COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N
clm/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 01349
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 21 Mai 2012, enregistrée sous le no 10/ 676
ARRÊT DU 13 Janvier 2015
APPELANTE :
Madame Maureen X... épouse Y...... 49380 THOUARCE
non comparante-représentée par Maître GUEMAS, avocat substituant Maître Pascal LAURENT de la SARL AVOCONSEIL, avocats au barreau d'ANGERS
INTIMES :
La SAS EXPANSION 5- placée sous sauvegarde de justice tribunal de commerce de Saint-Brieuc 34 rue de l'Avenir 22193 PLERIN
Maître B... (SELARL AJIRE) ès qualités d'administrateur judiciaire de la SAS EXPANSION 5... ... 35065 RENNES
Maître Z... ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS EXPANSION 5... 22042 SAINT BRIEUC CEDEX 02
non comparants-représentés par Maître QUEMERE, avocat au barreau de l'Essonne
La SAS ARANEA Rue Valentin des Ormeaux 49610 MURS ERIGNE
non comparante-représentée par Maître GUEMAS, avocat substituant Maître Ludovic TORNIER, avocat de la SELAS ORATIO AVOCATS au barreau de SAUMUR
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 Novembre 2014 à 14H00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, assesseur Madame Isabelle CHARPENTIER, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier : Madame BODIN, greffier
ARRÊT : du 13 Janvier 2015, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, Président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société Expansion 5 a pour activité l'organisation et la gestion de services de vente de produits nécessitant une aptitude professionnelle particulière notamment dans le domaine de l'électroménager, la télévision, la vidéo et le son. Ses services portent, notamment, sur l'externalisation des rayons techniques de la grande distribution et la gestion globale des services après-vente. Dans le cadre de la réalisation de ses missions de prestation de services auprès de la grande distribution, elle dispose de plusieurs structures assurant : la gestion des forces de vente terrain, la vente additionnelle (avec notamment la garantie remplacement à neuf) le service après-vente et la formation personnalisée.
La société Aranea a pour activité l'exploitation du centre commercial à l'enseigne Hyper U de Murs-Erigné.
Par contrat de prestation de services conclu le 21 avril 2006, à effet du 2 mai 2006 au 2 mai 2007, renouvelable par tacite reconduction, la société Expansion 5 s'est vue confier l'organisation et l'animation du secteur " TV-HIFI-VIDEO-micro informatique " du centre commercial de Murs-Erigné exploité sous l'enseigne " Hyper U " par la société Aranea.
Par contrat de travail à durée indéterminée du 23 mars 2007 à effet au 25 mars suivant, Mme Maureen X... épouse Y... a été embauchée par la société Expansion 5 en qualité de vendeuse démonstratrice moyennant une rémunération brute mensuelle de 1325, 93 ¿ outre un intéressement sous forme de pourcentage sur les produits vendus.
Mme Maureen X... épouse Y... avait pour mission la démonstration et la vente du matériel TV, Hifi, vidéo, électroménager et micro-informatique. Ce contrat de travail comportait une clause de mobilité prévoyant qu'en raison de la nature des fonctions du salarié et des besoins de l'employeur, Mme Maureen X... épouse Y... pourrait être affectée sur un autre lieu de travail dans un rayon de 200 kms autour de son lieu d'affectation.
Par courrier du 11 janvier 2010 adressé à la société Expansion 5, la société Aranea a résilié le contrat de prestation de services à compter du 2 mai 2010.
Par courrier du 13 avril 2010 faisant suite à un entretien avec le directeur régional, la société Expansion 5 a confirmé à Mme Maureen X... épouse Y... qu'en application de la clause de mobilité figurant à l'article III de son contrat de travail et en raison de la résiliation du contrat de prestation de services la liant à la société Aranea, elle était affectée au centre E. Leclerc Alençon Distribution à Saint Patern Arçonnay (72 610) en qualité de vendeur démonstrateur à compter du 3 mai 2010 sans modification des conditions de sa rémunération.
Par courrier du 30 avril 2010, cette dernière a refusé l'application de la clause de mobilité au motif qu'elle emportait une modification de son contrat de travail et elle a indiqué qu'elle ne rejoindrait pas sa nouvelle affectation mais resterait à son poste.
Après l'avoir convoquée, le 3 mai 2010 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 12 mai suivant, par lettre du 17 mai 2010, la société Expansion 5 lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse pour refus de prendre son nouveau poste de travail et absence injustifiée sans explication ni motif légitime.
Le 28 juin 2010, Mme Maureen X... épouse Y... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers. Dans le dernier état de la procédure de première instance, elle sollicitait, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail la liant tant à la société Expansion 5 qu'à la société Aranea, des dommages et intérêts pour délit de marchandage et prêt de main d'oeuvre illicite, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, un rappel de salaire pour les mois de mai, juin et juillet 2010 outre les congés payés afférents, un rappel d'indemnité de licenciement, un remboursement de frais de déplacement, une indemnité de procédure et la condamnation solidaire aux dépens de la société Expansion 5 et la société Aranea.
