COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N
aj/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02449
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 19 Septembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00538
ARRÊT DU 13 Janvier 2015
APPELANTE :
La SOCIETE TFN 251, rue de Crimée 75019 PARIS
non comparante-représentée par Maître DAUDET, avocat substituant Maître Eve DREYFUS, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Monsieur Philippe X...... 49000 ANGERS
Monsieur Gilles Y...... 49330 ETRICHE
Madame Christine Z...... 49640 DAUMERAY
Monsieur Thierry N...... 49700 ST GEORGES SUR LAYON
Monsieur Fabrice A...... 49700 DOUE LA FONTAINE
Monsieur Pascal B...... 49260 MONTREUIL BELLAY
Monsieur Ali C...... 49100 ANGERS
Monsieur Boulbaba D...... 49220 GREZ NEUVILLE
comparants-assistés de la SELARL atlantique avocats associés (me SALQUAIN), avocats au barreau d'ANGERS
Monsieur Anthony E...... 72200 LA FLECHE
Madame Isabelle F...... 49640 MORANNES
Monsieur Stéphane G...... 72200 BAZOUGES SUR LE LOIR
Monsieur Emmanuel H...... 49700 DOUE LA FONTAINE
Monsieur Stéphane I...... 49500 NYOISEAU
Monsieur Yohann J...... 49700 DOUE LA FONTAINE
Monsieur Mohamed I...... 49100 ANGERS
LE SYNDICAT CFDT DE MAINE ET LOIRE 14, Place Imbach 49100 ANGERS
non comparants-représentés par par la SELARL atlantique avocats associés (me SALQUAIN), avocats au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 25 Novembre 2014 à 14H00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, assesseur Madame Isabelle CHARPENTIER, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier : Madame BODIN, greffier
ARRÊT : du 13 Janvier 2015, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, Président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE,
La société technique Française de Nettoyage ou TFN est une entreprise de propreté qui est composée de plusieurs établissements et emploie plus de 10000 salariés et qui est soumise à la convention collective des entreprises de propreté.
Ses salariés Ms Philippe X..., Gilles Y..., Anthony E..., Thierry N..., Stephane G..., Emmanuel H..., Fabrice A..., Stéphane I..., Yohann J..., Pascal B..., Mohamed I..., Ali C..., Boulbaba D... et Mmes Isabelle F... et Christine Z... ont été affectés sur le site de la société Guillet à Daumeray qui est une entreprise d'agro-alimentaire ayant pour activité l'abattage, la transformation et la découpe de volailles et d'autres sur le site France Champignons.
Faisant valoir que leur employeur, la société TFN, ne respectait pas ses obligations salariales, le 28 mars 2008 ces salariés ont saisi le conseil de prud'hommes d'Angers de demandes en paiement de prime de panier, de compensation du temps d'habillage et de déshabillage, de repos compensateurs et de rappel de salaire.
Ms José P... O... chef d'équipe et Abdelkader C... étaient également demandeurs.
La CFDT de Maine et Loire est intervenue à la procédure.
L affaire a fait l objet d un retrait du rôle le 29 juin 2009 puis, après remise au rôle le 6 juillet 2009, d'un jugement du 12 avril 2010 déclarant les demandes caduques.
Les salariés ont à nouveau saisi le conseil de prud'hommes en janvier 2011.
Parallèlement, les contrats de travail de M. P... et M. C... ayant été rompus, par rupture conventionnelle pour l'un et par un licenciement pour l'autre, ceux ci ont saisi le conseil de prud'homme d'une contestation de ces ruptures et de demandes d'indemnisations subséquentes à ajouter à celles objets de la saisine d'origine.
Les litiges les opposant à la société TFN ont alors fait l'objet d'une disjonction et de deux enrôlements distincts.
Parallèlement également, sur demande de la société TFN, par ordonnance sur requête en date du 3 septembre 2008 le président du tribunal de grande instance de Saumur a désigné un huissier aux fins de visionner les enregistrements des caméras de vidéo-surveillance placées à l'entrée de la société Guillet pour la période d'avril à août 2008 et d'établir un relevé des heures d'arrivé et de départ des salariés à comparer avec les relevés d'activité établis par le chef d'équipe.
Ce procès verbal dressé le 18 septembre 2008 a été produit par l'employeur dans le cadre de la présente procédure et les salariés ci-dessus, ainsi que la CFDT, ont sollicité sans succès la rétractation de cette ordonnance et la nullité des actes subséquents.
