COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01108.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MAINE ET LOIRE, décision attaquée en date du 12 Décembre 2012, enregistrée sous le no 21200247
ARRÊT DU 05 Mai 2015
APPELANTE :
Madame Catherine X...... 72340 LHOMME (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/ 008756 du 10/ 10/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
non comparante-représentée par Maître Xavier RABU, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
LA CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE L'ANJOU (CAF) 32 rue Louis Gain 49927 ANGERS CEDEX 9
représentée par Madame Y..., muni d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mars 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller
Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 05 Mai 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE,
Madame Catherine X... est allocataire de la caisse d'allocations familiales de Maine-et-Loire depuis le mois d'octobre 2008 et se trouvait auparavant allocataire de la caisse d'allocations familiales de la Vendée.
La caisse d'allocations familiales de la Vendée versait à madame X... des prestations familiales (allocations familiales, complément familial et allocation de logement familiale) pour elle et ses enfants Florian, né le 13 mai 1987, Aurélie, née le 28 décembre 1988 et Laetitia, née le 29 mars 1992 et elle percevait le revenu minimum d'insertion.
Lors de son arrivée dans le Maine-et-Loire, madame X... a complété une déclaration de situation indiquant avoir encore deux enfants à son domicile, Aurélie et Laëtitia.
La caisse d'allocations familiales de Maine-et-Loire ayant constaté qu'Aurélie était allocataire de la caisse d'allocations familiales de la Rochelle depuis le mois de septembre 2007, a signalé cette situation à la caisse d'allocations familiales de la Vendée et a demandé également la mutation du dossier de madame X....
La caisse d'allocations familiales de la Vendée a alors recalculé les droits de madame X... aux prestations familiales en prenant en compte le fait qu'Aurélie était bénéficiaire d'une aide au logement versée par la caisse d'allocations familiales de la Rochelle depuis septembre 2007.
Il s'en est suivi un trop perçu de prestations familiales de 5 108, 35 ¿ pour les mois de septembre 2007 à septembre 2008 inclus au motif que madame X... ne pouvait bénéficier de prestations que pour deux enfants et non pour trois. Ce trop perçu a été notifié madame X... par la caisse d'allocations familiales de la Vendée suivant courrier du 14 octobre 2008.
Concernant Florian, qui n'apparaissait pas sur la déclaration de situation, mais figurait sur le dossier transmis par la caisse d'allocations familiales de la Vendée, madame X... a indiqué qu'il ne vivait plus chez elle depuis septembre 2008 alors que la caisse d'allocations familiales de la Vendée a constaté qu'il était également bénéficiaire d'aide au logement depuis septembre 2007 et non 2008 auprès de la caisse d'allocations familiales de la Rochelle.
Il s'en est suivi de nouveaux trop perçus de prestations familiales (allocations familiales et allocation de logement familiale) de 1 015, 15 ¿ ainsi que de revenu minimum d'insertion pour les mois de septembre 2007 à septembre 2008, madame X... n'ayant finalement droit aux prestations que pour un seul enfant durant cette période. Ce second trop perçu a été notifié à madame X... par la caisse d'allocations familiales de la Vendée le 16 décembre 2008.
Compte tenu du lieu de résidence de madame X..., les créances de la caisse d'allocations familiales de la Vendée ont été transférées à la caisse d'allocations familiales de Mairie-et-Loire le 16 décembre 2008.
Le remboursement de ces créances a été effectué sur le revenu de solidarité active et sur l'aide personnalisée au logement ainsi que sur l'allocation de soutien familiale perçus par Mme X... en application des dispositions de l'article L. 553-2 du code de la sécurité sociale.
Par courrier du 14 avril 2011, madame X... a demandé que lui soit transmise une copie de son dossier sans autre revendication et a renouvelé cette demande le 16 mai 2011.
La caisse d'allocations familiales de Maine-et-Loire lui a transmis les pièces de son dossier le 20 mai 2011.
Madame X... a demandé le 20 juin 2011 que lui soient détaillés les paiements retenues effectuées depuis octobre 2008.
Il lui a été indiqué le 8 juillet 2011 qu'elle restait à devoir un solde de 782, 60 ¿ au titre du second trop perçu transféré par la caisse d'allocations familiales de la Vendée pour un montant de 1 015, 15 ¿ alors que l'autre trop perçu de 5 108, 35 ¿ était soldé et que les prêts effectués auprès de caisse d'allocations familiales étaient aussi soldés.
A la demande de madame X..., un courrier détaillant le décompte lui a été adressé le 19 juillet 2011.
Le 28 décembre 2011, madame X... a déclaré n'avoir jamais reçu le dossier qui lui avait été envoyé le 20 mai 2011 et a demandé à le recevoir à nouveau. Copie lui en a é remise en main propre le 5 janvier 2012. A cette date elle ne restait plus devoir que la somme de 13, 07 ¿ sur la dette de 1 015, 15 ¿ laquelle a été définitivement soldée en février 2012.