Par jugement du tribunal de commerce de Saint-Brieuc du 28 septembre 2011, la société Expansion 5 a été placée sous procédure de sauvegarde. La SELARL AJIRE étant désignée administrateur judiciaire et M. Daniel Z... nommé mandataire judiciaire.
Par jugement du tribunal de commerce de Saint-Brieuc du 27 mars 2013, un plan de sauvegarde a été arrêté, la SELARL AJIRE, prise en la personne de M. Erwan B... étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Par jugement du 21 mai 2012 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :
- débouté Mme Maureen X... épouse Y... de sa demande de rappel de salaire au titre du mois de mai 2010 ;- condamné la société Expansion 5 à lui payer les sommes suivantes : ¿ 522, 68 ¿ de rappel de salaire au titre du mois de juin 2010 outre 52, 26 ¿ de congés payés afférents, ¿ 296, 18 ¿ de rappel de salaire au titre du mois de juillet 2010 outre 29, 61 ¿ de congés payés afférents, ¿ 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- dit que le contrat de travail liait Mme Maureen X... épouse Y... uniquement à la société Expansion 5 ;- débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour prêt de main d'oeuvre illicite ;- jugé son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeté la demande de dommages et intérêts pour licenciement injustifié ;- renvoyé " les parties à apurer leur compte quant au calcul de l'indemnité de licenciement suivant la présente décision et leur a réservé audience en cas de difficultés sur ce point " ;- débouté Mme Maureen X... épouse Y... de ses autres prétentions ;- rappelé que l'exécution provisoire était de droit s'agissant des créances salariales en application des articles R 1454-14 et R 1454-28 du code du travail, dans la limite de neuf mois de salaire calculée sur la moyenne des trois derniers mois soit, 1981, 59 ¿ ;- condamné chacune des parties à supporter ses dépens.
Mme Maureen X... épouse Y... a régulièrement relevé appel général de cette décision par déclaration formée au greffe, le 27 juin 2012.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 25 novembre 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 29 janvier 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles Mme Maureen X... épouse Y... demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Expansion 5 à lui payer les sommes suivantes : ¿ 522, 68 ¿ de rappel de salaire au titre du mois de juin 2010 outre 52, 26 ¿ de congés payés afférents, ¿ 296, 18 ¿ de rappel de salaire au titre du mois de juillet 2010 outre 29, 61 ¿ de congés payés afférents, ¿ 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- de condamner solidairement la société Expansion 5 et la société Aranea à lui payer les sommes suivantes : ¿ 23 779 ¿ de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ¿ 3500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner la société Expansion 5 à lui payer les sommes suivantes : ¿ 671, 90 ¿ de rappel de salaire au titre du mois de mai 2010 outre 67, 19 ¿ de congés payés afférents, ¿ 82, 73 ¿ de rappel d'indemnité de licenciement, ¿ 181, 85 ¿ de remboursement de frais pour le déplacement à Alençon (frais kilométriques et de péage), ¿ 259, 42 ¿ de remboursement de frais pour le déplacement à Plérin (frais kilométriques et de péage),- de condamner solidairement la société Expansion 5 et la société Aranea aux entiers dépens.
L'appelante soutient essentiellement que :
- s'agissant du licenciement,
à titre principal, la reprise, par la société Aranea, en gestion directe du service de vente de matériel TV, Hifi, vidéo, son qui avait été confiée à la société Expansion 5 en qualité de prestataire de services entre dans le champ d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; c'est en fraude de la loi que la société Expansion 5 et la société Aranea se sont entendues pour violer l'application de ce texte ; à titre surabondant, son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs que : son absence à compter du 3 mai 2010 n'était pas injustifiée en ce que par courrier du 30 avril 2010, elle l'avait motivée par son refus d'accepter une nouvelle affectation emportant modification de son contrat de travail au titre de la rémunération ; en outre, l'employeur ne l'a pas mise en demeure de se rendre sur le lieu de sa nouvelle affectation ; la nouvelle affectation, emportant modification de son contrat de travail, l'employeur ne pouvait pas se prévaloir de la simple mise en oeuvre de la clause de mobilité et elle même était fondée à refuser sa mutation ; à supposer que la mutation n'emportait pas modification de son contrat de travail, la clause de mobilité devait être mise en oeuvre de bonne foi, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce puisqu'il s'est avéré que la société Leclerc n'avait besoin d'aucun personnel supplémentaire, la société Expansion 5 n'apparaît pas avoir pourvu le poste qu'elle lui avait proposé ;
- s'agissant du rappel de salaire au titre de la retenue opérée sur le salaire de mai 2010, elle n'était pas en absence injustifiée mais c'est l'employeur qui a cessé de lui fournir du travail ;
- s'agissant du rappel de salaire au titre de l'indemnité compensatrice de préavis versée en juin et juillet 2010, en dépit de la dispense d'exécution de son préavis, l'employeur devait lui payer la partie variable de sa rémunération ;
- s'agissant du remboursement de frais de déplacement, elle justifie de frais de déplacement exposés pour les besoins de son activité professionnelle.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 25 novembre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société Expansion 5 et M. Daniel Z... pris en qualité de mandataire judiciaire demandent à la cour :
A titre principal :- de déclarer les demandes, et non pas, comme mentionné dans les écritures, l'appel de Mme Maureen X... épouse Y..., irrecevables ;
A titre subsidiaire :- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé le licenciement prononcé par la société Expansion 5 fondé sur une cause réelle et sérieuse ;- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Maureen X... épouse Y... de sa demande de rappel de salaire au titre du mois de mai 2010 et de toutes ses autres demandes ;- de l'infirmer en ce qu'il a condamné la société Expansion 5 au paiement d'un rappel de salaire au titre des mois de juin et juillet 2010 et d'un rappel d'indemnité de licenciement ;
