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31/03/2015 | FRANCE | N°13/01929

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 31 mars 2015, 13/01929


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01929.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 30 Mai 2013, enregistrée sous le no F 11/ 00800

ARRÊT DU 31 Mars 2015

APPELANTE :

LA SARL IASO Quartier Roche Chausson 26790 LA BAUME DE TRANSIT

non comparante-représentée par Maître CHOUQUET-MAISONNEUVE, avocat substituant Maître DAVID HERPIN, avocat au barreau de VALENCE
INTIME :
Monsieur Victorien X...... 49100 ANGERS

com

parant-assisté de Maître Mathias JARRY, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En appli...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 01929.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 30 Mai 2013, enregistrée sous le no F 11/ 00800

ARRÊT DU 31 Mars 2015

APPELANTE :

LA SARL IASO Quartier Roche Chausson 26790 LA BAUME DE TRANSIT

non comparante-représentée par Maître CHOUQUET-MAISONNEUVE, avocat substituant Maître DAVID HERPIN, avocat au barreau de VALENCE
INTIME :
Monsieur Victorien X...... 49100 ANGERS

comparant-assisté de Maître Mathias JARRY, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Février 2015 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Clarisse PORTMANN, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 31 Mars 2015, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE,
La société IASO gère une résidence accueillant des malades atteints de la maladie d'Alzheimer ; elle emploie plus de 11 salariés et est soumise à la convention collective des établissements d'hospitalisation privée.
Le 14 décembre 2005 la société IASO a embauché M. Victorien X... en contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'aide médico-psychologique.
Dans le dernier état de la relation de travail entre les parties M X... percevait un salaire mensuel de 1 741 ¿.
Le 31 mars 2011 M X... a été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire auquel il s'est rendu mais a indiqué qu'il ne participerait pas dans la mesure où l'employeur refusait qu'il y soit assisté d'un conseiller n'appartenant à l'entreprise au motif qu'il y avait une déléguée du personnel.
Il a ensuite, le 13 avril 2011, reçu une notification de mise à pied disciplinaire de trois jours pour une incitation à dénonciation calomnieuse et critiques sans fondement à l'égard de ses collègues visant à déstabiliser l'établissement.
L'employeur ayant maintenu la sanction, au surplus selon lui irrégulière, malgré sa contestation, en juillet 2011, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande d'annulation de celle ci.
Le 13 mars 2012 il a été licencié pour faute grave et il a contesté son licenciement et présenté des demandes d'indemnisation subséquentes.
Par jugement en date du 30 mai 2013 le conseil de prud'hommes d'Angers :- a annulé la sanction disciplinaire et condamné la société IASO à verser à M. X... les sommes de 1 500 ¿ pour irrégularité de la procédure, 330 ¿ au titre des trois jours de mise à pied injustifiée et 5 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,- a dit et jugé que le licenciement de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,- a assorti le jugement de l'exécution provisoire totale,- a condamné la société IASO à verser à M. X... la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par lettre recommandée expédiée le 2 juillet reçue au greffe le 5 juillet 2013, la société IASO a relevé appel de ce jugement qui lui a été notifié le 6 juin précédent.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écriture régulièrement communiquées déposées le 16 février 2015 et à l'audience, la société IASO demande à la cour :- de réformer le jugement en ce qu'il a annulé la sanction disciplinaire et alloué des indemnités à M. X..., de dire et juger que la procédure est régulière et que la sanction est justifiée et de débouter le salarié de ses demandes de ces chefs,- de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu les fautes commises par M. X... légitimant son licenciement mais de dire et juger que ces fautes sont graves et de le débouter de ses demandes de ce chef,- subsidiairement de réduire le montant des dommages et intérêts alloués à M X...,- de condamner M X... à lui verser la somme de 2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle fait essentiellement valoir :- que la procédure de la mise à pied a été régulière dans la mesure où le salarié avait été convoqué en vue d'une sanction et non en vue d'un licenciement, et qu'il ne pouvait dès lors se prévaloir des dispositions de l'article L. 1232-4 du code du travail de sorte que, en application de l'article L 1332-2 du code du travail, il ne pouvait se faire assister que par un membre du personnel de l'entreprise ; qu'au surplus il existait bel et bien dans l'entreprise un délégué du personnel, la déléguée précédemment élue ayant régulièrement accepté de poursuivre son mandat jusqu'aux élections suivantes ;- que cette sanction disciplinaire était justifiée au fond, par la faute commise par M. X... caractérisée par le fait d'avoir tenter de convaincre une collègue de porter plainte contre une autre collègue pour des faits sans aucun fondement et d'avoir, de ce fait, déstabiliser l'établissement ;- que le licenciement de M X... était justifié compte tenu des fautes avérées qui lui étaient reprochés caractérisées par une maltraitance active et un défaut de soins des personnes prises en charge dans l'établissement qui doivent être considérées comme particulièrement graves pour un membre du personnel s'occupant de personnes âgées et atteintes de la maladie d'Alzheimer.

Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 19 février 2015 et à l'audience M X... demande à la cour :- de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions concernant la sanction disciplinaire et ses conséquences indemnitaires,- de l'infirmer en ce qu'il a jugé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, de dire et juger que son licenciement a été sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de condamner la société IASO à lui verser la somme de 41 784 ¿ à titre de dommages et intérêts outre celle de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Il soutient principalement :- que la procédure de la mise à pied disciplinaire est irrégulière dans la mesure où, sa convocation prévoyant une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, les dispositions de l'article L. 1232-4 du code de travail étaient applicables ; que par ailleurs il n'y avait aucun délégué du personnel régulièrement en fonction ; qu'il est ainsi fondé à prétendre à l'indemnité prévue par l'article L. 1235-2 du code du travail ;- que par ailleurs cette mise à pied était injustifiée au fond, les faits qui l'ont fondés étant inexacts et ne pouvant en toute hypothèse caractériser une faute ;- que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse alors que les faits qui lui ont été reprochés ont été mal interprétés et ne caractérisent pas des fautes justifiant un licenciement.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se rapporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l'audience du 23 février 2015.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur la sanction disciplinaire,
Sur la procédure,
Il ne fait pas débats qu'ensuite d'une convocation par lettre recommandée du 1er avril 2011 pour un entretien fixé au 11 avril 2011, M X... s'est présenté à cet entretien assisté d'un conseiller extérieur à l'entreprise ; que l'employeur lui a indiqué qu'il ne pouvait être assisté que d'une personne appartenant au personnel de l'entreprise et ce d'autant qu'il y avait une déléguée du personnel ; que M. X... a alors refusé de participer à l'entretien et qu'il s'est vu ensuite notifier une mise à pied de trois jours le 13 avril suivant.
La convocation du 1er avril 2011 émane de M Y... le DRH de la société et est ainsi libellée : « des faits graves ont été portés à notre connaissance le 31 mars 2011. Nous souhaitons recueillir formellement votre avis. En conséquence nous vous convoquons à un entretien préalable à une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement le 11 avril lieu habituel de votre travail. Vous serez reçu par Mme Z... directrice locale. Lors de cet entretien vous pourrez être accompagné de la personne de votre choix appartenant obligatoirement au personnel de la résidence ».
Il résulte des termes de cette convocation que l'employeur a choisi, comme l'autorise son pouvoir de direction, la procédure préalable à sanction disciplinaire de l'article L 1332-2 du code du travail en précisant que l'entretien devait avoir lieu avec Mme Z... directrice locale et non avec la direction de l'association et notamment du DRH lui-même et a effectivement indiqué au salarié qu'il pouvait être accompagné de la personne de son choix appartenant obligatoirement au personnel de la résidence.
Pour autant, dans la mesure où il a précisé dans la convocation que la sanction pouvait aller jusqu'au licenciement, par application des dispositions de l'article L 1232-4 du code du travail, M X... était en droit de se faire assister lors de l'entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise et, s'il n'y avait pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise soit par un conseiller choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.
Si, ensuite d'élection le 6 décembre 2006, Mme A... puis Mme B... ont successivement exercé les fonctions de délégués du personnel, leur mandat de quatre ans avait pris fin le 6 décembre 2010 de sorte qu'en l'absence de nouvelles élections avant avril 2011 et de prorogation conforme du mandat de Mme B..., à cette date il n'y avait pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise.
Ceci posé, la demande de M X... au titre de cette irrégularité tend exclusivement à l'application des dispositions de l'article L 1235-2 du code du travail.
Or l'indemnité prévue par ce texte sanctionne l'irrégularité de la procédure « quand elle a conduit à un licenciement », ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, M X... ne s'étant vu infligé qu'une mise à pied.
M X... ne faisant pas d'autre demande que celle tendant à l'application du texte sus visé, il doit être débouté de sa demande d'indemnisation.
Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.
Au fond,
La mise à pied de trois jours notifiée à M X... est ainsi motivée : « nous vous reprochons le 31 mars 2011 d'avoir incité Mme J à déposer plainte pour racisme contre Mme C... infirmière référente sur la base d'un mot comportant selon vous des propos racistes. Les propos écrits étaient « obligation d'avoir une soirée détente par semaine en famille et/ ou entre amis autour d'un couscous par exemple ». Choquée Mme J est immédiatement venue se plaindre de la situation qu'elle a trouvée inacceptable et complètement inadaptée. Nous analysons votre attitude comme de l'incitation à la dénonciation calomnieuse. Nous vous rappelons que la définition calomnieuse est régie par l'article L-226-10 section 3 du code pénal dont voici le texte intégral : Votre objectif (incitation à transformation de simples faits en faits racistes) visait à porter atteinte à l'image de l'un de nos cadres est inacceptable. Le dénigrement de l'employeur ou d'un de ses représentants est un fait grave. De plus le règlement intérieur prévoit expressément cette situation dans son article V-24 application des sanctions à savoir : sanction de mise à pied de un à trois jours pour notamment critiques portées à l'égard de ses collègues sans fondement et visant à déstabiliser l'Etablissement. Votre refus de nous expliquer cette situation est choquant et nous vous informons que nous ne retenons aucune circonstance atténuante ».