Par courrier du 12 avril 2012, madame X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale en soutenant qu'elle avait averti à temps la caisse d'allocations familiales du départ de sa fille Aurélie et que les prélèvements effectués sur ses prestations étaient excessifs ce qui l'a plongé dans une grande détresse sociale ; qu'elle était ainsi fondée à demander a être indemnisée du harcèlement moral dont elle s'estimant victime et sollicitait le remboursement des frais de banque, d'assurance et de réparation de sa voiture ainsi que de son préjudice moral causé par le fait de ne pas avoir pu nourrir correctement sa fille Laetitia.
La caisse d'allocations familiales de Maine-et-Loire a répondu que madame X... ne percevait que le revenu de solidarité active et l'aide personnalisée au logement depuis le départ de sa fille Laetitia fin août 2011, que ces prestations n'étaient pas de la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale, que concernant les trop perçus transmis par la caisse d'allocations familiales de la Vendée toute action en contestation devait être formée contre cette dernière et qu'enfin les notifications des trop perçus effectuées les 14 octobre et 16 décembre 2008 indiquaient bien les démarches à effectuer en cas de contestation et la prescription de deux mois de l'article R. 142-1 du Code de la sécurité sociale et qu'ainsi madame X... était forclose, faute d'avoir saisi dans un délai de deux mois la commission de recours amiable mais aussi faute d'avoir agi dans le délai de deux ans de l'article L. 553-1 du code la sécurité sociale.
Par jugement en date du 12 décembre 2012 le tribunal des affaires de sécurité sociale a déclaré l'action de madame X... prescrite en ce qui concerne les retenues pour trop perçus et l'a déboutée de son action en responsabilité pour harcèlement moral.
Par déclaration au greffe en date du 26 avril 2013 madame X... a relevé appel de cette décision qui lui a été notifiée le 18 avril précédent.
MOYENS ET PRETENTIONS,
Dans ses dernières conclusions régulièrement communiquées déposées le 28 janvier 2015 et l'audience madame X... demande à la cour :
- de prononcer l'annulation du jugement entrepris,- de dire et juger qu'elle n'est pas prescrite en son action,- avant dire droit, d'ordonner à la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire de produire l'ensemble de son dossier contenant tant les documents reçus par elle que ceux émis par voie électronique,- de surseoir à statuer sur ses autres demandes. Elle fait essentiellement valoir :
- que le jugement doit être annulé parce qu'elle a dirigé ses demandes tant contre la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire que de la caisse d'allocations familiales de la Vendée et que seule la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire a été convoquée à l'audience de sorte que le tribunal n'a pas permis à toutes les parties de s'exprimer sur ses demandes et statué valablement au regard de la lettre de saisine ;- que si le tribunal a justement considéré que la prescription pour la contestation des trop perçus n'avait pas commencé à courir, il a à tort considéré que sa demande s'opposait à la prescription des paiements alors que la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire ne prouve pas lui avoir transmis les documents et éléments lui permettant de vérifier la validité des paiements opérés ; que subsidiairement sa saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale le 12 avril 2012 a interrompu la prescription de sorte que les paiements postérieurs ne peuvent être prescrits ;- que sa demande de production de la copie de son dossier par voie électronique est justifiée au regard des dispositions des articles 1et 4 de la loi no78-753 du 17 juillet 1978 ;
Dans ses dernières conclusions dites additionnelles régulièrement communiquées déposées le 19 février 2015 et à l'audience la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire demande à la cour de rejeter l'ensemble des demandes de madame X... et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Elle soutient en résumé :
- que les documents produits par madame X... hors du délai donné par la cour dans son avis de mise en état pour conclure doivent être jugés irrecevables,- que le jugement ne saurait être annulé alors que c'est madame X... qui a dirigé sa demande contre elle et qu'elle n'a pas estimé devoir présenter en temps utile de demandes contre la caisse d'allocations familiales de la Vendée qui lui avait notifié fin 2008 les trop perçus,- que l'action concernant les retenues pour trop perçus est effectivement prescrite par application des dispositions de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale alors que madame X... ne pouvait les ignorer puisqu'elles ont été effectuées en 2008, 2009 et 2010 sur les prestations qu'elle lui versait, qu'elle ne s'est jamais manifesté avant le 20 juin 2011, date à laquelle elle a demandé des informations qui lui ont été envoyées le 19 juillet 2011, jusqu'au 31 décembre 2011 date à laquelle elle restait devoir la somme de 13, 07 ¿ soldée en février 2012 ; qu'elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale en avril 2012 ;- que son dossier tel qu'en sa possession et intéressant le litige lui a déjà été transmis à deux reprises de sorte que sa demande à ce titre est mal fondée alors que par ailleurs à deux reprise lors de rendez vous elle a été précisément informé de sa situation.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 23 mars 2015.
