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23/06/2015 | FRANCE | N°15/00653

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 23 juin 2015, 15/00653


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 00653.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Février 2015, enregistrée sous le no F 13/ 00138

ARRÊT DU 23 Juin 2015

APPELANTE :
La Société JOUSSE Zone Artisanale de La Lande 1, Impasse Le Meslier-CS 20028 53100 PARIGNE SUR BRAYE
En présence de Mr A..., Président
assisté de Maître LANDAIS, avocat substituant Maître LE GOURIFF de la SELARL OUTIN GAUDIN et ASSOCIES

, avocats au barreau de LAVAL

INTIMEE :
Madame Nadine X...... 53470 COMMER
comparante-assisté...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 00653.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Février 2015, enregistrée sous le no F 13/ 00138

ARRÊT DU 23 Juin 2015

APPELANTE :
La Société JOUSSE Zone Artisanale de La Lande 1, Impasse Le Meslier-CS 20028 53100 PARIGNE SUR BRAYE
En présence de Mr A..., Président
assisté de Maître LANDAIS, avocat substituant Maître LE GOURIFF de la SELARL OUTIN GAUDIN et ASSOCIES, avocats au barreau de LAVAL

INTIMEE :
Madame Nadine X...... 53470 COMMER
comparante-assistée de Maître Hervé CHAUVEAU de la SELARL ZOCCHETTO-RICHEFOU ET ASSOCIES, avocats au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mai 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 23 Juin 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE,
Mme Nadine X... a été embauchée le 3 octobre 2005 en contrat de travail à durée indéterminée par la société Jousse en qualité d'ingénieur études, statut cadre position B2 de la convention collective nationale des travaux publics moyennant un salaire mensuel brut de 3 117, 59 ¿ pour 39 heures de travail hebdomadaire.
Elle a été licenciée pour faute grave le 6 mai 2013 pour, en résumé, avoir décidé seule de la modification d'un marché et en contrevenant ainsi aux directives de son employeur ce qui caractérise un acte d'insubordination.
Contestant son licenciement et soutenant avoir effectué des heures supplémentaires non rémunérées, le 16 juillet 2013 Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes indemnitaires subséquentes.
Par jugement en date du 6 février 2015 le conseil de prud'hommes de Laval :- a jugé le licenciement de Mme X... abusif et sans cause réelle et sérieuse,- a condamné la société Jousse à lui verser les sommes de 24 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, 10 341 ¿ à titre d'indemnités de préavis et 1 034 ¿ au titre de congés payés y afférents, 2 412, 90 ¿ à titre de salaire pendant la mise à pied et 241, 29 ¿ au titre de congés payés y afférents, 8 910, 50 ¿ au titre de l'indemnité de licenciement, 10 738, 80 ¿ au titre des heures supplémentaires et 1 078, 88 ¿ au titre de congés payés y afférents, 8 601, 32 ¿ au titre de la perte de droits au repos compensateur et 20 685 ¿ au titre du travail dissimulé,- a rappelé l'exécution provisoire de droit et a ordonné l'exécution provisoire pour la totalité, a condamné la société Jousse à rembourser aux organismes concernés six mois d'indemnité de chômage soit 20 685 ¿, a débouté les parties de leurs autres demandes, a condamné la société Jousse à verser à Mme X... la somme de 700 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par lettre recommandée reçue au greffe le 3 mars 2015 la société Jousse a relevé appel de ce jugement.
Elle a saisi le premier président de la cour d'appel d'une demande de sursis à exécution provisoire et l'affaire a fait l'objet d'un retrait du rôle par ordonnance du 18 mars 2015.

