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04/11/2014 | FRANCE | N°14/00378

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 04 novembre 2014, 14/00378


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 00378.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 17 Janvier 2014, enregistrée sous le no F 13/ 00275
ARRÊT DU 04 Novembre 2014

APPELANTE :

Madame Nathalie X...... 72190 COULAINES

comparante-représentée par Maître Bruno LAMBALLE, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
LA SAS ACCORD IMMOBILIER 10 Place des Jacobins 72000 LE MANS

non comparante-représentée pa

r Maître Laurent MEILLET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des disposit...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N aj/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 00378.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 17 Janvier 2014, enregistrée sous le no F 13/ 00275
ARRÊT DU 04 Novembre 2014

APPELANTE :

Madame Nathalie X...... 72190 COULAINES

comparante-représentée par Maître Bruno LAMBALLE, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
LA SAS ACCORD IMMOBILIER 10 Place des Jacobins 72000 LE MANS

non comparante-représentée par Maître Laurent MEILLET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Septembre 2014 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne JOUANARD, président Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 04 Novembre 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE,
Le 4 juin 2008 Mme Nathalie X...a signé avec la société Accord Immobilier un contrat d 'agent commercial.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 avril 2011 elle a notifié à la société Accord Immobilier la rupture de leur relation.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 avril 2011 la société Accord Immobilier a donné acte à Mme X...de sa rupture sans préavis sur laquelle elle a indiqué être d 'accord.
Par déclaration en date du 9 décembre 2011, Mme X...a saisi le conseil de prud 'hommes du Mans d 'une demande de re-qualification de sa relation de travail avec la société Accord Immobilier en contrat de travail de salarié VRP et en paiement de diverses indemnités d 'une rupture s 'analysant comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Après une décision de radiation du 18 janvier 2013, par jugement en date du 17 janvier 2014 le conseil de prud 'hommes du Mans, considérant que la preuve de ce que la relation de travail entre les parties ait été un contrat de travail n 'était pas rapportée, s 'est déclaré matériellement incompétent au profit du tribunal de grande instance du Mans pour connaître du litige.
Par déclaration au greffe reçue le 31 janvier 2014, Mme X...a formalisé un contredit à l 'encontre de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS,

Dans ses dernières écritures régulièrement communiquées déposées le 23 septembre 2014 et à l 'audience Mme X...demande à la cour d 'infirmer le jugement entrepris et après avoir dit que sa relation contractuelle avec la société Accord Immobilier doit être requalifiée en contrat de travail, de dire et juger que le conseil de prud 'hommes du Mans est compétent pour statuer sur ses demandes et de condamner l 'intimée à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l 'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières écritures régulièrement communiquées déposées le 23 septembre 2014 et à l 'audience la société Accord Immobilier demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de déclarer Mme X...irrecevable en son action devant la juridiction prud 'homale, de la déclarer incompétente pour statuer sur le litige opposant les parties, de les renvoyer devant le tribunal de grande instance du Mans et de condamner l 'appelante à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l 'article 700 du code de procédure civile
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l 'audience du 23 septembre 2014.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Pour contester le jugement entrepris Mme X...fait essentiellement valoir :

- qu 'il résulte de l 'examen des conditions d 'exercice de son activité de conseillère telles qu ' imposées par la société Accord Immobilier que la relation entre les parties doit être requalifiée en contrat de travail,- qu ' ainsi, contrairement à ce que soutient la société Accord Immobilier, elle rapporte la preuve de ce qu ' à compter de février 2009 correspondant à une période de restructuration de l ' agence, elle s ' est vu imposer non seulement un secteur d ' activité-en l ' espèce celui des salons de coiffure et instituts de beauté-mais également un secteur géographique précis et restreint limité au sud du département de la Sarthe ; ' elle avait une double contrainte : « elle ne pouvait prospecter pour un produit qui, par sa nature, avait été affecté à l ' de ses collègues titulaire d ' contrat d ' commercial ; elle ne pouvait prospecter pour un produit ne relevant pas d'un secteur d ' é affecté en dehors de la circonscription qui lui était précisément dévolue ; à l'inverse elle pouvait prospecter pour un produit hors secteur géographique relevant des secteurs d ' activité qui lui avaient été attribués » ; que ces affectations et leur changements à l ' initiative de la société sont clairement l ' illustration de la volonté de la société Accord Immobilier de conserver la maîtrise et le contrôle de son activité,- que la société via son directeur d ' agence la contraignait à assister à des réunions fixées toutes les deux semaines le lundi de 9 heures 12 heures avec un ordre du jour établi par lui ; qu ' elle devait rendre compte chaque semaine de la mise en place de ses mailings et de son agenda ainsi que de son activité ; que ses cartes de visite comme ses courriers ne mentionnaient que les références de l ' agence de même que les publicités ; que des permanences à l ' agence lui étaient imposées à raison de deux demi-journées par semaine ainsi que pour le remplacement de la secrétaire absente.

