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16/06/2015 | FRANCE | N°12/02609

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 16 juin 2015, 12/02609


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 16 Juin 2015

ARRÊT N al/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02609.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 09 Novembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00168

APPELANTE :
Madame Sandrine X... ... 49400 SAUMUR
non comparante-représentée par Maître CAO de la SCP ALAIN GUYON-PAUL CAO, avocats au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
LA SARL LE SABLIER SAUMUROIS AGE D'OR SERVICES 3 rue de l'écluse 49400 SAUMUR
repr

ésentée par Maître HUGOT de la SCP LEXCAP-BDH, avocats au barreau de SAUMUR

COMPOSITION DE LA COU...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 16 Juin 2015

ARRÊT N al/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02609.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 09 Novembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00168

APPELANTE :
Madame Sandrine X... ... 49400 SAUMUR
non comparante-représentée par Maître CAO de la SCP ALAIN GUYON-PAUL CAO, avocats au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
LA SARL LE SABLIER SAUMUROIS AGE D'OR SERVICES 3 rue de l'écluse 49400 SAUMUR
représentée par Maître HUGOT de la SCP LEXCAP-BDH, avocats au barreau de SAUMUR

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne LEPRIEUR, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 16 Juin 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE
Mme Sandrine X... a été engagée en qualité " d'assistance à la qualité de vie " par la société " Le sablier saumurois ", laquelle exerce sous l'enseigne " Age d'or services " une activité de service aux personnes, principalement des personnes âgées ou handicapées, selon contrat à durée indéterminée à temps partiel du 8 septembre 2009 à effet au même jour, la durée du temps de travail convenu étant de 10 heures par semaine. Plusieurs avenants successifs ont modifié la durée de travail de la salariée.
Après s'être trouvée en arrêt de travail à compter du 27 décembre 2010, et avoir été déclarée définitivement inapte par le médecin du travail, Mme X... a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement selon lettre du 23 juillet 2011.
La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 28 novembre 2011 de demandes relatives à l'exécution de son contrat de travail.
Par jugement du 9 novembre 2012, le conseil de prud'hommes de Saumur a : * débouté la salariée de sa demande en paiement de rappel de salaires au titre d'heures complémentaires non rémunérées ; * débouté la salariée de sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé ; * condamné la salariée au paiement de la somme de 500 ¿ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; * laissé les dépens à la charge de la salariée.
Mme X... a régulièrement interjeté appel.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La salariée, par conclusions régulièrement communiquées et parvenues au greffe le 19 août 2014, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, conclut :- à titre principal à la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et à la condamnation de la société au paiement à ce titre de la somme de 3 267, 46 ¿ bruts, outre 326, 75 ¿ bruts au titre des congés payés afférents,- à titre subsidiaire à la condamnation de la société au paiement de la somme de 1763, 58 ¿ bruts à titre de rappel de salaires, outre 176, 36 ¿ bruts au titre des congés payés afférents,- en tout état de cause à la condamnation de la société au paiement de la somme de 2000 ¿ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de ses prétentions, elle indique qu'il résulte de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation que dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail doivent être communiqués par écrit chaque mois au salarié ; en l'absence de stipulation particulière, ils doivent l'être avant le début de chaque mois. En l'absence d'une telle communication, il est présumé que l'emploi est à temps complet ; il appartient alors à l'employeur de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur. En l'espèce, les plannings fournis par la société démontrent que la durée du travail ainsi que la répartition sur les jours de la semaine étaient modifiés chaque semaine. De plus, l'ensemble des avenants étaient conclus pour une durée indéterminée. En conséquence, la salariée n'avait pas connaissance le 1er de chaque mois de son temps exact de travail ainsi que de ses horaires sur les jours de la semaine et se trouvait dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail ainsi que dans l'obligation de se tenir à la disposition constante de son employeur.