MOYENS ET PRETENTIONS,
Dans ses conclusions régulièrement communiquées déposées le 4 mars 2015 et à l'audience la société Jousse demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions et statuant à nouveau de dire et juger que le licenciement de Mme X... est justifié et repose sur une faute grave, qu'elle a été rempli de tous ses droits en matière d'heures supplémentaires et de repos compensateurs, qu'elle ne s'est pas rendue coupable de travail dissimulé et de débouter Mme X... de toutes ses demandes indemnitaires et de rappels de salaire et de toutes ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle fait essentiellement valoir :- que le licenciement de la salariée était justifié pour faute grave, alors que le courriel du 22 février 2013 envoyé par Mme X... à la société EMO l'informant de ce que, sur le marché signé avec cette société le 10 décembre 2012 pour 59 000 ¿ HT, la société Jousse lui rétrocédait une partie des prestations pour 15 200 ¿ avait été adressé par elle sans l'accord de la direction alors qu'elle n'en n'avait pas le pouvoir ; que cet acte caractérise bel et bien un abus de pouvoir et une insubordination au regard d'une instruction expresse, claire et précise qui lui avait été donnée quant à son obligation de soumettre à la validation préalable et systématique de M A..., seul habilité à décider de l'abandon ou de la modification d'une prestation prévue dans un marché, tout acte susceptible d'engager la société ; que Mme X... n'est pas fondée à faire état des circonstances atténuantes ou exonératoires qu'elle allègue dès lors qu'elle savait que M Y... responsable du bureau d'études n'avait pas plus qu'elle qualité pour prendre une décision et que le point de savoir si la société était ou non en mesure d'exécuter la prestation litigieuse n'était pas de son ressort dès lors qu'elle n'était pas en charge de l'organisation et de l'exécution des chantiers ; que cette insubordination caractérise une faute grave ; qu'en tout état de cause ses demandes sont excessives, étant précisé que son ancienneté n'était que de 7 ans et 7 mois et qu'elle a retrouvé du travail en juin 2014 ;- que la demande en paiement d'heures supplémentaires est tardive et injustifiée ; que Mme X... travaillait 39 heures sur la base d'horaires collectifs avec possibilité pour elle de ne reprendre qu'à 14 h en arrivant à 7H30 le matin ; que le système était déclaratif chacun renseignant des fiches prévues à cet effet et que Mme X..., qui s'était engagée à respecter l'horaire de travail pratiqué dans la société, a complété ces fiches sans y noter des heures supplémentaires alors que d'autres salariés en notaient ; qu'elle n'a jamais fait état d'une charge de travail induisant de telles heures alors qu'elle n'a pas hésité à la menacer d'un recours en juillet 2010 à propos d'une prime ; que le système d'accès aux locaux avec utilisation d'un badge et enregistrement de l'heure d'arrivée mais pas de sortie dans les lieux conservés pendant 3 mois relève de la sécurité et ne permet pas de déterminer la durée du travail ; que Mme X... ne produit aucun document crédible au soutien de sa demande, ses revendications (47h30 de travail hebdomadaire forfaitaire) ne coïncidant pas avec les agendas qu'elle produit-et qui ont été annotés pour les besoins de la cause alors qu'il est établi que, lors de l'enquête, elle les a cherché dans son bureau sans succès-et avec ses rendez vous extérieurs notés dans le calendrier Oulook commun à tout le personnel de bureau, comme d'ailleurs avec ses congés ; que sa demande en indemnisation pour privation de repos compensateur du fait d'heures supplémentaires excédant le contingent annuel est donc injustifiée ; enfin que sa demande au titre d'un travail dissimulé est injustifiée. Dans ses conclusions régulièrement communiquées déposées le 24 avril 2015 et à l'audience Mme X... demande à la cour de confirmer le jugement entrepris sauf à porte à la somme de 62 000 ¿ la somme à lui verser à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, à 24 140, 27 ¿ la somme à lui verser au titre des heures supplémentaires non payées depuis le 16 juillet 2010 et celle de 2 414 ¿ au titre de congés payés y afférents, à 16 934, 87 ¿ à titre de dommages et intérêts pour perte de ses droits à repos compensateur et de condamne la société Jousse à lui verser la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient en résumé :- que son licenciement est injustifié dès lors qu'elle a toujours fait valider ses études par M A... avant envoi mais qu'en l'espèce il s ¿ agissait non pas d'une des phases d'études de projet mais bien d'une décision pendant la phase d'exécution d'un marché gagné par elle ; qu'il relevait de ses fonctions de déterminer les solutions techniques, faire le choix des partenaires et assurer le suivi de chantier ; qu'en l'espèce lors du lancement du chantier en décembre 2012 il avait été convenu que le BEE déciderait qui ferait ces travaux de la société Jousse ou de la société EMO en fonction de la charge de travail-décision validée par M Z... présent ayant qualité pour interférer sur le contenu du marché-et que le BEE interrogé en février lui a répondu que si c'était urgent il fallait rétrocédé le marché à la société EMO de sorte que ça n'est pas elle qui a pris la décision ; que cette décision procédait de l'intention de mener à bien le chantier et qu'elle n'a jamais eu la volonté de nuire à son employeur ni de réduire son CA ; qu'elle n'a commis aucune insubordination ; que par ailleurs la prétendue moins value qui en est découlée ne représente que 1 % du CA généré par elle pour le compte de l'entreprise, la décision ayant également évité à l'entreprise les pénalités de retard ; que la société ne lui a jamais fait de reproches pour des plus ou moins values sur de nombreux marchés ; que la décision de rétrocession a été par la suite validée par M. A... qui a signé l'avenant au contrat et qui était informé des échanges de mails entre elle et M Y... responsable du BE ; qu'elle a toujours respecté les consignes et n'a jamais signer de commandes ;- que ses demandes indemnitaires sont justifiées alors que notamment elle a travaillé 13 ans dans cette entreprise qui a été rachetée, qu'elle n'a si retrouvé qu'un contrat de chantier ;- que sa demande en paiement d'heures supplémentaires à hauteur de 8h30 supplémentaires par semaine est justifiée en ce qu'elle produit des éléments de nature à l'étayer alors que son employeur ne justifie pas des horaires effectivement réalisés par elle ; que ses demandes en indemnisation pour perte de repos compensateur et travail dissimulé sont également justifiées.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 5 mai 2015.

