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23/06/2015 | FRANCE | N°13/01276

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 23 juin 2015, 13/01276


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N cp/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01276.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 18 Avril 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00115

ARRÊT DU 23 Juin 2015

APPELANT :
Monsieur Mourad X...... 53200 AZE
non comparant-représenté par Maître Patrice MARCEL, avocat au barreau de LAVAL

INTIMEE :
LA SAS TRANSPORTS COUE Route d'Argentré Zone Industrielle de la Chambrouillère 53960 BONCHAMP LES LAVAL
non

comparante-représentée par Maître Renaud GISSELBRECHT, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA ...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N cp/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01276.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 18 Avril 2013, enregistrée sous le no F 12/ 00115

ARRÊT DU 23 Juin 2015

APPELANT :
Monsieur Mourad X...... 53200 AZE
non comparant-représenté par Maître Patrice MARCEL, avocat au barreau de LAVAL

INTIMEE :
LA SAS TRANSPORTS COUE Route d'Argentré Zone Industrielle de la Chambrouillère 53960 BONCHAMP LES LAVAL
non comparante-représentée par Maître Renaud GISSELBRECHT, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mai 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Clarisse PORTMANN, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Clarisse PORTMANN, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 23 Juin 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :
M. Mourad X... a été embauché par la société Transports Coué le 14 février 2011 en qualité de chauffeur longue distance au coefficient groupe 7- 150M.
Il a fait l'objet d'un premier avertissement le 12 juillet 2011 suite à un accrochage survenu en région parisienne, et d'un second avertissement le 26 décembre 2011 en raison d'une absence de vérification du niveau d'huile de son camion.
Après avoir été mis à pied le 24 mai 2012, il a été licencié pour faute grave le 18 juin 2012. La lettre de licenciement reprend les deux avertissements déjà adressés et lui fait reproche en outre d'avoir " à maintes reprises effectué des prises de gasoil dans les stations interdites malgré les consignes de la direction " et plus précisément à quinze reprises de septembre 2011 à mai 2012.
M. Mourad X... a saisi le conseil de prud'hommes de Laval le 26 juin 2012 aux fins d'obtenir le paiement des salaires correspondant à la période de mise à pied conservatoire, l'indemnité de préavis, et des dommages et intérêts pour licenciement cause réelle et sérieuse.
Par un jugement en date du 18 avril 2013, le conseil de prud'hommes a :
- dit que les avertissements prononcés à l'encontre de M. Mourad X... les 12 juillet et 26 décembre 2011 étaient justifiés,- dit que le licenciement de M. Mourad X... pour faute grave était fondé,- débouté M. Mourad X... de toutes ses demandes,- débouté la société Transports Coué de sa demande pour frais irrépétibles,- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.
M. Mourad X... a interjeté appel de cette décision par lettre recommandée postée le 7 mai 2013.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, aux dernières conclusions respectivement :
- du 6 mai 2015 pour M. Mourad X...,- du 7 mai 2014 pour la société Transports Coué, soutenues à l'audience, ici expressément visées et qui peuvent se résumer comme suit.
M. Mourad X... demande à la cour :
- de le recevoir en son appel et de le dire fondé,- de prononcer la nullité des avertissements des 12 juillet et 26 décembre 2011,- de dire son licenciement cause réelle et sérieuse,- en conséquence, de condamner la société Transports Coué à lui payer les sommes suivantes : *une somme de 2677, 57 euros au titre des salaires pour la période du 24 mai au 19 juin 2012, *une somme de 5355, 14 euros à titre d'indemnité de préavis, *une somme de 803, 27 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, *une somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et cause réelle et sérieuse, outre les intérêts légaux à compter du procès verbal de non conciliation du 13 septembre 2012 au titre des sommes qui lui seront accordées, à l'exception des dommages et intérêts qui porteront intérêts à compter du jugement à intervenir,- de condamner la société Transports Coué à lui payer une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
S'agissant des avertissements, il prétend tout d'abord qu'ils doivent être annulés dès lors qu'ils n'ont pas été précédés d'une convocation à un entretien préalable. Concernant le premier, il ajoute qu'il n'est pas établi que l'accident qu'il a eu le 8 juillet 2011 résulte d'un manquement au code de la route, soutenant que c'est l'autre automobiliste qui est à l'origine de celui-ci et qu'en tout état de cause, il n'y a eu pour la société aucun préjudice, puisque ni l'autre conducteur ni son assureur ne lui ont réclamé une indemnisation. Il soutient que les travaux exécutés sur son camion sont sans lien avec l'accident, mais ont été réalisés en vue de la vente du véhicule, intervenue peu de temps après. S'agissant du second, qu'il prétend ne pas avoir reçu, il conteste avoir manqué à ses obligations, soulignant qu'il n'y avait aucun voyant lumineux l'informant d'un problème et qu'un camion ne peu circuler sans huile.