Ayant interjeté appel de cette ordonnance de refus de rétractation en date du 8 juillet 2009, par arrêt confirmatif en date du 8 juin 2010, la cour d'appel d'Angers a débouté les salariés de leur demande.
Par arrêt en date du 10 janvier 2012 la Cour de cassation, considérant que la cour d'appel, en statuant comme elle l'avait fait, avait dénaturé la lettre du 20 mai 2008 qui n'informait pas les salariés concernés de l'existence d'un dispositif de vidéo surveillance qui permettait de contrôler leurs heures d'arrivée et de départ sur le lieu de travail de sorte qu'elle avait violé les articles L. 1222-4 du code du travail et 1134 du code civil, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt sus visé et renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes.
Il résulte des déclarations des conseils des parties interrogés sur ce point par la cour à l'audience que cet arrêt n aurait pas été signifié et qu'aucune des parties n'a, à ce jour, saisi la cour de renvoi.
Par jugement en date du 19 septembre 2011, le conseil de prud'hommes d'Angers :- a écarté des débats l'ordonnance du 3 septembre 2008 et le constat d'huissier du 18 septembre 2008,- a condamné la société TFN à payer :- au titre de la prime de panier : à M. X... la somme de 246, 48 ¿, à M. Y... la somme de 167, 48 ¿, à M. E... la somme de 268, 60 ¿, à M. G... la somme de 154, 84 ¿, à M. I... la somme de 290, 72 ¿ et à M. D... la somme de 306, 52 ¿,- au titre de l'accord d'entreprise signé après le mouvement de grève de 2004 portant augmentation du taux du salaire conventionnel : à M. X... la somme de1 837, 90 ¿,- au titre du repos compensateur : à M. N... la somme de 889, 41 ¿, à M. H... la somme de 997, 16 ¿, à M. A... la somme de 844, 76 ¿, à M. I... la somme de 832 ¿, à M. J... la somme de 997, 16 ¿ et à M. B... la somme de 749, 85 ¿,- a dit que la société TFN devait au titre de la prime d'habillage et de déshabillage régler 15 minutes par jour travaillé à Ms X..., Y..., E..., N..., G..., H..., A..., K..., J..., B..., I..., Ali C..., D... et à Mmes F... et Z...,- a condamné la société TFN à verser à chacun des demandeurs la somme de 100 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- a condamné la société TFN à verser au syndicat CFDT de Maine et Loire la somme de 500 ¿ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi et celle de 100 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- a débouté les parties de leurs autres demandes et condamné la société TFN aux dépens.
Par déclaration au greffe en date du 7 octobre 2011 la société TFN a interjeté appel de ce jugement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS,
Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 25 novembre 2014 et à l'audience, la société TFN demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de débouter les salariés de toutes leurs demandes et les condamner solidairement à lui verser la somme de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens et le syndicat CFDT de Maine et Loire à lui verser la somme de 1 000 ¿ sur le même fondement.
Elle fait essentiellement valoir :
- que le litige se situe dans le cadre d'un conflit entre elle et M P... chef d'équipe chargé du site de l'entreprise Guillet-et notamment de vérifier les horaires des salariés-consécutif au mécontentement des clients sur les prestations, conflit qui a débuté en décembre 2008,
- que l'accord d'entreprise de fin mai 2004 qui prévoit que, pour compenser la prime du 24 juillet 2000, les salariés embauchés à cette date et toujours présents sur le site Guillet verront leur taux horaire conventionnel majoré et maintenu à + 3 % ne concernent ni M E... ni M Y... qui n'étaient pas présents dans l'entreprise au 24 juillet 2000 et qu'elle ne doit rien à M X... dont le taux horaire a effectivement été majoré en application de l'accord étant constant que, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, cette majoration ne s'applique pas chaque année dès lors qu'elle avait pour objectif de compenser une prime exceptionnelle,