En tout état de cause, la requalification doit être prononcée lorsque le recours par l'employeur à des heures complémentaires a eu pour effet de porter, pour une période même limitée, la durée de travail du salarié au-delà de la durée légale. Or en l'espèce, tel est le cas de l'avenant en date du 2 janvier 2010 qui a fait passer l'horaire hebdomadaire de travail de la salariée de 20 heures à 35 heures hebdomadaires.
Son contrat de travail doit être par conséquent requalifié en un contrat à temps complet et l'employeur condamné à un rappel de salaires sur la base d'un temps complet.
A titre subsidiaire, dès lors que l'employeur a eu recours à 4 avenants afin de modifier la durée de travail et de déroger aux dispositions des articles L. 3123-14 et suivants du code du travail, il est dû un rappel de salaires au titre de la majoration de 25 % applicable en cas de dépassement du dixième de la durée hebdomadaire de travail. La société, par conclusions régulièrement communiquées et parvenues au greffe le 7 octobre 2014, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, conclut au débouté de la salariée de toutes ses demandes, et subsidiairement à la réduction de celles-ci dans d'importantes proportions ainsi qu'à sa condamnation au paiement de la somme de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, elle expose que l'article L. 3123-14 du code du travail applicable à la relation de travail était celui dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 juin 2013 et qu'ainsi, la société n'avait pas à prévoir dans le contrat de travail la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine. Au demeurant, la salariée connaissait parfaitement ses heures et jours habituels de travail et si des modifications pouvaient ponctuellement intervenir, celles-ci ont eu lieu soit à la demande de la salariée soit avec son accord. L'existence de tableaux provisoires versés aux débats par Mme X... démontre que celle-ci était informée, chaque mois, des horaires qui étaient les siens. La régularisation de divers avenants confirme qu'elle avait donné son accord aux modifications de son temps de travail. La salariée n'était manifestement pas dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur.
Si l'horaire de travail de la salariée a été porté à 35 heures pour le seul mois de janvier 2010, c'est en vertu d'un avenant conclu volontairement. A supposer validé le raisonnement de la salariée, celle-ci ne peut pas former de réclamation au titre des mois d'octobre, novembre et décembre 2009.
A titre subsidiaire, les calculs présentés par la salariée pour justifier sa demande de rappels de salaires au titre de la majoration sont totalement erronés puisque méconnaissant la régularisation d'avenants successifs.
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur les demandes en paiement de rappel de salaires au titre d'heures complémentaires non rémunérées et d'une indemnité pour travail dissimulé, présentées en première instance :
La cour n'étant saisie d'aucune demande ni d'aucun moyen de ces chefs, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes en paiement de rappel de salaires au titre d'heures complémentaires non rémunérées ainsi que d'une indemnité pour travail dissimulé.
- Sur la demande, nouvelle en cause d'appel, de requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein et de paiement de rappels de salaire subséquents :
L'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction applicable, antérieure à la loi du 14 juin 2013, disposait : Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne : 1o La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application de l'article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; 2o Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ; 3o Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ; 4o Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.
Ainsi, selon l'article L. 3123-14, 3o du code précité, le contrat à temps partiel doit notamment mentionner les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié ; dans les associations et entreprises d'aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié. Il en résulte qu'en l'absence de stipulations relatives au jour du mois auxquels sont communiqués par écrit les horaires de travail des salariés des entreprises et association d'aide à domicile, ceux-ci doivent l'être avant le début de chaque mois ; l'absence d'une telle communication fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.