Pour les motifs de son licenciement, il soutient qu'il ne s'est jamais vu remettre la liste des stations AS24 interdites ni la note de service du 17 mai 2011, et ajoute qu'en décembre 2011, son employeur a mis à sa disposition un véhicule avec un réservoir plus petit le contraignant à faire le plein plus souvent.
La société Transports Coué sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande pour frais irrépétibles, le rejet des demandes du salarié et la condamnation de celui-ci à lui verser une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les fais engagés en première instance et la même somme au titre de ceux exposés en cause d'appel.
S'agissant des avertissements, elle prétend tout d'abord, qu'en application des dispositions de l'article L. 1332-2 du code du travail, ils n'avaient pas à être précédés d'un entretien préalable. Elle soutient ensuite qu'ils sont justifiés, dès lors qu'il est, selon elle, établi par les pièces qu'elle produit, d'une part que le 8 juillet 2011, M. Mourad X... a percuté un véhicule le précédant, et, d'autre part, que le 24 décembre 2011, il a été constaté qu'il n'y avait plus d'huile dans son camion, ce qui démontre qu'il n'avait pas procédé à sa vérification depuis plusieurs semaines.
En ce qui concerne la mesure de licenciement, la société Transports Coué soutient que son salarié avait bien reçu la liste des stations interdites et qu'il avait déjà fait l'objet de deux rappels à l'ordre écrits sur ce point, les 12 mars et 9 mai 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
I-Sur les avertissements :
Aux termes de l'article L. 1332-2 du code du travail : " Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. "
En l'absence de convention collective ou de règlement intérieur contraire, la société Transports Coué n'avait donc pas à convoquer M. Mourad X... avant de lui envoyer les avertissements des 12 juillet et 26 décembre 2011, lesquels n'étaient pas susceptibles d'avoir une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération de celui-ci.
Il n'y a donc pas lieu de les annuler pour non respect de la procédure.
Sur le fond, dans le premier courrier d'avertissement, daté du 12 juillet 2011 et réceptionné le 16 juillet 2011, il est reproché à M. Mourad X... les faits suivants : " Nous déplorons, de votre part, un incident survenu le 8 juillet 2011 en région parisienne, dont la responsabilité vous incombe entièrement. En effet, vous avez percuté un véhicule vous précédant. De tels manquements sont inadmissibles, en effet :
- Nous vous rappelons que dans le cadre de vos fonctions et attributions, vous devez en toutes circonstances, conserver la maîtrise de votre véhicule.- Cet accrochage relève d'une mauvaise évaluation de l'environnement, qui aurait pu avoir des conséquences bien plus graves au niveau corporel. Nous vous rappelons que vous devez impérativement respecter les distances de sécurité avec les véhicules qui vous précèdent.- L'accrochage, dont vous avez été l'auteur, entraîne un préjudice financier entièrement à la charge de l'entreprise puisque nous avons une franchise de 2000 euros. "
Or, si l'employeur fournit des pièces relatives aux réparations effectuées sur le véhicule, en revanche, il ne verse aux débats aucun élément quant aux circonstances de l'accident, alors que M. Mourad X... soutient pour sa part que c'est le conducteur de l'autre véhicule qui est venu percuter son camion en changeant de file après l'avoir doublé sur la droite. Dans ces conditions, l'avertissement n'apparaît pas justifié et doit être annulé.
Sur le second avertissement, la société Transports Coué justifie que la lettre recommandée du 26 décembre 2011 a bien été postée. Elle lui est revenue avec la mention " Non réclamée ", ce qui n'en affecte néanmoins pas la validité. Il y a fait mention des faits suivants : " Le camion dont vous avez la responsabilité immatriculé... a été emmené chez Volvo à Laval pour une vérification périodique. Le samedi 24 décembre 2011, ils ont constaté qu'il n'y avait plus d'huile dans le moteur. Nous vous rappelons que dans le cadre de vos fonctions et attributions, vous devez signaler le moindre problème au mécanicien, et devez vous assurer que votre ensemble ne comporte aucun problème. Nous constatons donc que vous n'avez effectué aucune vérification du niveau d'huile moteur, c'est pourquoi nous jugeons que votre responsabilité vous incombe entièrement. "
Pour établir la réalité de ce grief, la société Transports Coué verse aux débats un ordre de réparation, qui ne mentionne pas le numéro d'immatriculation du véhicule concerné, et qui fait juste référence à la nécessité de refaire " l'appoint " d'huile, ce qui signifie donc qu'il manquait du lubrifiant, mais pas en grosse quantité. Il produit également l'attestation de M. Y..., responsable d'atelier chez Volvo, qui indique : " concernant le camion immatriculé ..., Volvo a effectivement constaté qu'il n'y avait plus d'huile dans le moteur le samedi 24 décembre 2011 ". Or, outre le fait que le numéro d'immatriculation du véhicule ne correspond pas à celui mentionné dans la lettre d'avertissement, il apparaît tout à fait invraisemblable qu'un camion ait pu circuler sans huile moteur. Par suite, la preuve de ce second grief n'apparaît pas plus établie.
Il y a lieu en conséquence, infirmant en cela le jugement du conseil de prud'hommes de Laval, d'annuler les deux avertissements dont s'agit.