En réponse la société Accord immobilier soutient :- que le contrat signé par Mme X...est clair, qu ' elle s ' est volontairement inscrite au registre spécial des agents commerciaux et qu'elle n ' a jamais agi comme salariée ou préposée de l ' agence ni revendiqué un statut de salariée pendant l ' exécution de son mandat,- que contrairement à ce qu ' elle prétend elle a exercé son mandat hors tout lien de subordination ; qu ' ainsi elle n ' a jamais été astreinte à un horaire et/ ou à une obligation de présence ; qu ' elle n ' établit pas avoir eu à répondre à une obligation qui lui aurait été imposée ni que la société aurait été en mesure de l ' y contraindre et de la sanctionner,- que là encore contrairement à ce qu ' elle prétend mais qu ' elle ne prouve pas par les documents qu ' elle produit alors qu ' elle même établit le contraire, Mme X...n ' avait aucun secteur d ' activités ou géographique déterminé, qu ' aucune directive ne lui a jamais été donnée, qu ' aucun bureau ni ordinateur ne lui était affecté,- qu ' elle a seulement réparti les mandats de ses propres clients entre les agents commerciaux selon leur secteur d ' activité ou géographique,- qu ' à supposer même, Mme X...n ' a jamais respecté la sectorisation et n'a jamais été sanctionnée,- qu ' il ne lui a jamais été imposé de réunion et que, si des comptes rendus lui ont été demandés, ils ne concernaient que les clients de l ' agence et non les siens, que de telles demandes étaient normales, que la production d ' un seul compte rendu sur 132 semaines ne prouve rien, qu ' elle n ' a jamais eu d ' objectifs,- que Mme X...a, ensuite de sa rupture de leur contrat, signé un contrat avec l ' agence immobilière créée par le fils de M Y...autre agent commercial de l ' agence qui revendique à tort le même statut, ce qui établit bien qu ' elle ne se considérait pas comme salariée de la société Accord Immobilier ; qu ' elle a rejoint cette nouvelle agence avec la clientèle qu ' elle avait développée au cours de son contrat avec elle.

En droit le lien de subordination qui est l ' essence du contrat de travail est caractérisé par l ' exécution d ' un travail sous l ' autorité d ' un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d ' en contrôler l ' exécution et d ' en sanctionner les manquements, le travail au sein d ' un service organisé pouvant constituer un indice de ce lien lorsque l ' employeur détermine unilatéralement des conditions d ' exécution du travail.
Il appartient à celui qui prétend à l ' existence d ' un contrat de travail d ' en rapporter la preuve.
Si le juge doit vérifier les conditions réelles d ' exercice d ' activité sans s ' arrêter au contrat signé, il doit cependant être noté que lors de la signature par Mme X...du contrat d'agent commercial avec la société Accord Immobilier, son contrat lui laissaot expressément toute liberté d ' organisation de son activité sans secteur d ' activité précis.
Qu'ensuite de la rupture de son contrat avec la société Accord Immobilier sans justification précise le 13 avril 2011, Mme X...a effectivement été embauché en qualité de négociateur immobilier VRP salarié dans l'agence immobilière ouverte au Mans par le fils de M Y...qui a effectivement débuté son exploitation le 1er mars 2011.
Pour autant sur ses conditions de travail avec la société Accord Immobilier, Mme X...produit aux débats :- un courrier signé de M Z...et M A...responsables de l ' agence en date du 16 février 2009 adressé à tous les agents commerciaux-dont elle a accusé réception en le signant-aux termes duquel ils rappellent l ' exigence et les contraintes d ' un agent immobilier en terme de mandat, indiquent avoir constaté après vérification que les fiches de commercialisation n ' étaient pas mises à jour régulièrement de sorte que de nombreuses publicités envoyées directement ne pouvaient générer de contacts et les remercient de procéder avant le 1er mars 2009 à cette mise à jour, leur indiquent que les fiches de commercialisation de leurs produits seront vues sur Atransaction @ en cliquant sur leur nom ou dans le dossier annexé à ce courrier, qu ' en cas de mises à jour non effectuées les mandats seront attribués suivant les secteurs de chacun (voir annexe) la rémunération étant accordée à celui qui fera la nouvelle démarche auprès du vendeur ou du bailleur, que le secteur sera révisé trimestriellement suivant l ' activité du conseiller, que suite à la réunion du 9 février il a été évoqué l ' obligation de tenir à jour un compte rendu hebdomadaire qui devra être remis chaque lundi matin,- les annexes à ce courrier qui leur indiquent leur secteur géographique et d ' activité avec une carte jointe,- un courriel du 18 mai 2010 adressé à tous les agents commerciaux aux termes duquel les mêmes responsables leur rappellent les différents éléments validés ensemble à savoir qu ' afin de pouvoir gérer les contacts et les permanences éventuelles de chacun, leurs agendas devront être donnés tous les mercredi pour la semaine suivante ; qu ' afin de procéder à la mise en place de mailings, les codes postaux et les secteurs d ' activité ou géographiques doivent être donnés un jour précis de la semaine pour chacun ; que tous les acheteurs laissés en classe C (transactium) seront au profit de tous les conseillers ; que s ' agissant des mandats les dossiers dans lesquels des éléments manqueront ne seront pas enregistrés et que tous mandats de plus de 12 mois seront mis dans le pot commun ; que le souci de suivre et d ' les contacts agence et d ' obtenir un meilleur taux de pénétration du marché, des secteurs d ' activité et géographiques ont été mis en place et que ces secteurs seront modifiables tous les deux mois si ces derniers n ' ont pas été suffisamment travaillés ; que l ' agence mettant à leur disposition des locaux et du matériel ainsi que des contacts ils exigeaient que chaque bureau soit laissé propre et rangé après leur départ et tous les soirs.- l ' annexe à ce courrier qui fixe les secteurs géographiques et d ' activité qui Asont fait pour vous attribuer des contacts émanant de l ' agence, tous les secteurs non identifiés étant donc vacants et seront attribués selon leur taux de pénétration sur leurs secteurs respectifs @.- une attestation du 10 septembre 2013 de M B...ancien agent commercial de l ' agence qui confirme la mise en place de secteurs Apour la prospection et la rentrée des mandats vendeurs bailleurs @, qui indique qu ' il ne pouvait pas prospecter sur les secteurs de ses collègues et réciproquement, que s ' il rentrait des mandats hors secteur la direction de l ' agence s ' autorisait le droit de ne pas les valider et de les donner au collaborateur concerné, que les secteurs pouvaient être révisés tous les trimestres si le nombre de mandats était insuffisant, qu ' à ce titre ils avaient l ' obligation de fournir un compte rendu hebdomadaire et de le remettre chaque lundi matin lors de la réunion obligatoire pour tous les agents commerciaux de l ' agence, qu ' ils devaient fournir un compte rendu précis des affaires proposées et visitées, qu ' ils avaient deux permanences par semaine à l ' agence tant pour recevoir les clients que pour remplacer la secrétaire au téléphone.- ses outils de représentation dont il est établi qu'ils étaient au nom de l ' agence et qu'elle y apparaissait comme Acontact @.