MOTIFS DE LA DECISION,
Sur les heures supplémentaires,
S'il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies il appartient toutefois au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
Au cas d'espèce Mme X... qui a été embauchée le 3 octobre 2005 par la société Jousse en qualité d'ingénieur études, statut cadre, qui indique sans en justifier « avoir bien évidemment tenté à de multiples reprises d'obtenir le règlement de ses heures supplémentaires » soutient, dans le cadre de la procédure, avoir effectué 8h30 de travail hebdomadaire supplémentaire au-delà de 39 heures et ce depuis année 2010 en ce qu'elle prétend avoir travaillé tous les jours de 6h30 à 12h et de 13h30 à 17h45 sauf le vendredi où elle finissait à 16h30.
Au soutien de cette allégation elle produit des agendas personnels pour les années 2010 à 2013 dont il apparait qu'en effet ils ont été complétés a postériori alors qu'elle ne conteste pas ne pas avoir retrouvé ses agendas professionnels sauf celui de l'année 2013 qu'elle verse aux débats et dont au surplus, dans la mesure où elle prétend avoir travaillé tous les jours aux mêmes heures, l'utilité est particulièrement relative ; par ailleurs ces agendas sur lesquels elle s'est contenté d'écrire « 6h30 » ou « 6h45 » chaque jour de travail sont parfaitement insuffisants pour étayer sa demande d'heures supplémentaires.
Il en est de même de son agenda professionnel 2013 qui reprend ces mentions d'heure alléguée de prise et de fin de poste avec, pour seule précision, les lieux où elle s'est rendue ces jours là sans autre explication et justification de son emploi du temps.
Par ailleurs elle n'explique et a fortiori ne justifie pas les raisons pour lesquelles elle aurait, à compter de 2010, eu à effectuer des heures supplémentaires à la demande de son employeur et notamment ne fait pas état d'une quelconque charge supplémentaire de travail qui les auraient nécessitées.
Il s'ensuit que les documents produits par Mme X... ne sont pas suffisamment précis et concordants pour étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires.
Parallèlement d'ailleurs la société Jousse justifie :- avoir diffusé une norte de service rappelant l'horaire collectif de travail du lundi au jeudi de 8h à 12 h et de 13h30 à 17h30 et le vendredi jusqu'à 16h30,- que le système de contrôle de la durée du travail était déclaratif s'agissant notamment des cadres soumis à cet horaire collectif et que les salariés devaient remplir-et remplissaient d'ailleurs-des fiches faisant éventuellement apparaître des heures supplémentaires,- que les « feuilles d'heures hebdomaire bureau » de Mme X... sur toute la période en cause, qui font apparaître ses déplacements et les dossiers sur lesquels elle travailait, ne portent mention d'aucune heure supplémentaire,- que Mme X... n'a jamais déclaré effectuer de telles heures ni revendiqué le paiement de ces heures alors qu'en effet elle n'a pas hésité à revendiquer par courrier recommandé en juillet 2010 le paiement d'une prime en menaçant son employeur d'un recours prud'hommal,- que les mentions du calendrier Outlook de l'entreprise concernant Mme X... pour les années en cause ne permettent pas de constater l'existence d'heures supplémentaires,
Il est par ailleurs établi qu'il n'existait pas dans l'entreprise de système de pointeuse ni d'enregistrement de la durée du travail, le seul système de badge existant étant celui permettant l'accès aux locaux de l'entreprise avec enregistrement de l'heure d'arrivée du salarié utilisant son badge d'accès, conservé pendant trois mois dans un souci de sécurité, sans utilisation pour quitter les locaux et donc sans vérification de l'heure de sortie, de sorte qu'il ne peut être fait grief à la société de ne pas avoir produit ces enregistrements, comme d'ailleurs les éléments concernant les autres salariés, sans intérêt pour la solution du litige.
Par voie d'infirmation du jugement, Mme X... doit donc être déboutée de sa demande en paiement d'heures supplémentaires.
Sa demande d'indemnisation au titre des repos compensateurs étant exclusivement fondée sur l'existence d'heures supplémentaires ici non avérée Mme X... sera débouté de sa demande d'indemnisation de ce chef.