A titre très subsidiaire :- de juger que Mme Maureen X... épouse Y... n'apporte pas la preuve d'un préjudice ;- de la débouter de toutes ses demandes ;- de la condamner au paiement de la somme de 2500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Expansion 5 et M. Daniel Z... ès qualités soutiennent essentiellement que :
- s'agissant du licenciement, les demandes de Mme Maureen X... épouse Y... sont irrecevables au motif qu'au regard de la fin de non recevoir que constitue le principe d'interdiction de se contredire au détriment d'autrui (principe de l'estoppel), l'appelante ne peut pas, en cause d'appel, invoquer une argumentation contraire à celle développée en première instance ; en l'espèce, l'appelante a, de manière contradictoire, invoqué en première instance, une situation de co-emploi et un prêt de main d'oeuvre illicite tandis qu'en cause d'appel, elle invoque le contrat de prestation de services dont elle contestait l'existence en première instance et l'existence d'un contrat de travail la liant uniquement à la société Expansion 5 ;
- à titre subsidiaire au fond, Mme Maureen X... épouse Y... n'est pas fondée à invoquer l'article L. 1224-1 du code du travail en ce que : la seule rupture du contrat de prestation de services n'entraîne pas transfert d'une entité économique autonome et l'application du texte invoqué ; la salariée ne démontre pas que le service auquel elle participait ait constitué une entité économique autonome au sein de la société Expansion 5, qui n'a transféré aucun moyen d'exploitation à la société Aranea ; le licenciement est justifié au motif, d'une part, que la clause de mobilité est valable et que son application n'emporte pas modification du contrat de travail, d'autre part, qu'elle a été mise en oeuvre dans l'intérêt de l'exploitation de la société Expansion 5 et de bonne foi ; son refus caractérisait bien une attitude fautive d'abandon de poste justifiant le licenciement ; sur le rappel de salaire et la part variable, l'abandon de poste justifie l'absence de versement d'une rémunération ;
sur le rappel d'indemnité de licenciement, la non prise en compte de la période de préavis justifie que ne soit pas versé un rappel d'indemnité de licenciement ; celle-ci étant calculée sur la base du salaire des douze derniers mois précédant le licenciement, soit hors période de préavis, la salariée a été remplie de ses droits de ce chef ; sur les frais de déplacement, Mme Maureen X... épouse Y... n'est pas fondée a en demander le remboursement en ce que : le déplacement à Alençon a été effectué à sa demande, le déplacement au siège de la société à Plérin pour la tenue de l'entretien préalable est permis par le code du travail et il a été rendu nécessaire au regard de l'absence injustifiée de la salariée ;
- à titre très subsidiaire, Mme Maureen X... épouse Y... ne produit aucun élément pour justifier du préjudice qu'elle invoque pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 10 novembre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société Aranea demande à la cour :
A titre principal :- de déclarer les demandes, et non pas, comme mentionné dans les écritures, l'appel, de Mme Maureen X... épouse Y... irrecevables ;
A titre subsidiaire :- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Maureen X... épouse Y... de l'ensemble de ses demandes à son encontre ;- de juger qu'elle n'est pas son employeur et de la débouter de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- de débouter cette dernière de ses demandes de dommages et intérêts et de sa demande de condamnation solidaire ;- de la condamner au paiement de la somme de 3000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- de condamner solidairement Mme Maureen X... épouse Y... et la société Expansion 5 aux entiers dépens.
La société Aranea soutient essentiellement que :
- s'agissant du licenciement, les demandes de Mme Maureen X... épouse Y... sont irrecevables au motif qu'au regard de la fin de non recevoir que constitue le principe d'interdiction de se contredire au détriment d'autrui (principe de l'estoppel), l'appelante ne peut pas, en cause d'appel, invoquer une argumentation contraire à celle développée en première instance ; en l'espèce, elle a, de manière contradictoire, invoqué en première instance, une situation de co-emploi et un prêt de main d'oeuvre illicite tandis qu'en cause d'appel elle invoque la validité du contrat de prestation de servicee et l'existence d'un contrat de travail la liant uniquement à la société Expansion 5 ;- à titre subsidiaire au fond, Mme Maureen X... épouse Y... n'est pas fondée à invoquer l'article L. 1224-1 du code du travail en ce que : la simple perte d'un marché et la présence de salariés au sein de l'entreprise prestataire ne suffit pas à caractériser une entité économique autonome ; la première condition pour caractériser une entité économique autonome à savoir la présence d'un service autonome au sein de la société Expansion 5 dédié au contrat de prestation de services conclu avec la société Aranea n'est pas remplie ; la seconde condition pour caractériser une entité économique autonome c'est à dire le transfert des moyens d'exploitation n'est pas remplie puisque la société Expansion 5 ne lui a transféré aucun actif ; S'agissant du licenciement, Mme Maureen X... épouse Y... n'est pas fondée à demander sa condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au motif qu'elle n'est pas son employeur ;
- à titre très subsidiaire, la société Aranea fait sienne l'argumentation développée par la société Expansion 5 pour rejeter la demande de Mme Maureen X... épouse Y... au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'ESTOPPEL ou interdiction de se contredire au détriment d'autrui :
En première instance, Mme Maureen X... épouse Y... demandait la condamnation solidaire de la société Expansion 5 et de la société Aranea à lui payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour prêt illicite de main d'oeuvre, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire du chef des mois de mai, juin et juillet 2010 et de solde d'indemnité de licenciement.