II-Sur le licenciement :
Il résulte suffisamment de l'attestation de Mme Z..., secrétaire, que la note du 17 mai 2011comportant une liste de stations AS24 préférentielles et une liste de stations interdites a été affichée dans l'entreprise et qu'un nouvel exemplaire en a été remis par ses soins à M. Mourad X... le 16 mars 2012, suite à un entretien entre le salarié et son employeur, entretien pour lequel il avait été convoqué par lettre recommandée du 12 mars 2012.
Dans ce courrier, dont l'employeur justifie qu'il a été réceptionné le 17 mars 2012, il est fait grief au salarié d'avoir pris à 12 reprises depuis le mois de septembre 2011, du carburant dans une station " interdite ". Il est rappelé à M. Mourad X... que de " tels faits sont inadmissibles compte tenu de leurs conséquences financières pour l'entreprise ".
Or la fiche établie par la société Transports Coué, dont M. Mourad X... ne conteste pas le contenu, mentionne que le salarié s'est à nouveau fourni dans une station interdite le 23 mars, le 5 avril et le 23 mai 2012. Sur ce document, sont également indiquées les stations autorisées auprès desquelles M. Mourad X... pouvait s'approvisionner et il en résulte, que même s'il avait un camion ayant un réservoir ne permettant de parcourir que 500 km, il était en mesure de respecter les consignes de son employeur en s'approvisionnant plus tôt ou plus tard.
Dès lors, le non respect délibéré par M. Mourad X... des instructions de son employeur est établi. Or, outre fait qu'elle causait un préjudice important à la société Transports Coué, cette situation a été réitérée en dépit des mises en garde des 12 et 16 mars 2012. De la part d'un salarié ayant une faible ancienneté, elle caractérise une faute grave justifiant la mise à pied conservatoire et le licenciement dont il a fait l'objet.
La décision du conseil de prud'hommes de Laval sera donc confirmée en ce qu'elle a dit le licenciement de M. Mourad X... fondé sur une faute grave et débouté celui-ci de ses demandes indemnitaires et de rappel de salaire.

III-Sur les demandes accessoires :
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Partie succombante, M. Mourad X... supportera les dépens afférents à l'instance d'appel et sera subséquemment débouté de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société Transports Coué la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant en matière sociale, publiquement et contradictoirement,
- Confirme le jugement rendu le 18 avril 2013 par le conseil de prud'hommes de Laval sauf en ce qu'il a dit que les avertissements des 12 juillet et 26 décembre 2011 étaient justifiés,
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,
- Annule les avertissements des 12 juillet et 26 décembre 2011,
- Rejette les demandes pour le surplus,
- Condamne M. Mourad X... aux dépens de l'instance d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01276
Date de la décision : 23/06/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-06-23;13.01276 ?
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