Si la décision de sanction relève du pouvoir de direction de l'employeur, il appartient au juge, quand il est saisi, d'en apprécier le bien fondé objectif et le caractère proportionné.
Il résulte des documents produits et des débats que Mme C... infirmière référente et ancienne collègue et « amie » de Mme E... lui a, à l'issue d'une discussion portant sur les problèmes personnels de cette dernière, remis un mot en forme d'ordonnance ainsi libellé « 1 : obligation d'avoir une soirée détente par semaine en famille et ou entre amis (autour d'un couscous par exemple) ; 2 : faire l'amour avec son mari » ; que Mme E... a montré ce mot à ses collègues le 31 mars 2011.
Si M X... soutient seulement avoir le 31 mars 2011 « exprimer son étonnement et sa consternation » face aux propos contenus dans le mot écrit par Mme C... infirmière référente, il résulte des attestations de Mme E..., qui l'a rapporté à Mme Z..., qu'il a, avec Mme F... autre salariée, « insisté pour qu'elle porte plainte pour racisme ».
Or ce comportement qui a motivé la sanction de mise à pied caractérise bel et bien une incitation à la dénonciation d'un fait gravement critiquable imputable à une collègue de nature à porter atteinte aux relations normales de travail et donc à l'entreprise.
M X...- qui de ce fait l'admet-justifie ce comportement par la détresse dans laquelle Mme E... se trouvait après avoir reçu ce mot et par le fait que, selon lui, les termes de ce mot étaient inacceptables de la part d'une supérieure hiérarchique.
Cependant si certains salariés confirment les allégations de M X..., Mme E... elle-même atteste le 21 décembre 2011 « sur le mot que Fabienne m'avait écrit et passé, il s'agissait comme je l'ai déjà avancé de « copineries » entre nous deux et que jamais il n'était question de ma part de lui donner d'autres proportions. En conclusion de notre entretien j'apprends aussi que des collègues qui sont en différent avec la SARL IASO essayent d'utiliser cette lettre à des fins disproportionnées. Sachez que je ne suis nullement au courant de cette machination et que je décline toute utilisation de toute nature et à toute fin de la lettre susdite. Vous pouvez également m'appeler à témoigner si vous jugez que c'est nécessaire » puis le 25 janvier 2012 « je suis partie en congés maladie le 5 août 2010 je me suis fait opérer. J'ai repris le travail début janvier 2011, je n'étais pas bien. L'équipe a joué sur le fait que j'ai reçu un avertissement au sujet de retard de mon arrêt maladie. J'entendais plein de critiques, j'étais mal. Fabienne s'en est aperçu et m'as dit as-tu 5 mn je suis allée après mon travail dans le bureau de Fabienne je lui ai parlé de mes soucis d'opérations avec les complications de mon VAE. Elle m'a écouté et m'a demandé de me détendre et m'a écrit une lettre avec des mots « d'anciennes collègues ». Je ressentais des embrouilles entre la direction et le personnel » « L'équipe voulait savoir pourquoi Fabienne m'avait reçu. Le lendemain, j'ai montré la lettre de Fabienne à toute l'équipe. Ils me disaient « pourquoi elle t'a mis des mots comme ça.. il faut porter plainte, c'est du racisme ; j'étais perdu. J'en ai parlé à mon mari qui m'a dit que c'est un piège pour moi et qu'ils se servent de moi, que si Fabienne a fait la lettre c'est gentil de sa part qu'il ne faut pas porter plainte et qu'ils règlent leur problèmes entre eux. Le 31 mars Mme F... et M. X... ont insisté pour que je porte plainte pour racisme, j'ai écouté les conseils de mon mari et je suis allée voir Mme Z... dans son bureau.
