'essai.
Toutefois, faute pour l'employeur d'avoir établi un contrat de travail écrit en application des dispositions de la convention collective applicable, le salarié ne peut pas se voir opposer une période d'essai de sorte que la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur sans respecter la procédure de licenciement doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le rappel de salaires,
M. Y... peut prétendre à un rappel de salaires durant la période du 4 avril au 12 avril 2012, soit 9 jours. Il a perçu de l'employeur un salaire de 207. 50 euros brut pour la période du 4 au 10 avril 2012 en qualité d'agent de sécurité.
La promesse d'embauche mentionne que le salarié bénéficie d'un coefficient 275 niveau 3, ce qui correspond selon la convention collective à un salaire minimum de 2836. 42 euros brut au 1er janvier 2012.
Il sera fait droit à la demande du salarié au titre du rappel de salaire à hauteur de la somme de 728. 51 euros bruts, congés payés inclus, correspondant à : 2 836. 42 euros X 9/ 30 = 850. 92 euros bruts outre les congés payés de 85. 09 euros, dont il faut déduire la somme de 207. 50 euros déjà versée.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis,
M. Y... est fondé à réclamer l'indemnité compensatrice de préavis d'une semaine prévu par l'article 8 de l'annexe V de la convention collective, ce qui représente la somme de : 2 836. 42 X 7/ 30 = 661. 83 outre les congés payés de 66. 18 euros, soit un total de 728. 01 euros brut.

Sur les dommages-intérêts pour licenciement abusif,
Aux termes de l'article L 1235-5 du code du travail, en cas de licenciement abusif, le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi. M. Y... aurait dû percevoir une rémunération mensuelle brute moyenne de 2 836. 42 euros, avait 31 ans et justifiait d'une ancienneté de 9 jours au sein de l'entreprise. Il n'est pas contesté au vu de son curriculum vitae qu'il a retrouvé un emploi depuis janvier 2013 en tant que technico-commercial. Ses revenus actuels sont ignorés. Compte tenu des circonstances ainsi évoqués et en l'absence de plus de précisions, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à la somme de 3 500 euros les dommages et intérêts résultant du préjudice subi du fait de la rupture. Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les dommages-intérêts complémentaires,
Le salarié ne justifie pas de sa demande complémentaire de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. L'indemnisation allouée sur le fondement de l'article L 1235-5 du code du travail a déjà pris en compte les préjudices subis par le salarié résultant de la rupture de son contrat de travail. Sa demande de dommages et intérêts complémentaire sera en conséquence rejetée, par voie d'infirmation du jugement.
Sur les dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche,
L'article R 4624-10 du code du travail prévoit que le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.
En l'espèce, la société ESIP n'a pas justifié de ses diligences pour que M. Y... puisse subir cet examen médical obligatoire dans le délai prescrit par la loi. L'employeur sera en conséquence condamné à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts, par voie de confirmation du jugement.

Sur la demande reconventionnelle de la société ESIP,
La société ESIP a présenté en cause d'appel une demande de dommages intérêts en raison du comportement de particulière mauvaise foi de M. Y.... Une telle demande n'est pas fondée à l'encontre du salarié dont la plupart des demandes ont été accueillies favorablement. La société ESIP sera déboutée de sa demande indemnitaire.

Sur les autres demandes
Aux termes de l'article R 1234-9 du code du travail, l'employeur doit délivrer au salarié au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications lui permettant d'exercer son droit aux prestations sociales. Il convient en conséquence d'ordonner à l'employeur de délivrer à M. Y... les bulletins de salaires rectificatifs conformes aux dispositions du présent arrêt, au plus tard dans les 15 jours de la notification du présent arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard, durant une période de 30 jours à compter de la notification du présent arrêt dont la cour ne se réserve pas la liquidation.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. Y... les frais non compris dans les dépens. La société ESIP sera condamnée à lui payer à la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile
La société ESIP, qui sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sera condamnée aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant, publiquement et contradictoirement, en matière sociale et en premier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le début de la relation de travail de M. Y... avec la société EIP à compter du 29 mars 2012, a condamné la société ESIP à payer à M. Y... la somme de 1 352. 30 euros brut à titre de rappel de salaire, congés payés inclus, la somme de 779. 90 euros brut au titre de l'indemnité de préavis, congés payés inclus, la somme de 7500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
DIT que la relation de travail de M. Y... avec la société ESIP a débuté le 4 avril 2012.
CONDAMNE la société ESIP à payer à M. Y... :
- la somme de 728. 51 euros bruts à titre de rappel de salaire, congés payés inclus,- la somme de 728. 01 euros brut. au titre de l'indemnité de préavis, congés payés inclus,- la somme de 3 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,- la somme de 2 000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
REJETTE la demande reconventionnelle de dommages-intérêts de la société ESIP,
ORDONNE à la société ESIP de délivrer à M. Y... les bulletins de salaires rectificatifs conformes aux dispositions du présent arrêt et ce au plus tard dans les 15 jours de la notification du présent arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard, durant une période de 30 jours à compter de la notification du présent arrêt.
CONFIRME le surplus des dispositions du jugement déféré.
CONDAMNE la société ESIP aux dépens de l'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01328
Date de la décision : 30/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-06-30;13.01328 ?
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