Elle sera enfin déboutée de sa demande en paiement de l'indemnité prévue par l'article L 8223-1 du code du travail pour travail dissimulé par non déclaration d'heures supplémentaires dont il vient d'être dit qu'il n'était pas établi qu'elle en ait effectué.
Sur le licenciement,
Aux termes de la lettre de licenciement du 6 mai 2013 qui fixe les limites du litige, Mme X... s'est vu notifier son licenciement pour faute grave en ces termes : « Nous vous informons que nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs d'une faute grave.
Dans le cadre de vos missions de chargé d'affaires au sein de la société Jousse je vous avais rapelé que vous deviez me soumettre pour validation avant tout envoi vos études et notamment vos études de prix, les commandes auprès des fournisseurs, vos plans d'exécution.. De même vous n'êtes pas sans ignorer que vous n'avez pas le pouvoir de décider seule d'une modification d'un marché conclu par la société Jousse.
Cependant sur le marché CAPF ville de Flers sur lequel nous intervenons en qualité de sous traitant de la société EMO vous avez décidé seule de rétrocéder une prestation qui était ibncluse dans notre marché. En effet vous avez confirmé par écrit à la société EMO que la société Jousse ne procèderait pas à la fourniture, au cavlage, aux automatismes, à la programmation et à la mise en service de la nouvelle armoire de traitement des matières de curage, prestation qui était prévue dans notre marché. Votre décision unilatérale a entraîné pour la société Jousse une moins value de 15 200 ¿ HT sur ce marché. Vous ne pouviez pas ignorer que vous n'aviez pas le pouvoir de décider seule d'une modification du marché conclu par la société Jousse avec la société EMO. Vous avez délibéremment contrevenu à mes directives et il s'agit d'un acte d'insubordination que je ne peux tolérer au sein de la société Jousse. Les explications recueillies auprès de vous au courds de notre entretien du 30 avril 2013 n'ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. Nous nous voyons dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre société pour faute grave ».
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail et le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.
Les faits ci dessus visés dans la lettre de licenciement à savoir la décision prise d'intitiative par Mme X... et notifiée par elle par courriel à la société EMO le 22 février 2013 sans l'aval de la direction de l'entreprise de lui rétrocéder une partie d'un marché sont avérés et d'ailleurs non contestés dans leur matérialité.
Mme X... les a notamment reconnus dans son courrier du 30 avril 2013 adressé à la société Jousse aux termes duquel elle écrit : « lors de l'entretien de ce jour vous avez fait état d'insubordination de ma part à savoir la rétrocession de la réalisation d'une armoire éléectrique pour un montant de 15 200 ¿. Il s'avère que cette eventualité avait été évoquée dès la réunion de démarrage du chantier avec la société EMO mandataire du marché et que la décision a été prise en concertation avec le responsable du Bureau d'Etudes Electriques, la prestation étant impossible à réaliser par Jousse dans les temps. Etant donné que c'est moi qui ai estimé la moins value et que j'étais en relation directe avec la société EMO j'ai effectivement envoyé le mail qui confirmait l'abandon de prestation afin que mon chantier puisse continuer à avancer normalement (la supervision des chantiers traîtés par mes soins faisant partie entière de ma fonction). Je reconnais ne pas en avoir parlé précisément au Responsable du Service Exécution qui lui aussi était en surcharge importante de travail et m'avait demandé d'assurer l'exécution de mes nouveaux chantiers (Argentré Sud et Lassay). Compte tenu du montant limité de la prestation rétrocédée au regard de l'ensemble des marchés traîtés par mes soins en 2012 soit plus de 1, 6 M ¿ et du fait qu'elle n'a aucune conséquence doùmmageable pour la société Jousse je demande que la sanction soit proportionnée à la faute et que cette dernière soit requalifiée en faute simple avec annulation de la mise à pied conservatoire. Une procédure de rupture conventionnelle ou une réintégration peuvent également être envisagée. Dans le cas où ma requête s'avèrerait sans suite de votre part je ne manquerai pas de saisir le conseil des prud'hommes avec toutes les conséquences que cela implique ».