- que les primes de panier pour les salariés travaillant le samedi sur le site Guillet ont été versées à compter de 2007 et que, pour la période antérieure, la demande des salariés est imprécise et non justifiée de sorte que, faute de rapporter la preuve de son bien fondé, ils doivent en être déboutés ; qu'en vertu d'avenants à leur contrat de travail ils n'ont plus travaillé le samedi à compter de juillet 2005 et qu'avant 2005 et à compter de leur embauche en 2003, leur tranche horaire de travail de 12- 19h ne justifiait pas le versement de cette prime ; qu ils ne versent aucun justificatif de leur demande et ne précisent pas la période concernée et que, quand bien même ils auraient travaillé le samedi, l'octroi de cette prime devrait être justifié par les horaires effectués sur lesquels ils n'apportent aucune précision,
- qu'en droit le temps d'habillage et de déshabillage ne constitue pas du temps de travail effectif et qu'il ne fait l'objet de contrepartie, soit financière soit sous forme de repos, qu'à certaines conditions ici non remplies ; qu'il est établi par les documents produits-et notamment le constat d'huissier de septembre 2008- que les salariés arrivaient régulièrement en retard et en tout cas n'arrivaient pas en avance pour revêtir leur tenue de travail et sortaient avant l'heure et en tout cas ne sortaient pas après l'heure pour se déshabiller et que ce temps d'habillage et de déshabillage étaient en réalité compris dans l'horaire de travail et donc rémunéré comme tel ; qu'ils n'ont jamais présenté une telle demande avant 2007 et qu'ils sont de mauvaise foi alors qu'ils se sont livrés à une fraude sur leurs relevés d'heures avec la complicité de M P... leur chef d'équipe, ce que confirment la contradiction et la confusion de leurs décomptes ; qu'à cet égard la cour devra confirmer sa décision du 8 juin 2010 qui a considéré que l'ordonnance sur requête et le constat de l'huissier était recevables,
- que s'agissant des repos compensateurs demandés par les six salariés travaillant à France Champignons, quatre d'entre eux ne produisent aucun décompte et que les décomptes produits par les deux autres sont inexacts en ce qu'ils ont comptabilisé des repos auxquels ils n'ont pas droit de sorte qu ils doivent être déboutés de leur demande de ce chef,
- que le syndicat CFDT ne justifie pas de sa qualité à agir et qu'en toute hypothèse sa demande est injustifiée.
Dans leurs écritures régulièrement communiquées déposées le 21 février 2014 et à l'audience, Ms X..., Y..., E..., N..., G..., H..., A..., K..., J..., B..., I..., C..., D... et Mmes F... et Z..., ainsi que le syndicat CFDT de Maine et Loire, demandent à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :- écarté des débats l'ordonnance du 3 septembre 2008 et le constat d'huissier du 18 septembre 2008,- condamné la société TFN à payer :- au titre de la prime de panier : à M. X... la somme de 246, 48 ¿, à M. Y... la somme de 167, 48 ¿, à M. E... la somme de 268, 60 ¿, à M. G... la somme de 154, 84 ¿, à M. I... la somme de 290, 72 ¿ et à M. D... la somme de 306, 52 ¿,- au titre de l'accord d'entreprise : à M. X... la somme de1837, 90 ¿,- au titre du repos compensateur : à M. N... la somme de 889, 41 ¿, à M. H... la somme de 997, 16 ¿, à M. A... la somme de 844, 76 ¿, à M. I... la somme de 832 ¿, à M. J... la somme de 997, 16 ¿ et à M. B... la somme de 749, 85 ¿,- dit que la société TFN devait, au titre de la prime d'habillage et de déshabillage, régler 15 minutes par jour travaillé à Ms X..., Y..., E..., N..., G..., H..., A..., K..., J..., B..., I..., C..., D... et à Mmes F... et Z...,- condamné la société TFN à verser à chacun des demandeurs ainsi qu'au syndicat CFDT de Maine et Loire la somme de 100 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de le réformer pour le surplus et, statuant à nouveau et y ajoutant, de la condamner à verser :- au titre de l'accord d'entreprise à M. E... la somme de 1 946 ¿ et à M. Y... la somme de 767 ¿,- à chacun des salariés la somme de 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- au syndicat CFDT de Maine et Loire les sommes de 20 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi et celle de 3 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- aux dépens.