A l'appui de ces prétentions, elle soutenait que sa mise à la disposition de la société Aranea par la société Expansion 5 procédait d'un prêt illicite de main d'oeuvre et elle invoquait une situation de co-emploi lui permettant de se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail la liant tant à l'une qu'à l'autre de ces sociétés.
En cause d'appel, elle demande la condamnation solidaire des deux sociétés seulement au titre du paiement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en se prévalant de leur part d'une violation frauduleuse des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail destinée à faire échec au transfert de son contrat de travail à la société Aranea qui, selon elle, aurait dû s'opérer de plein droit en vertu de ce texte.
La seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir.
Au cas d'espèce, la contradiction invoquée n'est pas caractérisée en ce que la salariée maintient bien en cause d'appel sa demande de condamnation solidaire des deux sociétés à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La circonstance qu'elle invoque un autre moyen à l'appui de cette demande ne permet pas de caractériser une contradiction de nature à rendre ses prétentions irrecevables en ce que ce comportement procédural n'est pas constitutif d'un changement de position, en droit, de nature à induire la société Expansion 5 et la société Aranea en erreur sur ses intentions lesquelles sont d'obtenir leur condamnation solidaire.
Ce comportement procédural ne constitue donc pas un estoppel et la fin de non-recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui sera rejetée.
Sur le prêt illicite de main d'oeuvre :
En cause d'appel, Mme Maureen X... épouse Y... ne reprend pas sa demande indemnitaire pour prêt illicite de main d'oeuvre et elle ne critique pas les dispositions du jugement qui l'ont déboutée de ce chef de prétention. La cour n'étant saisie d'aucune demande ni d'aucun moyen sur ce point, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour prêt illicite de main d'oeuvre.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail :
L'article L. 1224-1 du code du travail dispose : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. ".
Il résulte de ce texte, interprété à la lumière de la Directive n 2001/ 23/ CE du Conseil du 12 mars 2001, que l'entité économique autonome dont le transfert entraîne la poursuite de plein droit avec le cessionnaire des contrats de travail des salariés qui y sont affectés s'entend d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre.
La perte d'un marché de services ne caractérise pas à elle-seule le transfert d'une entité économique autonome.
La reprise d'une activité en gestion directe entre dans le champ d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail à la condition qu'elle s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise. Il faut que les moyens qui permettent de réaliser l'activité, c'est à dire les éléments corporels et incorporels qui permettent sa mise en oeuvre soient également transférés. La reprise d'une activité sans les moyens permettant de la réaliser n'emporte pas transfert d'une entité économique autonome.
Au cas d'espèce, il résulte du contrat de prestation de services conclu le 21 avril 2006 entre la société Expansion 5 et la société Aranea et ce, pour une durée d'un an avec possibilité de tacite reconduction, que la prestation fournie par la première à la seconde consistait uniquement à " assurer l'organisation et l'animation du secteur TV HIFI VIDEO Micro Informatique Jeux dans le point de vente situé au sein du magasin HYPER U de Murs Erigné " par l'intervention de certains de ses salariés ayant pour particularité de présenter une compétence professionnelle " particulièrement adaptée aux caractéristiques et à la nature des produits " concernés " ainsi qu'aux exigences des clients en ce domaine. ". Il suit de là que la prestation fournie par la société Expansion 5 à la société Aranea était limitée à la prestation " gestion des forces de vente terrain " consistant en la mise en place de vendeurs spécialisés au sein du rayon TV HIFI VIDEO Micro Informatique Jeux du magasin HYPER U de Murs Erigné à l'exclusion des autres prestations pouvant être fournies par cette société prestataire de services, à savoir, " la vente additionnelle " comportant la garantie remplacement à neuf, les extensions de garanties, l'assurance casse et casse/ vol, l'offre de reprise des PC portables et téléphones portables, le pack sécurité, " le service après-vente " et " la formation personnalisée ".