Il résulte enfin de son témoignage s'agissant des dires de ses collègues qu'elle « était perdue après ce qu'ils lui avaient dit et gonflé le mot racisme à propos de la lettre que je leur ai parlé, ça touchait ma fierté ».
Il ressort en résumé de ces déclarations que le mot écrit par Mme C... à Mme E..., alors qu'elles étaient anciennes collègues et qu'elles ont évoqué lors d'un entretien le mal être de cette dernière-et dont au surplus le caractère objectivement « raciste » est loin d'être évident-, ne lui a posé aucun problème en lui-même et que ce sont les réactions des membres de l'équipe, dont M X..., qui en ont stigmatisé les termes en les considérant comme inacceptables et en s'érigeant en défenseur de Mme E... et en accusateur de Mme C...- avec laquelle ils avaient des différents-et alors que ça ne les concernait pas, qui a eu pour effet de la perturber d'avantage alors qu'elle n'était déjà pas bien.
Il s'en déduit que le comportement injustifié et fautif de M X... justifiait la sanction de la mise à pied de trois jours qui lui a été infligée.
Le jugement entrepris doit donc être infirmé de ce chef et M X... débouté de sa demande en annulation de sa mise à pied.
Sur le licenciement,
Aux termes de la lettre de licenciement reçue par M X... qui fixe les limites du juge il a été licencié pour :
- « maltraitance active : le 17 février 2012 à 18h30 pendant le repas alors que Mme Z... et Mme C... repartaient chacun vers l'unité 2 et que les coursives étaient éteintes, Mme Z... a entendu une interpellation suivante « Arrête Victorien ! » à votre égard de la part de Mme C.... Mme C (chambre 039) venait d'être tirée brutalement. Malgré votre déni devant Mme Z..., Mme C... qui grâce à sa situation a été témoin du fait que vous avez pris par le bras Mme C de manière violente afin de la pousser dans le couloir pour lui faire quitte la salle de vie de l'unité 1. Vous avez été surpris de la présence de vos deux cadres qui étaient dans la pénombre.- défaut de soins : le 17 février 2012 à l'heure du goûter M L (chambre 018) a été victime d'une fausse route par absorption d'une compote trop liquide alors que son repas doit être mixé et épaissi afin d'éviter ce type d'accident. Son protocole de prise en charge est parfaitement clair et vous ne l'avez pas respecté. Nous constatons que cet accident s'inscrit dans un nombre surprenant d'évènements de ce type sur cette unité et sur ce roulement. En effet le 1er février 2012 Mme P (chambre 024) a été victime d'une fausse route avec une crêpe. Le 15 janvier 2012 M. L (chambre 018) a été victime de fausse route sans trop de conséquence. il avait été hospitalisé pour les mêmes raisons le 27 décembre 2011 à la suite d'une fausse route survenue lors de votre temps de travail. La coïncidence et la fréquence de ces quatre évènements ne s'expliquent pas par des pathologies particulières mais bien par un défaut de prise en charge. L'accident du 17 février 2012 vous est totalement imputable alors que la vigilance avait été renforcée ".