Ils font essentiellement valoir :
- que contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, Ms. E... et Y... peuvent prétendre au bénéfice de l'accord d'entreprise signé après le mouvement de grève de 2004 dans la mesure où, s'ils travaillaient alors pour la société GSF, les contrats de travail de cette société ont été repris par la société TFN,
- que pour le reste leurs demandes ont été justement prises en compte par le conseil de prud'hommes s'agissant tant de la prime de panier pour les samedis travaillés avant 2007, que de la prise en compte en application de l'article L. 3121-3 du code du travail comme du temps de travail effectif du temps d'habillage et de déshabillage de 2003 à 2007, que des repos compensateurs,
- que le syndicat CFDT de Maine et Loire est recevable et fondé en ses demandes en application des dispositions des articles L. 2262-9 et L. 2262-11 du code du travail au regard des atteintes à la convention collective et à l'article L. 1134-2 du même code au regard de la discrimination dont M P... a été l'objet.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l audience du 25 novembre 2014.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Sur le rappel de prime de panier, Les dispositions de l article 11-04 de la convention collective nationale des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 étendue par arrêté du 31 octobre 1994 sur le travail de nuit et reprises par l accord du 23 janvier 2002 relatif au travail de nuit puis par la convention collective du 26 juillet 2011 actuellement en vigueur prévoient qu'une prime de panier, égale à deux fois le minimum garanti, est accordée aux personnels effectuant au moins six heures et demie au cours de la vacation qui se situe entre 21 h et 6 h ; ce personnel bénéficie d'un temps de pause de vingt minutes pris sur le temps de travail. Il ne fait pas débats que les salariés demandeurs ont été remplis de leurs droits au titre de cette prime de panier de nuit.
Il est établi qu'ensuite d'une demande des délégués du personnel lors d'une réunion du 27 mars 2007, depuis le mois d'avril 2007 la société TFN verse une prime de panier aux salariés qui travaillent le samedi de 12 à 19 heures.
Elle a donc reconnu le droit des salariés au paiement de cette prime, en tout cas à compter de cette date.
La réclamation des salariés affectés sur le site de la société Guillet porte sur cette prime de panier qu ils estiment leur être dû pour la période antérieure à 2007.
La société TFN ne discute pas dans le principe son obligation à paiement en ce qu'elle porte sur une période antérieure à l'accord de 2007.
Pour justifier leur demande, les salariés produisent un courrier recommandé adressé le 24 juillet 2007 par le délégué du personnel à l employeur qui fait suite à son accord donné en avril pour la verser pour l avenir, lui précisant qu à cette date il était dû : 53 paniers à M. Y..., 78 à M. X..., 85 à M. Q..., 92 à M. S..., 86 à M. C... Abdelkader et 90 à M D... et M G... présente un décompte des samedis travaillés avec une évaluation de 1 006, 74 ¿, le premier juge lui ayant alloué la somme de 154, 84 dont il se satisfait dès lors qu il conclut à la confirmation du jugement.
Ils précisent dans leurs écritures que les sommes demandées correspondent à 3, 16 ¿ par jour de travail.
Leur demande est alors suffisamment étayée quant au nombre de samedis travaillés.
Ce nombre de paniers et donc de samedis annoncés par les salariés, dont il n'est pas discuté qu'ils travaillent dans l'entreprise depuis 2003, correspond à moins de deux années de temps de travail et la société TFN se contente de soutenir que depuis 2005 ils ne travaillent plus « tous les samedis » mais ne conteste pas qu'entre 2003 et 2005 ils ont effectivement travaillé dans cet horaire « tous les samedis ».
Dans ces conditions la société TFN-à laquelle cette demande en paiement a été présentée dès 2007- ne fournissant pas les plannings de travail qu'il lui appartenait de conserver et qui lui ont été demandés par le conseil de prud'hommes devant lequel elle n'a fait que discuter les modalités de calcul, le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef.
Sur le repos compensateur,
En application des dispositions des articles L. 3122-39 et L. 3122-40 du code du travail les travailleurs de nuit bénéficient de contreparties au titre de périodes de nuit pendant lesquelles ils sont employés sous forme de repos compensateurs et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale ; la contrepartie dont bénéficient les travailleurs de nuit est prévue par la convention ou l'accord collectif de branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement.
Aux termes de l'article 11. 04 de la convention collective nationale des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 repris par l'article 2 de l'accord collectif du 23 janvier 2002 relatif au travail de nuit puis dans l'article 6. 3. 2 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011 « tout salarié qui bénéficie du statut de travailleur de nuit a droit à un repos compensateur de 2 % entre 21 heures et 6 heures dans le mois » et il ne fait pas débats que ce droit à un repos compensateur est ouvert au salarié dès lors qu il a accompli 43, 33 heures de travail effectif. Ils bénéficient par ailleurs de majorations des heures de nuit. Quatre des six salariés de la société TNF-qui sont ceux qui travaillent sur le site de l'entreprise France Champignons ¿ à savoir M. H..., M. A..., M. I... et M. J...- se contentent d affirmer que l'entreprise n a pas respecté ces dispositions conventionnelles de sorte qu il leur est dû diverses sommes qu'ils fixent sans aucune référence aux mois concernés ni aux heures effectivement travaillés et sans expliciter leur mode de calcul. Ils n'étayent donc en rien leur demande de sorte qu'ils doivent en être débouté, la cour, comme la société TFN, étant dans l'impossibilité d'en vérifier le bien fondé, au surplus à hauteur des sommes qui leur ont été allouées à tort par le premier juge sur leur seule affirmation et en se fondant sur un constat d'huissier qu'il a préalablement écarté des débats.