Ces vendeurs avaient pour mission d'assurer la démonstration et la vente des produits en fournissant des conseils aux clients, de procéder aux encaissements et d'établir les dossiers de crédit, de gérer la mise en place des produits en rayon et des stands publicitaires, d'assurer l'animation commerciale et les offres promotionnelles, de suivre l'état des stocks et d'assurer la tenue des réserves. La prestation de services fournie par la société Expansion 5 comportait également l'analyse des attentes des clients, des tendances du marché, des actions de la concurrence, l'établissement de relevés de ventes mensuelles, d'une analyse des résultats et de rapports d'activité et de synthèse.
Ce contrat énonce expressément que les salariés de la société Expansion 5 formant la force de vente technique spécialisée du rayon TV HIFI VIDEO Micro Informatique Jeux du magasin HYPER U de Murs Erigné demeuraient placés sous l'autorité de leur employeur, la société Expansion 5, qui s'engageait notamment à assurer leur formation, à les rémunérer, à régler les cotisations sociales, à conclure avec eux un contrat de travail conforme à la législation en vigueur, à mettre à leur disposition soit une tenue de travail spécifique, soit un signe distinctif, à garantir leur responsabilité civile ce qui, en l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour, était bien le cas.
Au soutien de sa position selon laquelle la reprise en gestion directe par la société Aranea du rayon TV HIFI VIDEO Micro Informatique Jeux du magasin HYPER U de Murs Erigné a emporté application de l'article L. 1224-1 du code du travail et transfert de son contrat de travail à la société Aranea, Mme Maureen X... épouse Y... se contente d'énoncer des généralités sous couvert de nombreux exemples de jurisprudence et de procéder par voie d'affirmation sans même soutenir que la reprise et la poursuite de cette activité en gestion directe se serait accompagnée du transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité. L'appelante ne fournit aucun élément, ni même aucune explication pour tenter de caractériser une telle entité économique autonome.
Or, en l'état des éléments soumis à l'appréciation de la cour, il n'apparaît pas que, pour fournir la prestation de services objet du contrat conclu le 21 avril 2006 avec la société Aranea, consistant en l'organisation et l'animation du rayon concerné, la société Expansion 5 ait mis en place des moyens autres que ceux énoncés audit contrat, c'est à dire du personnel composé de quelques uns de ses salariés formant une force de vente spécialisée, notamment des moyens corporels ou incorporels qui seraient venus s'ajouter à ces moyens en personnel. Aucun élément ne permet de considérer que la société Expansion 5 ait réalisé les prestations d'analyse et d'établissement de relevés de vente et de rapports à partir de moyens ou d'un service spécifiquement dédiés à la société Aranea. Il apparaît au contraire que ces prestations étaient fournies à partir de moyens et services comptables et administratifs destinés à l'ensemble de ses clients.
Il n'est donc pas établi que l'activité qu'elle assurait dans le cadre du contrat de prestation de services en cause l'était au moyen d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments matériels poursuivant un objectif propre. Il s'avère d'ailleurs qu'à la fin de l'exécution de ce contrat, la société Expansion 5 n'a transféré à la société Aranea aucun moyen d'exploitation, notamment, aucun élément corporel ou incorporel lié à l'activité du rayon concerné et l'appelante, qui n'en cite aucun, ne soutient pas utilement le contraire.
Enfin, Mme Maureen X... épouse Y... est totalement défaillante à caractériser la fraude qu'elle invoque et elle procède encore à cet égard par pure affirmation en soutenant que les deux sociétés intimées se seraient entendues pour faire échec à l'application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail.
Il ne ressort donc pas des éléments de la cause que l'activité d'organisation et d'animation du secteur TV HIFI VIDEO Micro Informatique Jeux mise en oeuvre par la société Expansion 5 au sein du magasin HYPER U de Murs Erigné exploité par la société Aranea ait été assurée avec des moyens spécifiques en personnel et en matériel, et que la reprise de cette activité en gestion directe par cette dernière se soit accompagnée du transfert, à son profit, d'éléments d'exploitation corporels ou incorporels significatifs, nécessaires à la poursuite de l'activité antérieurement assurée par la société prestataire. Les conditions objectives de l'article L. 1224-1 du code du travail n'étant pas remplies, Mme Maureen X... épouse Y... est mal fondée à invoquer le transfert d'une entité économique autonome au profit de la société Aranea, emportant de plein droit poursuite de son contrat de travail avec cette dernière.
Elle sera en conséquence déboutée de ses demandes en ce qu'elle les dirige contre la société Aranea.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement adressée à Mme Maureen X... épouse Y... le 17 mai 2010 et qui fixe les termes du litige est ainsi libellée :
" Madame, Par courrier du 13 avril 2010, nous vous confirmions qu'à compter du 3 mai 2010, vous seriez affectée au Centre E. Leclerc Alençon Distribution Rte du Mans 72610 ST PATERN ARCONNAY en qualité de vendeuse démonstratrice, par l'application de l'article III " Modification du lieu de travail " de votre contrat de travail et que cette mutation s'inscrivait dans le cadre d'une nouvelle organisation du service et de la bonne marche de l'entreprise compte tenu de l'arrêt du contrat de Prestation de services de notre client SA ARANEA à Murs Erigné.... "
Suivent le rappel des entretiens ayant précédé ce courrier, du respect du délai de prévenance prévu par la clause de mobilité, de la proposition de prêt sans intérêt et de celle de prise en charge des frais de déplacement pendant trois semaines formulées par l'employeur, de l'assurance donnée de l'absence de modification du contrat de travail, notamment de l'absence de modification des conditions de rémunération, de la mise en oeuvre d'une visite du nouveau lieu de travail conformément à la demande de la salariée.