Au regard des termes clairs de son courrier ci dessus Mme X... est aujourd'hui mal fondée à soutenir tout à la fois que ça n'est pas elle qui a pris la décision mais M Y... responsable du Bureau d'étude-qui d'ailleurs atteste du contraire-et/ ou qu'avant d'être prise cette décision avait été portée dès l'origine du chantier à la connaisance de M Z... ayant les mêmes pouvoir de donner son accord que M A... ¿ ce qui est inexact-puis ensuite à celle de M A...-dont il est établi qu'il n'en a eu connaissance que par mail du 10 avril 2013.
Elle est également mal fondée à soutenir qu'une telle décision rentrait dans ses attributions alors que ses fonctions résultant de sa fiche de poste et de leur exercice effectif ne lui permettaient pas d'engager la société d'une façon ou d'une autre et qu'elle ne disposait pas du pouvoir de notifier à un cocontractant de la société l'abandon d'une partie d'un marché signé ; elle affirme sans en justifier qu'une telle situation s'était déjà présentée et qu'il ne lui en avait pas été fait grief alors que la société Jouse produit un courrier qu'elle lui avait adressé le 21 février 2007 lui rappelant ses défaillances d'alors et lui rappelant qu'elle ne devait signer aucune commande auprès des fournisseurs et qu'elle devait soumettre pour validation avant envoi ses études, y compris ses études de prix, ainsi que ses plans.
La faute commise par Mme X... qui a pris une décision ne lui appartenant pas mais qui a eu pour autant des conséquences d'une importance relative pour l'entreprise est établie et si, elle n'était pas de nature à justifier la rupture immédiate de son contrat de travail, elle caractérise incontestablement une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Il s'ensuit que si Mme X... doit être déboutée de sa demande en indemnisation consécutive à la rupture justifiée de son contrat de travail, elle a droit au paiement de son salaire pendant la mise à pied ainsi qu'à l'indemnité de préavis et de congés payés y afférents et à l'indemnité de licenciement.
Par confirmation du jugement, la société Jousse sera donc condamnée à lui verser les sommes-non sérieusement discutées dans leur montant-de 2 412, 90 ¿ au titre de salaire pendant la mise à pied et 241, 29 ¿ au titre des congés payés y afférents, 10 341 ¿ au titre de l'indemnité de préavis et 1 034 ¿ au titre des congés payés y afférents et de 8 910, 50 ¿ au titre de l'indemnité de licenciement.
L'équité commande le rejet des demandes des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.

PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Jousse à verser à Mme X... les sommes de 24 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, 10 738, 80 ¿ au titre des heures supplémentaires et 1 078, 88 ¿ au titre de congés payés y afférents, 8 601, 32 ¿ au titre de la perte de droits au repos compensateur et 20 685 ¿ au titre du travail dissimulé et à rembourser aux organismes concernés six mois d'indemnité de chômage soit 20 685 ¿.
STATUANT à nouveau de ces chefs :
DIT et JUGE le licenciement de Mme X... justifié par une cause réelle et sérieuse.
DEBOUTE Mme X... de ses demandes en dommages et intérêts pour licenciement injustifié, heures supplémentaires, indemnisation pour perte de repos compensateur et pour travail dissimulé et DIT n'y avoir lieu à condamner la société Jousse à rembourser aux organismes concernés six mois d'indemnité de chômage soit 20 685 ¿.
CONFIRME le jugement entrepris en ses autres dispositions.
DEBOUTE les parties de leurs autres demandes.
CONDAMNE la société Jousse aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/00653
Date de la décision : 23/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-06-23;15.00653 ?
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