L'employeur ajoute que " Ces évènements récents et significatifs s'inscrivent dans un cadre général de travail particulièrement difficile depuis une année. En effet nous sommes au regret de constater que vous avez fait l'objet de plusieurs mesures disciplinaires à savoir :- le 15 mars 2011 notre directrice locale vous a notifié un avertissement pour le motif " comportement totalement inadapté à une prise en charge respectueuse de la personne âgée ". Vous avez souhaité contester cette décision. Notre direction des ressources humaines a cependant confirmé le 8 avril 2011 l'avertissement ; en effet les éléments d'explications que vous avez présentés ne nous ont pas permis de lever cette décision,- le 13 avril 2011 notre direction des ressources humaines vous a notifié une mise à pied disciplinaire pour le motif de critiques portées à l'égard de ses collègues sans fondement et visant à déstabiliser l'Etablissement. Vous avez là aussi contesté notre décision que nous vous avons confirmée le 20 mai 2011. De plus le 1er décembre 2011 Mme G... votre cadre référent et nouvellement arrivée établit une note professionnelle constatant de grandes difficultés dans le respect des consignes de travail et nous demande de conduire devant témoins un entretien. Celui-ci avait pour objet de vous replacer dans un contexte hiérarchisé d'une prise en charge soignante de patients Alzheimer.