"... Le 30 avril 2010, par courrier recommandé, vous nous avez indiqué dans un premier temps ne pas refuser cette mutation pour mentionner ensuite que vous ne l'acceptez pas dans ces conditions, celles-ci constituant à vos yeux une modification de votre contrat de travail.
Nous vous avions déjà rappelé dans le cadre de nos précédents envois que vos fonctions, votre durée hebdomadaire de travail ainsi que vos conditions de rémunération restent inchangées. Au terme de votre courrier du 30 avril 2010, vous indiquiez que vous refusiez de vous rendre au sein du magasin d'affectation. Nous ne comprenons pas votre entêtement consistant à mentionner que vous auriez été mal reçu au sein du magasin ou que vous seriez amené à obtenir une diminution de votre rémunération alors même que vous n'avez pas commencé à travailler sur votre nouveau lieu d'affectation et que nous vous avons confirmé à plusieurs reprises l'absence de modification de votre contrat de travail. Depuis le 3 mai 2010, malgré l'arrêt de notre prestation auprès du magasin de Murs Erigné dont vous étiez parfaitement informé, vous ne vous êtes pas présentée à votre poste de travail à St Grégoire et ce, sans nous donner aucune explication ou motif légitime. Votre refus de prendre votre poste de travail nous a conduit à engager une procédure en vue d'un éventuel licenciement et malgré toutes nos tentatives de discussion et d'écoute, lors de l'entretien préalable du 12 mai 2010 avec M. Eric A... Directeur Régional, vous ne nous avez donné aucune justification légitime susceptible d'expliquer votre refus de prendre votre poste de travail au Centre E. Leclerc Sodirennes de St Grégoire et vous nous avez confirmé que vous vous positionneriez en absence injustifiée selon votre bon désir. Nous ne pouvons accepter ce type de comportement qui empêche le bon fonctionnement de notre service. En conséquence, nous vous notifions ce jour votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. ".
La clause de mobilité insérée à l'article III du contrat de travail de Mme Maureen X... épouse Y... intitulé " Modification du lieu de travail " est ainsi libellée : " Le lieu de travail de Mme Maureen X... est actuellement fixé à SA FINAMO-MURS ERIGNE. En raison de la nature des fonctions de Mme Maureen X... liées à la présentation et à la vente des produits définis à l'article II du présent contrat, mais également en raison des besoins de la société en terme d'organisation, de l'activité économique et des opportunités de carrière qui pourront se présenter, le changement du lieu de travail pourra être rendu nécessaire, étant précisé que ce changement d'affectation pourra intervenir dans le secteur ci-après défini :- dans un rayon de 200 kms autour de l'affectation actuelle. Un tel changement ne constitue pas une modification du contrat de travail de Mme Maureen X... sauf s'il devait conduire à une affectation hors du périmètre ci-dessus défini. Les conditions particulières d'une nouvelle affectation seront communiquées à Mme Maureen X... en temps utile, en fonction de l'éloignement décidé et en tout état de cause au minimum quinze jours avant, afin que Mme Maureen X... puisse prendre toutes les dispositions nécessaires. II est précisé qu'un refus de changement d'affectation pourrait alors être constitutif d'une faute grave de la part du salarié. ".
Mme Maureen X... épouse Y... ne discute pas la validité de cette clause de mobilité ni qu'elle a bénéficié du délai de prévenance contractuellement prévu pour sa mise en oeuvre.
Le refus par un salarié de rejoindre la nouvelle affectation qui lui a été définie en application d'une clause de mobilité et son absence de ce nouveau poste ne peuvent pas constituer un motif réel et sérieux de licenciement dès lors que cette nouvelle affectation a pour effet d'emporter la modification d'un élément du contrat de travail.
Mme Maureen X... épouse Y... soutient que sa mutation au sein du magasin E. Leclerc situé à Saint-Patern Arçonnay aurait " nécessairement " eu pour effet de modifier sa rémunération au motif que les modalités de calcul de la part variable de cette rémunération étaient, au sein du magasin E. Leclerc, différentes de celles applicables au sein du magasin HYPER U de Murs-Erigné. Reprenant les termes du courrier qu'elle a adressé à son employeur le 30 avril 2010, ellel argue de ce qu'au sein du magasin E. Leclerc de Saint-Patern Arçonnay :- le commissionnement individuel portait sur la vente des gros produits tandis que le commissionnement collectif portait sur tous les produits en libre service ;- le PEM (aspirateurs, micro-ondes) était absent du magasin donc il n'entrait pas dans le commissionnement des vendeurs " Expansion 5 " alors qu'au HYPER U de Murs-Erigné, les vendeurs " Expansion 5 " bénéficient d'un commissionnement sur ces produits ;- il n'y avait pas de commissionnement sur les dossiers de crédit ;- le salaire moyen des vendeurs Expansion 5 de Saint-Patern Arçonnay était inférieur à celui perçu par les vendeurs Expansion 5 du magasin HYPER U de Murs-Erigné.