En l'espèce, la durée du travail convenue était prévue au contrat puis dans les avenants successifs. S'agissant de la répartition du temps de travail convenu entre les jours de la semaine, il était mentionné par exemple, dans le contrat initial, que l'horaire hebdomadaire de 10 heures était réparti en 2 heures par jour sur 5 jours. Si cette clause de répartition peut apparaître imprécise, en ce qu'elle ne mentionne pas les jours de la semaine travaillés, en tout état de cause cette clause n'était pas exigée pour les salariés des entreprises d'aide à domicile, comme dans le cas présent. S'agissant de la détermination des horaires, ceux-ci figuraient dans le contrat de travail initial et les avenants successifs.
Mais il convient de constater que les indications figurant dans le contrat de travail initial et les avenants successifs étaient purement théoriques. Ainsi tant le nombre d'heures travaillées chaque semaine que les jours travaillés et les horaires de travail étaient modifiés sans cesse, d'une semaine à l'autre. L'employeur ne justifie pas des conditions dans lesquelles les horaires de travail effectifs ainsi que ses modifications étaient portés à la connaissance de la salariée et notamment du respect d'un quelconque délai de prévenance. Les plannings intervenant dont la société se prévaut étaient des plannings hebdomadaires et non mensuels et il n'est nullement justifié que tous les plannings hebdomadaires d'un mois aient été remis avant le début de chaque mois à la salariée.
Ainsi, à titre d'exemple, pour le mois de septembre 2009, le contrat de travail initial prévoyait une durée hebdomadaire de travail de 10 heures répartie " en 2 heures par jour sur 5 jours, selon l'horaire suivant 9h. 12h ". Le planning hebdomadaire intervenant de la semaine 38 allant du lundi 14 au dimanche 20 septembre 2009, portant la date du 16 septembre 2009, dont la société soutient au demeurant qu'il était provisoire et ne correspond pas à la réalité des heures effectuées mais avait été porté à la connaissance de la salariée (sans préciser à quelle date il l'avait été) prévoit 25, 30 heures de travail sur 6 jours (soit sur tous les jours de la semaine sauf le vendredi), ainsi réparties : 2 heures de travail le lundi, 6 heures le mardi, 4 heures 45 le mercredi, 7 heures 15 le jeudi, 2h45 de travail le samedi et 2h 45 le dimanche. Le planning de la semaine suivante, qui porte la date d'édition du 18 septembre 2009, mentionne des horaires de travail totalement différents, soit 7 h15 de travail le mardi, 4h 15 le mercredi et 5 h le jeudi. De la même manière, alors que l'avenant du 1er octobre 2009 à effet au même jour prévoyait un horaire de travail de 20 heures hebdomadaires " réparties en 2 heures et 3 heures par jour sur 4 jours, selon l'horaire suivant : 9h... 12h et de 14 à 16h ", le planning hebdomadaire intervenant portant la date du 5 octobre 2009 et établi pour la semaine 41 allant du lundi 5 au dimanche 11 octobre 2009 mentionne un temps de travail d'une durée globale de 26 h 15 sur 6 jours, soit 5 h 30 le lundi, 7 heures 45 le mardi, 2 heures 30 le mercredi, 2 heures 45 le jeudi, 2 heures 15 le vendredi, 5 heures 30 le samedi. Des constatations similaires peuvent être faites pour d'autres périodes d'emploi. Par voie de conséquence, il s'avère que les horaires de travail effectifs n'étaient pas communiqués par écrit avant le début de chaque mois à la salariée et que celle-ci se trouvait dans l'impossibilité de connaître son rythme de travail et à la disposition constante de l'employeur.
Il sera par conséquent fait droit à la demande de requalification, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens. Les sommes réclamées à titre de rappel de salaires et congés payés afférents ne sont pas discutées en leur quantum et ont été exactement calculées en l'état des pièces produites. Il sera fait droit à la demande principale, par voie de dispositions nouvelles.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré en ses seules dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la société Le sablier saumurois à payer à Mme Sandrine X... les sommes de : * 3 267, 46 ¿ bruts à titre de rappel de salaires au titre de la requalification du contrat de travail en un contrat à temps plein, outre 326, 74 ¿ bruts au titre des congés payés afférents ; * 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Déboute la société Le sablier saumurois de ses demandes au titre des frais irrépétibles en première instance et en cause d'appel ;
Condamne la société Le sablier saumurois aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02609
Date de la décision : 16/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-06-16;12.02609 ?
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