En conclusion nous avons été amenés au cours de l'année 2011 à vous notifier un avertissement pour un comportement inadapté envers un résident et une mise à pied en raison de problèmes relationnels avec des collègues de travail. Vous n'avez pas tenu compte de nos remarques. Vos agissements atteignent désormais un degré de gravité incompatible avec vos fonctions puisque les faits reprochés s'assimilent à des faits de maltraitance. Vous ne tenez pas copte des consignes et de la situation personnelle de chacun des résidents. Vous ne tenez pas compte des consignes individuelles concernant la situation personnelle de chacun des résidents. Il est en effet impossible pour un soignant de choisir les personnes que l'on veut prendre en charge. Ainsi vous adoptez un comportement inadapté vis-à-vis de certains des résidents en usant d'une violence inadmissible. Nous ne pouvons que déplorer vos agissements rendant impossible votre maintien dan l'entreprise. Nous vous rappelons que nous sommes garants auprès de chaque personne âgée et de leurs familles d'une prise en charge professionnelle adaptée à chaque situation de santé et ceci dans le cadre défini par nos autorités de tutelle. En conséquence nous vous notifions votre licenciement pour faute grave aux motifs de défaut de soins et de maltraitance avérée ».

Les faits du 17 février 2012 reprochés à M X...- qui consistent à avoir pris, sans ménagement par le bras et en la faisant virevolter, une patiente qui déambulait-caractérise un comportement inadapté et fautif pour un soignant et ce alors même que cette patiente devait effectivement être reconduite dans sa chambre et que cette démarche était rendue difficile par sa résistance, fut elle violente, induite par sa pathologie ; le fait que le travail était difficile en raison des effectifs réduits n'est pas de nature à excuser ce comportement et l'allégation de M X... aux termes de laquelle Mme C... lui aurait tendu un piège en le laissant seul gérer cette situation au lieu de l'aider est sans fondement sérieux.
Le fait du même jour à savoir qu'à l'heure du goûter M L (chambre 018) a été victime d'une « fausse route » par absorption d'une compote trop liquide dont M. X... la nourrissait-alors que son repas devait être mixé et épaissi afin d'éviter ce type d'accident, son protocole de prise en charge étant parfaitement clair et connu de ce dernier-est également avéré et d'ailleurs non sérieusement contesté.
Mis en perspectives avec d'autres incidents du même type dont la « fausse route » avec une crêpe de Mme P le 1er février précédent, là encore avérée, cet incident du 17 février démontre un manque d'attention réitéré de la part de ce salarié envers les patients qui là encore caractérise un comportement inadapté et fautif de la part d'un « soignant » ; que le fait qu'il ne soit pas le préparateur des repas et/ ou que ce type d'incident puisse se produire n'est pas de nature à excuser le comportement de M X....
Il résulte par ailleurs des documents produits :- que Mme B..., qui était présente lors de la fausse route du 17 février, a constaté que M. X... en donnant ce repas était plus ou moins attentif aux résidents et que, ce qui l'a surpris c'est qu'il est resté sans réaction devant un tel état d'urgence, laissant les soignants sans soutien ; « s'il y a un problème il laisse le problème aux autres soignants. Concernant Mme H... pour quoi lui a-t-il donné une crêpe puisque celle-ci a une alimentation mixé ? Il ne respecte pas les protocoles, il ne fait que ce qu'il décide »- que M X... avait participé en novembre 2011 à une journée de formation sur les troubles psycho-comportementaux,- que Mme G... nouvellement arrivée a dû rappeler à M X... la nécessité de travailler en équipe et de se soumettre aux décisions de sa hiérarchie, son rapport faisant état de faits précis marquant un non respect des instructions qui ont conduit à un entretien informel de recadrage qui s'est déroulé le 7 décembre 2011,- que le docteur I... médecin coordonnateur évoque de la part de M. X... un certain manque d'empathie de façon générale et, sans que lui soient reproché ses qualités professionnelles dans l'organisation des activités dont il parle, un agacement trop perceptible dans son comportement dès le matin accompagné d'un manque de prévenance.

Les faits qui ont motivés le licenciement de M X... sont avérés et ils caractérisent des fautes graves en ce que, compte tenu des risques qu'entraînent un tel comportement de la part d'un soignant, ils justifiaient la rupture immédiate et sans préavis du contrat de travail.
Le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement était seulement sans cause réelle et sérieuse.
M X... doit donc être débouté de toutes ses demandes au titre de son licenciement.
L'équité commande le rejet des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions et STATUANT à nouveau et y AJOUTANT :
DÉBOUTE M. X... de sa demande d'indemnisation de l'irrégularité de la procédure de mise à pied et de sa demande d'annulation de la sanction de mise à pied de trois jours qui lui a été notifiée le 13 avril 2011.
DIT et JUGE que le licenciement de M. X... pour faute grave était justifié et le DÉBOUTE de toutes ses demandes d'indemnisation à ce titre.
DÉBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
CONDAMNE M. X... aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODIN Anne JOUANARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01929
Date de la décision : 31/03/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2015-03-31;13.01929 ?
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