Le contrat de travail de Mme Maureen X... épouse Y... prévoit que sa rémunération est composée d'une part fixe d'un montant mensuel brut de 1325, 93 ¿ et d'une part variable dont le montant est déterminé par application d'un pourcentage sur les produits vendus.
Au soutien de la modification de rémunération qu'elle invoque, l'appelante se contente de verser aux débats quatre fiches (pièces no 2, 10, 15 et 24) en date des 2 mai 2006, 1er octobre 2008, 1er décembre 2009 et 1er février 2010 détaillant les modalités de la rémunération, notamment les modalités de détermination de la part variable, applicables à ces dates au sein du magasin HYPER U de Murs-Erigné. Elle ne produit aucune pièce pour justifier de ce que les modalités de détermination de la part variable de sa rémunération auraient été différentes et moins avantageuses en contrepartie de l'activité qu'elle était appelée à développer au sein du magasin E. Leclerc situé à Saint-Patern Arçonnay ni même aucune pièce venant étayer les affirmations reprises ci-dessus contenues dans sa lettre du 30 avril 2010 relativement aux conditions de commissionnement et de rémunération des salariés affectés au magasin Leclerc. Elle ne soutient pas même que l'activité de ce magasin aurait été plus faible que celle du magasin HYPER U de Murs-Erigné et que le chiffre d'affaires réalisé ait été de nature à faire baisser la part variable. Or la société Expansion 5 lui a constamment écrit (courriers des 13 et 21 avril 2010 ce dernier courrier étant une réponse à ses interrogations relatives, notamment, à sa rémunération, formulées le 19 avril précédent) que sa mutation n'entraînerait aucune modification de sa rémunération, celle-ci de même que ses fonctions et la durée hebdomadaire de travail restant inchangées.
Mme Maureen X... épouse Y... est donc défaillante à rapporter la preuve de ce que la mutation mise en oeuvre aurait eu pour effet d'emporter la modification d'un élément de son contrat de travail, notamment de sa rémunération.
En second lieu, elle soutient que l'employeur aurait mis la clause de mobilité en oeuvre de mauvaise foi en ce que la visite effectuée au magasin E. Leclerc de Saint-Patern Arçonnay lui aurait permis de constater qu'il n'y avait là aucun besoin de personnel supplémentaire de sorte, selon elle, que la société Expansion 5 aurait fait jouer la clause de mobilité dans le seul espoir qu'elle refuse le poste proposé et qu'elle puisse ainsi la licencier pour refus illégitime de rejoindre sa nouvelle affectation.
La bonne foi de l'employeur dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité est présumée et il incombe au salarié d'établir qu'elle l'a été pour des raisons étrangères à l'intérêt de l'entreprise ou dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle. Or en l'espèce, Mme Maureen X... épouse Y... ne produit aucun élément à l'appui de sa thèse et le registre des entrées et sorties du personnel communiqué par la société Expansion 5 à sa demande ne permet pas non plus de l'accréditer. La preuve d'une mise en oeuvre de mauvaise foi de la clause de mobilité fait donc défaut.
Enfin, pour contester le bien fondé de son licenciement la salariée soutient qu'avant de prononcer la rupture, l'employeur aurait dû la mettre en demeure de rejoindre son nouveau lieu de travail. Toutefois, aux termes du courrier recommandé du 13 avril 2010 emportant notification de la mutation, l'employeur demandait expressément à Mme Maureen X... épouse Y... de se présenter sur son nouveau lieu de travail à son nouveau responsable d'équipe le 3 mai 2010 à 9 heures. Par courrier du 21 avril 2010, il a répondu à ses interrogations et, à sa demande, il lui a fixé un rendez-vous le 26 avril 2010 à 16 heures au Centre E. Leclerc de Saint-Patern Arçonnay, lieu de sa nouvelle affectation. Il ne fait pas débat que la salariée a bien effectué cette visite du lieu de sa nouvelle affectation. Par lettre recommandée du 30 avril 2010, Mme Maureen X... épouse Y... a fait connaître à la société Expansion 5 qu'elle n'acceptait pas cette mutation et qu'elle ne rejoindrait pas sa nouvelle affectation mais resterait à son poste au sein du magasin HYPER U de Murs-Erigné. Dans ces conditions, en l'absence de situation de suspension du contrat de travail et compte tenu de la clarté du refus émis par la salariée de se présenter au lieu de sa nouvelle affectation alors qu'elle était parfaitement informée de la date et de l'heure auxquelles elle devait s'y présenter, l'employeur n'avait pas à la mettre en demeure de rejoindre ce poste avant d'entamer la procédure de licenciement.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la mutation de Mme Maureen X... épouse Y... est intervenue en vertu d'une clause de mobilité valable dont la mise en oeuvre est exclusive de mauvaise foi de la part de l'employeur et de modification du contrat de travail de la salariée. Le refus de cette dernière de rejoindre son nouveau poste de travail sans motif légitime et son absence injustifiée à ce poste le 3 mai 2010 caractérisent de sa part un manquement fautif aux obligations découlant pour elle du contrat de travail, qui justifie son licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme Maureen X... épouse Y... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur la demande de rappel de salaire afférente au mois de mai 2010 :
Au mois de mai 2010, Mme Maureen X... épouse Y... a fait l'objet d'une retenue sur salaire d'un montant de 671, 90 ¿ pour absence injustifiée du 3 au 17 mai 2010. Cette retenue est parfaitement fondée dans la mesure où, au cours de cette période, elle était absente de son nouveau poste de travail sans motif légitime de sorte qu'ayant refusé de fournir le travail auquel elle était tenue, elle ne peut prétendre à aucune rémunération. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de rappel de salaire outre les congés payés afférents.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des mois de juin et juillet 2010 :
Aux termes de la lettre de licenciement, Mme Maureen X... épouse Y... a été dispensée de l'exécution de son préavis de deux mois.