En revanche Ms B... et N... produisent chacun un tableau intitulé « repos compensateur » faisant apparaître le nombre d'heures de nuit effectuées par eux chaque mois depuis octobre 2002 dont il ressort que le total de heures de repos compensateur auquel ils auraient droit s'élève à 86, 99 heures pour M B... à 103, 18 heures pour M N....
Ces documents sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de les discuter, ce qu'il ne fait pas utilement dans la mesure où il se contente d'affirmer que les salariés ont comptabilisé les mois au cours desquels ils effectuaient moins de 43, 33 heures de travail effectif de nuit sans cependant produire de justificatif des heures effectivement accomplies par eux.
Leur demande est ainsi justifiée en son principe sauf à constater qu'il résulte de l'examen de ces tableaux :- que M B... n'a pas effectué 43, 33 heures de travail effectif entre 21 heures et 6 heures pendant les mois de juillet 2004 (42 h), d'août 2005 (17, 5 h), de juillet (22h) et décembre 2006 (29, 5h) de sorte qu'à ce titre il doit lui être alloué la somme de 729, 91 ¿- que M N... n'a pas effectué 43, 33 heures de travail effectif entre 21 heures et 6 heures pendant les mois de juillet 2003 (42, 75 h), d'août 2004 (24, 5h), de juillet 2005 (43h), d'avril (0h) et de juillet 2006 (32, 5 h) et de juillet 2007 (32h) de sorte qu'à ce titre il doit lui être alloué la somme de 858, 28 ¿.
Sur les rappels de salaire pour heures d'habillage et déshabillage,
En préalable à l'examen de cette demande il y a lieu pour la cour, s'agissant du constat d'huissier du 18 septembre 2008 :- de constater que la demande de la société TFN de confirmer sa décision du 8 juin 2010 qui a considéré que l'ordonnance sur requête et le constat de l'huissier était recevable est irrecevable alors qu'il n'appartient pas à une cour d'appel de « confirmer » une décision qu'elle a prise et qui, au surplus, a été cassée et annulée en toutes ses dispositions par la Cour de cassation,- de considérer que cette décision de justice régulièrement communiquée ne saurait être « écartée des débats ».- de considérer, comme le premier juge, la cour étant juge de la pertinence des éléments de preuve qui lui sont soumis, que compte tenu des conditions dans lesquelles les bandes de vidéo-surveillance ont été obtenues, le procès verbal d'huissier du 18 septembre 2008 qui en retranscrit les données doit être écarté des débats.
Aux termes des dispositions de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations.
L'article L. 3121-3 du même code stipule que le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet d une contrepartie ; ces contreparties sont accordées, soit sous forme de repos, soit sous forme financière lorsque le port d'une tenue de travail est imposé et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail ;
Ces contreparties sont déterminées par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives de branche, d'entreprise et d établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps à du travail effectif.
Il ne fait débat que ni les accords collectif du travail applicables à la relation de travail entre les parties ni le contrat de travail des salariés concernés ne prévoient une quelconque contrepartie au temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage dont il n'est pas discuté qu elles sont nécessaires en raison du port par eux d'une tenue de travail imposée par l'employeur qu'ils doivent revêtir sur leur lieu de travail.
La demande des salariés porte donc sur une contrepartie financière constituée par une indemnité équivalente à leur salaire à hauteur de 15 minutes par jour pour les années 2003 à 2007.
Or au-delà de la polémique liée au constat d huissier du 18 septembre 2008, il n'a jamais été soutenu-ni a fortiori établi-par les salariés qu'ils arrivaient avant l'heure de leur prise de poste parce qu'ils devaient s'habiller et qu'ils quittaient l'entreprise après l'horaire prévu parce qu ils devaient se déshabiller mais seulement que, dans la mesure où ils devaient s'habiller et se déshabiller sur leur lieu de travail, il leur était dû une contrepartie.
Ils n'ont jamais contesté que ce temps était compris dans leurs horaires de travail et leur était payé comme du temps de travail effectif.