MOTIFS DE LA DECISION,
Sur la recevabilité des documents produits,
En matière de sécurité sociale la procédure est orale et les dates données aux parties pour conclure n'ont pas pour effet de rendre irrecevable leurs écritures et pièces produites au-delà desdits délais ; il s'ensuit que la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire, qui a pu conclure en réponse et s'expliquer à l'audience sur ces pièces, de sorte que le contradictoire et les droits de la défense ont été respectés, est mal fondé à en solliciter le rejet.
Sur la nullité du jugement,
Pour soutenir que le jugement serait nul, madame X... fait valoir que « le tribunal n'a pas permis à toutes les parties de s'exprimer sur ses demandes et n'aurait pas statué valablement au regard de la lettre de saisine ».
Ce fondement au demeurant peu explicite et nullement soutenu en droit dans les écritures apparaît ressortir d'un défaut de respect par le tribunal du contradictoire en ce qu'il aurait statué hors la présence d'une partie qui aurait dû être convoquée.
Si en application de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, il ne ressort en rien du jugement entrepris que le tribunal ait retenu dans sa décision des moyens, explications et documents invoqués ou produits dont les parties n'ont pas été à même de débattre ni qu'il ait fondé sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Par ailleurs aucune des causes de nullité d'un jugement ressortant des dispositions des articles 430 et suivants du code de procédure civile article 436 et 458 au demeurant étrangère au litige n'est soulevé par l'appelante.
Enfin aux termes des articles 1 et 4 du code de procédure civile, seules les parties introduisent l'instance et l'objet du litige est déterminé par leurs prétentions respectives.
En l'espèce il résulte du dossier de la procédure que, par courrier reçu le 13 avril 2012, madame X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Pays de la Loire de ses réclamations.
Elle était alors allocataire de prestations qui lui étaient versée par la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire-à laquelle son dossier avait été transmis depuis 2008- et il résulte clairement de sa lettre contenant saisine du tribunal qu'elle dirigeait exclusivement ses demandes à l'encontre de ladite caisse ; que c'est dans ces conditions que seule cette caisse a été régulièrement convoquée à l'audience, ce qui n'a pas donné lieu à une quelconque observation de la part de Mme X... qui a développé ses demandes au fond.
Si madame X... estimait nécessaire de mettre en cause une autre caisse d'allocation familiales il lui appartenait soit de présenter des demandes à son encontre soit de solliciter sa mise en cause et sa convocation, ce qu'elle n'a pas fait et qu'elle ne peut faire grief au tribunal de ne pas avoir fait en ses lieux et place.
Madame X... sera en conséquence débouté de sa demande en nullité du jugement entrepris.
Sur la prescription,
La demande de Mme X... a pour objet de contester le caractère justifié des trop perçus d'allocations qui ont été constatés à son détriment en 2008 et qui ont été remboursés par elle par prélèvements sur les allocations qui lui ont été versées postérieurement.
Elle conteste donc les décisions de retenues pour trop perçus de la CAF qui ont données lieu à notification en octobre et décembre 2008 en soutenant qu'elles lui ont causé un préjudice.
Dans ces conditions, dès lors que sa demande n'est pas une demande en restitution d'indû, la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire est mal fondée à lui opposer les dispositions de l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale qui sont étrangères au litige.
Or dans la mesure où il n'est pas établi que madame X... ait reçu notification de ces décisions constatant ces trop perçus en octobre et décembre 2008, le délai de deux mois pour les contester n'a pu courir de sorte que son action en contestation de ces décisions n'est pas prescrite.
Au fond,
La demande de sursis à statuer est mal fondée alors que Mme X... ne précise pas quelles pièces elle demande précisément et qu'il est avéré qu'elle a eu connaissance et communication des documents la concernant détenues par la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire avec laquelle au surplus elle a eu deux entretiens sur sa situation, ce dont elle ne disconvient pas.
Il convient alors de rouvrir les débats et d'inviter Mme X... à conclure au fond sur sa demande, l'affaire étant renvoyée à l'audience du 19 octobre 2015.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
STATUANT à nouveau et y :
DEBOUTE la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire de sa demande tendant à voir écarter des débâts les documents produits par madame X... hors du délai donné par la cour dans son avis de mise en état pour conclure.
DEBOUTE Mme X... de sa demande en nullité du jugement pour défaut de respect du contradictoire.
REJETTE la fin de non recevoir tirée de la prescription visée à l'article L. 553-1 du code de la sécurité sociale soulevée par la caisse d'allocations familiales de Maine et Loire.
ROUVRE les débats et enjoint à Mme X... de conclure au fond, l'affaire étant rappelée à l'audience de 19 octobre 2015 à 14H00.