Comme l'ont exactement rappelé les premiers juges, il ressort des dispositions de l'article L. 1234-5 du code du travail que l'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.
Mme Maureen X... épouse Y... soutient en conséquence à bon droit que son indemnité compensatrice de préavis devait être calculée non seulement en considération de la part fixe de sa rémunération mais aussi en considération de la part variable qu'elle aurait perçue si elle avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis.
La société Expansion 5 ne lui ayant réglé son indemnité compensatrice de préavis que sur la part fixe, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il lui a alloué les sommes non discutées de 522, 68 ¿ outre 52, 26 ¿ de congés payés afférents et de 296, 18 ¿ outre 29, 61 ¿ de congés payés afférents à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis pour les mois de juin et juillet 2010.
Sur la demande de rappel d'indemnité de licenciement :
La société Expansion 5 a versé à Mme Maureen X... épouse Y... une indemnité de licenciement d'un montant de 1 280, 19 ¿.
En application des dispositions de l'article R. 1234-4 du code du travail, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement, soit le tiers des trois derniers mois précédant le licenciement, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel versée au salarié pendant cette période de trois mois n'étant, dans ce cas, prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.
La société Expansion 5 indique à juste titre que l'indemnité compensatrice de préavis n'entre pas dans le calcul de l'indemnité de licenciement de sorte que l'appelant ne peut pas prétendre que cette dernière soit calculée en intégrant les rappels de salaire qui lui ont été alloués de ce chef.
Il ressort de l'examen des bulletins de salaire de Mme Maureen X... épouse Y... que le douzième de sa rémunération des douze derniers mois s'établit à la somme de 2011, 08 ¿ tandis que le tiers des trois derniers mois s'établit à la somme de 2025, 96 ¿ de sorte que c'est cette dernière formule qui est la plus avantageuse. En vertu de cette moyenne de rémunération, elle peut prétendre à une indemnité de licenciement d'un montant de 1 349, 29 ¿. Dans la mesure où elle n'a perçu que 1 280, 19 ¿, la société Expansion 5 sera condamnée à lui payer la somme de 69, 09 ¿ à titre de solde d'indemnité de licenciement.
Sur la demande de remboursement de frais :
Les premiers juges n'ont pas répondu à ce chef de prétention. Mme Maureen X... épouse Y... est bien fondée à solliciter le remboursement des frais de déplacement qu'elle a été tenue d'exposer pour se rendre de Thourcé (49), lieu de son domicile, à Plérin (22), lieu du siège social de la société Expansion 5 afin de participer à l'entretien préalable à son licenciement. Cette dernière sera condamnée à lui payer de ce chef la somme de 259, 42 ¿ correspondant au montant des frais kilométriques exposés.
Par contre, dans la mesure où ce déplacement n'avait aucun caractère obligatoire mais répondait à une demande de la salariée, il n'incombe pas à la société Expansion 5 de supporter les frais de déplacement que Mme Maureen X... épouse Y... a pu exposer pour se rendre de son domicile à Alençon-Saint-Patern Arçonnay (61) afin de visiter le magasin E. Leclerc, site de sa nouvelle affectation.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Mme Maureen X... succombant amplement en son appel, elle supportera la charge des dépens d'appel. Compte tenu des situations économiques respectives des parties, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune d'elles la charge des frais irrépétibles d'appel qu'elle a pu exposer.
Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS ;
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière sociale et en dernier ressort ;
Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui et déclare recevables les demandes de Mme Maureen X... épouse Y... ;
Déboute Mme Maureen X... épouse Y... de ses demandes en ce qu'elle les dirige contre la société Aranea ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la société Expansion 5 à payer à Mme Maureen X... épouse Y... les sommes suivantes :-69, 09 ¿ à titre de solde d'indemnité de licenciement ;-259, 42 ¿ au titre de ses frais de déplacement ;
Déboute Mme Maureen X... épouse Y... de sa demande de remboursement de frais kilométriques pour se rendre à Alençon-Saint-Patern Arçonnay (61) ;
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne Mme Maureen X... épouse Y... aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Viviane BODIN Anne JOUANARD