Il s'ensuit que leur demande d'une contrepartie qu'ils perçoivent déjà en ce que leur temps d'habillage et de déshabillage leur est rémunéré comme du temps de travail effectif doit être rejetée et le jugement entrepris infirmé de ce chef.
Sur la demande de rappel de salaire,
Dans le cadre d un document intitulé compte rendu de la réunion suite au mouvement de contestation des salariés TFN du site de Guillet établi en 2004, il a été convenu que, « pour compenser la prime du « 24 juillet 2000 » les salariés embauchés à cette date et toujours présents sur le site de Guillet verront leur taux horaire conventionnel majoré et maintenu à + 3 % ».
Ms E... et Y..., qui n'étaient pas présents dans l'entreprise à cette date, ne peuvent pas prétendre au bénéfice de cet accord.
Il n est pas discuté qu'en exécution de cet accord M X... a vu son taux horaire majoré de 3 %.
Il résulte clairement de cet accord intervenu pour mettre fin à un conflit dans l'entreprise que cette majoration avait pour objectif de compenser le défaut de paiement d'une prime exceptionnelle qui aurait dû être versée le 24 juillet 2000 et qu'il n'était pas de l'intention commune des parties de l'appliquer pour une période illimitée dans le temps.
Le jugement doit donc être infirmé de ce chef et M. X... doit être débouté de sa demande en rappel de salaire qui porte sur les années 2008 et 2009.
Sur les demandes du syndicat,
Le moyen tiré du défaut de justification par le syndicat CFDT de Maine et Loire de sa qualité à agir est une fin de non recevoir au sens de l article 122 du code de procédure civile qui peut être soulevée en tout état de la procédure.
Ce syndicat, qui est intervenu volontairement à l instance par courrier de son conseil du 16 mai 2008, ne donne aucune information notamment sur la personne ayant qualité pour agir en son nom, ne produit ni ses statuts ni la liste des dirigeants ayant vocation à agir en justice en son nom.
Pour autant il est représenté par un avocat et il n'est pas contesté qu'il a déposé ses statuts et qu'il a une existence légale au sens de l'article L. 2131-3 du code du travail et donc la capacité civile, la société TFN n ayant pas procéduralement contesté son intervention volontaire devant le conseil de prud'hommes.
Par ailleurs la société TFN se contente de solliciter dans le dispositif de ses écritures repris oralement à l'audience le débouté des demandes de ce syndicat sans requérir leur irrecevabilité.
Il résulte cependant de la présente décision que compte tenu de l'importance de l'atteinte par la société TFN à un intérêt collectif, le jugement entrepris qui l'a condamné à verser au syndicat CFDT de Maine et Loire une somme de 500 ¿ à titre de dommages et intérêts et celle de 100 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doit être confirmé.
L'équité commande le rejet des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :
- écarté des débats l'ordonnance du 3 septembre 2008,
- condamné la société TFN à payer :
- à M. X... la somme de 1 837, 90 ¿ au titre de l'accord d'entreprise signé après le mouvement de grève de 2004 portant augmentation du taux du salaire conventionnel,
- à M. H... M. A..., M. I... et M. J... des indemnités de repos compensateur,
- à M. N... et à M. B... les sommes de 889, 41 ¿ et 749, 85 ¿ à titre d'indemnités de repos compensateur,
- dit que la société TFN devait au titre de la prime d'habillage et de déshabillage régler 15 minutes par jour travaillé à Ms X..., Y..., E..., N..., G..., H..., A..., K..., J..., B..., I..., Ali C..., D... et Mmes F... et Z...
STATUANT à nouveau de ces chefs :
DEBOUTE Ms X..., Y..., E..., N..., G..., H..., A..., K..., J..., B..., I..., Ali C..., D... et Mmes F... et Z... de leur demande tendant à voir écarter des débats l'ordonnance du 3 septembre 2008.
DEBOUTE M. X... de sa demande au titre de rappel de salaire.
DEBOUTE Ms. H..., A..., K... et J... de leurs demandes au titre d un repos compensateur.
CONDAMNE la société à verser à Ms N... et B... les sommes respectives de 858, 28 ¿ et 729, 91 ¿ à titre indemnités au titre du repos compensateur.
DEBOUTE tous les salariés en la cause de leur demande de contrepartie salariale de leur temps d'habillage et de déshabillage.
CONFIRME le jugement entrepris en ses autres dispositions.
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en appel.
CONDAMNE la société TFN aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Viviane BODIN Anne JOUANARD