Ces éléments-dont la société Accord Immobilier prétend seulement qu ' ils seraient inexacts ou faux ou insuffisants à établir la subordination sans produire de documents contraires exploitables à l'exception de copies d'échanges de courriels marquant au demeurant des relations étroites entre elle et Mme X...-sont suffisants pour établir que, même si la sectorisation apparait avoir été mise en place pour la gestion des clients de l'agence, la plus grande part de son activité était consacrée à ces clients et ce dans le cadre d'un service organisé caractérisé par :- une sectorisation contrainte modifiable à la seule initiative de la société Accord Immobilier et avec des contrôles et des sanctions : les dossiers dans lesquels des éléments manqueront ne seront pas enregistrés, tous les mandats de plus de 12 mois seront mis dans le pot commun, « s ' il rentrait des mandats hors secteur la direction de l ' agence s ' autorisait le droit de ne pas les valider et de les donner au collaborateur concerné »,- une obligation d'information sur son activité par la production de ses agendas et d'un compte rendu hebdomadaire à remettre le lundi matin, la mise en place de permanences à tenir à l'agence et de réunions hebdomadaires obligatoires, la remise de cartes de visite professionnelles au nom de l'agence, la mise à disposition d'un bureau et d'un ordinateur.

Mme X...travaillait ainsi effectivement dans le cadre d'un service organisé sous l ' autorité de la société Accord Immobilier qui, par les responsables de l'agence, avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d ' en contrôler l ' exécution et d ' en sanctionner les manquements.
La preuve du lien de subordination étant rapportée, la relation de travail entre les parties ressort effectivement d ' un contrat de travail de sorte que le jugement entrepris doit être infirmé et le conseil de prud ' hommes du Mans jugé compétent pour statuer sur la nature et les conséquences de sa rupture.
L'équité commande la condamnation de la société Accord Immobilier à verser à Mme X...la somme de 2 000 euros sur le fondement de l ' article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses disposions.
STATUANT à nouveau et y AJOUTANT :
DIT et JUGE que la relation de travail entre la société Accord Immobilier et Mme X...caractérise un contrat de travail.
DIT et JUGE en conséquence que le conseil de prud ' hommes du Mans est compétent pour statuer sur la nature et les conséquences de sa rupture.
CONDAMNE la société Accord Immobilier à verser à Mme X...la somme de 2 000 euros sur le fondement de l ' article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE la société Accord Immobilier aux dépens de première instance et d ' appel

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODINAnne JOUANARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00378
Date de la décision : 04/11/2014
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 26 septembre 2016, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 26 septembre 2016, 15-10.105 15-10.111, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-11-04;14.00378 ?
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